- Cet après-midi, on fait du cheval ! annonça Sophie en brandissant son téléphone. Tu savais que c'était une région très branchée équitation, ici ?

- Je ne savais pas, non. Tu sais, je ne suis pas spécialement doué en...

- Ce sera l'occasion de t'améliorer !

Il lui jeta un regard horrifié. Il gardait un mauvais souvenir des poneys et chevaux en général, depuis une colonie de vacances pendant laquelle il s'était fêlé le coccyx à cause d'une chute. Il n'avait pas monté depuis, et il n'était même pas sûr de se souvenir comment faire.

- Houlà, c'est peut-être pas l'idée du siècle, Soph...

- Mais si. J'adore en faire, moi. Tu vas bien faire un petit effort pour moi, non ?

Il haussa les épaules. Elle sortit dans le jardinet pour appeler le centre équestre, et sourit en voyant un labrador brun débarquer au trot dans le jardin des voisins. Elle s'accroupit pour le caresser, jeta un œil à son collier : il (ou plutôt elle) s'appelait Cannelle.

- Hé, Oli, le chien des voisins s'appelle comme ta copine !

- Heu... Bonjour ? grésilla son téléphone.

- Oups, pardon.

Son interlocuteur venait de décrocher, elle avait dû lui hurler dans les oreilles en parlant à Olivier.

Il lui assura qu'ils pouvaient venir dès maintenant, ils avaient de la place. Sophie se précipita alors dans la voiture avec Olivier et lui dicta impatiemment l'adresse, râlant pendant cinq minutes quand il tapa un « z » à la place d'un « e ».

Il démarra en écrasant l'accélérateur, elle l'avait un peu énervé.

Il fit moins le malin quand on le laissa avec un filet dans les mains, face à un cheval qui dut baisser la tête pour se mettre à sa hauteur. Il n'avait pas la moindre idée de comment harnacher l'animal.

- Alors monsieur, vous ne savez pas comment mettre ça ? lui jeta une jeune femme, souriante.

Elle lui montra comment faire, l'enleva et le lui rendit :

- À vous. Vous êtes dans quel groupe ? Débutants ?

- Je ne sais pas, il faut demander à la dame là-bas...

Il désigna Sophie qui, impatiente, avait déjà sorti son cheval du box. La femme qui l'avait aidé se dirigea vers elle, l'abandonnant avec le filet dans les mains. Il n'était pas plus avancé sur la façon dont il devait le mettre. Sophie rentra son cheval à la demande de la cavalière, et vint à la rencontre d'Olivier :

- Bah alors, tu sais même pas mettre un filet ?

- Eh oh, j'ai mis la selle tout seul au moins !

Elle jeta un coup en œil au dos du cheval, défit tout et tourna le tapis.

- Décidément, tu n'es pas doué. Dis, la dame m'a proposé de t'envoyer dans le groupe des débutants plutôt qu'avec moi. Ça ne te dérange pas qu'on soit séparés ?

- Non, non... Du coup, tu peux lui mettre le... Aah !

Sa monture venait de balancer la tête de son côté pour lui renifler les cheveux.

- Détends-toi un peu, il ne va pas te faire de mal.

Elle leva les yeux au ciel et l'aida à finir de préparer son cheval.

Quelques heures plus tard, alors qu'Olivier transpirait à grosses gouttes pour partir au trot à la suite du poney d'une petite fille, il entendit un cheval au galop se rapprocher de lui dans son dos : c'était Sophie, qui se porta à sa hauteur et trotta à côté de lui.

- Tiens-toi droit, ne te penche pas en avant. Voilà, super.

- Ça brûûûle les cuisses !

Elle sourit pour toute réponse, et repartir au galop. Elle semblait tellement à l'aise sur son cheval, comme si elle était née en selle, ou qu'elle en avait fait toute sa vie. Ils se retrouvèrent un peu plus tard en rentrant les chevaux dans leurs box respectifs.

- Pourquoi il y a autant de sangles à défaire ? grommela Olivier.

Ils remercièrent le personnel du ranch, et ils se remirent en voiture, lui soulagé, et elle, heureuse de ces instants de liberté. Ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas monté : elle faisait beaucoup d'équitation étant petite, mais elle avait arrêté en allant s'installer en ville.

- Si ça se trouve, je vais aller vivre à la campagne et devenir cavalière professionnel. Ou alors, j'aurai mon propre ranch et je formerai des enfants pour qu'ils deviennent des pros. Je t'apprendrai, aussi.

Il baragouina un vague acquiescement. Il n'avait pas vraiment envie de réitérer à nouveau cette expérience pour le moins désagréable...