≍ 34. Gaz et incendie ≍
Maiko s'engouffra dans la voiture, aux côtés de Naomasa. Son chef et maître de stage venait de démarrer le véhicule. Ils allaient faire une simple patrouille après une plainte d'un citoyen, alors que Ochiya et le désagréable Takamasa se chargeaient d'attraper un malfrat, tout ce qu'il y avait de plus banal.
Apparemment, le quartier était un peu craignos, et les petits voyous aimaient bien mettre la pagaille. Normalement, le détective Naomasa ne s'occupait pas de ce genre d'affaire, mais il avait choisi de commencer en douceur avec sa stagiaire.
— On est arrivé, dit-il en se garant. Il coupa le moteur, et enfila son chapeau. Maiko sortit de la voiture, et agraffa les pans de sa longue cape. C'était la première fois qu'elle la mettait.
— Mitsuo ne vient jamais sur le terrain ? questionna l'adolescente alors qu'ils commençaient lentement à remonter la rue, jetant quelques coups d'oeil ça et là.
— Il est plus branché information que physique.
— Oh... C'est dommage, c'est intéressant d'aider les gens en face à face, pensa Maiko à haute voix.
— Certains préfèrent l'anonymat plutôt que la gloire. Et puis, les policiers ne sont pas connus, puisque les héros prennent toute la renommée.
— Oui, mon père m'a dit la même chose, soupira la jeune fille. Puis elle sourit en repensant aux mots de son paternel.
Tout à coup, une explosion se fit entendre. Des cris s'élevèrent après la déflagration, et Maiko se tourna vers l'origine du bruit. Naomasa partit en courant, et l'adolescente le suivit aussitôt.
Des civiles fuyaient en sens inverse. Naomasa aborda un homme pour lui demander des explications. Maiko profita de son élan pour créer des marches avec son alter, et elle grimpa jusqu'au toit de l'immeuble le plus proche.
— Par ici ! cria-t-elle en bas. Elle montra la direction à son supérieur, et elle partit devant, sautant au dessus de la rue vers la fumée qui s'élevait dans le ciel.
— Buto ! Attends-moi !
— Pas le temps !
Naomasa jura, avant de se mettre à courir dans la rue. L'homme qu'il avait accosté n'avait aperçu aucun vilain dans les parages. Et le bâtiment qui avait implosé était surtout constitué d'appartements.
Maiko arriva finalement devant l'immeuble. Les fenêtres avaient volé en éclat, et le verre crissait sous ses épaisses bottes. Et soudain, elle sentit. L'odeur du gaz. C'était sûrement un accident, mais ce n'était pas la fin. Il devait y avoir du monde à l'intérieur. L'explosion avait déjà créé une pagaille sans nom, et plusieurs personnes étaient couchées au sol, dans la rue. Même ce genre d'accident banal avait son importance.
— Buto !
Naomasa venait d'arriver sur les lieux. Maiko lui expliqua rapidement les conclusions qu'elle avait fait, et elle demanda la permission d'agir.
— Je peux protéger physiquement des civiles, et trouver la fuite de gaz avant que les pompiers n'arrivent ! Ça nous fera gagner du temps !
— Je peux pas te laisser y aller toute seule Buto ! Tu es sous ma responsabilité.
— Et ces gens ? Ils sont sous la responsabilité de qui ? demanda Maiko avec énervement.
Naomasa soupira, et il attrapa sa radio.
— Ne prends pas de risque inutile. D'abord, les civiles. Ils sont la propriété !
Maiko hocha la tête, déterminée, et partit en courant vers la porte béante. Elle plaça sa cape devant son visage. Avec un puissant coup de pied, elle ouvrit la première porte à sa droite. L'adolescente fit rapidement le tour pour vérifier s'il n'y avait personne, puis elle passa à l'appartement d'en face. Une femme au foyer était allongée au sol. Maiko choisit d'économiser ses forces pour les victimes des étages supérieurs, et elle souleva la femme sur son épaule. Difficilement, elle sortit, avant de la poser assez loin des décombres. Elle recommença son action aux deux premiers étages, et arrivée au troisième, elle décida d'utiliser les boucliers individuels qu'elle avait appris à manipuler avec sa mère. Il y avait un couple de personnages âgées, qui n'avaient pas perdu connaissance malgré l'explosion. Maiko les accompagna en bas, et remontant en quatrième vitesse.
Alors qu'elle arrivait au dernier appartement, elle entendit les sirènes des ambulances. Les secours étaient finalement arrivés, et il ne lui restait plus qu'un homme à évacuer. Il était lourd, mais réveillé. Il s'appuya de tout son poids sur Maiko. La jeune fille faillit tomber plusieurs fois dans les escaliers, mais après quelques dizaines de secondes laborieuses, elle finit par y arriver.
— Plus qu'à trouver la source de la fuite, fit Maiko en s'étirant. Naomasa l'appella alors qu'elle venait rentrer une nouvelle fois dans le bâtiment.
Le gaz ne ferait plus d'autres victimes. L'explosion avait brisé toutes les fenêtres, et le vent envoyait l'air contaminé par le gaz dehors, alors elle ne risquait plus d'être asphyxiée. Il fallait qu'elle trouve du savon, et elle pourrait se mettre à la recherche de la fuite. Elle fouilla dans le placard du premier appartement, et elle finit par tomber sur ce qu'elle cherchait.
Elle vida une partie du flacon de shampoing dans ses mains, et elle bougea doucement ses doigts. De l'eau apparut, et elle l'a fit voleter autour des tuyaux à risques. Après de longues minutes de recherches, son eau savonneuse fit mouche. Des bulles se formèrent sur le tuyau de la cuisine, dans l'appartement du deuxième étage.
Satisfaite, elle repartit dehors pour en parler avec les secours. Elle rejoignit Naomasa, qui la gronda légèrement sur son impulsivité. Maiko s'excusa, et elle partit prévenir les experts techniques de l'endroit de la fuite.
— Cette journée était épuisante ! souffla Maiko en s'affalant dans un fauteuil du commissariat. Utiliser son alter pour créer des boucliers était compliqué, autant mentalement que physiquement. Cela demandait beaucoup de ressources et de concentration.
— T'as bien géré pour une gamine, sourit Ochiya en pianotant un rapport sur son ordinateur.
— Elle aurait du attendre les services d'urgence au lieu de partir à la recherche de la fuite, soupira Naomasa. Buto, je sais que tu as ta licence et que tu peux utiliser ton alter quand la situation l'exige, mais tu devrais écouter les ordres. Sinon, la hiérarchie sera bouleversée.
— Tu seras bouleversé oui, rit Ochiya.
— T'as pas besoin de la couver, c'est plus une gamine, fit Mitsuo en appuyant son menton au creux de sa main. Il fit un clin d'oeil à la benjamine du groupe, et Maiko lui sourit en réponse.
— T'es plus coriace que t'en as l'air, pour une gamine, se moqua Takamasa.
— J'ai simplement fait mon devoir de héros.
Takamasa éclata de rire, et donna un coup de poing sur son bureau.
— Héros. Héros ! Redescends sur terre. T'as peut-être sauvé des vies aujourd'hui, mais tu as fait ce qu'aurait pu faire n'importe qui. Un héros est censé se battre contre des vilains ou je ne sais quelle connerie !
Il se leva, faisant rouler sa chaise plus loin. Et avec un regard dédaigneux envers Maiko, il sortit de la pièce. Ochiya soupira, et Mistuo jeta un regard compatissant vers la benjamine.
— Ne sois pas dure avec lui, il n'a jamais vraiment supporté les héros, expliqua Naomasa en posant une main sur l'épaule de Maiko.
— Et c'est une raison pour s'en prendre à moi ? répondit la jeune fille, en fixant ses pieds. Elle avait été fière de son action du jour, et il avait tout ruiné avec quelques paroles.
— Bien sur que non. C'est juste qu'il n'aime pas que le boulot des policiers soit volé. C'est un gars de la vieille école, il a du mal avec le progrès.
— Je vois. Je vais aller dormir, bonne nuit tout le monde.
Maiko s'inclina pour les saluer, et elle rejoignit la petite chambre qu'on lui avait prêté le temps du stage.
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C'était son premier stage, et Hide était à la fois terrifié et excité. Il n'avait pas sa licence, comme les autres de sa classe, alors il devrait écouter les ordres de son supérieur, Backdraft, pour utiliser son alter. Même s'il n'avait pas besoin de l'activer, puisque son corps réagissait seul.
Le début de la journée avait été relativement calme. L'équipe de pompier dont il faisait parti avait été appelée deux fois pour des broutilles. Pourtant, ça avait permis à Hide de se faire une idée du métier. Les pompiers pouvaient arrêter des incendies, secourir de pauvres civiles en danger, mais ils étaient aussi appelé pour des futilités, comme rendre visite à une personne âgée qui se sentait seule. C'était arrivé. Lorsqu'ils étaient parvenu à l'adresse indiqué, il avait été surpris de trouver un vieil homme, qui n'avait pas de problème. L'un des pompiers avait grondé l'aîné, mais ils étaient restés quelques minutes pour parler avec lui.
L'adolescent se demanda si les héros faisaient ça aussi. S'arrêter pour parler aux gens. Passer pour un psychologue dans la rue. Faire autre chose que de se battre contre des vilains ou signer des autographes.
L'après-midi avait été plus mouvementée. L'équipe s'était rendue sur les lieux d'un incendie. Ses aînés, camouflés dans leur épaisse combinaison, étaient entrés dans la maison en feu pour secourir les victimes, pendant que Backdraft arrosait les flammes grâce à son alter. Hide n'aurait pas eu à bouger, mais il entendit un aboiement. Personne ne semblait y faire attention. Alors, quitte à se faire réprimander et punir, il était entré à son tour.
Sa tenue de héros ne le protégeait pas de la chaleur. L'intérieur de la maison était un véritable four. L'épaisse fumée l'empêchait de respirer correctement. Il sentait déjà son corps transpirer, et sa peau devenait noire a cause des émanations de fumée. Il mit un pan de sa veste devant sa bouche, et grimpa les escaliers du mieux qu'il put. Une poutre de la maison tomba soudainement du plafond. Les trois marches devant lui s'écroulèrent sous le poids de la poutre, et de nouvelles flammes vinrent lécher sa peau.
Mais il n'abandonna pas. Il prit son élan, et il sauta par dessus le trou. Il entendait à peine les cris des autres pompiers qui s'activaient en bas des escaliers. Une fois arrivé à l'étage, il fouilla chaque pièce et finit par trouver un chiot.
Le canidé aboyait, caché dans la baignoire. Hide se précipita vers lui, et alors qu'il tendait la main pour l'attraper, le chien le mordit.
— Aïe ! Je suis là pour te sauver et c'est comme ça que tu me remercies ? Chien ingrat.
Hide passa ses mains sous le ventre du chiot et il le plaqua contre lui, sous sa veste. Il se retourna pour partir, mais le feu avait encore prit de l'ampleur. L'eau de Backdraft avait du mal à venir à bout de l'incendie. Il ne pourrait pas sortir par là où tomberait entré. En un coup d'oeil, il repéra la seule fenêtre de la pièce. Il ne pourrait sûrement pas passer par là, mais le chien, oui.
— Tu auras mal à l'atterrissage, mais endure-le, d'accord ?
Il ouvrit la petite fenêtre, et après avoir caressé le crâne du chien, avec un sourire, il le poussa par l'ouverture. Il espéra que le canidé ait atterrit sur quelque chose d'agréable. Maintenant, il devait sortir. Il savait qu'il allait souffrir. Mais il n'avait pas le choix.
La journée était terminée. Il s'était fait sévèrement réprimander. Les flammes l'avaient blessées au deuxième degré, et les pompiers l'avaient regardés presque effrayés lorsqu'il était sortit de la maison, les vêtements brûlés, la peau carbonisée. Il avait finir à l'hôpital, mais son corps avait totalement guérit alors il était encore dans l'ambulance.
Les regards horrifiés qui l'avaient observé tournaient en boucle dans sa tête. Le Japon possédait une multitude d'alter, tous plus différents les uns que les autres. Alors pourquoi le regardait-on comme s'il était une bête de foire ? Parce que sa peau reprenait sa forme initiale alors même qu'elle avait noirci ?
Hide se laissa retomber sur son oreiller. Après tout, c'était normal. Il serait aussi étonné, voire même choqué si quelqu'un guérissait de cette façon. Il ferma les yeux, et essaya de dormir. Il ferait mieux la prochaine fois.
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