Loch Lenen (partie 2)
Dom regarda à nouveau sa montre. Les minutes et les heures défilaient, il n'osait toujours pas ouvrir la bouche de peur de mal s'y prendre. Sophie s'arrêta soudain, et tendit le doigt vers un coin de bleu dans le ciel :
- Un nuage rare ! Un nuage rare, Domino !
- Ah oui ? Où ça ?
- Le trou de ciel, là. Ben, c'est rare. J'ai lu ça dans je ne sais plus quel magazine, c'était très intéressant ; ça m'a donné envie de m'intéresser aux nuages.
- Comment il s'appelle alors, ce nuage rare ?
- Je ne sais plus.
- Dommage. Tu t'intéresses aux nuages, donc ?
- Oui, enfin non, pas trop. Pas du tout, même. Cet article a attiré ma curiosité et j'ai retenu deux-trois trucs, mais je n'ai jamais creusé la question.
- Pourquoi ? Manque de motivation ?
- Je suppose que j'ai eu la tête ailleurs ces temps-ci, je n'ai pas vraiment réfléchi aux nuages.
- Tu pensais à Matt ?
Elle ne répondit pas et accéléra légèrement le pas pour le dépasser. Mauvais moment pour en discuter. Il prit donc son mal en patience et laissa passer une petite heure silencieuse. Ils grimpaient un étroit sentier à flanc de colline, des pierres roulaient sous leurs chaussures et des ronces leur griffaient les mollets ; mais la vue promettait d'être magnifique une fois en haut. Tandis que Dom peinait à reprendre son souffle, Sophie escaladait la colline avec aisance, pas le moins du monde dérangée par la côte raide qu'ils montaient, ni par le terrain instable. Un vrai cabri.
- On déjeune en haut ! annonça-t-elle, se doutant que cette promesse le motiverait un peu.
Elle avait remarqué, à force de le côtoyer pour la tournée, que Dom apportait beaucoup d'importance aux repas. C'était un moment sacré pour lui, il était très important de manger équilibré tout en alliant intelligemment les différents goûts. Il avait cuisiné plusieurs fois pour tout le groupe, et Sophie avait pu apprécier ses talents culinaires insoupçonnés. Elle ne se souvenait pas de l'avoir entendu parler de ça en interview, et elle se l'était imaginé plutôt négligent sur ce qu'il mangeait, le genre à s'arrêter aux bases : pâtes, riz, pommes de terre. Agréable surprise de le découvrir ainsi, pour une Française...
Elle se souvenait en particulier d'un soir où il leur avait mitonné une ratatouille délicieuse, fondante à souhait et parfaitement assaisonnée. Elle s'était demandée combien de temps il avait mis pour cuisiner ça ; il avait simplement répondu que, lorsque l'on aime faire ce que l'on fait, on ne voit pas le temps passer. Il s'était ensuivi une discussion animée sur ce fameux Disney, Ratatouille ; Chris s'était mis dans une colère noire en entendant Matt appeler le rat "Ratatouille", et Tom avait aussitôt calmé les hostilités, à moitié plié de rire de voir que son bassiste démarrait au quart de tour pour quelque chose d'aussi insignifiant. Dom avait alors expliqué, une fois l'agitation retombée, que c'était justement ce dessin animé qui lui avait donné envie de s'y mettre, de s'atteler aux fourneaux et de créer de cette façon-là, radicalement différente de la musique mais tout autant artistique.
Elle étouffa un rire en le voyant grimacer devant son sandwich rabougri.
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