Il faut que je trouve un nom pour leur enfant. Je n'ai AUCUNE inspiration. Vous avez des idées ?

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- J'ai une surprise pour toi, Soph, dit Matthew le lendemain matin.

Kelly était sortie faire un tour, il en profitait donc pour montrer cette surprise à Sophie.

- Ferme les yeux et ouvre tes oreilles.

Elle entendit le bruit caractéristique d'un CD que l'on met dans un lecteur, et un battement de cœur retentit dans toute la pièce.

- Qu'est-ce que...

- Chuuuut. Ne dis rien, profite juste. Je t'explique après...

Il se mit alors à chanter. Elle sourit, se laissa envahir par cette douce mélodie, et savoura les sensations que sa voix éveillait en elle. Elle en avait l'habitude, depuis le temps qu'elle écoutait ses chansons, sans compter le nombre de fois où il lui avait chanté un petit truc a capella pour le plaisir. Elle préféra ne pas écouter les paroles, sinon son extase ne serait pas totale. Son enveloppe charnelle s'évapora en petits morceaux d'âme qui se fondirent dans ses particules de voix...

- Je ne me lasserai jamais de cette expression, murmura Matt une fois la chanson terminée.

Elle ouvrit les yeux sur la réalité, et le visage souriant de Matthew à quelques centimètres du sien. Elle chercha ses mots un instant, la conscience encore pas très réveillée, et Matt en profita pour l'embrasser.

- C'était beau, Matt, mais je n'ai pas compris... Ces battements de cœur...

- Ce sont ceux de cette petite personne.

Il posa l'index sur son ventre rebondi.

- Quoi ? Mais... Comment tu as pu...

- Tu te souviens de notre premier rendez-vous, ils nous avaient fait écouter ses battements de cœur. On voyait aussi ce bout de chair palpiter. Ça m'avait chamboulé l'âme, plus que tout le reste. J'ai voulu... Je ne sais pas, j'ai voulu rendre immortelle cette émotion que j'ai ressentie à cet instant précis. Je ne voudrais l'oublier pour rien au monde. Alors mes pensées sont tout de suite allées à la musique... Quoi de plus immortel qu'un morceau de musique ? Les gens pourront toujours le chanter dans cinquante, cent, deux-cents ans. Alors j'ai construit toute la chanson autour de ça.

- Où diable l'as-tu enregistrée ? Il te faut un studio pour faire une musique, non ?

- Oui, mais non. Disons que je me suis débrouillé avec U2. Et pour enregistrer les battements de cœur, j'ai juste attendu que tu sortes du cabinet pour demander au médecin de repasser l'extrait pendant que je l'enregistrais.

- Tu es vraiment incroyable.

Il eut un sourire modeste. Elle se décala sur le canapé pour se caler contre lui et s'allongea à demi pour poser la tête sur son épaule. Il se mit à lui caresser les cheveux, savourant ce moment de tendresse. D'ici quelques jours, ils ne seraient plus que très rarement seuls tous les deux... Il avait du mal à le réaliser.

- Et les paroles, elles racontent quoi ?

- Cette chanson est adressée à une personne que j'aime beaucoup. Elle s'applique à plein de gens, en fait. Elle dit que, même si tout le monde l'abandonne, qu'elle est au fond du gouffre et au bout du rouleau, je serai là pour elle.

- C'est mignon.

- Mouais. Je ne suis pas content. Je voulais écrire quelque chose spécialement pour le bébé, une chanson qui exprimerai tout mon amour pour lui. Ça aurait été terriblement cliché de dédier une chanson à mon enfant, mais ça me paraissait être important quand même. Alors je me suis assis devant ma feuille et un crayon, avec un fond de Rachmaninov pour l'inspiration. Tu me diras qu'avec ses notes torturées il n'est peut-être pas le meilleur exemple pour me faire écrire une chanson d'amour, mais sa musique me donne de l'inspiration – bref. J'ai été incapable d'écrire quoi que ce soit. Une fois devant ma page blanche, rien, nothing, nada, nichts. Je n'ai pas su cracher le moindre mot. J'ai réfléchi, je me suis demandé pourquoi. J'ai réessayé plus tard dans la journée, puis le lendemain et la semaine suivante. Mais décidément, je ne trouvais rien. Et devine pourquoi ?

Elle ouvrait de grands yeux, elle n'avait aucune idée du pourquoi du comment.

- Je ne sais pas...

- C'est tout simple. À force de réfléchir, j'ai compris qu'à mes yeux, ce bébé n'est encore qu'une idée abstraite. Il n'existe que parce que je vois ton ventre grossir. Mais sa présence réelle, perceptible, visible – je ne sais pas si tu vois où je veux en venir – n'existe que dans mon imagination.

- Parce qu'il n'est pas encore né ?

- Exactement. Et tu seras d'accord, je pense, pour dire que c'est compliqué d'aimer quelque chose d'imaginaire.

- Oui, enfin ça dépend quoi, mais dans ce contexte, oui, c'est vrai. Mais alors pourquoi tu n'as pas attendu sa naissance pour écrire ta chanson ?

- Je voulais t'en faire la surprise. Je voulais que ça soit quelque chose qui reste entre nous... Ça concerne plutôt notre enfant, mais je voulais que, dans un premier temps, ça soit un truc entre toi et moi.

- Je comprends.

Il sourit à nouveau. Ses yeux brillaient de désir, mais il savait se tenir, il ne la toucherait pas avant son feu vert. Heureusement, me direz-vous.

Alors qu'elle avançait le visage pour l'embrasser, quelque chose de chaud coula entre ses jambes. Elle se leva dans un sursaut d'adrénaline et s'écria, effrayée :

- Je perds les eaux !!