≍ 33. Le Mont Fuji ≍
○ Passage entre ○ → Je préviens pour les plus jeunes et sensibles, il y a un court passage un peu.. crade. Je suis restée très brève mais je préfère le dire quand même. Mon côté qui aime écrire du sale a refait surface. Sorry ╮(╯_╰)╭
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Depuis presque quatre heures, Kana dormait dans un bus minable. Les sièges étaient peu confortables, et le brouhaha constant causé par deux vieilles femmes commencer à énerver la jeune fille. Elle voulait garder suffisamment de batterie pour le reste de la journée, alors elle avait décidé de ne pas écouter de musique pendant le trajet. Et à la place, elle avait le droit d'entendre tous les ragots de Tokyo.
Kana avait mal au dos. Elle changea de position dans l'espoir de se sentir mieux. Mais elle soupira, lasse. Dans quinze à vingt minutes, elle serait arrivée, elle devait juste tenir.
Elle allait effectuer son stage chez Starwood. Kana ne la connaissait que de nom. Elle ne savait pas exactement à qui elle aurait affaire. Si elle avait choisi de partir aussi loin de la capitale, c'était pour disparaître des radars quelques jours. Elle avait vu les images d'elle passer à la télé, et elle s'était dégoûtée. Elle avait failli tuer Maiko, mais le pire, c'est qu'elle ne s'en souvenait pas. Elle était revenue en cours en se faisant aussi discrète que possible : elle se sentait trop coupable pour apparaître devant ses camarades.
Elle ne s'était toujours pas excusée auprès de Maiko. Elle tenait à découvrir ce qu'il se passait à l'intérieur de son corps avant. Et comme le Mont Fuji était éloigné de tout, elle aurait moins de chance de blesser accidentellement quelqu'un. Il fallait juste qu'elle en parle avec son maître de stage.
Le bus s'arrêta enfin. Kana descendit et prit son sac de sport dans la soute, avant de s'éloigner du véhicule. Elle fusilla du regard les deux comères qui l'avaient empêchées de dormir pendant le voyage. Elle partit en souriant lorsqu'elle les entendit se plaindre du comportement des adolescents.
- Kana Ando ? l'interrompit une voix féminine dans son dos.
Kana se retourna pour faire face à une femme plus âgée qu'elle. Starwood était dans la fleur de l'âge. Elle devait avoir le double de son âge, et elle dégageait quelque chose d'indescriptible. Ses yeux la transperçaient : ils étaient d'un gris profond. Kana eut l'impression qu'elle était capable de voir que quelque chose habitait son corps.
- Oui, c'est moi.
- Je suis Starwood. Mais tu peux m'appeler Amaya. Suis moi, on va directement en mission.
Starwood attrapa le sac que Kana tenait sur son épaule, et partit en direction d'une petite voiture noire. L'adolescente la suivit, un peu surprise de débuter une mission à peine arriver. Elle s'était levée tôt pour arriver à l'heure.
Elles roulèrent quelques minutes avant de s'arrêter devant ne maison, au bord de la forêt d'Aokigahara. Celle-ci était réputée dans tout le Japon pour son très haut taux de suicide. Kana trouvait seulement glauque, mais faire des recherches dessus lui permettraient de penser à autre chose. Ce stage arrivait au moment idéal.
Alors que Starwood était en train d'ouvrir la porte de la maison, Kana en profita pour la détailler un peu plus. Amaya portait un justaucorps clair qui recouvrait tout son corps. Les manches étaient attachées à ses majeurs. Par dessus, une robe fine et transparente flottait autour d'elle. Ses longs cheveux noirs étaient tressés par endroit, formant une coiffure complexe. La grâce s'échappait d'elle. Et pourtant, malgré sa douceur apparente, Kana sentait qu'elle était ferme et disciplinée.
- Aller entre. Change toi, et on y va. Ta chambre est au fond du couloir, à gauche.
Kana hocha la tête, et partit rapidement dans la pièce désignée par son maître de stage. Elle comportait lit simple, avec un petit bureau, une chaise et une commode. L'adolescente posa son sac sur le matelas, et sortit la valise contenant son costume. Elle enfila le justaucorps noir qui laissait peu de place à l'imagination, puis elle attacha ses monde cheveux noirs en une haute queue de cheval. Il lui restait à mettre ses bottes, et elle était prête.
La forêt apparaissait à sa fenêtre. Les premiers arbres cachaient déjà la lumière du soleil, et la noirceur des bois la fit frissonner. Après avoir jeté un dernier regard dehors, la jeune fille rejoignit Amaya. Kana frictionna ses bras avec vigueur pour se réchauffer.
- Si tu as froid, j'ai ce qu'il faut.
Starwood ouvrit une porte, et elle s'engouffra dans la pièce qui semblait étroite. Elle en ressortit avec un épais pull en laine verte émeraude, et une longue cape à capuche. Kana la remercia avant d'enfiler ce que lui tendait Amaya.
- Il faut s'habituer à l'étrange climat d'Aokigahara, la rassura-t-elle. Bon, allons-y. La police veut me voir.
- La police ? s'étonna Kana. Pourquoi ?
D'habitude, les héros patrouillaient, et s'occupaient des vilains qu'ils rencontraient. Lorsque la police appelait les héros à la rescousse, c'était parce que la situation ne pouvait pas être gérée.
- Ils sont débordés, et ils ont de nouveaux éléments sur une affaire en cours. Je t'en parlerai en route.
Les deux femmes rentrèrent dans la voiture pour repartir vers la ville, au commissariat.
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L'affaire dont parlait Starwood était préoccupante. La police trouvait régulièrement des corps pendus aux arbres de la forêt, ils étaient évident qu'ils se suicidaient. Certains laissaient des lettres d'adieu, d'autres des bouteilles de saké ou des objets personnels. On voyait leur tristesse, leur désespoir au travers de leurs actions. Mais les corps de cette affaire étaient différents. Plus ou moins consumés par d'étranges flammes, leur visage montrait une profonde douleur.
Starwood se gara finalement, et les deux filles allèrent voir le commissaire. Le maître de stage parla longuement avec lui, essayant d'avoir le plus d'information possible. Le policier la salua, et partit remplir de la paperasse. Amaya regardait les photos d'un énorme dossier, et visionnait des rapports sur l'ordinateur qu'on avait mis à disposition.
- Est ce que je peux voir ? finit par demander Kana. Elle n'était pas sûre de le vouloir, mais elle n'était pas là pour se tourner les pouces.
- Si tu as le courage. Les photos sont vraiment pas jolies à voir ma petite Kana.
Kana hocha la tête, et saisit l'une des photos au hasard. Avec une profonde respiration, elle la retourna. Entre les troncs d'arbres se trouvait un corps immobile, flottant dans le vide. Une corde reliait son cou à une grosse branche. Le cliché était pris de loin, et on ne voyait pas les détails. Mais l'atmosphère que dégageait la photo était puissante et terrifiante. Prise de jour, l'image était en noire et blanc. Quelques rayons de lumières passaient à travers les hauts feuillages. Kana reposa la photo sur le bureau et en attrapa une deuxième.
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Elle ne le fixa qu'une seconde, et pourtant, l'image resta incrustée dans sa rétine. On y voyait le visage en gros plan. Kana sut qu'il s'agissait d'une femme grâce à la courbe de son visage et sa coupe de cheveux. Sa peau calcinée et craquelée, sa bouche ouverte dans un cri muet, ses orbites vides et noirs, dont les yeux avaient sûrement été dévorés par des corbeaux. Tout était horrible à voir. Cette femme était méconnaissable. Le seul moyen de l'identifier était le test ADN ou l'empreinte dentaire. Son visage était détruit, et ses empreintes digitales effacées par le feu.
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- C'est horrible, chuchota l'adolescente en reposant la photo.
- On est là pour ça. Trouver l'auteur de ces horribles meurtres. Les héros ne travaillent pas toujours sur des missions cools comme on peut le voir à la télé.
- Je m'en doute. Mais je pensais pas travailler sur une histoire de meurtre en série dès mon premier jour de stage. Il y a combien de victime ?
- Pour l'instant, quatre. Il faudra être très prudente cette semaine. Je pense qu'il va repasser à l'acte dans les prochains jours.
Kana resta silencieuse. Lorsque Starwood aura pris connaissance des dernières nouvelles, elles partiraient faire un tour dans la forêt.
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Le trajet de voiture se fit sous la pluie. Avec chance, lorsqu'elles arrivèrent à destination, le déluge avait pris fin. Kana mit tout de même sa capuche, et elle suivit Starwood dans les bois. De grosses gouttes tombaient des branches, et venaient s'écraser sur sa tête et ses épaules.
- Au fait, je voulais vous parler de mon alter, fit soudainement Kana.
- Tes professeurs m'en ont déjà parlé. Tu entends une voix qui te paraît mauvaise, c'est ça ?
- Oui...
- Et lorsque cette voix te parle, tu perds ta maitrise de toi, et tu deviens folle de rage. Et quand tu te réveilles, tu n'as aucun souvenir. Est ce que c'est ta voix qui tu entends ? Ou la voix de quelqu'un que tu connais ?
- Non... C'est un homme, mais je ne sais pas qui ça peut être.
- Peut-être que quelqu'un te contrôle à distance ? Comme une marionnette. Ou alors...
- Ou alors quoi ?
Starwood s'arrêta, l'air grave. Elle ouvrit la bouche pour parler, lorsque tout à coup, un rire à glacer le sang résonna autour d'elles. Kana écarquilla des yeux, alors qu'Amaya les fermait pour se concentrer. Elle posa un genou à terre, et effleura le sol avec une main.
- Par ici.
La femme s'élança entre les arbres sans attendre Kana. L'adolescente la suivit en courant, slalomant entre les obstacles. Après plusieurs dizaines de mètres de courses, Starwood s'immobilisa.
- J'ai perdu sa trace. Étrange...
- En quoi consiste votre alter exactement ? interrogea Kana, curieuse.
- Disons en gros que je suis connectée à la nature.
- Et vous alliez dire quoi, tout à l'heure ?
- Et bien, si tu n'es pas possédée ou contrôlée par quelqu'un, il ne reste qu'une seule possibilité. Tu es malade.
Kana la fixa sans répondre. Alors, elle était peut-être folle. Peut-être que cette voix n'était que son subconscient qui se dédoublait pour prendre l'avantage ? Peut-être que c'était vraiment elle qui avait attaqué Maiko ? La peur s'infiltra dans ses veines. Elle ne voulait pas. Elle ne voulait pas être folle. Elle ne voulait pas devenir une vilaine. Elle ne voulait pas que son fort intérieur s'oppose à ses idéaux. Mais que pouvait-elle réellement faire ?
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