Manon ne pouvait pas s'arrêter de pleurer. Elle pleurait toutes les larmes qu'elles avait retenues pendant 3 ans. Les trois seules années de sa vie, d'après ses souvenirs. Trois longues années.

    Simon reposa la lettre.
    - Incompréhensible.
    En effet. C'était tout ce qu'il y avait à retenir.
    - Aller ! Ça peut pas être si terrible !
    Déclara Angelica en se saisissant du papier. Elle se trompait. Elle s'en rendit compte elle-même, quelques minutes plus tard, lorsqu'à son tour, elle reposa la lettre au sol, abattue. Elle ne dit rien, Angelica n'était pas du genre à avouer ses défaites.

    C'est ce moment que choisit Alice pour rentrer dans la chambre. Elle passa le seuil puis s'arrêta net.
    - Oula... Vous en faites des têtes ! Je dérange ?
    D'habitude, Angelica l'aurait gratifié d'une remarque cynique qui aurait bien vite été suivie par un ricanement de Manon mais cette fois-là, elles n'étaient pas d'humeur.
    - Bien sûr que non, Alice... Tu peux rentrer c'est aussi ta chambre... soupira Angelica.
    - Wow... Alors là ça va vraiment pas ! Est-ce que je peux aider ? C'est cette lettre le problème ? Je peux la lire ?
    Les trois amis se regardèrent d'un air entendu : au point où on en était... Manon hocha la tête et Alice commença la lecture.

Dès qu'elle eut fini, ils attendirent l'expression de son visage, tristesse, colère, dégoût... n'importe quoi qui aurait pu signifier l'incompréhension. Mais elle ne vint pas. Ils continuèrent de la fixer, abasourdis. Était-ce possible qu'elle ai compris quoi que ce soit à ce charabia ? Ils n'osaient pas l'espérer...
- Eh ben ? Qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoi vous me regarder comme ça ?
- T'as vraiment compris quelque chose ? demanda Simon.
C'était LA question. Manon s'attendait déjà à la réponse. Non. Ça ne pouvait être que non. Comment aurait elle compris quelque chose ? Elle ne savait même pas d'où venait cette lettre !
- Pas tout évidemment ! Mais il y a quand même deux trois trucs qui sont flagrants !
Ils la dévisagèrent, les yeux ronds.
- Vous trouvez pas ?
Non. Ils ne trouvaient pas. Ils étaient bien trop occupés à se demander par quel miracle, Alice, la fille qui s'extasiait chaque matin de la couleur du ciel avait réussi à déchiffrer une lettre que ses trois camarades n'auraient pas moins compris si elle avait été écrite dans une autre langue !

    Elle commença à s'expliquer.
    - Regardez ! elle attrapa la lettre et entoura un passage avec son doigt. Là ! L'expéditeur évoque ce qu'il se passe à l'Ouest, ensuite il suppose d'envoyer une personne nommée Kuraya dans le Nord, et enfin, il propose de l'emmener à l'Est. Ça veut donc dire...
Le visage d'Angelica s'éclaira.
- Que la personne qui parle se trouve soit au centre, soit au Sud !
Alice hocha la tête. Manon sentit l'espoir renaître dans son cœur ! Peut-être qu'elle allait apprendre des chose finalement ! Simon, lui, restait dubitatif.
- Au centre... c'est pas possible ! Vous le savez très bien ! Il n'y a des gens qu'à l'Est !
Alice haussa les épaules. Angelica leva les yeux au ciel. Manon était sûre que Simon racontait n'importe quoi : pour quelle raison l'Est serait il inhabité ? On aurait dit un conte pour effrayer les enfants bien plus qu'une réalité.
- Hum, Simon... Tu sais peut-être que tes parents... t'ont menti.
- N'importe quoi ! Y'a pas que mes parents bande d'imbéciles ! Tout le monde sait ça ! Y'a rien à l'Est ! C'est comme ça ! Demandez à qui vous voulez !
Manon choisit de ne pas le vexer.
- D'accord, d'accord... t'énerves pas. On a qu'à dire que c'est au centre de l'Est du Massakota.
Simon parut se calmer.
- Ok. Bon qu'est-ce qu'on peut apprendre d'autre.
Et c'est comme ça qu'ils commencèrent à décrypter la lettre, petit à petit.