Chapitre 22
— Doucement. Ça va ?
Rogue opina et se redressa. Trois semaines s'étaient écoulées depuis qu'il avait été si allègrement passé à tabac par ces mages inconnus. Il avait souffert de plusieurs côtes fêlées et d'un bras cassé, mais il avait connu pire. Aujourd'hui, son bras était réparé, mais ses côtes le faisaient encore souffrir.
Ce qui l'inquiétait le plus, cependant, et il s'était abstenu d'en faire part aux parents de la concernée, c'était le fait qu'Hermione ait été envoyée au loin pour ne pas être en contact avec lui pendant sa convalescence forcée chez les Granger.
— Poppy, je veux vous poser une question ? demanda-t-il en s'appuyant sur une canne.
— Si c'est sur Miss Granger, je ne pourrais pas répondre.
Rogue serra les mâchoires.
— Minerva vous a défendu de me parler d'elle ou quoi ? demanda-t-il. Elle ne se sent pas coupable, même un tout petit peu, d'avoir raconté mon passé à ses parents, alors que, éventuellement, ça aurait été à moi de le faire ?
— Pas des moindres, Severus...
Rogue tourna la tête et un chat rayé sauta sur une chaise près du lit. Il regarda l'homme un moment puis se transforma et McGonagall apparut, assise sur la chaise.
— Vous devriez avoir honte, Minerva, dit alors Rogue. Il n'y avait strictement rien entre Miss Granger et moi, je n'avais pas ce genre d'attente la concernant...
— C'est le même schéma qu'avec Lily, Severus, dit alors la Directrice. Excepté que là, vous avez vingt ans de différence et, même si elle est majeure, vous n'avez pas moins profité d'une faille grande ouverte dans sa confiance en elle.
— C'est d'elle que viennent les choses ! siffla Rogue. C'est elle qui a tenu à ce que je lui parle de Lilly !
— Ne vous énervez pas, dit Pomfresh.
— Comment le pourrais-je ? J'ai trente-huit ans, j'ai largement passé l'âge d'avoir un chaperon ! répliqua le sombre professeur.
— Vous oui, mais pas Miss Granger.
Rogue darda un regard noir à McGonagall puis se détourna et s'en alla en claudiquant sur sa canne, son bras droit autour de ses côtes qui le faisaient souffrir malgré les potions.
— Quel caractère... soupira Pomfresh.
— Il a toujours été comme ça, répondit McGonagall. Cependant, je ne le crois qu'à moitié quand il dit qu'il n'y avait entre eux.
— Je pense comme vous, mais ils ne s'en sont probablement pas encore rendu compte... Malheureusement, dites-vous bien que plus nous nous acharnerons à les tenir éloignés l'un de l'autre, plus ils feront tout pour se retrouver, quitte à braver encore plus les interdits.
— Seriez-vous en train de me suggérer de les laisser faire à leur guise ? demanda la Directrice, surprise.
— Oui et non... Disons que vous pourriez les laisser faire, mais en les surveillant, de loin... Miss Granger a eu besoin d'un ami, de quelqu'un qui puisse l'écouter pleurnicher sur son sort, et Severus a été là à ce moment-là... N'oubliez pas que notre Maître de Potions est un écorché vif, lui aussi, et lui, il n'a eut personne pour l'aider à comprendre et à guérir. Tout ce qu'il sait c'est que Lily a été assassinée parce qu'il a, un jour, révélé une partie de la Prophétie à Voldemort... Pour lui, c'est sa faute si Lily est morte, il l'a tuée par le biais d'une autre personne.
McGonagall resta silencieuse un moment puis se leva et lissa sa robe verte.
— Je viens de recevoir un message du père d'Hermione, dit-elle alors. Ils comptent renvoyer leur fille à Poudlard pour les vacances de Noël, peut-être... peut-être que ce serait un bon début pour tester la surveillance ?
— Pourquoi pas ? Il y a très peu d'élèves qui restent au château pour les fêtes, ce sera plus facile de les surveiller, surtout que les tableaux vous sont acquis...
— Cela ne reviendrait-il pas à de l'espionnage ?
— Mais n'est-ce pas ce que font les Directeurs de Poudlard depuis un millier d'années, Madame ?
McGonagall ne trouva rien à répondre à cela et se contenta de hocher la tête.
.
Hermione n'avait jamais été aussi fébrile de retourner à Poudlard, même après les vacances d'été. Mais ce n'était pas pour retourner en cours qu'elle était impatiente, mais plutôt pour avoir des nouvelles de Rogue, car McGonagall avait été plutôt évasive sur le sujet, au début de sa "captivité" chez Sonia Granger, pour ne plus en parler ensuite, ce contentant de parler des cours, des devoirs et de ses camarades de classe.
— Comment retournes-tu à Poudlard ?
— Cheminée, dit Hermione en glissant des livres dans son sac de classe. Je ne peux pas encore Transplaner, et de toute façon, c'est impossible sur le domaine.
— Je vois... Tu nous en veux ?
— Pour m'avoir envoyée chez grand-mère pendant trois semaines ? grinça Hermione sans se retourner. Non, pas du tout...
Madame Granger serra les lèvres puis déposa une pile de linge propre sur le lit de sa fille et s'en alla en silence. Elle rejoignit son mari au salon et s'assit près de lui en soupirant.
— Ça lui passera, dit celui-ci. Dès qu'elle aura retrouvé son univers, elle ne nous en voudra plus, ne t'en fais pas.
— J'aimerai être aussi sûre que toi, chéri, répondit la mère d'Hermione. Mais quelque chose me dit qu'elle n'est pas encore sortie du pétrin...
— Concernant qui ? Ce professeur, ou sa nouvelle maison ?
— Les deux, je pense, même si, après réflexion, tu avais raison, on a sans doute été trop rapides à l'envoyer au loin... Peut-être aurions-nous du discuter avec elle, avant...
— Un tient vaut mieux que tu l'auras, chérie, soupira Monsieur Granger en se levant. Il est l'heure, dit-il ensuite. Hermione !
— J'arrive !
La jeune femme apparut avec un sac de voyage à la main, habillée de son uniforme scolaire règlementaire ; voir la cravate verte et le blason de Serpentard sur le pull de sa fille fit un drôle d'effet à Madame Granger qui n'avait jamais vu, jusqu'à maintenant, que le rouge de Gryffondor.
— Aussi étrange que cela puisse paraître, chérie, je trouve très jolie en brune, tu sais ?
— Et tu me le dis seulement maintenant ? Merci quand même. Bon, il faut que je parte, maintenant.
Les adieux furent pour le moins raides, mais les parents de la jeune femme ne s'en formalisèrent pas. Hermione s'approcha ensuite de la cheminée et attrapa de la Poudre de Cheminette dans le sachet qu'elle avait à la main. Les flammes devinrent vertes et elle se tourna vers ses parents.
— Je vous laisse le sifflet pour le Scout'Hibou, dit-elle en donnant l'objet à sa mère. Soufflez dedans si vous avez besoin d'un oiseau pour m'écrire.
— Ah, merci, c'est gentil, chérie... Passe de bonnes vacances de Noël, dit Madame Granger. On pourra venir te chercher le vingt-quatre, si tu veux...
— On verra, si...
Elle se tut et souffla par le nez.
— J'allais dire, si Ron et Harry restent, mais...
— Oh, et tu ne peux pas aller quand même chez les Weasley ? Tu crois vraiment que le fait que tu aies changé de maison va déranger la mère de Ron ? demanda Monsieur Granger.
Hermione haussa les épaules.
— À vrai dire, je n'en sais rien... Je demanderai à Ron, mais j'en doute... Par contre, ça risque de jeter un froid sur le repas de Noël, vu qu'ils ne me parlent plus depuis quatre mois...
— Hm, bon, tiens-nous au courant, d'accord ? On ne fait rien de spécial cette année, alors dès que tu sais, tu nous envoies un message.
— D'accord, maman.
Ils s'enlacèrent un moment puis la jeune femme se glissa dans la cheminée et cria sa destination.
.
— Severus, parce que je suis quelqu'un d'indulgent, je vais vous laisser l'accueillir, mais je ne veux pas que les choses dérapent, c'est clair ?
— Limpide, Minerva, et je sais pertinemment que vous allez nous surveiller comme si nous étions des adolescents, donc vous avez ma parole.
— Non, vous n'êtes pas des adolescents, non, mais vous êtes chacun d'un côté de la barrière invisible qui se trouve entre professeur et élève, qui est formellement interdite à franchir pour l'un comme pour l'autre, rétorqua la Directrice de Poudlard, les sourcils froncés.
Rogue plissa le nez puis McGonagall souffla et tourna les talons. Elle quitta son propre bureau, la seule pièce du château dont la cheminée était reliée au monde extérieur pour les voyages, et quand la porte se fut refermée, Rogue soupira profondément. Soudain, les flammes de la cheminée devinrent vertes et l'homme serra sa main sur la canne qui lui permettait de se déplacer depuis qu'il avait pu quitter l'Infirmerie.
.
Hermione détestait les voyages par cheminée. C'était salissant, décoiffant, et le tournoiement rendait malade une fois sur deux. Cependant, lorsqu'elle fut projetée sur le tapis, se réceptionnant de deux pas mal assurés, la jeune femme n'eut pas le loisir de s'apitoyer sur l'état de sa coiffure ou de son uniforme.
— Professeur... souffla-t-elle en découvrant Rogue assis sur une chaise, à côté du bureau de McGonagall.
— Bonjour, Miss Granger... répondit l'homme avec un mince sourire.
Hermione avisa alors la canne puis elle reporta son regard sur Rogue et s'approcha. Il se leva alors avec un peu de peine et la jeune femme se glissa dans ses bras en pressant son front contre son épaule. C'était un geste parfaitement inhabituel entre eux, mais en le voyant ainsi, avec cette canne, se mouvant comme un petit vieux, la jeune femme avait senti son petit cœur de fille se fissurer. Pis encore quand elle sentit le bras libre du professeur de Potion se resserrer dans son dos. Le coup de grâce fut ce qu'il lui souffla en la serrant contre lui, son grand nez pressé contre ses cheveux.
— Tu m'as tant manqué, Hermione...
La jeune femme eut un hoquet et recula. Elle appuya durement son front contre celui de Rogue et sourit. Elle repoussa ensuite une mèche noire et soudain, il l'embrassa avec vivacité et elle répondit au baiser avant de le briser.
— On va droit vers les ennuis, souffla-t-elle.
— Je sais... La Directrice est en train de nous surveiller, je peux la sentir de l'autre côté de la porte, elle doit fulminer, mais...
Rogue secoua la tête et se redressa. Hermione sourit doucement et posa ses mains de part et d'autre de son torse.
— Tu souffres encore ? demanda-t-elle.
— La magie ne peut pas tout réparer, répondit le sombre homme en secouant la tête. Pomfresh a jugé mes blessures trop dangereuses pour me donner du Pouss'Os, ajouta-t-il en se rasseyant.
La jeune femme hocha la tête et se mordit les lèvres. Soudain, la porte du bureau s'ouvrit et elle recula prestement.
— Bonjour, Miss Granger ! s'exclama McGonagall. Ravie de vous voir de retour. J'espère que ces quelques semaines de repos vous ont permis de réfléchir et de vous recentrer sur vous-même, car dès le premier janvier, vous vous installerez dans le dortoir de Serpentard, comme c'était prévu.
Hermione baissa le nez. Elle jeta un bref regard à Rogue qui opina, puis la jeune femme regarda la Directrice et hocha la tête.
— Bien, Madame, dit-elle. Puis-je partir, j'ai mes affaires à ranger.
McGonagall hocha sèchement la tête et Hermione récupéra son sac et tourna les talons. Elle quitta le bureau, mais la porte était à peine refermée que la voix de la vieille sorcière résonnait. Hermione se mordit les lèvres en fermant les yeux, puis elle souffla et se laissa porter par le phénix d'or jusqu'en bas où, à sa grande surprise, Daphné l'attendait.
.
— J'arrive pas à y croire !
— Je te jures que c'est la vérité, Daphné...
— Nan, mais Hermione, toi et Rogue, quoi ! Tu te rends comptes ?
Assise en tailleur sur le lit d'Hermione, Daphné était abasourdie.
— Il n'y a pas de lui et moi, pour l'instant, répondit la brunette en haussant les épaules. C'était... Je ne sais pas, c'était...
— Spontané ?
— Complètement... Pendant une seconde, j'ai eu l'impression que c'était normal et que...
Hermione soupira et rangea un pull gris dans sa penderie.
— Je ne sais pas quoi faire, dit-elle alors. J'étais à peine sortie du bureau de McGonagall qu'elle lui passait un savon et...
— Ouais, j'imagine qu'il a dû passer un mauvais moment, mais c'est Rogue, et tu sais qu'il est loin d'être quelqu'un qui se laisse gueuler dessus sans rien dire, quand bien même il serait a...
— Chut ! s'exclama alors Hermione en lui coupant la parole. Ne dis pas ça.
— Quoi ? Mais pourtant...
— Je ne sais pas, Daphné, d'accord ? répondit la Gryffondor. Je ne sais pas, je suis paumée, là, et je...
La jeune femme se prit la tête entre ses mains et Daphné grimaça. Elle jeta alors un coup d'œil sur le réveil de son amie et déplia ses jambes.
— Il est bientôt l'heure de déjeuner, dit-elle en se levant. Prends quelques minutes pour te remettre de tes émotions, puis rejoins-moi dans la Grande Salle. Je pense que certains seront contents de te revoir.
— Pas Malefoy en tous cas... grommela la jeune femme en se levant à son tour.
— Détrompe-toi ! s'exclama Daphné en rigolant. Il t'a réclamée !
Hermione la regarda avec de grands yeux.
— Tu n'es pas sérieuse ?!
— Si ! Dès la première semaine de ton absence, il a commencé à pester qu'il n'avait plus personne à embêter ! s'esclaffa la jeune blonde.
Hermione sourit puis se mit à rire. Daphné la laissa alors finir de ranger ses affaires tranquillement en disant qu'elle avait hâte qu'elles puissent enfin être dans la même chambre et pouvoir médire les garçons toute la soirée avec Pansy et Millicent.
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