Des petits Sophellamy
Sophie remonta sur Dijon en train la veille de son rendez-vous. Elle dormit dans son studio, repoussant le plus possible le souvenir de la présence de Matt dans cet endroit. Elle se rendit chez son médecin le lendemain. C'était à nouveau le vieux aussi chaleureux qu'un réfrigérateur, mais elle préférait un glaçon plutôt que le petit prétentieux qui avait presque ordonné à Matt de changer de métier pour avoir un enfant, la dernière fois. Le temps passa lentement. L'absence du père se faisait cruellement ressentir. Le docteur ne fit aucun commentaire sur cette absence, et Sophie lui en fut reconnaissante. Mais elle écourta la séance, incapable de retenir ses larmes plus longtemps. Elle s'en voulait de priver Matt du bonheur d'organiser avec elle la venue au monde de ce bébé qui était aussi le sien.
Elle reprit un train en direction de Nice, et passa tout le voyage les genoux remontés sous le menton, les bras entourant ses jambes et le visage caché dedans, des écouteurs dans les oreilles qui hurlaient du Slipknot. Son humeur s'éclaircit à mesure qu'elle revenait vers le sud. Lorsqu'elle arriva, elle souriait même.
- On fait quoi ? demanda Dom.
- Comme tu veux.
- C'est moi qui te pose la question...
Elle haussa les épaules, souriante.
- Je propose de s'allonger dans l'herbe et de dormir.
- Excellente idée.
Mais une fois allongée, les brins d'herbe lui chatouillant la nuque, une tristesse sourde lui enserra le cœur dans un étau. Elle ne put retenir ses larmes. Elle s'efforça de faire le moins de bruit possible pour ne pas déranger Dom qui s'était assoupi, alors elle mordit son poing pour ne pas éclater en sanglots et se tourna dos à lui. Elle se recroquevilla sur elle-même, essuyant péniblement ses joues du dos de ses mains déjà trempés.
- Sophie, murmura Dom.
Il lui frotta maladroitement le dos pour tenter de la réconforter. Elle roula de côté pour se mettre à genoux, se leva, et fit quelques pas vers la maison :
- Je crois que j'ai besoin d'être seule un moment...
- Attends... supplia Dom. Ne fuis pas... Je ne veux que t'aider.
Elle retomba sur les fesses sans se rapprocher plus de lui. Il voyait ses épaules trembler et l'entendait renifler.
- Sophie, je pense que tout ce dont tu as besoin, c'est Matt... Je n'ai pas bien compris pourquoi vous vous êtes embrouillés, mais cette prise de distance commence à te faire du mal... Tu devrais aller le retrouver, t'expliquer avec lui, et retrouver le bonheur avec lui.
Elle secoua fermement la tête sans le regarder.
- Ne sois pas bornée... Tu as besoin de lui, Soph. C'était une bonne idée de venir me tenir compagnie pendant ces deux belles semaines. Je suis heureux de t'avoir vue sourire, courir sur la plage, essayer de me couler dans la mer... Mais maintenant il est temps de retrouver l'amour de ta vie. Il t'attend, il t'aime, il souffre loin de toi.
Il la rejoignit plus haut sur la pelouse et l'entoura de ses bras. Ses sanglots se calmèrent peu à peu, et elle reprit ses esprits. Elle rendit son étreinte à Dom, avant de se lever avec un soupir mi-accablé, mi-soulagé.
- Merci pour tout, Dominic... Ton amitié m'est vraiment très précieuse.
Elle tira un mouchoir de sa poche, sourit faiblement :
- Je suppose que je vais chercher un train pour Dijon et lui demander de me rejoindre... Ou alors je vais aller à Londres, je crois que c'est là qu'il est parti.
- Je vous souhaite tout plein de bonheur, et de nous faire plein de petits Sophellamy.
- Quoi ?
- Des petits Sophellamy.
Elle éclata de rire.
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