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Chapitre 2 - Celle qui a des projets ✓

Il n'est pas encore six heures quand Anthéa saute hors de son lit. Elle ne se lève pas aussi tôt en temps normal, surtout le lendemain d'une grosse soirée, mais aujourd'hui, c'est un peu différent. Déjà, il y a eu l'annonce de sa grand-mère quand elle est rentrée du cinéma avec les autres résidents. Un nouveau venu a profité de leur absence pour débarquer. Une aubaine pour la jeune fille qui trouvait la maison bien grande pour à peine cinq personnes. Seul problème, il s'est aussitôt enfermé dans la chambre mise à sa disposition et Nan a interdit à quiconque de le déranger tant qu'il n'en serait pas sorti.

Obéissante, Anthéa ne s'attarde donc pas devant sa porte. Ce qu'elle n'aurait de toute façon pas fait. Qui sait à quelle heure le garçon se lèvera ? Au lieu de ça, elle se rue dans la salle à manger où sa grand-mère est déjà attablée.

— Tu es bien matinale, la félicite la vieille dame sans lever les yeux de son quotidien illustré.

— Je veux pas rater le nouveau, explique-t-elle alors qu'elle tire une chaise face à elle.

— Tu as peur qu'il s'en aille si tôt ?

— Ah ! Non, du tout. Je veux juste être la première à le rencontrer. Pourquoi ? Tu crois qu'il va partir ?

Le nez dans son bol de céréales, Anthéa la dévisage, ses grands yeux verts écarquillés. De l'autre côté de la table, sa grand-mère esquisse un sourire avant de lui servir un verre de jus d'orange.

— Non, je ne crois pas. Ou, tout au moins, je ne le crois plus.

Circonspecte, Anthéa fronce les sourcils et repose son bol pour libérer ses mains et faire ainsi glisser ses cheveux en bataille derrière ses oreilles. Un mouvement auquel elle ne pense pas, qu'elle ne remarque même pas, mais qu'elle fait au moins cinquante fois par jour. Alors que son interlocutrice referme son magazine, elle note dans son regard une lueur amusée. Sans lui laisser le temps de s'en émouvoir, pourtant, la femme s'est relevée, prête à quitter la pièce.

— Ça m'arrange que tu sois debout, j'ai un rendez-vous, ce matin. Tu t'occuperas de notre nouvel ami quand il se lèvera ?

— Comment ça ?

— Eh bien, fait lui visiter la maison, ce genre de choses.

Peu après, la porte de l'entrée émet une plainte légère tandis que Vivienne la referme avec douceur et Anthéa se retrouve plongée dans le silence. Incapable de rester sans bouger, elle commence par changer l'eau des fleurs sur la table, puis elle s'attaque à la vaisselle laissée dans l'évier, avant de remonter au second. Sans gêne, elle colle l'oreille à la porte ornée d'un cadre photo bleu et écoute de longues minutes avant de redescendre dans la bibliothèque du premier étage.

Soit le garçon dort encore, soit il a fui pendant la nuit, mais dans un cas comme dans l'autre, il ne sert à rien d'attendre passivement dans le couloir qu'il daigne se montrer. En pleine réflexion, ses pensées toutes entières tournées vers le nouveau venu, elle se met à fredonner l'une de ses chansons préférées du moment. La bibliothèque est en désordre, en partie par sa faute, si bien qu'elle se met en devoir de ranger tout ce qui y traîne avant que Vivienne ne découvre le carnage. Quelques vêtements abandonnés sont empilés sur le dossier d'un fauteuil. Quant aux livres qu'elle récupère sous les assises et sur la table basse, elle les classe en deux piles. Ceux qu'elle compte lire d'ici peu, et ceux qui ne revêtent à ses yeux aucune espèce d'importance. Ceux-ci, des ouvrages de fictions pour l'essentiel, se retrouvent entassés sur les étagères, entre tant d'autres couvertures jaunies et craquantes. Les autres, de gros ouvrages traitants de la lutte ouvrière et des grèves historiques, sont alignés bien comme il faut sur le haut du piano devant lequel elle s'installe, les jambes croisées.

Il faudra qu'elle se dépêche si elle veut les avoir terminés avant la rentrée. Aussi, accueille-t-elle la fin de sa chanson avec un soupir et relève-t-elle le couvercle de l'instrument avec un peu trop d'entrain. Aussitôt, ses doigts se mettent à courir sur les touches et sa voix se joint aux notes pour un récital à destination des seuls moutons de poussières cachés sous les meubles anciens.

À leurs seules oreilles sourdes, vraiment ? Rien n'est moins sûr quand un mouvement brusque attire son attention aux limites de son champ de vision. La porte qui était restée entrouverte pour lui permettre d'entendre le bruit des pas sur les marches de l'escalier, s'ouvre en grand alors qu'une silhouette inconnue se retourne, en panique, vers le couloir.

Sans un bruit – ou du moins, sans un bruit de plus, cette porte, comme toutes les autres, étant sujette aux grincements – le nouveau venu retire sa manche coincée dans la poignée et s'écarte, désireux de se fondre dans les ombres que le Manoir prodigue en quantité.

Anthéa, elle n'a pas perdu de temps. Elle a balancé ses pieds aux chaussettes dépareillées devant elle et a rejoint le couloir en deux enjambées.

— Tu dois être Caleb, s'exclame-t-elle. Je suis trop contente de te rencontrer ! Moi, c'est Anthéa.

L'adolescent tressaillit et une plainte qu'il tente de camoufler s'échappe de ses lèvres avant qu'il ne se retourne avec une lenteur extrême dans sa direction.

— Je... euh... Tu me connais ? bégaie-t-il en lui rendant sans entrain sa poignée de main.

— Nan m'a parlé de toi quand on est rentrés, hier soir, explique-t-elle sans le lâcher. Je voulais être la première à te rencontrer. J'aurais peut-être dû attendre dans la cuisine pour être sûre de te croiser, mais j'avais pas non plus envie de rester à rien faire, donc je suis remontée. Tu m'as entendue jouer ? Ça t'a plu ? C'est pour ça que tu t'es approché ?

Le garçon reste un moment sans rien répondre, et en même temps elle ne lui laisse que très peu d'espace pour le faire. Sa main, qu'elle tient toujours dans la sienne, s'est mise à suer et ses doigts tressautent et tapotent dans sa paume comme s'ils cherchaient à fuir. Quand il parvient enfin à s'extraire de sa poigne énergique, il s'empresse de les glisser, elle et sa jumelle, dans les poches de son jean à la fois trop large et trop court.

Il est dépassé par les événements, on dirait, mais fait de son mieux pour que ça ne se voit pas.

— Nan, c'est Vivienne ? demande-t-il, avant qu'elle ne va pas se remettre à poser mille questions.

D'un hochement de tête, Anthéa approuve.

— Pour moi c'est Nan, mais pour toi ça restera Vivienne. Quoique si tu veux l'appeler Nan, ça m'étonnerait qu'elle te l'interdise. Mais j'ai entendu personne d'autre l'appeler comme ça, alors ça serait peut-être un peu bizarre, non ? Enfin, on n'est plus à une bizarrerie près, ici, donc c'est comme tu veux.

Elle fait deux pas en arrière et l'invite à la suivre dans la bibliothèque.

— C'est ma grand-mère, au fait. C'est pour ça que je vis ici, même si je vais rentrer à Harland School en septembre. Du coup, je suivrai pas les cours au Manoir, comme vous, même si je vous envie un peu. J'ai toujours eu cours comme ça, moi, avec mes parents, mais pas cette année, à cause de Harland. C'est excitant, bien sûr, mais ça m'inquiète un peu aussi... Enfin, entre, insiste-t-elle alors qu'il n'a toujours pas bougé. Si on réveille les autres ils vont râler.

— Je dois te rappeler que tu jouais du piano ? grimace-t-il.

Mais, docile, Caleb obéit et reste sans voix quand il découvre les hauts murs tapissés d'ouvrages à ne plus savoir qu'en faire. Plus de bandes dessinées encore que dans la salle d'étude, des romans, des recueil, des magazines. Largement de quoi occuper une vie entière. Peut-être même deux s'il s'autorise quelques parties d'échecs, d'Uno ou de Loup Garou dont une partie des cartes a été abandonnée sur une étagère.

Anthéa hausse les épaules et ferme la porte dans son dos avant de se diriger vers le canapé où elle se laisse tomber. Repliant aussitôt ses jambes sous ses fesses, elle laisse assez de place à Caleb pour qu'il s'y installe aussi s'il le désire.

— Tant que je joue des morceaux calmes, ça a pas l'air de les réveiller.

— Ça n'a pas l'air ? répète-t-il, incertain. Tu ne sembles pas très bien renseignée.

— Personne s'est jamais plaint, explique-t-elle. Mais je n'habite ici que depuis quinze jours, et j'évite de jouer tous les matins. Au cas où. J'ai pas envie que les autres me jette à la porte, tu vois ? Même si Nan les laissera pas faire, je préférerais quand même qu'on s'entende, eux et moi. Après, j'essaie quand même d'en profiter tant que c'est les vacances, parce qu'une fois à Harland je risque d'avoir beaucoup moins de temps pour moi. En-tout-cas, c'est ce que mon père prétend.

Elle ramène ses jambes contre son torse et les entoure de ses bras un instant, avant de changer une nouvelle fois de position les sourcils froncés et les yeux dans le vague. Caleb triture l'ourlet de son t-shirt puis, avec un soupir, il enjambe l'accoudoir et s'y assied sans la quitter des yeux.

— T'as pas l'air ravie.

Anthéa secoue la tête puis vient planter ses yeux d'un brun aux reflets orangés dans les siens. Elle replace ses cheveux derrière ses oreilles, tire sur son propre t-shirt et croise une nouvelle fois ses jambes sous ses fesses.

— C'est pas ça, marmonne-t-elle. C'est juste que j'ai peur que l'école me bouffe tout mon temps et que je n'en aie plus pour faire les autres trucs que j'ai l'habitude de faire. Je voyage depuis ma naissance, tu vois, et les études n'ont jamais occupé plus de la moitié de mes journées.

Elle soupire et fronce les sourcils alors que son regard se tourne à nouveau dans le vague et des souvenirs pas si lointains.

— J'ai hâte de découvrir l'école par moi-même, vraiment... Mais en même temps, j'ai plein d'amis qui m'ont raconté qu'il s'y passe des choses vraiment bizarres... Pas à Harland spécifiquement, je connais personne là-bas. Non, mais dans les écoles de manière générale.

Caleb laisse passer un moment avant de répondre, pas certain d'être de bon conseil sur ce sujet en particulier.

— Pourquoi tu as choisi d'y aller, alors ? Tu pouvais continuer les cours par correspondance. Apparemment, c'est ce qui se fait ici et il ne semble pas y avoir de limite d'âge.

Le sourire qui se peint sur le visage d'Anthéa est craquant, même s'il ne parvient pas totalement à adoucir ses traits. Son visage, quoi qu'encore empreint des rondeurs de l'enfance a déjà quelque chose de dur. Comme une ombre un peu étrange que son sourire et sa joie de vivre suffisent la plupart du temps à gommer, mais pas toujours.

— Je veux aller à l'université, répond-elle avec un clin d'œil.

— Pour étudier quoi ?

Amusée par sa soudaine curiosité, elle se penche dans sa direction avec un air de conspiratrice. Curieux, Caleb s'approche en retour pour lui permettre de lui glisser quelques mots à l'oreille.

— C'est censé être un secret.

Pas convaincu, le garçon hausse un sourcil, ce qui fait rire Anthéa.

— Cela dit, ajoute-t-elle sur le même ton, tu m'as l'air tout à fait digne de confiance, alors je vais le partager avec toi. En fait, j'ai beaucoup voyagé, tu vois, et souvent dans des pays assez pauvres. J'ai vu ce que la pollution et le changement climatique font aux populations, aux animaux, à la Terre... Je veux aider à corriger le tir. Trouver des solutions pour dépolluer l'océan, pour faire pleuvoir sur le désert, pour protéger les forêts primaires et la Vie. J'ai déjà plein d'idées, mais j'ai pas les compétences pour les mettre en œuvre... Alors, je vais devenir ingénieure.

Les yeux humides et brillants, elle hausse les épaules et remet ses cheveux en place. Parler de son avenir la rend aussi enjouée qu'anxieuse, aussi choisit-elle de détourner le sujet avant que l'adolescent ne rajoute quoi que ce soit.

— Alors comme ça, elle t'a mis dans la chambre bleue ? J'ai hésité à la prendre. Son accès à la terrasse est trop bien, mais je voulais une vue sur le parc. Et puis comme ça, j'habite tout en haut et ma chambre est gigantesque, je dois dire...

— L'accès à la terrasse ?

— T'as pas remarqué ? Mais t'as une vue de dingue sur le jardin et la ville ! Viens, je vais te montrer.

Sans lui demander son avis, Anthéa attrape le sac à dos que le garçon a déposé à ses pieds et disparaît dans le couloir. Pris de panique, Caleb s'élance sur ses traces et la rattrape alors qu'elle est presque arrivée au second.

— C'est bon ! s'écrie-t-il. Je vais le porter. Donne !

Sans s'offusquer du fait qu'il lui arrache le sac des mains, Anthéa le précède dans la chambre qu'il a quittée peu de temps avant. Le lit est refait et les rideaux sont tirés. On jurerait que personne n'a dormi ici. L'adolescent est passé maître dans l'art de ne pas se faire remarquer. Ou presque.

D'un geste brusque, Anthéa tire sur l'épaisse tenture et les timides rayons de soleil envahissent l'espace. En partie aveuglé par cette soudaine luminosité, Caleb s'avance en direction de la porte-fenêtre sans remarquer que le tapis au milieu de la chambre a été froissé par le passage d'Anthéa. Quand son pied butte contre le repli duveteux, il tente bien de rétablir son équilibre, mais sans succès. Il court à demi sur trois pas, lâche son sac qui tombe devant sa jambe droite et, voulant épargner l'intégrité physique de son téléphone, seul bien de valeur qu'il possède et qui se trouve à l'intérieur, il bondit par-dessus. Hélas, la pièce n'est pas aussi vaste que la salle d'étude qu'il a visitée la veille et, alors qu'il se pensait enfin sorti d'affaire, Caleb vient s'encastrer dans la porte-fenêtre qu'Anthéa n'a heureusement pas eu le temps d'ouvrir.

À moitié sonné et le côté droit du visage meurtri, il se tourne vers celle qui n'a rien manqué de sa débandade. Il espérait un peu de compassion, ou à défaut de retenue, mais au lieu de ça, il la voit exploser de rire.

Pliée en deux, Anthéa a les joues rouges à force de se bidonner. Ça devrait être vexant. Ça le serrait assurément face à n'importe qui d'autre. Mais le rire d'Anthéa n'a rien de moqueur. Au contraire, il sonne presque comme un pansement sur la bosse qui hésite à se former sur le front du garçon.

— Pardon, s'excuse-t-elle enfin, alors que des larmes perlent aux coins de ses yeux. Pardon. Je devrais pas rire, mais...

Le reste de sa phrase est noyé dans un nouvel éclat et il lui faut plusieurs minutes avant d'être à nouveau capable de se faire comprendre. Tandis qu'elle éponge ses joues d'un revers de main, elle passe la seconde sur le front de Caleb dans un geste affectueux et lui sourit comme s'ils partageaient déjà un secret millénaire.

— On va devenir les meilleurs amis du monde, prophétise-t-elle alors que, sous ses doigts, la douleur et la honte s'amenuisent déjà un peu.

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