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Chapitre 7

- Moi, embrasser qui ? Qui t'as dit ça yaye boy ?

- En tout cas tu m'as déçue Raby ? Comment oses-tu faire ces genres de chose, en plus dans un lieu public ?

- Yaye, je te jure que tout cela est bien faux. Tu me connais très bien et tu sais pertinemment que je ne suis pas ces genres de fille, d'autant plus faire pareille chose.

- Quelqu'un m'a dit t'avoir vu en noir avec un garçon, aujourd'hui dans le jardin public...

- Ha ha haaaa ! Waa ! Déjà, je n'étais pas habillée en noir aujourd'hui, j'avais porté ma robe en wax jaune bleu. On dirait que tu perds la tête, maman. En plus, j'étais partie avec Salim au Centre Culturel, on avait une répétition pour le festival.

- Han ! Fallait parler très tôt. Ça m'a beaucoup étonné. Je t'aurais coupée la tête si c'était avéré. Heureusement que ton papa n'est pas au courant.

- Au courant de quoi ? Ha ha, yaye boy, toi aussi, tu crois toujours aux racontars. Ou bien, tu veux dire que c'est Salim que j'embrassais ?

- Safurla ! En tout cas, si tu as un prétendant, qu'il passe ici pour qu'on puisse le connaître.

- Ha ha ! Tu vas me tuer avec tes histoires de prétendants !

Et ça discutait, et ça riait. Ce qui me soulagea. J'avais eu de ces peurs bleues au début et mes craintes se dissipèrent sur le champ. Je laissai échapper un léger sourire, Raby savait bien jouer un cinéma : elle s'était belle et bien habillée en noir et nous étions dans le jardin public, sauf qu'elle ne m'avait pas du tout embrassé comme le prétendait sa maman, ou du moins, celui ou celle qui l'aurait informée. Elle s'est défendue avec assurance et d'une inspiration inédite. Une vraie menteuse ? Je ne saurais la qualifier ainsi, son mensonge nous était utile et nous sauva d'une première tentative de diffamation de je ne sais qui.

Alors que faire maintenant ? Rompre avec elle et en finir une bonne fois pour éviter la déception ? Heureusement, mon oncle Badara n'était pas au courant de leur discussion et cela me rassura davantage. Ma tante ne se doutait aucunement de ma relation avec Raby, et c'était chose arrangée et il fallait y éviter tout soupçon.

Il était fort probable que c'était la silhouette qui avait rapporté à ma tante nous avoir vu. Néanmoins, cela pressait d'en parler à Raby avant que la situation ne vire au drame. Quand ? C'était impossible cette nuit même, il faisait un peu tard et entamer une discussion prêterait le flanc aux soupçons. Elle avait gagné mon estime et ma grande affection ; je l'aimais et avais peur d'elle concomitamment.
Créer des histoires ou des faussetés pour me tirer de l'impasse n'était mon fort ; à sa place, Salim aurait avoué avoir bien été dans le jardin public avec Raby et nié l'inconfortable calomnie.

Comme de coutume, nous étions, Raby, Diary et moi, sur la terrasse en train de regarder un film. Mon esprit était, par contre, occupé à trouver le bon moyen de parler avec elle sur ce que j'avais entendu qui devait sûrement avoir un rapport avec la silhouette. C'était celle d'une fille et c'était bien sûr cela. J'hésitais à entamer ce débat devant Diary et j'y renonçai après moult réflexions. Raby était si sereine et savait bien maîtriser ses émotions quand on n'était pas seuls.

Je ne dormis pas cette nuit ; je voulus trouver secours, par je ne sais d'où.

***

Le lendemain, Raby prétendait aller à leur soi-disant répétition. Sa mère la crut et nous partîmes comme de coutume errer par là où le hasard nous menait à sa guise. Cette fois-ci, Raby n'avait pas menti, elle me mena jusqu'au centre culturel où quelques de ces camarades y étaient, dansant et chantant au rythme des tambours. Elle me présenta quelques-unes d'entre elles qui la harcelèrent de questions sur ma personne. Je me mis un peu à l'écart après les découvertes et les entendis qui me qualifiaient et me décrivaient à leur goût. On faisait semblant de n'avoir rien entendu et se contentait d'un léger sourire qui trahissait l'indifférence. Salim était un beau gosse et avait l'air sérieux. Que cela ne vous en déplaise ; elles parlaient et tombaient sur le charme de ma sérénité. Raby n'assuma pas d'affirmer sa condition et laissait ses amies dans leur délires émotionnels.

Au rythme des tam-tams qui repartirent de plus belle, elle s'élança comme une gazelle, lâcha quelques pirouettes avec une souplesse athlétique. Le batteur l'encouragea à laisser un refrain de sa spectaculaire démonstration improvisée. Raby y consentit bon gré. Elle ne détacha pas son regard sur moi tout en s'échauffant ainsi avec ses camarades qui prestaient d'une harmonie chorégraphique. Raby me parlait à travers ses gestes et son regard guignant. Elle dansait pour moi, et je lui donnais intérêt. Elle n'était plus présente, son corps bougeait au rythme de son cœur, l'esprit n'y put rien favoriser. Et je me surpris dans un sourire qui ne m'était pas naturel, hypnotisé par la joie étincelante et rayonnante qui luisait sur son visage. Elle me vampait et faisait exprès de me tenir en haleine aussi bien qu'elle y put. Mon esprit se perdit dans des rêveries et des souvenirs nostalgiques. La trajectoire de ma vue devint linéaire et ça ne clignait presque plus. J'eus la mine bouche bée. Un atroce courant glacial me traversa ; ce n'était plus Raby que je voyais danser... J'eus l'impression que c'était bien Saly qui s'était érigée devant moi. Je fis l'effort d'essuyer ce mirage malsain qui me hantait et j'y parvins.

- Salim, on y va, me dit Raby, après son spectacle. Je suis fatiguée, j'en peux plus.

Nous repartîmes sans prévenir. Elle tenait ma main dans la sienne et nous longions les allées du jardin public. Une bonne petite escale dans le lieu habituel ne serait pas mal. Raby m'invita à m'asseoir pour discuter un peu. J'avais une petite inquiétude due à ce qui s'était passé la veille. Je regardais autour de nous mais c'était juste des inconnus qui passaient et ne faisaient même pas attention à nous.

Raby - Toi, Salim, on dirait que ton esprit n'est pas dans ta cervelle, dit-elle en rigolant. Qu'est-ce que tu regardes dans les environs ?

Moi - En fait, hier, quand on s'apprêtait à partir, j'avais l'impression que quelqu'un nous guettait...

Raby - ... je sais, c'était Racky, je lui ai déjà réglé son compte.

Moi - Quoi ?! Tu blagues ou quoi ?

Raby - Oh oh, même moi je l'ai vue, et avant toi. Je ne voulais pas t'inquiéter.

Moi - Sacrée jeune fille ! Tu es une vraie actrice de cinéma ! Excuse-moi mais je vous ai entendues, ta maman et toi, quand elle te réprimandait parce qu'on lui a dit qu'on s'embrassait.

Raby - C'était encore Racky, cette peste ! Elle ne sait pas de quoi je suis capable. Mais dis-moi, je danse bien ?

Moi - Trop bien même !

Raby - Ah bon ?! Merci ! C'était à ton honneur !

Moi - Je sais !

Raby - Comment tu as su ?

Moi - Il n'est pas nécessaire de parler pour faire comprendre ce qu'on veut dire. La parole est moins expressive que certaines attitudes humaines telles que le silence et le regard. Jeune fille, tu ne te rendais pas compte du comment tes yeux brillaient d'amour ; tes mouvements n'étaient pas les tiens mais de ton âme qui se laissait jouir de ma présence à tes côtés. Ils te trahissaient et je ne doute pas que tes camarades puissent saisir le sens de ta danse brusque et improvisée.

Raby - Waouh ! Tu as une analyse assez profonde sur le comportement des gens. Tu me fais peur là, taquina-t-elle.

Moi - C'est toi qui fais peur au contraire. Ta timidité est un appât nuisible ; je ne dis pas que tu es louche. Au contraire. Tu es plus intelligente que tu ne laisses paraître, et ta joie de vivre me chante à merveille.

Raby - Autant d'éloges qu'on me comble là !

Moi - Je sais ce que cela sent de souffrir d'un amour qui n'est pas réciproque. Une telle chose me serait impardonnable ; tu gages de m'aimer jusqu'où ta patience te le permet.

Raby - Une gentillesse n'est jamais gratuite. Et on se cache derrière l'amitié pour arriver à nos fins.

Moi - Elle était fortuite en toi, et elle s'est vue métamorphosée en une affection qui te rend agressive et bien inspirée pour la maintenir.

Raby - C'est parce que je n'accepterais pas qu'on me l'arrache et qu'on m'érige des obstacles.

Moi - Tenir tant à une personne qu'on vient à peine de connaître !

Raby - Et ton discours voudrait-il signifier le caractère partiel de ma position ?

Moi - Je gage fort bien que je t'estime et t'adore plus que tu ne le penses ou que tu l'es. Un peu de réserve et sérénité sont bien plus aises pour moi.

Raby - Toujours égal à toi ! Mais, dis-moi, tu veux quoi comme cadeau pour ton anniversaire ?

Moi - Mon anniversaire ? Tu t'es informée de la date ?

Raby - Je vois que tu ne me connais toujours pas. Je ne me contente pas d'aimer ; je m'enquis de tes goûts et phobies. De tes états d'âme et de tes plaisirs. Je saurai, ainsi, te souffrir autant que tu ne le penses. Et on ne sera jamais rabat-joie ; rester forte et compréhensive dans les hauts et les bas. Quelles que soient tes humeurs, on saura comment rester sereine et réconfortante. Et je veux être la personne envers qui tu pourras te confesser sans regret. Rassure-toi que je te connais mieux que tu peux l'imaginer. Assez parler. Dis-moi ce que tu veux, et ne me parles pas de roman, je t'en conjure.

Moi - Quel beau discours ! Je te laisse choisir à ta fantaisie. J'avais un peu peur de toi, mais là ça devient plus immense.

Raby - C'est parce que tu fais des efforts pour qu'on ne sache rien de toi.

Moi - J'ai grandi dans la solitude et cela me va à merveille.

Raby - Mais je vais te dire une chose : la solitude est pire que l'ennemi. À force de garder pour toi ce qui te fait mal, tu vas accumuler trop et ça peut dégénérer à une rancune contre tu ne sauras qui. Tu ne peux pas fuir la société, et dans toute chose, il y a le bien et le mauvais. Chacun d'entre nous a mille et une raison d'être triste ; mais sache qu'il y a aussi mille et une raison d'être heureux. Et tu ne peux pas savoir si toi, Salim, tu es bon ou mauvais tant que tu te recroquevilles et ne t'ouvres pas aux autres. Je t'aime, non pas parce que tu es une personne parfaite - ce qui est absurde -, mais cela m'est arrivée tout naturellement. Qu'importe tes défauts, cela ne me chatouille guère. Je vois que tu as besoin d'être heureux, mais ne sais pas comment. Eh bien, Salim, mets-toi à ma place ! Tu sauras ce que cela veut dire aimer ; là, tu es dépourvu de toute sensibilité et d'affection. Il n'y a que tu sang dans ton cœur, rien d'autre ...

Elle finit son discours par des larmes qui me rendent coupable d'un crime. Je ne pus articuler mot pour la consoler, car je ne savais pas comment. Quelle honte ! Elle me connaissait mieux que moi-même. Raby s'était donnée les moyens pour connaître ma vraie personnalité. Je me contentais seulement de lui essuyer les larmes ; elle me laissa faire et on s'échangeait un de ces sourires qui adoucissent les maux et réconfortent.

- Désolé, c'était un moment de faiblesse, poursuivit-elle, un instant après.

- Non, ne t'inquiète pas, dis-je finalement. Tu as parfaitement raison. Je comprends mieux combien tu tiens à moi. Mais tu dois comprendre aussi que je ne l'ai pas souhaité ainsi. À mon enfance, maman était ma meilleure amie et elle est partie pour jamais. J'ai vécu aussi beaucoup de déceptions avec des soi-disant amis ; au comble de tout cela, c'est le vide à la maison, aucune ambiance sentimentale. Je ne sais pas vraiment. Mon oncle Mamady qui me terrorise depuis très jeune, mon père qui ne me demande que d'étudier et rien d'autre. Ma meilleure amie qu'on rejette par orgueil. Et voilà que tu me fais découvrir quelque chose qui dormait en moi depuis longtemps sans que je le susse.

Elle me prit par les deux mains et me dit :

- Cela me rassure que tu te rendes compte de retrouver cette chose. Je pourrai enfin dire à maman que j'ai un nouveau prétendant que je vais lui présenter.

- Quoi ?! Tu n'oses surtout pas !

- Ha ha ha !!! Reste tranquille mon ami, ce n'est pas le moment de lui dire ça, rigola-t-elle. Le moment où tu compteras demander ma main, elle saura en aval. Mais, ne t'inquiète pas, elle a l'esprit très futé, elle sait déjà peut-être, que sais-je ?

- Tu parles !

Nous rentrâmes quelques instants après s'être échangés de douces paroles et des blagues.

***

Le temps s'écoula ; je devais alors penser à commencer les démarches pour mon orientation universitaire. L'État avait mis en place un dispositif numérique qui permettait de s'inscrire et de faire les procédures obligatoires. Raby me prêtait très souvent son ordinateur et j'en profitais pour faire le nécessaire.

Raby et moi étions très attachés l'un à l'autre à tel point qu'on ne puisse douter d'une éventuelle relation sérieuse. Mon oncle Badara se contentait seulement de me parler sur ma carrière estudiantine et professionnelle. Il me suggéra de trouver une pré-inscription pour aller étudier à l'étranger, sauf que c'était trop tard et que je n'avais qu'une chance sur cent de l'obtenir. Il n'y avait pas raison de garder espoir sur ce projet. J'espérais être orienté à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis. Toutefois, je fis des recherches sur Internet et trouvai une opportunité inattendue de la part d'une université canadienne du nom de Laval. Sans perdre de temps davantage, j'en fis part à mon oncle Badara qui en était vraiment ravi. Il va falloir alors se dépêcher pour s'inscrire et poursuivre la procédure au niveau du Ministère de l'Enseignement Supérieur. Mon père, par le biais de ma tante Fama qui était venue à Louga pour trois jours, me remis la somme que je devais envoyer par western union en guise d'inscription pour l'université canadienne. Ce qui fut fait.

Sauf que je devais rentrer à Dakar pour pouvoir poursuivre de près les démarches. C'était difficile d'interrompre ainsi ses vacances mais c'était une question d'avenir. Je balançais pendant presque trois jours avant de pouvoir enfin me décider : il fallait rentrer dans le plus bref délai. Finis les doux moments, les jeux et les parties de plaisir, de nouvelles épreuves m'attendaient à l'horizon et je fus convaincu qu'elles ne seront pas faciles. Ma jumelle Diary pouvait encore restée autant qu'elle voulait, on avait encore presque un mois et quinze jours pour écouler nos vacances. La partie était finie pour ma part. Il m'était très difficile de le dire à Raby, elle m'en voudrait sûrement car ne pouvant pas supporter que je la quitte ainsi et dans un court terme. Mais il le fallait.

Un jour que nous étions assis dans le jardin public où nous avions l'habitude de fréquenter, je lui fis savoir mon projet.

- Non Salim, tu taquines ! me dit-elle. Tu n'oses pas nous quitter ainsi sans prévenir très tôt. Dans deux jours ?

- Oui, il me faut régler certaines choses au niveau du Ministère et j'ai assez perdu du temps.

- Ok, je vois. Mais c'est si pressé à tel point que tu veux rentrer après-demain ?

- Oui, je te jure. Si je pouvais le faire aujourd'hui ou demain, ...

Je n'ai pas pu terminer ma phrase, ses yeux étaient larmoyants. On allait encore causer le malheur. Je détournai mon regard et je tremblotais et suais presque.

- Et je suis sûre que nous n'allons plus nous revoir, avança-t-elle au bord des larmes.

- Non, qu'est-ce que tu dis ? Je ne suis pas si ingrat que ça. On va se parler tous les jours par WhatsApp ou SMS. Je vais t'appeler très souvent, Raby. Je viens de te connaître pendant ces quelques jours qu'on a passés ensemble, mais sache que tu as beaucoup changé ma vie dans le bon sens. Je ne te laisserai jamais de ma vie, rassure-toi.

- Tu dis ça juste pour me rassurer, mais je suis convaincue que tu ne tiendras pas ta promesse.

- Ai-je l'air de quelqu'un qui parle pour flatter ? Non, Raby, tu ne peux pas imaginer à quel point tu m'as humanisé. Donne créance en moi, et arrête de pleurnicher comme une gamine. Ça me met mal à l'aise, je t'en supplie ... Ah voilà, tu vois que c'est le sourire qui te va mieux. Tu es toute mignonne comme ça. Où est cette forte jeune fille que je connaissais en toi ? Ce n'est pas encore la fin du monde ... Je n'aime pas te voir triste, ça te rend moche, tu sais ... Aïe !!! Tu veux me lacérer avec tes ongles ? Voilà ton agressivité dont je parlais. Pourquoi méchante aussi ? Ha ha. Sacrée Raby, on dirait Karaba la sorcière. Mais, dis-moi, tu me donnes la permission de rentrer ?

- Et si je te dis non ? Me demanda-t-elle après avoir sécher ses larmes.

- Je reste et laisse tout mon projet tomber à l'eau.

- Non, je ne veux pas te rendre malheureux après t'avoir offert le bonheur, mon cher ami. Je t'apprécie beaucoup car tu es un garçon de principe et très sérieux. Tu as un avenir à construire, vas-y. Je ne te conseillerais pas de ne pas changer, comme le disent certains. Change, mais dans le bon sens, améliore-toi, on a que ça de bien pour reconstruire sa personnalité. Moi en tout cas, au-delà d'être ta bien aimée, je saurai être ta conseillère et ta confidente.

- Tu me redonnes du courage et ça motive vraiment d'entendre cela de toi. Bon, il faut qu'on rentre, je n'ai pas encore informé tes parents.

- D'accord. On y va.

Je sentis qu'elle était toujours triste, ce qui était quasi normal, je l'étais plus qu'elle, vous dis-je.

Nous étions un samedi.

Je fis savoir à ma tante Astou ma décision. Elle m'en voulait au début, mais comprit finalement pourquoi j'étais pressé de rentrer.

Je ne dormis pas la veille. Et si on annulait toute cette connerie que j'étais en train de faire ? Me disais-je. Le regret prit place déjà, et je me reprochais d'avoir pris une telle décision à la va-vite. Mais il était trop tard d'en revenir, alea es jacta !

Le jour de mon départ, Raby se réveilla plus tôt que de coutume, pour m'aider à bien ranger mes bagages qui n'étaient pourtant pas assez conséquents. Quelques instants après, elle ressortit et revint avec son sac d'ordinateur qu'elle me tendit.

- Tiens, Salim, c'est pour toi, me dit-elle.

- C'est quoi ça ?

- L'ordinateur. Je n'en ai pas trop besoin. Papa va m'en procurer un autre.

- Tu es folle, on dirait, Raby. Non, s'il te plaît, tu en as besoin. Je ne peux pas accepter ceci. C'est trop fait.

- Salim, je ne te demande pas ton avis. Tu vas accepter ce présent sinon je ne te parlerai plus, et je suis très sérieuse.

- Sheuuut !!! Toi aussi. Je ne veux pas te causer des ennuis, et si ton papa te le demande ?

- Ha ha ! Ne t'inquiète pas, je lui ai déjà dit. Je lui ai expliqué que tu as vraiment besoin d'un ordinateur, plus que moi en ce moment avec tes démarches. D'autant plus, tu dois aller à l'université, alors que moi, je n'ai même pas encore fait le Bac. Il dit qu'il va m'en offrir si j'aurai une bonne mention au Bac l'année prochaine... Tu me regardes comme si je mens ...

- Pourtant il n'en est rien. Je te crois. En tout cas, merci profondément, tu me surprends chaque jour.

- Ce qui nous lie est plus fort qu'un simple matériel. Je ne saurais jamais l'offrir ou le troquer. Tu as plus de valeur que quoi que ce soit pour moi.

- Ce n'est pas ta bouche qui parle !

- Tu maîtrises à merveille le monde des sentiments...

- ... Juste à travers les romans...

- Ils ne sont que le reflet de la vie réelle. Bon, je te laisse te préparer.

Et elle ressortit, sans s'apercevoir de ma main qui voulait la retenir encore un instant.

* * *

Raby me tendait la main en signe d'adieu, jusqu'à ce que le bus se perdit de vue. J'étais resté fort jusqu'à ce moment où je pris connaissance réellement de ce que je venais de faire. Mes larmes coulaient sans que je ne m'en rendis compte, et il en serait ainsi si la personne assise à côté de moi ne m'eut demandé la cause de mes pleurs.

- Baye Faal, lóy jóy (Qu'est-ce que tu pleures) !

J'étais indifférent au début, mais à ce mot de Baye Faal, je me laissais dominer par le sens de l'humour. Je souriais légèrement sans même savoir quoi lui répondre. Cette personne était elle-même un vrai Baye Faal, au sens physionomique du terme. Ses rastas tombaient jusqu'à son nombril et son accoutrement de njakhass laissait témoigner son appartenance au Mouridisme. J'avais peur des Baye Faal depuis mon enfance, leur voix et leur démarche fougueuse me faisaient frissonner atrocement à leur rencontre.

Mais, cette fois-ci, je n'eus nullement le frisson devant cette créature que je craignais tant. Je souriais tout en essuyant mes larmes. Remarquant que je ne répondais pas, il insista toujours.

- Baye Faal, qu'est-ce qui ne va pas ?

On eut l'impression que cette créature n'était pas comme les autres. Il dégageait vraiment l'air d'une grande personnalité, ses rastas bien soignés et son njakhass formait un puzzle de divers tissus des plus chers à l'époque. Son cou était paré d'un joli et brillant collier avec une photo de Mame Cheikh Ibrahima Faal - qu'on surnommait Lamp Faal-, d'une texture noire et blanche qui collait bien avec le style. Sa mine laissait témoigner une modestie et une simplicité incommensurables. Mon illusion infantile m'avait dupé, car je venais de découvrir la grandeur d'âme d'un Baye Faal. Une subite contemplation a suffi pour que je puisse lire toute cette remarque, sans être dans un projet de flatter.

- Non, rien, répondis-je finalement.

- Ah bien sûr, il y a quelque chose qui te met dans cet état. Aucune des futilités de la vie ne doit te faire pleurer, mais seulement la crainte de Dieu. Un Goor-Yalla ne pleure pas devant les gens pour exprimer sa tristesse. Tu dois habituer ton cœur à souffrir les difficultés, quel que soit leur degré. Moi, j'incarne la philosophie de notre guide spirituel Mame Cheikh Ibrahima Faal : subvenir à nos besoins par la sueur de notre front, le respect, l'endurance, la dignité et la modestie, pour ne citer que ces qualités.

- Ah c'est bien.

- Baye Faal, il n'y a pas une vie facile. Sois fort et évite d'être émotif. Cela te rend faible dans certaines situations où tu ne feras que ruiner ton âme.

Je me contentais de hocher la tête et d'acquiescer. Et on discuta longuement comme des amis s'étant connus depuis belle lurette. Nous relatâmes nos odyssées parsemées d'embûches et d'épreuves accablantes.

Mon ami, le Baye Faal, finit son trajet à Thiès où il me fit ses adieux avant de descendre. Il avait deux gros baluchons qu'il portait sur ses deux épaules robustes. Ses pas étaient ceux d'un forçat, et je remarquais qu'il avait aussi une grosse ceinture attachée au bas-ventre. Son ombre disparut quelques instants après que le bus soit reparti, faisant cap sur Dakar.

Dakar s'annonçait à l'horizon après moins d'une heure de route. L'air pesait lourd contrairement au climat pur de Louga qui vous rafraîchissait la respiration.

Je fis un texto à Saly pour lui annoncer que j'avais écourté mes vacances à cause de ce que vous savez déjà. Elle me fit savoir aussi qu'elle comptait rentrer dans deux semaines.
À mon arrivée, seules ma tante Fama et notre bonne Mariétou m'accueillirent chaleureusement ; grand-mère était allé à Diourbel chez sa fille Anta, la petite sœur à mon père que je ne connaissais pas à merveille. Mon oncle n'avait pas bougé d'un iota, et attendit que je vienne le saluer. Ce que je fis sans broncher.

Le soir, j'allumais ma "nouvelle" machine et je remarquais que le fond d'écran avait été changé et que Raby y avait mis à la place ce qui ressemblait à un poème où on pouvait lire ceci :

" À mon cher Salim,

Tu rayonnes plus que le soleil

Ton sourire brille plus que les étoiles

Et ton cœur est aussi pur qu'une âme innocente

T'aimer ne m'est nullement un péché

Mais un secours dont ma personne pourra se réjouir

Tant que tu m'aimes, tu ne changeras jamais ce fond d'écran.

Rabiatou Ndiaye. "

Salim changera-t-il le fond d'écran ? Quel avenir lui réserve le destin sur sa vie universitaire ? Le combat de la vie continue avec ses différentes péripéties.

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