Chapitre 8 - La consternation
Les jours passent et aucune autre invitation en vue.
Il a tourné la page, je devais m'y attendre. Maintenant, je dois juste me faire à cette décision, sa décision. Cependant, il ne quitte pas ma tête pour autant et mille interrogations tournent en boucle... Qu'avait-il à cacher ? Était-il marié ? Si tel était le cas, le fait que je vois son visage n'aurait rien changé ! Je n'aurai certainement pas accepté la situation, mais garder son identité secrète, était inutile. Rien n'est marqué sur son front !
Je me fais klaxonner parce que le feu est au vert, c'est ça d'avoir la tête dans les nuages ! Alors que je passe la première, je remarque un objet brillant sur le tapis du côté passager. Le métal m'éblouit à cause du soleil, mais je distingue très bien de quel objet il s'agit...
La montre ! Celle de mon homme masqué ! Je l'avais totalement oubliée... Elle a dû tomber de mon sac lorsque je l'ai jeté, de colère, contre le siège de ma voiture l'autre soir.
Qu'est-ce que je vais en faire ? Je passe la matinée à cogiter dans mon coin... À l'instant même où je déguste un café, toujours plongée dans mes pensées pour trouver une solution, Violette s'assoie à côté de moi et me voit, la montre en main.
— Waouh ! Que fais-tu avec une montre comme ça ?
— Une montre comment ?
— Ben tu ne connais cette marque ? Elle vaut une vraie petite fortune...
Oh mon dieu. Raison de plus pour lui rendre, je ne veux pas qu'il me traite de voleuse ou de profiteuse !
— C'est-à-dire... ?
— Regarde sur internet et tu verras ! Ça dépend des modèles...
Conscience d'avoir peut-être fait une boulette, Violette se poste sur son ordinateur portable sans rien me dire de plus. Je m'empresse de taper la marque et la référence, quand je m'étrangle avec une gorgée de café. Le prix frôle les cinq chiffres et me fait bondir de surprise. Hors de question que je garde cette montre ! De plus, elle s'est remise à fonctionner, alors je ne sais pas comment, mais elle va très vite retrouver son propriétaire.
Je n'ai aucun moyen de le joindre, il ne semble plus décidé à m'inviter, et même si mon corps le réclame encore, je ne veux plus avoir affaire à quelqu'un de muet sur sa vie. Ça semble mal parti, et pourtant, en regardant les aiguilles des secondes avancer rapidement, je vois James passer devant la porte vitrée de mon bureau... Ce n'est peut-être l'idée du siècle, mais cela reste une idée.
Je range la montre dans le tiroir de mon bureau, que je prends soin de fermer à clef et je rejoins mon collègue à l'extérieur. Il fume une cigarette, en me voyant, il tire une latte avec un air de bad boy. Aucun effet sur moi.
Sans passer par quatre chemins, je lui balance :
— J'ai quelques questions pour toi.
— Ah Ouais ? il me répond en rejetant sa fumée encore plus haut.
— Voilà... tu as dit que tu avais enquêté sur les soirées masquées... Tu peux m'en dire plus ?
— Ah ah ma petite Sophia, s'esclaffe-t-il. Je savais que ça te plairait. Tu veux savoir quoi au juste ?
— Est-ce que tu sais qui les organise ?
— Non, désolé ma jolie.
Attristée, je fais une moue qui lui ôte son sourire de beau parleur, avant qu'il n'ajoute :
— Je sais où et quand elles ont lieu, mais pas d'info sur l'organisateur. C'est sacrément bien mené leur truc.
Je retrouve un peu d'espoir ! Mon but est bien de connaître le lieu de la prochaine soirée, non ? Malgré tout, il reste un petit détail à régler, me faire inviter. En battant des cils, je lui demande :
— Tu pourrais me dire où aura lieu la prochaine ?
—Ça se négocie... Tu me donnes quoi en échange ?
— Je ne sais pas, on verra.
Je pense m'en tirer comme ça, mais je sais que James ne va rien lâcher. Il est tenace et surtout, il tire toujours la situation en son avantage. Sans attendre, il rétorque :
— Non non, il me faut du concret. Tiens et si en échange... je t'accompagnais ?!
Un long calcul surgit dans ma tête... De toute façon, je ne souhaite pas m'y rendre pour coucher avec qui que ce soit... J'y vais juste pour rendre la montre à mon inconnu masqué, rien de bien compliqué.
— D'accord. Mais faut-il encore que tu arrives à nous faire inviter...
— Ah parce que je dois faire ça aussi ?
— Oui, pas le choix James ! Alors ?
— J'ai des connaissances... Puis c'est mon métier, tu sais !
Il me fait un clin d'œil, comme s'il voulait me prouver qu'il est réellement plus doué que moi. Je n'apprécie pas sa vanne, mais je ne dis rien, et me contente de revenir sur ma demande.
— Dégote-nous trois invitations. Merci.
— Trois ? Il y aura une invitée surprise ?
— Exactement ! je dis pour le motiver.
Il ne pensait tout de même pas que j'allais y aller qu'avec lui ?! Je pense qu'Andréa sera plus que ravie de venir avec nous. Je ne sais pas si elle s'entendra avec James, mais une fois là-bas, il fera sa vie de son côté, et nous, on accomplira notre mission. La présence de ma meilleure amie me poussera à ne pas commettre l'irréparable.
Grâce à elle, aucune tentation.
***
Je dois avouer que James a réussi à me surprendre. Le lendemain, il me remet trois invitations. Je pensais qu'il se donnait juste de l'épaisseur en prétendant pouvoir y arriver, mais il faut croire que mon collègue a de la ressource...
Nous avons les informations nécessaires, soit la date, le lieu, l'heure, et le thème. Cette fois, je me fous royalement du thème, mais pour Andréa, c'est la partie la plus excitante. Depuis que je lui ai remis son carton d'invitation, elle ne cesse de me remercier, et trépigne d'impatience. Elle s'applique pour coller à l'étiquette ' millionnaires chics ', le thème de cette nouvelle soirée masqué, et porte une robe dorée et pailletée. Moi, je mise sur une courte robe rose pastel et entièrement dentelée. Elle est chic, sans en faire trop. Pour accentuer l'effet millionnaire, Andréa me pare de bijou, avec par exemple, cette manchette cuivrée et ce collier d'or très voyant.
Nous portons les mêmes masques couleur bronze. Cela est fait exprès pour que l'on puisse se reconnaître plus facilement, juste au cas où...
James doit nous rejoindre sur place, et effectivement, quand nous arrivons au parking du luxueux appartement où se trouve la fête, il est déjà là. Les mains dans les poches, le dos adossé à sa voiture. Qu'attend-il de cette soirée ? Est-ce qu'il veut découvrir un monde qui, je l'avoue est totalement palpitant ? Faire des rencontres ? Ou juste du sexe ? Quoi qu'il arrive, il devra se débrouiller tout seul, parce que je ne compte pas rester longtemps par ici.
Je fais rapidement les présentations entre Andréa et James, puis silencieusement, comme un rituel, nous mettons nos masques. J'engage ensuite la marche en direction de la colline où se trouve la villa qui accueille la soirée. Mission activée.
Nous ralentissons un peu lorsque nous arrivons au sommet, scotchés par la beauté du lieu. La grande maison carrée, pratiquement toute vitrée, se trouve au milieu d'un énorme jardin avec piscine. Il fait trop froid pour se baigner, d'ailleurs tout le monde est à l'intérieur, mais illuminé de toute part, ce point d'eau fait sensation.
— Bon, n'oublie pas, me dit Andréa en rompant le calme qui s'était installé, tu le trouves, tu lui donnes la montre, et on s'en va.
Je me concentre, puis je me tourne vers elle, déterminée comme si j'allais mener un combat de boxe. Mon amie, reprend ses vieilles habitudes et ne tient plus en place. Une vraie pile électrique. James ne parle pas beaucoup. Logique, il se concentre sur les fesses de ma coloc... Je ne suis même pas surprise. Il a compris que j'étais là pour un homme, et étrangement, il ne m'a fait aucune remarque.
Nous donnons tous les trois nos invitations sans noms aux portiers, puis nous entrons dans le vif du sujet. Quand je vois tous les invités masqués, un apaisement se forme en moi, comme si j'allais retrouver celui qui m'a fait vibrer ces dernières semaines. Mais il n'en est rien. Je ne vais pas subir une vague de sensations, je ne vais pas avoir de frissons, ni d'orgasme, et encore moins de marée de plaisir. Rien de tout ça. Alors le retour à la réalité est brutal... Si ma meilleure amie a les yeux qui brillent face à cette somptueuse soirée, moi je n'ai qu'une hâte, c'est retrouver mon lit, et c'est avec le cœur lourd comme une ancre, que je cherche mon inconnu.
— Wow, c'est tellement classe, s'extasie ma colloc.
Elle a raison, le thème n'est pas bling-bling, juste somptueux. Tout le monde a joué le jeu, mais avec raffinement. Les bijoux étincellent, les tenues sont chics, et je retrouverai presque l'enchantement du premier soir.
— Je t'invite à boire un verre Andréa ? lui demande James.
Elle me regarde, pensive, et me dit :
— Écoute, le mieux c'est de se rejoindre plus tard, ok ? Je pense que tu devrais aller le voir toute seule, enfin... s'il est là ce soir.
Je rêve, elle ne va tout de même pas accepter la proposition de James ? Alors que j'allais lui répondre négativement, je pense apercevoir mon homme assis sur le rebord d'un canapé. Bon, Andréa est assez grande, elle saura se débrouiller et remballé mon collègue si besoin.
— Ne t'en fais pas, je te la ramènerai entière, me taquine James.
Je ne l'écoute plus, je suis plutôt concentrée sur ma cible, mais avec le monde qui passe juste devant, j'ai du mal à être sûre qu'il s'agisse bien de lui...
Tout d'un coup, il jette un coup d'œil vers moi, mais je sais qu'il ne m'a pas encore vu. Sans réfléchir, je prends Andréa dans les bras, comme si je voulais la saluer, et cache ce que l'on peut voir de mon visage. Je lui glisse doucement dans l'oreille que je pense avoir repérée mon inconnu masqué. Mais elle se dégage de moi, et me pousse à assumer ma présence. Sans attendre, elle rejoint James à l'étage et disparaît, me laissant seule face à ma mission.
Bon, et bien, il est temps d'agir.
Je m'arme de courage pour l'affronter, sauf que je suis stoppée net. Ce que ce qui suit n'était pas prévu. Ma vision se trouble, je perds un instant le contrôle de mon corps, je ne peux plus avancer d'un pas. Une femme habillée d'une longue robe noire, le colle de près. De trop près.
Il ne sourit pas et ne fait rien d'autre que jouer avec des clefs dans sa main. Il ne m'a toujours pas vu, alors je peux les observer comme je veux. Cette femme se dandine devant lui et l'attrape par les épaules. Leurs visages se rapprochent dangereusement, le baiser ne semble pas loin. Mon cœur se brise, se resserre comme un étau. J'ai mal.
Je ne veux pas en voir plus, et pourtant, je ne peux pas les lâcher du regard. Ils se dirigent maintenant au fond de la pièce.
Est-ce qu'elle va prendre ma place ? Cela semble clair, il m'a remplacé et va s'envoyer en l'air avec la première femme masquée qu'il a trouvé à son goût...
Je marche discrètement derrière eux et arrive dans un couloir vide. Mince, où sont-ils passés ? Je ne sais pas quoi faire d'autre à part me faire toute petite et scruter la foule. Je baisse les bras, après tout, ils ont peut-être déjà rejoins une suite...
Est-ce que je serais assez forte pour l'affronter après qu'il ait baisé cette femme ?
Dix minutes plus tard, j'envoie un sms à Andréa, mais elle ne me répond pas... Pour m'occuper, je m'assois sur le canapé en cuir, pile là où il se trouvait tout à l'heure. Est-ce que le fameux Bernard, qui l'accompagne toujours, se trouve par ici ? Pour une fois que j'ai besoin de lui, on dirait bien que ce n'est pas le cas.
J'ai le temps de commander un verre, de le boire et de voir que les invités commencent à avoir chaud. Et je ne parle pas seulement au niveau de la température. Je vois enfin Andréa sortir du couloir, par où justement, le couple maudit est entré. Quand elle me voit, elle accourt vers moi. Si James l'a emmerdé, je le vire de la soirée. Je suis assez remontée pour me charger de lui.
— Tout va bien Andréa ?
— Oui ça va ne t'inquiète pas. Excuse-moi si je ne t'ai pas répondu de suite, mais cette soirée est tellement géniale... ! Et toi alors, tu lui as rendu sa montre, c'est bon ?
— Non...
— Pourquoi ?
— Je l'ai vu partir avec une femme... Je pense qu'il est allé dans une suite.
Sa mine se ferme.
— Oh non...
— Ce n'est pas grave, ne t'inquiète pas... On ne se doit rien lui et moi. Si je ne le vois pas d'ici dix minutes, je m'en vais. C'est déjà bien que j'attende qu'il fasse ses petites affaires.
— Très bien. Dis-moi, je veux te demander quelque chose, mais ne te fâche pas hein !
— Euh... je balbutie.
Andréa regarde le carrelage lustré et brillant. Elle cherche ses mots, et enchaîne très vite :
— Voilà... James m'a embrassé là-haut. Et puis pour rigoler, il a regardé le prix des chambres, ou des pièces privées, je ne sais pas comment on appelle ça. Mais c'est tellement cher, si tu savais, on était choqués... Au même moment, un couple sortait justement d'une chambre et ils nous ont dit qu'ils n'en avaient plus besoin. Alors ils nous ont remis les clefs. Ils nous laissent la suite pour une heure. Ça te dérange si, James et moi...
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