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Chapitre 48 - Celle qui apprend

L'air poisseux et l'odeur de moisissure n'ont pas eut raison de l'enthousiasme des résidents. Toute la semaine durant, ils ont aménagé la cave, étudiés les propriétés de divers matériaux d'isolation et tenté de les reproduire magiquement. Sous les conseils avisés de Venacio, ils ont orienté leurs recherches vers les dernières innovations en la matière, ce qui a permis à l'espace négligé de se réchauffer à mesure qu'il s'insonorisait.

Affalée dans un pouf à mémoire de forme qui était encore, jusqu'il y a quelques jours, une chaise branlante, Anthéa inspecte le plafond. Darcy termine de transformer une vieille couverture qui y a été punaisée en une plaque rigide plus à même d'absorber les bruits.

— On devrait créer un sort qui empêche le son de se propager, réfléchit-elle tout haut.

Le travail qu'iel effectue demande concentration et patience, mais Darcy prend quand même le temps de se retourner vers elle pour râler.

— Parce que, clairement, c'est notre spécialité d'inventer des sorts. C'est même pour ça que tout va toujours siii vite.

Anthéa hausse les épaules et s'enfonce un peu plus profondément dans son gigantesque cousin.

— On commence à être pas mal calés en isolation, quand même. Si on parvient à conceptualiser dix ou peut-être même cent couches de fibres de verre superposées en une fine couverture et qu'on la déploie autour de la pièce dans une sorte de, je sais pas trop comment dire ça, un espace entre la réalité et autre chose ? on devrait pouvoir isoler complètement la cave ou même n'importe quel espace, vous croyez pas ?

Et c'est vrai qu'à force de recherches intenses, ils sont tous devenus plus calés que la plupart des apprentis en BTP sur le sujet. Pour ce qui est du côté univers parallèles, en revanche, ça risque de se complexifier un peu, car les informations à ce sujet sont, elles, bien plus théoriques. Venacio, qui l'a écoutée avec attention, se prend la tête dans les mains. En pleine réflexion, il soupire avant de se retourner vers elle.

— Si tu es parvenue à cette conclusion toute seule, je crois qu'il sera bientôt temps qu'on aborde la physique quantique et la science des trous noirs.

— On a le niveau pour ça ? doute Simran en mettant de côté le feu qu'elle essaye de faire prendre dans une sorte de lanterne de sa composition.

— Pas vraiment, mais si vous étudiez aussi sérieusement que vous l'avez fait jusque-là, ça ne devrait pas vous poser trop de problème. En revanche, reprend-il en s'adressant à Anthéa. Si tu parviens à en comprendre le fonctionnement avant moi alors que j'ai consacré ma vie à ce sujet, je ne réponds plus de rien.


— Tu crois qu'il était sérieux ? s'inquiète Caleb, deux heures plus tard, alors qu'ils marchent dans les rues de Londres.

— Qui ?

— Venacio. À propos des trous noirs et tout ça. Tu crois que tu pourrais comprendre comment ils fonctionnent avant lui et tous les autres scientifiques ?

Anthéa hausse les épaules, ce qui entraîne le bras de Caleb en même temps.

— Ça m'étonnerait, j'y connais rien en astronomie.

Une fois l'isolation du plafond terminée, les adolescents se sont rendus au centre-ville pour faire quelques emplettes dans le but d'améliorer leur nouveau repère. Le large sac que tiennent ensemble Caleb et Anthéa contient un chauffage d'appoint qu'ils comptent laisser dans la cave, au moins jusqu'à ce que le radiateur magique de Simran soit en état de fonctionner sans risque.

— On a besoin de nouveaux pantalons, ça vous dérange si on fait un saut au One New Change ? les interrompt Tobias alors qu'ils se dirigent vers la prochaine bouche de métro.

Le centre commercial de la City n'est pas un lieu où ils passent souvent, et emporté par la curiosité de le découvrir, ils y traînent au final bien plus de temps que prévu.

— Je sens plus mes bras, se plaint Caleb alors qu'ils sortent de leur dixième magasin de vêtements sans que personne n'ait rien acheté.

— Donne, je te remplace, se propose Zach en tendant le bras pour prendre l'anse du sac.

Alors qu'il espérait passer un peu de temps avec Anthéa, il déchante quand celle-ci laisse sa place à Drew, et le sourire qu'il affichait encore une fraction de seconde plus tôt disparaît, remplacé par une moue boudeuse bien éloignée de ses expressions ordinaires.

Caleb a remarqué que malgré ce qu'elle a pu lui dire au sujet du fait de passer plus de temps avec Zachary, elle n'en fait rien. Au contraire, elle semble même tout faire pour éviter de se retrouver seule avec lui. Il suffit qu'il l'invite au cinéma ou même juste à se balader pour qu'elle saute littéralement sur le premier de leurs amis qui passe avec l'intention de le convier à l'activité.

Malgré tout, elle ne le craint pas. Son regard est aussi franc que d'habitude, son débit de parole aussi important, ses fous rires aussi nombreux. Non, le problème ne semble pas être le jumeau, avec qui elle a continué à interagir comme avant qu'ils ne se mettent ensemble, mais bien quelque chose de plus intime.

Peut-être que s'il tentait d'absorber ses sentiments au lieu de lui transmettre les siens quand il lui prend la main, il parviendrait à comprendre ce qu'elle ressent.
Il a considérablement diminué ses actions de zenitification depuis sa discussion avec Venacio, mais n'a pas arrêté pour autant. Quand il s'est aperçu que Simran s'était rapprochée d'elle-même, lui posant régulièrement une main sur l'épaule ou laissant leurs jambes se toucher quand ils paressent sur le canapé ou qu'ils travaillent dans la salle d'étude, il a repris en partie ses habitudes. Conscient qu'il devra un jour en parler avec ceux avec qui il l'utilise toujours, il se contente pour l'instant d'être plus discret.

Il est sur le point d'attraper la main d'Anthéa pour tenter de mettre son plan à exécution quand un garçon bondit de l'escalator à leur droite. D'à peu près leur âge, il a le visage fermé, les cheveux coupés courts et le regard plus noir encore que Drew quand elle pose les yeux sur lui. Rien dans son comportement n'indique qu'il a conscience de leur présence à seulement deux mètres de lui ou même du reste des badauds. Dans le large espace dégagé où ils se trouvent, il retire juste le sac à dos qu'il porte sur ses épaules et le balance dans leur direction en le faisant glisser au sol.

Le sac passe devant eux, les dépasse et se stabilise enfin au milieu de la large place, à quelques mètres seulement de leur position. Du coin de l'œil, Caleb voit le garçon s'enfuir en courant dans l'autre direction, et dans son dos, il entend Simran crier. Inquiet, il se retourne et surprend Hadrien enlacer Zia, englobant son corps frêle dans le sien, plus large. La protégeant de la seule façon qu'il lui semble posséder.

La situation lui échappe, il ne comprend pas ce qu'il se passe, mais à ses côtés, Anthéa, impérieuse et le regard froid, tend la main vers le sac à dos. Aussitôt, un orbe doré se matérialise autour de l'objet tandis que l'air dans la galerie perd plusieurs degrés en moins d'une seconde. Sans que rien ne l'explique, celui-ci vient alors à manquer à Caleb. Dans ses poumons circule moins d'oxygène, plus de CO2 et sa tête se met à tourner.

Sans même le regarder, Anthéa lui plaque une main sur la bouche et ordonne :

— Inspire.

C'est contre intuitif, mais ça fonctionne. L'air remplit sa gorge, ses poumons, ses vaisseaux sanguins, et la jeune fille le relâche. Elle n'a pas quitté l'orbe doré des yeux, prête, il en est certain, à le faire exploser elle-même si ça s'avère nécessaire.

Il n'a pas dû se passer plus de quelques secondes, et autour d'eux, d'autres cris retentissent. D'abord interpellés par la voix de Simran, des passants se sont arrêtés. Ils sont désormais surtout surpris par la sphère de cinquante centimètres de diamètre qui est apparue sous leurs yeux.

— Le connard... gronde Drew à moins d'un pas de lui.

Et comme Anthéa, elle tend le bras devant elle. À sa différence, pourtant, elle n'a pas gardé la main ouverte, mais l'a refermée à demi, la transformant en un pistolet enfantin. Son regard glacial est fixé sur le type qui décampe toujours et elle a lâché le sac contenant le radiateur.

Du pouce, elle abaisse un cran de sécurité fictif et tire une première fois. Puis une seconde, et une troisième, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le plaisantin se retrouve cloué au sol par 16 clous ayant transpercé ses vêtements au plus près de son corps. Sa bouche accompagne chaque tir d'un POC que lui seul entend tant la clameur a redoublé quand le garçon est tombé.

L'air se raréfie une nouvelle fois autour d'eux et Caleb vacille à nouveau. Anthéa n'a rien vu de ce qui vient de se passer, concentrée sur la sphère d'or qui a encore grossi. Elle n'a rien vu, mais a capté les cris de surprise des passants et les vociférations du délinquant. Ce petit con invective le monde entier, et à chacune de ses insultes la mâchoire d'Anthéa se crispe davantage, raréfiant encore l'air disponible dans le centre commercial.

— Anthéa, supplie Caleb alors que ses genoux flanchent. Anthéa, arrête...

Il ignore comment elle fait ça, mais il est encore assez conscient pour remarquer qu'il est le plus affecté par ce qui se passe. Autour d'eux, d'autres promeneurs se sont arrêtés. Leurs regards curieux se sont mus en œillades inquiètes, leurs murmures enflent et enflent encore, au point de bientôt être prêts à exploser. L'air n'a pas encore disparu de leur côté, mais la peur a commencé à prendre le dessus. Désormais à genoux aux pieds d'Anthéa, Caleb ignore si ce qui le terrifie le plus est la menace que représente le sac ou le regard de son amie en cet instant précis.

— Anthéa...

La sphère a encore grossi. Elle est plus haute qu'eux maintenant, et les touristes les plus proches commencent enfin à se sentir mal. Une femme s'évanouit tout d'abord, suivie par une deuxième, puis par un homme portant un costume hors de prix.

Encore quelques minutes et ils seront tous morts. Et ce ne sera pas à cause de ce que contient le sac. Alors Caleb prend la main d'Anthéa et la pose sur sa bouche. Il inspire, à la recherche de l'air qu'elle lui a déjà fourni une première fois, mais rien ne se passe. Ses poumons le brûlent, il ne peut même pas hurler, la rappeler à la raison. Avant que ses dernières forces ne le quittent, il serre son poignet et, pour cette fois seulement, ce n'est pas un shot de zen qu'il lui transmet, mais toute la peur et l'angoisse qui l'habite.

Au moment où elle quitte la boule d'or des yeux et qu'elle pose ceux-ci sur son ami, à genoux par terre, elle prend conscience du problème. Autour d'eux, ses amis, au même titre que les badauds les plus proches, ont commencé à se sentir mal. Seul Caleb, pourtant, semble sur le point de s'évanouir.

— Anthéa...

Les mains de Zachary sur ses épaules la font sursauter, mais le fait qu'il doive aussitôt reculer d'un pas pour pouvoir reprendre une inspiration fait naître une terreur panique dans son regard. Aussitôt, elle plaque sa main sur la bouche de Caleb.

— Respire, lui ordonne-t-elle pour la seconde fois.

Et alors qu'il retrouve des couleurs tandis que ses poumons se remplissent d'un air qu'elle crée sans savoir comment, elle sent ses doigts affermir leur prise autour de son poignet et l'angoisse refluer à travers leur connexion.

Dans le public, de plus en plus de gens commencent à paniquer. Si certains ont pensé à une performance artistique, cette théorie perd des adeptes à chaque seconde qui passe.

— Endors-les, murmure-t-elle. Endors-les tous.

Caleb secoue la tête. Un genou toujours à terre, il doit s'y reprendre à deux fois avant de parvenir à se remettre debout.

— Je ne sais pas faire ça.

— Tu sais calmer n'importe qui.

Alors, elle aussi l'a remarqué. Mais Caleb secoue la tête une seconde fois.

— Je devrais tous les toucher...

— Utilise l'air, les molécules d'oxygène...

Ça le fait rire, mais un rire sinistre, sans joie aucune.

— T'as failli me tuer en le faisant. Tu nous aurais tous tués si t'avais continué.

Ça lui met un coup, ça la blesse plus qu'aucun autre mot qu'il ne lui a jamais dit, mais elle l'encaisse.

— Anthéa... On doit bouger.

Dans son dos, Zachary tente une seconde approche. Il a l'air inquiet, et un peu apeuré aussi. Cette expression est absurde sur son visage avenant, sur un garçon avec sa carrure.

— Un happening, propose Zia de sous la silhouette courbée d'Hadrien.

— C'est trop tard pour ça, contredit Tobias.

Et il a raison. Ils savent tous qu'il a raison.
Autour d'eux, des téléphones filment, d'autres ont à coup sûr appelé la police.

— Alors courez, décide Anthéa. Maintenant.

Ils auraient pu partir tous en même temps. Ils auraient probablement dû, pour que ça ait plus d'impact. Mais rien n'était préparé, et ils restent tous statiques, les bras ballants, incertains. Quand elle comprend que personne ne bougera si l'un d'eux ne donne pas le coup d'envoi, c'est Simran qui initie leur fuite. Rapide comme l'éclair, elle se faufile entre les petits groupes de gens statufiés, et en un battement de cils, elle a disparu. Les premiers à la suivre sont Hadrien et Zia, mains dans la main. Viennent ensuite Tobias, Drew qui repousse un homme qui tente de la retenir, et enfin Zachary, qui accepte d'abandonner sa petite amie après un hochement de tête entendu de celle-ci.

Caleb glisse sa main dans celle d'Anthéa et fait deux pas vers la sortie, mais recommence à angoisser quand il remarque qu'elle hyperventile, bloquée au milieu de l'attroupement. Il tire sur son bras, mais elle ne bouge pas, alors il fait la dernière chose qu'il se sent en état de faire et commence à lui envoyer de la force sous forme de vague du peu de bien-être qu'il trouve encore en lui.

Pourtant, les choses ne se passent pas comme elles le font toujours et, à l'endroit où leurs deux peaux se touchent, il sent comme une résistance.

— Pas maintenant, souffle Anthéa.

Sa voix est à peine audible, couverte par sa respiration rapide et le murmure de la foule.

— Pas maintenant, répète-t-elle. Pas maintenant, pas maintenant... Arrête de respirer, Caleb, je t'en supplie... Maintenant !

Tout va trop vite pour lui, mais il bloque sa respiration au moment où elle le lui demande. Anthéa lève alors les bras au ciel et une ode de choc le percute, résonne à travers chacun de ses os avant de couler autour de son corps pour fondre sur les clients du centre commercial.

Plusieurs tombent à la renverse, peut-être même que certains s'évanouissent, mais la plupart se font juste un peu bousculer. C'est suffisant pourtant, pour que les deux adolescents s'enfuient, laissant derrière eux la sphère dorée qui a commencé à se fendiller et un garçon cloué au sol qui n'a jamais arrêté de hurler des insanités.

Ils n'ont pas encore rejoint l'extérieur quand d'autres cris, plus paniqués cette fois, retentissent dans leurs dos. Une explosion de lumière chaude accompagne la débandade des touristes terrorisés et, dehors, les deux amis se retrouvent pris dans une marée humaine pressée de s'éloigner aussi vite que possible. Quand ils parviennent à s'en extraire, ils n'aperçoivent aucun des autres adolescents, mais il ne faut pas deux minutes à leurs téléphones pour se mettre à vibrer sous un flot de messages paniqués. De cette manière, et pour plus de sécurité, il est décidé que chacun rentrera de son côté.

C'est ainsi qu'il leur faut une heure avant d'être tous de retour au manoir. Et c'est réunis dans la bibliothèque qu'ils reviennent sur ce qui vient de se produire.

— On est forcément sur les caméras de surveillance, sanglote Hadrien.

Zia, assise à ses côtés, lui caresse le dos, mais il ne semble même pas le remarquer.

— Mais on n'a rien fait ! s'emballe Drew en faisant les cent pas.

— On a fui, la corrige Tobias

Bien trop zen, il s'est allongé dans le canapé et s'envoie tout un paquet de bonbons sans en proposer aux autres.

— Comme plein de gens, temporise son frère. On dira qu'on eu peur.

— On a eu peur ! s'énerve Drew, qui se retient de peu de l'attraper par le col.

C'est étrange, réalise Caleb alors qu'une dispute entre les trois Reed est sur le point d'éclater. Ils n'ont pas essayé de se servir de la magie, ils n'ont même fait de mal à personne. Ils ont juste réagi instinctivement à ce qu'ils ont pris pour une menace. Tous sont pourtant persuadés qu'ils vont finir en prison si ça s'apprend. C'était peut-être une erreur, tout compte fait, d'essayer d'améliorer leurs capacités.

À côté de lui, Simran se prend la tête dans les mains, à deux doigts de fondre en larmes.

— Mais qu'est-ce qu'on a fait ? On a fait exploser un sac.

— Ils verront qu'il n'y avait pas d'explosif dedans en plus... renchérit Hadrien.

Dans son canapé, Tobias ricane alors qu'il engouffre une pleine poignée d'oursons colorés dans sa bouche.

— Ils vont rien comprendre.

— Ils vont nous rechercher, grimace Drew.

— On n'a rien fait, insiste Zia, sa main allant et venant dans le dos d'Hadrien, dans une parodie de geste réconfortant. Enfin, si... Mais...

— Le type, je l'ai cloué au sol ! Je l'ai. Cloué. Au sol ! J'aurais pu le buter si j'avais merdé. Mais je pensais que c'était un terroriste, pas une petite merde qui jouait au con.

Tous soupirent, abattus, quoi que soulagés que Darcy n'ait pas été avec eux ou ne soit déjà de retour au manoir. Iel les aurait atomisés pour ce qu'ils ont fait, pour avoir risqué de les révéler au grand jour.

— On aurait dû les oublieter... murmure Caleb pour lui-même.

Il a un peu honte de n'avoir pas tenté ce qu'Anthéa lui a demandé, mais il ne s'en sentait pas du tout capable. Et puis ça n'aurait fait que les endormir, ils auraient gardé leurs souvenirs. Quand il relève la tête et qu'il trouve Drew à quelques centimètres de lui, le regard fou, prête à le mordre, il bondit sur les genoux de Simran pour lui échapper, mais déjà elle s'est redressée et a recommencé à arpenter la bibliothèque.

— On n'est pas dans ton Harry Potter de merde !

— Ni dans Men in Black, même si ça serait bien pratique, se marre Tobias.

— On est foutu... pleurniche Hadrien.

Anthéa n'a pas ouvert la bouche depuis qu'ils sont rentrés, sauf pour leur expliquer ce qui s'est passé après leur départ. Et un peu avant, aussi. L'orbe doré, c'est elle qui en est à l'origine, bien sûr. Elle y a enfermé le sac pour qu'il ne blesse personne en explosant. Parce qu'elle aussi, elle a pris l'abruti pour un terroriste. Caleb est persuadé que c'est ce qu'il espérait, d'ailleurs. Le plaisir de faire flipper quelques touristes trop nerveux peut vraiment pousser certains crétins à faire n'importe quoi.

Ignorant ce que contenait réellement le sac, et ne voulant pas risquer de le laisser faire des dégâts après leur départ, Anthéa l'a fait exploser elle-même dans sa bulle protectrice constituée de multiples couches d'isolant. C'est ce qui a créé le mouvement de panique. C'est aussi la raison pour laquelle elle a vidé l'espace autour d'eux de son oxygène. Pour empêcher l'explosion de s'y propager.

Depuis, elle n'a rien ajouté et est restée scotchée à son téléphone, à agir comme si elle ne les entendait pas. Inquiet pour elle autant que pour les autres, Caleb décide de prendre sur lui. S'extrayant des genoux de Simran, il se met à déambuler entre les fauteuils. Il fait mine de réfléchir, s'assied parfois sur un accoudoir ou sur la table basse encombrée de notes de cours à moitié illisibles. De cette façon, et sans que personne ne le remarque, il se met à effleurer un bras, à poser son pied nu contre un autre, à calmer chacun des adolescents les uns après les autres.

Quand plus aucun cri, plus aucun sanglot, plus aucune plainte ne sort d'aucune bouche, il s'appuie à la table d'où Anthéa n'a pas bougé et pose sa main sur son poignet. Il s'attend à ce qu'elle bloque ses endorphines comme ça a été le cas dans le centre commercial, mais elle n'en fait rien. Au contraire, elle accepte avec un soupir d'aise la tranquillité qu'il lui offre, et quand elle relève les yeux dans sa direction ils sont moins torturés, plus souriants.

— J'ai peut-être une bonne nouvelle, leur annonce-t-elle. Le but de l'explosion, c'était pas seulement de neutraliser la potentielle bombe, c'était aussi de corrompre les vidéos et les photos que les gens avaient pu prendre.

— Comment ça ?

— Vous avez entendu parler des attaques EMP ? C'est un peu ce que j'ai essayé de faire, mais en moins puissant. Et en moins maîtrisé, peut-être, aussi.

Elle roule des yeux, pas désireuse de les voir s'attarder sur ce manque de professionnalisme de sa part, et leur désigne son téléphone.

— Il n'y a aucune vidéo. Nulle part. Même dans les articles qui parlent de ce qui s'est passé. Je crois que tous les téléphone ont été infectés. Vous devriez vérifier les vôtres, d'ailleurs. Je sais pas jusqu'où ça a été, mais c'est pas impossible que vos derniers fichiers soient corrompus. Désolée pour ça.


Bien plus tard, alors que la nuit a recouvert la ville et que les adolescents sont rentrés chez eux ou se sont enfermés dans leur chambre, l'un d'entre eux reste patiemment allongé dans son lit. Les yeux grands ouverts, Caleb ne parvient pas à relativiser ce qui s'est passé. À moins que toute l'angoisse qu'il a ponctionnée sur les autres ne le consume ? Quoi qu'il en soit, il expérimente en cet instant l'une des plus vilaines insomnies de toute sa vie.

Quand la porte de sa chambre grince et qu'un filet de lumière en provenance de l'escalier se glisse par l'ouverture, il se redresse, inquiet. Mais quand la voix d'Anthéa lui demande l'autorisation d'entrer, ses muscles se relâchent et il se laisse retomber sur ses coussins.

— T'as pas l'air bien, lui glisse-t-elle en s'allongeant à ses côtés, dans la petite place qu'il lui a faite.

— Tu m'en diras tant...

Elle sourit, mais dans l'obscurité de la pièce où ne filtre que peu la lueur des éclairages publiques, il ne distingue qu'un éclat dans ses yeux rieurs. Sans lui demander la permission, elle se glisse sous les draps et lui attrape la main. Aussitôt, un sentiment de bien-être le gagne tandis que ses yeux se ferment et que sa tête s'enfonce plus confortablement dans les coussins. D'une pression des doigts, il lui indique que ça va, qu'elle peut s'arrêter, mais elle ne semble pas comprendre alors il rouvre les yeux et se tourne vers elle.

Ils se distinguent à peine, mais ça n'a aucune espèce d'importance.

— Comment tu fais ça ? la questionne-t-il.

Car, jusqu'à aujourd'hui, personne ne semblait capable de le faire à l'exception de lui. Le bruit que font les coussins lui apprend qu'elle vient de hausser les épaules, mais sa voix s'élève quand même juste après.

— J'ai étudié les sensations que ça crée quand tu le fais.

— Tu as absorbé mon sort ?

Nouveau mouvement sur sa droite. Anthéa s'est tournée sur le dos, le regard dans le vide.

— Peut-être. Je sais pas trop. Mais ça marche ou pas ?

— Ben oui, souffle-t-il, aussi soulagé d'avoir pu en profiter qu'agacé de ne plus être le seul à savoir le faire. Mais je voudrais savoir aussi recopier les sorts des autres.

— Je pense que t'en es capable, affirme-t-elle en lui serrant la main. On doit tous en être capable. J'ai rien de plus spécial que vous.

Au-dessus de sa tête, Caleb entend un froissement dans l'air et de la même façon que l'éclat dans l'œil d'Anthéa a pu briller grâce aux lampadaires de la rue, les plumes irisées du pendentif lui renvoient juste assez de lumière pour qu'il le reconnaisse.

— Il te suit comme un chien.

Nouveau bruissement de coussins. Anthéa approuve.

— Je commence à penser qu'il est sentient.

Pendant plusieurs minutes, aucun d'eux n'ajoute rien. Juste heureux d'être l'un contre l'autre, aux portes du sommeil, et non pas enfermés dans une salle d'interrogatoire aux murs sales et les menottes aux poignets.

— On doit en parler à Venacio, soupire Caleb avant de sombrer pour de bon.

Mais il n'entend jamais la réponse d'Anthéa, qu'elle ne s'autorise que longtemps après qu'il se soit endormi et peu avant qu'elle n'en fasse de même.

— Tu as sans doute raison...


**

Hey les gens !

J'espère que ce chapitre n'est pas trop incompréhensible. Je l'ai en partie réécrit avant de le poster, mais je pense qu'il pourrait encore être amélioré.

Cette scène, avec le petit con qui balance son sac avant de se barrer, je l'ai vécue il y a quelques années en Angleterre. C'était un peu après les attentats du Bataclan et du métro de Bruxelles, il y avait beaucoup de monde autour de nous et j'ai réellement eu peur. J'ai bondi en arrière, la main sur le bras de mon compagnon pour qu'il en fasse de même et... personne d'autre n'a bronché. Rien. Pas un cri, pas un coup d'œil, pas une putain de réaction de qui que ce soit à part moi.

Juste après, le mec est venu récupérer son sac et je me suis senti tellement bête. Parce que personne n'a réagi. Parce que j'ai peut-être plus attiré l'attention que lui en faisant un écart.
Mais clairement, si j'avais eu les mêmes pouvoirs que les gamins du Manoir, le sac et le gars auraient probablement disparu dans l'hyper-espace...

Toujours aujourd'hui, je ne comprends pas que personne n'ait bougé. Que les attentats arrivés à cette époque n'aient pas plus marqué les esprits. Que personne n'ait imaginé le pire à part moi.
C'est la première des deux fois où j'ai pris conscience que ces événements, bien que je ne les ai pas vécus directement, avaient changé quelque chose en moi.


Aussi, aujourd'hui, on est le 14 juin. Mon bébé aurait dû avoir 17 ans.
C'est la deuxième année qu'elle n'est pas là pour le fêter, que cette date n'a plus de signification. Et je n'avais pas prévu de terminer cette note en pleurs, mais bon, voilà.
Elle me manque.
Putain, qu'elle me manque !

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