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3. Les Montessori

Sage avait fait ses adieux. En rentrant après son affectation, elle avait trouvé sa famille réunie qui l'attendait autour de la petite table, tous impatients de savoir. Elle avait fondu en larmes, en leur annonçant son métier définitif. Un silence de mort s'était abattu sur la petite maison. Ils savaient qu'une telle affectation était possible voire probable, mais personne n'avait voulu croire que Sage serait sélectionnée pour être domestique. En général, les enfants étaient réquisitionnés pour le même genre de tâches que leurs parents. C'est ce qui était arrivé à ses aînés.

Son père avait alors pris les choses en main. Le visage grave, il avait rassuré sa fille en la prenant dans ses bras comme il le faisait à l'époque où elle avait encore peur du noir. Depuis, Sage avait grandi et elle savait qu'il ne fallait pas craindre la pénombre mais la vie en général, elle avait cependant ressenti le même réconfort qu'autrefois.

En préparant son baluchon, elle avait vu du coin de l'œil sa mère secouée de sanglots silencieux et son père lui murmurer à voix basse de se ressaisir pour ne pas effrayer les autres. Les adultes savaient qu'une affectation dans une famille noble était l'équivalent d'une sentence de mort imminente. Ils allaient l'user jusqu'à la moelle et, quand elle ne serait plus assez vigoureuse pour les servir comme ils l'estiment juste, Sage disparaîtrait d'une façon obscure et plus personne ne la reverrait jamais.

La jeune femme avait serré une dernière fois sa famille dans ses bras avant de se diriger, la mort dans l'âme, vers l'autre côté de la ville. Le côté privilégié. En sortant, un rayon de soleil lui caressa le visage et elle le leva vers le ciel comme anesthésiée par les récents événements.

Elle ne ressentait plus rien.

Alors quand Jamie l'avait appelé en trottinant vers elle, le visage éclairé d'un large sourire, pour lui annoncer qu'il avait été choisi pour être apprentie aubergiste, le métier le plus honorable et le mieux parmi leur caste, elle n'avait même pas réagi. Il avait froncé les sourcils, remarquant son trouble :

— Qu'est-ce qui t'arrive Sage ?

Son air inquiet et la myriade d'émotions qui avaient traversé son regard, avaient presque sorti son amie de sa torpeur. Presque.

— Je pars, Jamie, annonça-t-elle d'une voix tremblante. Il y a de grandes chances qu'on ne se revoit jamais. Prends soin de toi, finit-elle d'une toute petite voix.

Elle se détournait déjà pour marcher, raide comme la mort. Il lui saisit le bras brusquement pour la retourner vers lui.

— Mais de quoi tu parles ! avait-il grondé, le visage déformé par la peur. On est censé finir notre vie ensemble toi et moi Sage, je le sais depuis le premier jour où je t'ai vu !

Lentement, la chaleur de ses mots s'insinua dans le cœur de Sage. Elle l'observa attentivement. Si elle avait été différente, plus docile et moins rêveuse, dans une autre vie, elle aurait été éperdument amoureuse de ce jeune homme.

De son assurance face aux désillusions de la vie.

De sa force face à l'adversité.

De sa certitude en regardant l'avenir.

Mais elle savait aujourd'hui, mieux que quiconque, que les rêves et les espoirs étaient quelque chose de dangereux à Valdaren. Ils tuaient votre âme. Et Sage lui annonça d'une voix vibrante d'émotions.

— D'aussi loin que je me souvienne, tu as toujours été là et jamais je ne pourrais payer la dette que j'ai envers toi. Tu as illuminé ma vie Jamie. Et peut-être que nous aurions fini notre vie ensemble comme tu le dis, peut-être qu'on se serait unis, mais il faut que tu arrêtes d'y penser.

— Mais je t'aime, plaida-t-il d'une voix ferme et résolue, comme si ce simple fait résoudrait tout.

— Je suis assignée au service d'une famille noble.

Elle avait aboyé cette nouvelle. Crevant de jalousie pour la première fois de sa vie. Et ce sentiment immonde était tourné vers son meilleur ami. Envers Jamie. Pour la chance qu'il avait eu lors de son affectation. Pour son insouciance. Pour tout ce qu'elle aimait chez lui.

Il lui lâcha le bras comme s'il avait été brûlé. Il savait ce que ça signifiait. Que la vie de la jeune fille était scellée. Elle fit un pas en arrière, se détournant à moitié, incapable de regarder la tristesse sur son visage.

Elle s'éloigna et il la laissa faire.

— Je trouverais un moyen, Sage. Je t'en fais la promesse.

Ce serait sans doute les dernières paroles qu'elle entendrait de sa bouche. Et elle se jura de toujours les chérir.

Le cœur de Sage se serra. Devant l'immense demeure à la porte en bois massif et aux nombreuses fenêtres qui reflétaient les rayons du soleil, la jeune femme fut prise du besoin urgent de prendre ses jambes à son cou. Son cerveau était passé en mode survie et elle se demanda si elle aurait une chance de s'en sortir si elle écoutait la peur qui lui tordait l'estomac et lui hurlait de fuir. Tout ses muscles étaient tendus d'appréhension. Elle avait eu vent de personnes qui avaient essayé de s'échapper de Valdaren. Mais la frontière était bien gardée par la milice royale et personne n'avait jamais réussi à se soustraire à l'autorité établie.

Cependant Sage décida que tant qu'elle aurait envie de se battre, tant qu'elle conserverait cet instinct de préservation, c'est qu'on ne lui aurait pas encore tout pris. Qu'elle était encore en vie et elle-même. Elle se jura qu'elle tiendrait et résisterait le plus longtemps possible pour ne pas se laisser aller à trouver sa situation normale. A se satisfaire des petites choses qu'on lui accorderait et qu'elle ne se réjouirait jamais en se disant « ça aurait pu être pire ». Même si objectivement c'était la stricte vérité.

Relevant la tête, bombant le torse pour se donner du courage, elle fit un pas pour monter les quelques marches en pierre du perron quand on l'interpella depuis une petite porte sous l'escalier.

— Où tu crois aller comme ça la nouvelle ?

Sage considéra la jeune femme trapue qui lui faisait des signes de la main pour qu'elle la rejoigne. Elle était habillée d'une robe informe taillée grossièrement dans un tissu rugueux. Par-dessus, un large tablier était noué sur sa taille et sa tête était coiffée d'un petit chapeau blanc qui retenait ses cheveux sales en arrière.

— Ça va pas bien la tête de te présenter à l'entrée principale. On t'a jamais dit que les maîtres ne voulaient pas qu'on foule le même sol qu'eux ?

— Je suis désolée, c'est mon premier jour, j'ignorais qu'il y avait des règles.

— Elle ignorait qu'il y avait des règles, répéta son interlocuteur avec un air renfrogné. 'Manquait plus que ça ... une écervelée qui s'imagine qu'elle est devenue une princesse parce qu'elle va vivre dans une grande maison.

Sage se sentit un peu vexée de son commentaire et s'apprêtait à rétorquer, mais la femme ne lui en laissa pas le temps.

— Bah, tu me diras on a tous été jeune, et tu finiras bien par apprendre... d'une façon ou d'une autre.

La jeune femme frissonna dans sa petite robe. Elle attrapa son petit balluchon et suivi la domestique par le petit passage sous le perron. Elles longèrent un couloir à la peinture jaunie et écaillée et débouchèrent dans la cuisine. Celle-ci était immense et des gens s'affairaient autour des nombreux fours. Il y avait aussi une grande table, en partie occupée par de jeunes hommes qui avalaient rapidement le contenu de leur assiette, et l'autre partie par des aides cuisine qui découpaient frénétiquement des légumes d'une main experte.

Personne ne fit attention à elle et la scène rappela à Sage l'organisation bien huilée d'une ruche. Il y a quelques années, quand elle était encore assez jeune pour ne pas craindre de monter tout en haut des plus grands arbres de la capitale, la jeune femme était tombée sur l'une de ces grosses boules où des milliards d'abeilles travaillaient frénétiquement, sans relâche, et où chacune avait l'air d'avoir une mission bien précise. Fascinée, Sage était restée un moment suspendue au-dessus du vide à l'observer.

— Bon, ce n'est pas compliqué, la voix de la domestique la rappela à l'ordre. Tu es ici pour remplacer Camille, elle servait dans les étages supérieurs, pour les repas et collations, un peu de ménage, aider la maîtresse et ses filles à s'habiller... C'est ce que tu vas faire toi aussi, mais la première semaine c'est mieux si tu restes en bas avec nous pour te familiariser à la maison et ses règles.

Sage se demanda ce qu'il était arrivé à Camille, mais elle ne posa pas la question. En soi, si son prédécesseur n'était plus là, c'est qu'elle avait fini à la fosse commune, et la jeune femme n'avait pas vraiment envie de savoir comment elle y était arrivée.

— Au fait, moi c'est Joséphine, mais tout le monde m'appelle Josy, ici c'est plus simple d'utiliser des noms courts.

A ce moment, quelqu'un hurla son nom en lui demandant de se grouiller, qu'ils étaient à la bourre.

— Tu arrives pas au bon moment, on est sous l'eau à cause du déjeuner. Le mieux c'est que tu te mettes dans un coin où tu ne dérangeras personne. On te montrera ta couchette tout à l'heure.

Elle se retournait déjà pour vaquer à ses occupations, mais elle revint sur ses pas.

— C'est quoi ton nom déjà ?

— Sagittaire, enfin Sage, se reprit-elle en se raclant la gorge.

— C'est bien, je vois que tu apprends vite, répondit Josy en lui faisant un clin d'œil, puis elle se désintéressa d'elle pour de bon.

Sage recula pour se fondre dans le mur derrière elle et elle fit comme on lui avait dit : elle se tint tranquille et observa son nouvel environnement.

Les jours défilèrent à une vitesse incroyable, tant et si bien que Sage n'eut pas le temps de s'appesantir sur les récents changements dans sa vie. Josy l'avait prise sous son aile et en quelques jours, la jeune femme était presque opérationnelle et se débrouillait quasiment toute seule dans ses tâches quotidiennes. Au bout de deux semaines, elle était parfaitement intégrée à l'équipe de service et tout le monde la respectait pour son assiduité. Mais il était terriblement dur de se faire des amis quand une journée ne contenait que 24 heures et qu'on n'avait pas une minute pour se reposer. Leurs vies étaient rythmées par le besoin urgent et incessant d'anticiper les moindres désirs de la famille Montessori.

Dès l'aube, il fallait faire le tour du rez-de-chaussée, ouvrir les rideaux, taper les coussins, ranger la vaisselle laissée à l'abandon par les maîtres de la maison, allumer les feux dans les cheminées, dresser la table du petit déjeuner, monter réveiller en douceur les habitants en leur proposant un rafraichissement.

Après le petit déjeuner, il fallait habiller ces dames. Si Lady Montessori était déjà un monstre, ses filles étaient des suppos de Satan. A chaque fois que Sage pénétrait dans les chambres des jeunes filles, elle pensait ne pas en ressortir indemne. Mais au fil des semaines, elle avait compris que les deux jeunes filles, âgées de seize et dix-huit ans, prenaient simplement plaisir à la torturer et la faire suer à grosses gouttes.

L'après-midi aurait dû être plus calme, la famille vacant à ses occupations, ou étant généralement en visite à la cour. Mais non. Il fallait balayer, astiquer du sol au plafond chaque recoin de l'immense demeure.

Le soir venu, bien après que le soleil se soit couché, Sage remontait dans la petite chambre qu'elle partageait avec quatre autres domestiques, fourbue et vidée. Elle enlevait doucement ses vêtements de jour, pour passer la chemise de nuit de son enfance, et lorsqu'elle fermait les yeux, allongées sur la paillasse inconfortable, elle s'imaginait dans la petite salle commune dans la maisonnette de ses parents, bercée par la respiration lente et profonde de ses frères et sœurs.

En deux mois, Sage n'avait senti l'air frais sur son visage que quand elle ouvrait les grandes fenêtres de plein pied du rez-de-chaussée. Pour une fille des rues comme elle, tout le temps fourrée à droite à gauche, à monter aux arbres, à se balader dans la capitale, c'était une véritable torture. 

Elle était malheureuse et complètement éreintée.

Brisée. Voilà ce qu'était Sage.

Mais dans son cœur, à l'abri des oreilles indiscrètes. La jeune femme continuait de croire qu'il y avait quelque chose de meilleur en ce monde. Que sa vie, ne pouvait pas se résumer à ça : une éternelle servitude sans repos ni moments de joie. Alors, quand le sommeil l'emportait enfin, elle rêvait de montagnes rocheuses luisant sous le couché du soleil, de prairie d'un vert vibrant balayée par le vent, d'une étendue d'eau à perte de vue dont le goût légèrement salé, restait sur sa langue jusqu'à son réveil. 

***** Et voilà le chapitre 3
Une vie bien terne pour notre Sage, mais ne vous inquiétez pas, dans le prochain chapitre, celle-ci va prendre un tournant plus ... mouvementé. Elle qui rêve d'aventure sera servie, bien que je suis presque sûre que ce n'est pas vraiment ce qu'elle avait en tête. 
N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, même si c'est négatif, tant que c'est constructif, je suis preneuse ! 
Un petit clique sur la petite étoile du vote pour laisser une trace de votre passage me ferait aussi plaisir :)
Prenez soin de vous, 
WSC.

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