
34 - Newt - La peluche
Le lendemain de l'arrivée de Rachel et Blake dans la Société, le réveil fut particulièrement difficile.
J'avais très mal dormi, et une puissante migraine me vrillait le crâne. Je n'arrivais pas à m'empêcher de penser à la blonde, de vouloir me lever pour vérifier si elle allait bien...
J'avais eu la peur de ma vie en voyant Ella la menacer de son arme. J'avais beau me répéter qu'elle-aussi voulait aller chercher Rachel et qu'elle ne la tuerait donc pas, j'avais l'impression que l'arrestation de Blake devait beaucoup plus compter à ses yeux que la survie de mon amie.
Dès que j'estimai l'heure correcte pour me lever, j'enfilai un jean et une chemise, passai un manteau par-dessus et sortis le plus silencieusement possible du bâtiment des dortoirs. Il faisait froid dehors, et le vent matinal cinglait mes joues et ébouriffait mes cheveux que je n'avais déjà pas pris la peine de coiffer.
Je me mis directement en marche en direction de l'hôpital, où avait été amenée Rachel après s'être évanouie. Là-bas, on m'indiqua qu'elle était sortie quelques minutes plus tôt. Je n'avais pas eu de chance de ne pas la croiser... Quand je demandai si elle allait bien, le médecin me répondit qu'elle avait subi un épisode de stress intense qui avait causé une grande fatigue et pourrait la troubler psychologiquement pendant un moment.
Je remerciai l'homme et repartis, mais j'étais encore moins rassuré.
Je ne savais pas ce que Blake avait pu raconter a Rachel à propos des Marqués, de la Société... Elle devait avoir une impression très peu valorisante de notre communauté, et l'accueil que lui avait réservé Ella n'avait vraiment pas dû arranger les choses.
J'avais eu mon premier aperçu de ma nature en compagnie d'Alice, qui avait su adoucir suffisamment la chose pour que je ne pète pas les plombs et supporte le fait que j'avais un pouvoir. Mais Rachel avait dû l'apprendre à l'Infirmerie ou en compagnie de Blake, deux expériences sans doute très traumatisantes. J'avais peur qu'elle puisse avoir une mauvaise réaction. Je voulais juste l'aider, mais si le sociopathe lui avait fait rentrer dans le crâne qu'il était le gentil et nous les méchants, que pourrais-je faire ?...
Je finis par trouver la jeune fille après presque une demi-heure de recherche, un peu plus vers le Nord de la petite ville, et elle n'était pas seule.
- Newt ! s'exclama Liana en me voyant approcher. Comment tu vas ?
- Ça va, répondis-je en la rejoignant, avant de me tourner vers Rachel.
Elle me regardait d'un air un peu vide. Ses yeux étaient rouges et cernés, signe qu'elle avait dû encore pleurer.
Elle ouvrit la bouche comme pour parler mais la referma aussitôt, et à la place vint se lover dans mes bras. Un peu surpris, je la serrai cependant contre moi et pus constater qu'elle tremblait.
- Je crois que je vais retourner me coucher, soupira-t-elle finalement en s'écartant. Je suis trop fatiguée.
- Tu te souviens où est ta chambre ? demanda gentiment Liana.
Mon ancienne camarade de classe hocha la tête puis se détourna et remonta la colline à pas lents.
- Elle est levée depuis longtemps ? chuchotai-je à ma nouvelle amie.
- Je suis sortie prendre l'air il y a à peu près une demi-heure et elle était seule, alors je lui ai montré les dortoirs. Et comme elle voulait rester dehors je lui ai fait visiter la colline.
Je suivis la jeune fille blonde du regard jusqu'à ce qu'elle ait totalement disparu de mon champ de vision, inquiet.
- C'est elle qui est arrivée hier avec Blake n'est-ce pas ? continua Liana.
- Oui, c'est ça. C'est une ancienne... amie.
- Tu veux dire une ex ?
- Non ! Au contraire, nous n'étions pas vraiment proche. Du tout.
- Vous êtes assez tactiles, pourtant...
Je haussai les épaules, ne sachant pas vraiment quoi répondre.
- Je ne sais pas. C'est juste... naturel.
Elle acquiesça, mettant heureusement fin à la discussion sur le sujet.
- C'est quoi cette maison ? finis-je par lui demander en désignant la bâtisse qu'elle et Rachel observaient quand j'étais arrivé. Pourquoi est-elle si grande et éloignée des autres ?
- C'était celle de James Williams, je ne sais pas si tu en as entendu parler...
- Le prof d'histoire a prononcé son nom une fois mais je n'ai pas trop suivi.
- C'était un grand scientifique. C'est lui qui a fait apparaître nos Marques pendant sa captivité, mais il a surtout refondé la Société, établit ses règles. Il nous a sauvé de la Cité, quoi. Tous les ans on fait une fête en son honneur, le jour de l'anniversaire de sa mort il y a une centaine d'années. C'est dans une semaine, samedi prochain.
Je fus plutôt agréablement surpris à cette annonce. Après tout, la vision que j'avais pour l'instant de la Société n'était pas très globale... en presque deux semaines j'avais à peine rencontré d'autres adultes que Miss Lumina et les professeurs. Ce serait l'occasion.
- Et personne ne vit là-dedans ?
- Non. On la rénove pour la garder debout en son hommage, mais techniquement elle est encore la propriété de la famille Williams. Bref, poursuivit la jeune fille en haussant les épaules. Les cours vont bientôt commencer, il faudrait rentrer...
J'acquiesçai et nous prîmes le chemin du retour.
Durant la matinée, Ella ne vint pas en cours. Où pouvait-elle être ? Était-elle encore en train de discuter avec Miss Lumina comme elle l'avait fait la veille pendant de longues heures ?...
Je savais qu'elle avait dû s'expliquer auprès de la dirigeante à propos du fait que j'étais dehors sans autorisation, et j'étais bien content de ne pas avoir été moi-même convoqué. Je n'avais pas envie d'expliquer mon rêve de Nick et n'avait malheureusement pas le talent d'acteur de la brune.
Ce n'est qu'à la fin de la journée que je la revis, soit après presque deux jours sans elle. C'était au moment où je sortais de l'école, en compagnie de Liana et Rachel qui était venue en cours pour l'après-midi.
La brune portait un gros sac-à-dos, perché sur son épaule.
- J'ai ramené des cadeaux ! annonça-t-elle en s'avançant parmi les élèves.
Surpris, je m'arrêtai pour la regarder donner un jouet à un garçon d'une dizaine d'années, des figurines à un autre. Une robe pour une petite fille, une poupée pour une autre, un ballon de foot pour des jumelles...
- Pourquoi fait-elle ça ? m'étonnai-je dans un chuchotement.
- Ella qui joue au père Noël, ricana Liana. J'y crois pas...
- C'est quoi le père Noël ? demanda Rachel à la jeune fille.
- Pas très important. C'était un peu une tradition avant, quand Alice partait dans la Cité pour une mission pas trop dangereuse, elle ramenait des cadeaux à tout le monde. D'habitude les expéditions servent juste à nous pourvoir de provisions, de vêtements et de matériel qu'on ne peut pas fabriquer nous-mêmes, donc les loisirs sont ignorés, mais Alice s'arrangeait pour contourner légèrement la règle.
J'observai la jeune Poursuiveuse distribuer le contenu de son sac aux enfants et à quelques-uns des adolescents. Un fillette qui ne devait pas avoir beaucoup plus de six ans s'agrippa à sa jambe, et elle parvint à se dégager doucement en grimaçant.
Quand son regard finit par croiser le mien, je m'attendis à ce qu'elle m'ignore, me jette un regard noir ou une remarque désobligeante. Au lieu de quoi, souriante et ignorant totalement l'air subitement fermé de mes deux amies, elle s'approcha de moi.
- Newtie, j'ai aussi une surprise pour toi.
- Ne dis pas "l'honneur d'être en ma compagnie", s'il te plait.
A mon plus grand étonnement, la brune éclata de rire. D'un rire sincère, en tout cas j'en eus bien l'impression, même si c'était difficile de savoir avec elle.
- Pas faux, ça fait deux cadeaux du coup, annonça-t-elle en me plaquant une forme touffue contre la poitrine, sur laquelle je refermai les mains par réflexe. A plus tard...
Elle m'adressa un petit clin d'œil et s'éloigna, alors que je restai figé, stupéfait par son étrange bonne humeur.
- Je rêve, grommela Liana, dont j'avais oublié la présence pendant un instant. Ne tombe pas toi-aussi dans son piège, Newt...
- Quel piège ? Et pourquoi "moi-aussi" ?
- Elle essaie de te mettre dans sa poche comme elle fait avec tout les autres... Et ça n'a pas d'importance. Ce qui en a c'est que tu es plus intelligent que ça, je le sais bien.
Je ne répondis pas, car à ce moment-là Rachel cria. Je me tournai aussitôt vers elle, pour voir qu'elle avait plaqué sa main sur la bouche en fixant le ciel. Je suivis son regard.
Quelqu'un était debout sur l'arrête du toit de l'école, les bras écartés à l'horizontale pour garder l'équilibre.
Sous mon regard ébahi, la jeune fille faillit tomber sous un coup de vent mais finit par recouvrir sa position initiale.
- Qu'est-ce qu'elle fait là-haut ? s'exclama Liana avant de se précipiter vers l'intérieur de l'école.
Un instant plus tard, la voix de Quentyn résonna sur nous, portée par le vent.
- Harmony !
Son visage apparu par un velux ouvert, sans doute celui par-lequel la jeune adolescente était passée pour arriver là.
À l'entente de son prénom, elle se retourna et perdit à nouveau l'équilibre pendant un instant.
- Est-ce que quelqu'un a le pouvoir de téléportation ? demandai-je autour de moi.
Je sentis Rachel se tendre, et sus qu'elle pensait à la même personne que moi.
Blake. Si seulement il n'avait pas été ce qu'il était, il aurait pu sauver Harmony.
Quentyn s'était hissé sur le toi et tendait la main à la jeune fille qui ne semblait pas comprendre où était le problème.
Quand il parvint enfin à la faire redescendre par le trou, je sentis le soulagement m'envahir en même temps que l'assemblée se mettait à applaudir son acte. Ce n'est que lorsque je voulus suivre le mouvement que je me souvins du cadeau d'Ella.
C'était un ours en peluche bleu.
Un bisounours.
Je sentis un sourire étirer mes lèvres malgré moi.
Quand une Harmony à l'air totalement perdue finit par sortir du bâtiment accompagnée par Liana et Quentyn, une nouvelle ovation retentit, qui ne m'empêcha toutefois pas d'ignorer un léger bruit métallique quand je rabaissai le bras tenant la peluche.
Je l'inspectai, soudain curieux. Je finis par remarquer un endroit où la couture était défaite, laissant apparaître le rembourrage. Étrange, si elle était neuve... Je glissai un doigt à l'intérieur, qui finit par atteindre un anneau métallique.
Celui-ci était relié à une clé et un morceau de papier. La première était petite, banale et légèrement rouillée. Sur le second on pouvait lire ces mots :
Hôtel de Ville, couloir de gauche, premier sous-sol, porte tout au bout du couloir.
Attends-moi là-bas après les cours, fais en sorte que personne ne te voie.
Je glissai le tout dans ma poche et rejoignis mes amis sans rien laisser paraître de mon dilemme intérieur quant à ce que je devais faire.
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AFleurDeMot
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