Zelda
C'est Pétunia qui m'accueille en jappant quand je m'approche de Louis. D'abord méfiante, elle me jauge d'un regard prudent, les oreilles dressées, la truffe tendue pour renifler l'air. Puis, d'un coup, elle se radoucit et trottine jusqu'à moi et frotte son museau contre mon genou.
« Je crois qu'elle t'aime bien... me glisse son maître. Pétunia, dis bonjour à Zelda. »
La chienne aboie. Je lui caresse gentiment le creux entre les deux oreilles. Puis elle se lasse, m'échappe et s'enfuie. Je la regarde retourner gaiement aux pieds de Louis. Il porte une chemise à manche courte. Je crois que ça le met en valeur. Il me sourit timidement. Son regard brille, répond à mon air observateur. Le vent balaye ses mèches blondes.
« J'ai ramené de la bière, je bredouille, me sentant un peu bête de le détailler comme un simple morceau de viande.
- Cool.
- Et j'ai du saucisson.
- Tu deviens officiellement ma personne préférée sur terre. »
Je lui souris. Il me sourit vraiment. C'est ravageur. Pétunia grogne. Je crois qu'elle n'a pas aimé.
« Après Pétunia, je la rassure. J'ai quelque chose pour elle, aussi. »
Je fouille dans mon sac à dos. J'en sors un petit paquet de croquettes. Louis s'approche, me le retire des mains doucement. Ses doigts frôlent les miens. J'ai l'impression qu'un courant électrique parcoure mon échine.
« Elle adore ce sachet ! s'exclame-t-il, tout content. C'est adorable.
- J'ai aussi des tapas, j'explique en décrétant que j'en avais marre d'être assise. »
Le sable se meut sous mon poids. Louis me rejoint.
« Des tapas ?
- Oui. Tu sais, c'est pleins de petits plats que tu grignotes comme ça..
- Je sais ce que c'est, répond Louis, un peu vexé. »
Je me sens mal.
« C'est juste que je suis étonné d'en manger en Bretagne, il ajoute, plus doucement. »
Son changement de ton me rassure. Il me sourit de nouveau. L'ombre sur son visage a disparu.
« C'est Mamicha, je confesse. Au début, je voulais juste prendre du saucisson mais elle n'a pas voulu.
- Sacrée Maria, se moque gentiment le garçon. Et donc, il fallait absolument faire des tapas ?
- Mamicha est espagnole, je souligne. Enfin, elle est franco-espagnole. Alors le soir, on mange souvent des tapas.
- Ah ! Mais Mamicha, c'est plus un surnom de l'est de l'Europe, non ?
- Je l'ai toujours appelée comme ça.
- Pourquoi ?
- Parce qu'avant, elle avait des chats, je réponds très sérieusement. Mamie chat, Mamicha.
- C'est indiscutable... »
On échange un regard complice, je pouffe. Je me sens vraiment bien avec lui. D'un commun accord tacite, on vide mon sac. Des patatas bravas maisons, des jalapeños. A la moue dubitative qu'il tire, je me fais la remarque que Louis n'aime peut-être pas le poivron, même quand il est pané avec un peu de farine et d'œuf. Je continue quand même à ouvrir mes tups'. Un peu de saucisson, du jambon sec, du fromage. J'ai du pain aussi, du nature et du frotté à l'ail et à la tomate avec un filet d'huiles.
« C'est un véritable festin, me fait remarquer Louis.
- Et encore, tu n'as pas vu les desserts...
- Parce qu'il y a des desserts ?
- J'ai fait des banoffees, je confesse. »
D'un coup, on dirait que c'est Noël.
.
« C'est beau... je murmure. »
On a fini de grignoter. Parler avec Louis, c'est comme parler avec Isis. C'est simple. Il ne dit pas grand-chose, par contre. Il m'écoute beaucoup, pose parfois des questions. Quand je lui demande des choses, il évite mon regard, répond en regardant la mer.
« Oui, ça l'est... répond Louis. »
On s'est abîmé dans le couché de soleil. Le ciel rougeoie, la mer s'assombrit. Il n'y a que l'horizon qui flambe. Quand l'écume touche le sable, elle s'évapore en de grossières paillettes de lumière. Sur le pelage de Pétunia, le soleil dessine avec la nuit de légères vagues.
C'est beau.
« Comment est-ce que Maria est arrivée là ? me demande Louis, presque dans un murmure. »
Un instant, je suis tentée de lui répondre. Et puis je me rends compte que je ne sais pas.
« Papi était breton, je précise quand même. Pour le reste, je ne lui ai jamais demandé.
- Et la clé qu'elle t'a donnée ? »
Je réfléchis. C'est vrai que je lui en ai parlé, la dernière fois, dans le grenier.
« Je ne sais pas, j'avoue. Je n'y ai pas pensé non plus. »
Je me grattouille le crâne. Je crois que le vent y a déplacé quelques grains de sable.
« Tu ne t'es jamais posé la question ?
- Bah non. »
On se jauge du regard. Il est doux, son regard. J'aime la façon dont ses yeux brillent.
« Et toi, tu veux savoir ? je lui demande.
- Moi ? Oui et non.
- Pourquoi ?
- Parce que je ne suis pas si curieux que ça, d'habitude. »
J'inspire profondément.
« Et là ?
- Je suis curieux de tout, depuis que je te connais. »
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