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Chapitre 4

Le temps passa plus vite qu'un coup d'éclair en pleines fortes précipitations. Et on grandit et le passé archivé dans les tiroirs du souvenir. Le soleil et la lune poursuivirent leur trajectoire habituelle, se côtoyant quelquefois sur le sort de l'humanité. La camaraderie reste éphémère et la noble amitié demeure toujours.

Ma jumelle Diary était devenue une fille voilée ; mais la mauvaise nouvelle est qu'elle avait repris deux classes, accusant ainsi un retard de deux années. Le décès de maman l'avait sûrement affectée et, partant, cela avait eu un effet assez conséquent sur sa stabilité mentale. Cela devrait m'affecter plus qu'elle, moi qui s'était attaché plus à maman. Incohérence ? Disons plutôt que maman m'avait plutôt mieux préparé dans ma vie future ; j'étais mieux outillé psychologiquement pour pouvoir affronter les épreuves de la vie et sûrement vivre sans elle. Ainsi, je devins plus studieux et brillant, mes moyennes avoisinaient quasiment les trois meilleures.

Je n'étais plus dans la même école que mes anciens camarades que vous aviez eu à faire connaissance dans les parties précédentes. On se revoyait très rarement et les liens d'amitié s'affaiblirent et disparurent dans le vide. Saly avait grandi et avait un autre meilleur ami - je ne saurais vous en dire quelque chose d'on ne peut plus sûre. Birahim devint un souvenir, et Assane idem, et Demba pareillement.

Sauf Mame Faty.

Nous étions dans le même lycée après l'obtention de notre BFEM, mais nos classes étaient séparées telles deux extrémités d'une chaussée. On se croisait très souvent dans la cour, et au fur et à mesure que les mois prirent de l'âge, je la trouvais plutôt effacée et elle me saluait à peine. Elle s'était faite de nouvelles amitiés, j'en ressentais une folle jalousie et je ne sus pourquoi. Je ne manquai pas de l'aborder un jour et de lui reprocher son attitude.

- Bonjour Mame Faty.

- Bonjour Salim, tu vas bien ?

- Pourquoi tu ne me salues plus ?

- Je ne te salues pas ? Salim, toi aussi. Nous sommes des amis de longue date, ce n'est pas maintenant que je vais t'ignorer.

- En tout cas, tu as l'air très bizarre maintenant. Je ne te reconnais plus.

- Sheuut Salim ! Pas d'histoire s'il te plaît. Je peux avoir ton numéro ? Je t'écris après.

- D'accord. Vas-y ! 77... (ainsi de suite).

- Merci. Je vais t'écrire après.

- OK, je l'espère bien.

Et elle répartit froidement et sans le moindre sourire habituel. Je fus très choqué, oh mon Dieu. Était-ce vraiment Mame Faty à qui je parlais ? Le fille hyper souriante et ouverte, la plus folle de notre groupe ? Non, je ne m'étais pas dupé. Comme les personnes se métamorphosent du jour au lendemain, mais - tenez-vous bien, vous dis-je - à un degré exorbitant !

Des jours passèrent et je ne reçus ni coup de fil, ni texto de sa part. Néanmoins, on se croisait de temps en temps dans la cour, s'échangeant tout simplement le bonjour. Je m'y habituai et ma gêne se dissipa.

Je fis la connaissance de Karim. Il était la personne me ressemblant typiquement. Pas physiquement. Nous avions quasiment les mêmes centres d'intérêts. Parfois, nous allions à la bibliothèque pour préparer nos exposés ou pour bouquiner à longueur de journée. Jovial et très sympa, humble et très ouvert, taquin et très intelligent, disponible et très exemplaire, pieux et très bon conseiller, autant d'éloges que sa personnalité mérite sans exagération, vous dis-je. Karim incarnait l'idéal de par son caractère et sa grandeur d'âme. Un jour qu'il lisait Karim d'Ousmane Socé, je voulus découvrir un mystère qu'il ne voulut jamais dévoiler ou en parler :

- Boy, j'espère que tu n'es pas comme ton homonyme que tu es en train de lire ? Lui taquinais-je.

- Ha ha ! Dama ko niru ? (Je ressemble à ça ?). J'ai l'air d'un coureur de jupons ? répliqua-t-il.

- Non même pas. Je voulais juste savoir. Comme toi tu n'es jamais triste ou énervé, il y a sûrement une bonne amie qui prend soin de toi.

- Ndeyssane (Hélas). Vraiment, je ne comprends pas le sénégalais, je dirais même l'africain. Pour vous, quand on est toujours gai, c'est forcément qu'on se sent bien et qu'on profite d'un paradis terrestre ? Non Salim, je te croyais plus mature que ça.

- Aythia (Allez) mon philosophe ! Mais tu ne peux pas me leurrer frangin, je te connais comme mes poches.

- Donc tes poches sont trouées sans que tu le saches alors, plaisanta-t-il gaillardement.

- Je m'en doute fort bien.

- Je vais te dire une chose. Je n'attends pas que les autres m'apportent le bonheur. Je le crée par moi-même et je le vis. Afficher toujours sa tristesse est la plus mauvaise des faiblesses. Néanmoins, la tristesse est humaine, personne ne peut s'en débarrasser de toute sa vie. Mais laisser les autres t'affaiblir pour des raisons anodines, ... mon frère, - je te dis - c'est la pire des sottises.

- Tu parles comme un sage.

- Loin de tout cela. C'est juste que la raison ne s'apprend pas à l'école. C'est quelque chose qu'on inculque à soi-même. Nous, les jeunes, n'avons plus le temps de réfléchir. Nous sommes scotchés toute la journée à nos terminaux mobiles ; partant, la pédagogie et la culture générale sont à la merci d'une vacuité intellectuelle absolue. Et, je te dis, aucun savoir-vivre.

- C'est quand même la mode. Mais tu n'as toujours pas répondu à mes préoccupations, je vais être plus explicite : tu as une copine ? Oui ou Non ?

- Ha haa !!! Je te renvoie la question.

- Oui, bien sûr que j'en ai. (Rassurez-vous, je mentais pour l'obliger à répondre.).

- OK. Maintenant, une autre question : est-ce indispensable ?

- C'est l'effet de mode qui l'exige.

- Tu le dis de façon gratuite, mais en réalité, c'est ce que pense tout le monde, du moins les jeunes. Nos malheurs commencent par là car nous ne distinguons pas le nécessaire du superflu. Conséquence : désolation et désarroi à en jamais finir. Il ne faut pas forcer, mon frère, laissons les choses se faire naturellement.

- Pourtant, tu as raison.

- J'ai toujours raison.

- Bon Dieu de bon sang ! Tu me névroses. Modestie zéro !

- Ha ha ha !!! Tu m'injures là ! N'étale pas le débat boy. Je suis ton grand, un peu de respect waay ! Toi, avec ta ou tes copines, je ne sais pas comment tu t'aménages pour les gérer. Sacré Salim !

- Donc tu m'as cru ? Je taquinais seulement, je n'ai pas de copine.

- Je sais. Tu n'as même pas le courage, lançait-il entre éclats de rire.

- Absurde ! Ce n'est pas une question de courage, mais de temps. Je n'ai pas le temps pour des amourettes. Mes romans me suffisent largement.

- Si tu le dis.

- Et c'est, en réalité, bien vrai. Cela t'empêche de te concentrer comme il se doit, tu es obligé de gérer ses humeurs et tu ne te rends pas compte de l'asservissement que tu es en train de vivre. Et toi, tu me connais fort bien...

- ... comme mes poches, continua-t-il.

- Ha ha ! J'espère qu'elles ne sont pas trouées comme les miennes ?

- Tu le sais mieux que moi.

- Je disais que tu me connais fort bien : je ne suis pas de nature pour les douceurs. Je te dis ce que je ressens et ce qui me dérange en toute franchise. Et puis, voilà quoi ! C'est à toi de supporter ou de couper les ponts tout courts. Je n'aime pas être galantin, c'est juste ça.

- Tu parles comme un expérimenté, renchérit-il comme pour se moquer de moi.

- Tu n'as pas du tout tort. C'est cela, ah oui !

- Une bonne nouvelle qui m'avait échappé alors.

- Voilà.

- Et j'en sûr que tu leur écrirais un factum au lieu d'un texte galent et doux.

- Si la nécessité se faisait sentir, bien sûr.

- Pardieu !

Il avait toujours cette attitude à poser une question sur une qui lui était adressée à chaque fois. C'était son art de discuter, et ainsi, te faisant adhérer sa logique sans que tu t'en rendes compte. Même s'il avait tort, il reconnaît d'abord, mais ne manqua pas de rapporter un autre argument qui faisait que tu adoptas son raisonnement.

Il décrochait toujours les meilleures notes en philosophie et en Histoire-Géographie, de même qu'en Français. Son art de raisonner certifiait absolument son fort en dissertation et en commentaire. Il me rapetassait souvent mes quelques textes d'exposé ou d'exercices à rendre et qu'on traitait chez nous. Et on ne verrait jamais sur terre une personne aussi équilibrée dans ses humeurs selon la situation. La voir en classe, en plein cours, vous croirez qu'il est réservé et ne donnait aucune importance de la présence des autres. Et si je vous dis que c'est le plus taquin et parfois farceur en dehors de l'école ou de la classe !

Enfin, voilà une personne qui me sera utile toute ma vie. Me disais-je. Mais, cette pensée ne dura que quelques jours.

Nous étions à deux mois de l'examen de baccalauréat. Les révisions avaient bon train, des groupes de travaux se forment, des nuits blanches devant les exercices. Le feu vert de la course avait été signalé depuis belles lurettes, certains s'étaient lancés à point, d'autres étaient fort bien à la dernière minute. La bousculade se sentait sensiblement, et les potentiels candidats devenaient de plus en plus méfiants. Personne ne faisait plus confiance à ses camarades, on ne se donnait plus la main. C'était sans doute la saison où les marabouts se donnaient les moyens pour se faire le maximum de profits.

La tension et la pression des parents étaient incommensurables. Les voisins même se lançaient dans le bal, on aurait dit que je portais un cachet marqué "BAC" sur mon front en constatant comment ils me dévisageaient. Nous devenions les combattants nous préparant pour aller à la guerre. Je recevais fréquemment des appels et des messages d'encouragement. Je ne me sentais plus à l'aise dehors, sous le regard dévorant des autres. Ils jugeaient et parlaient, te qualifiaient quelques fois. Ils savaient si j'allais réussir ou échouer : moi je n'en étais pas totalement sûr.

Nous avions quasiment bouclé tous les cours, Karim et moi ne faisions que réviser et faire des renforcements pédagogiques ensemble à la maison, quelques fois au lycée, les samedis et dimanches matin et soir. D'autres fois à la bibliothèque que nous fréquentions très souvent. Tandis que d'autres prenaient le train en marche et bachotaient éventuellement.

Un jour que nous venions de descendre, Karim et moi longions la chaussée, discutant de tout et de rien. Le soleil était à son zénith et brillant de façon incandescente. C'était la période de forte chaleur, l'approche de la saison hivernale.

Nous marchions en liesse, rigolant, revenant du lycée un samedi soir. Quelques instants plus tard, un bruit lugubre retentit, suivi d'un grincement des pneus d'un véhicule.

Je ne savais pas ce qui s'en suivit.

Les autres vous raconteront l'intégralité de la suite de cette histoire, moi j'étais mort, dommage que je ne pourrai pas vous narrer le reste de ma vie jusqu'à l'instant où je vous parle.

Non, je vous rassure, je m'étais juste tombé en syncope à la seconde même. Au réveil, ... "où suis-je ? " me demandais-je, les yeux grands ouverts. La pièce était bien éclairée et j'entendais des voix venant... de loin ? de près ? Que sais-je ? Une silhouette s'approcha devant moi, j'avais la vue floutée, le corps immobilisé comme anesthésié.

Je ne sus qui j'étais, ni même si j'étais. C'était le néant absolu, car il n'y avait aucune sensation, aucune perception de ce qui m'entourait. Néanmoins, je revins à la conscience, je reconnus des voix humaines et certaines qui m'étaient habituelles : papa était là, ma tante Fama et mon oncle Mamady.

Le temps s'était retourné en arrière.

J'avais l'impression que la scène du jour du décès de maman s'était reproduite. Mais cette fois, le silence était total. Je m'étais rendormi derechef et à mon réveil, ils étaient tous partis sauf l'infirmière qui s'était assise à côté.

- Où est mon père ? Lui demandais-je sans même la saluer.

- Bonjour Salim, comment te sens-tu ?

- Où est mon père ? poursuivis-je, esquivant sa question.

- Ils sont partis, mais ils vont revenir dans un instant.

- Où suis-je ? Qui es-tu ? Pourquoi vous m'avez attaché le cou ? Lui questionnais-je, d'une voix quasi atteinte d'une dysphonie et saccadée.

- Salim, calme-toi. Tu as fait un accident avec ton ami Karim.

Je tressaillis affreusement quand j'entendis le nom de Karim. Mon Dieu ! Mon esprit repris la conscience à la normale. Je me ressouvins petit à petit l'avant-scène du drame, jusqu'au moment où j'entendis le bruit tonitruant d'un véhicule.

- Mais soxna si (Madame), où est Karim, pourquoi il n'est pas ici comme moi ?

- Salim, calme-toi ! me dit-elle, en me tenant par la paume d'une main réconfortante. Repose-toi, je vais t'expliquer après.

- Non, s'il vous plaît Madame, dites-moi s'il va bien.

- Bon, je t'explique alors.

Et elle commença son récit selon ceux qui avaient assisté au drame.

Flash-back

Nous longions le trottoir quand, subitement, un véhicule qui voulait dépasser un camion dérapa et renversa Karim qui était le plus près de la chaussée. Son corps me bouscula contre un tronc d'arbre, et je tombai raide évanoui. Karim mourut sur le champ.

Tout le monde accourut, espérant nous venir en aide ; le véhicule continua sa course, le chauffeur n'a pas daigné s'arrêter et s'enfuit à vive allure. On le poursuivit, en vain.

Les habitants nous avaient couverts d'un grand drap blanc, croyant que nous étions tous les deux morts. Ma tête saignait furieusement. Les curieux venaient de tous les coins du quartier. Tandis que quelques-uns soutenaient que nous étions bien vivants, quelques autres disaient être sûrs que nous étions tous morts. J'étais mort et Karim vivant, pour certains ; j'étais bien vivant et Karim était sur le point de succomber, pour d'autres. Les femmes criaient au secours, les enfants se faufilaient dans la foule qui s'était formée autour de nous.

Les secours n'étaient pas encore sur place pendant presque dix bonnes minutes. Des insultes et reproches voltigeaient de partout.

Quelques secondes après, les secours radinèrent enfin. Les sirènes des sapeurs-pompiers retentirent et la camionnette se fraya un chemin jusqu'à l'endroit où nous étions couverts. L'un des agents dégagea la couverture à moitié et nous tata le pouls. Étaient-ils morts ? Vivants ? On l'assommait de questions sur notre sort. Il ne répondit pas. On nous embarqua dans l'ambulance et cette dernière répartit sans prêter le flanc aux commérages.

On nous achemina à l'hôpital principal le plus proche.

Un garçon, dans la foule, et quelques-uns nous avaient reconnus et s'étaient empressés d'alerter nos parents respectifs.

Karim fut conduit à la morgue de l'hôpital. Il avait perdu une énorme quantité de sang, et son corps présentait plusieurs fractures. Sa survie n'était pas garantie.

Je subissais les derniers soins majeurs dans une salle d'urgence. Je revins à la conscience, mes blessures étaient pansées.

Néanmoins, je n'étais pas totalement sain et sauf : j'avais eu une hémorragie après mon choc, perdant ainsi une quantité de sang assez conséquente. Heureusement, une personne de bonnes mœurs humanitaires m'avait sauvé la vie. Nous avions le même groupe sanguin O+. En plus, c'était une personne qui me connaissait fort bien, mais elle avait dit à l'infirmière de ne pas me révéler son nom. Elle attendait dehors quand je repris connaissance.

* * *

C'était une histoire vraiment gaguesque pour moi.

À la fin de son récit, je remarquais que l'infirmière était tout en larmes. Je ne l'avais pas regardée des yeux, me contentant seulement de l'écouter raconter ce qui m'a conduit jusqu'ici.

Ses larmes étaient d'une sincérité étonnante.

- Donc, Madame, vous voulez dire que Karim est bien mort ? Lui demandais-je, le regard évasif.

- Oui, effectivement, me répondit-elle d'une voix hésitante.

À la seconde même de sa réponse, un liquide brûlant coula sur mes joues et atteignit le menton. Et une deuxième fois, et une troisième fois... Et encore, et encore, ... Je ne sus combien de fois.

Et encore une fois, la vie a trahi et trahira. Les lèvres tremblotaient, j'étais crispé sous ma couverture. La pièce devint atrocement froide et me semblait horrible.

Mes larmes coulaient à flot et d'une fréquence torrentielle.

Les paroles de Karim ! Ô combien elles étaient studieuses et sages. Il était clair d'esprit.

- Gëmël Yalla (Crois en Dieu).

L'infirmière venait de parler. Je sentis un léger sourire d'une tristesse sans expression.

Je prenais la fin de mon bonheur comme étant le début d'un nouveau soulagement. La vie est dépourvue d'âme humaine, elle est insensible aux malheurs qu'elle nous cause.

Je revivais nos parties de foot, nos courses sur les sentiers de l'école. Karim ne savait pas qu'il ne finira jamais le Nini d'Abdoulaye Sadji que je lui avais prêté. Il m'avait promis de m'expliquer un sujet de philosophie qu'il avait déjà traité et bien maîtrisé.

Mon pauvre frère, si tu savais combien de fois j'ai promis des choses que je ne pourrai jamais accomplir !

Maman et Karim n'étaient pas ordinairement des humains. Ils furent des anges que le Ciel avait envoyés vers ma pauvre personne. Ils repartirent sur la pointe des pieds, une fois leur mission accomplie.

Néanmoins, je m'incriminais, me diabolisais moi-même, j'étais maléfique et je ne méritais pas d'être aimé.

Le monde devra désormais s'éloigner de moi, je suis détenteur d'un mauvais sort et mets en péril la personne qui s'attachera à Salim.

Je voulais désormais être seul, seul et encore seul, vous dis-je. Seul avec mes bouquins qui m'ont toujours tenu compagnie et qui ne me lâcheront jamais. Seul, oui seul.

Karim était le genre de personne qui contestait, avec des raisons plausibles, ce que tout le monde soutenait. Pour lui, le passé n'est pas seulement un passé et qu'on doit l'oublier et se concentrer sur le présent et mieux se projeter dans le futur.

- Si le passé était insensé et dépourvu de quintessence, la mémoire le serait aussi, mon frère. Pourquoi nous ressentons un bonheur inexprimable quand nous nous ressouvenons des moments de joie qu'on a vécus avec nos proches ou amis ? Pourquoi nous éprouvons une aversion extrême et secrète quand les moments de désolation et de tristesse nous reviennent dans notre pensée ? Si on rêve un avenir meilleur c'est parce qu'on veut qu'il soit un passé réajusté et amélioré. Le présent, je n'en parle même pas. Il est aussi éphémère qu'un éclair. Boy Salim, je ne suis pas un visionnaire mais si je sais que mon avenir sera meilleur, c'est parce que je sais que je ne commettrai plus jamais les erreurs que j'avais commises dans le passé. Je saurais écarter les personnes qui m'avaient mis des bâtons sur les roues ; non plus, j'éviterai, du mieux au monde que je pourrai, de causer du tort, car je ne me réclame pas comme la meilleure et parfaite personne.

Me disait, un jour, Karim.

- Certains, comme toi, pensent que je ne suis jamais triste. Mon frère, détrompez-vous. Quand on ne pleure pas si on se sent mal, moralement je te dis, les larmes vont couler dans le cœur et cela le rassit. On devient ainsi rancunier et intolérant. Sauf que moi, je m'enferme dans ma chambre et me débarrasse de mon courroux. Je refais bien mon visage et je ressors bien rajeuni et libéré. Nul autre n'est mieux placé que toi-même pour être ton propre confident quelques fois.

Et le comble, aujourd'hui, est que tu te fais du mal pour le bonheur de quelqu'un qui ignore ton existence. Alors, pourquoi diable ruinerais-je mon âme à causes des supplices et humeurs des autres ? Nous vivons aujourd'hui, dans un monde où l'amour est une chimère, des illusions, des mirages, je te dis. Oui. Chacun combat pour sa propre cause. L'amitié n'est plus gratuite. Il faut juste savoir l'essence de notre existence, un point c'est tout. Ne compliquons pas notre vie, encore moins celle des autres.

Karim parlait encore, son esprit était toujours vivant, il me parlait et je l'entendais. J'en étais sûr et certain. Sa voix résonnait dans mon esprit, son ombre était là.

Je délirais et j'étais enrôlé dans de profondes réflexions. Le parfum de la pièce me rebutait. Tous les soins qu'on me procurait n'étaient, en réalité, pour moi, que des palliatifs ; mes plaies avaient une douleur inexprimable. Dieu merci, je n'eus rien de cassé dans le squelette, ni la tête fendue. A contrario, la sueur perlait mon visage due à une légère fièvre, tandis que je ressentais une légère fraîcheur qui me caressait la main.

Donc l'infirmière était toujours là ? Je ne l'entendais pas qui me parlait. Elle tenait toujours ma main et me rassurait que j'irais mieux et que je sortirais dans quelques jours. Combien ? Je ne saurai vous dire.

Le compte à rebours était déjà lancé et le temps m'était compté.

Bientôt les examens de baccalauréat. À combien de semaines ? ... de jours ? ... d'heures ? Les jours se rapetissaient. Je ne savais plus, ni même si c'était déjà passé. Je n'avais plus la notion du temps dans la pièce funeste où j'étais. Il n'y avait ni soleil ni lune, encore moins étoile. Il n'y faisait ni jour ni nuit. Mais le baccalauréat s'approchait et je le sentais. Et c'était bien cela et bien vrai.

- Vous avez dit que la personne qui m'a sauvé la vie est là, dehors ?

- Oui, je vais l'appeler après. Pour l'instant repose toi encore. Je vais revenir dans un instant.

- Son nom s'il vous plaît ? Ce n'est pas mon père ? Ma tante Fama ?

- Repose toi, je te dis. Tu vas finir par détériorer ton état de santé.

- D'accord.

Et elle sortit sans renchérir mot, refermant la porte derrière elle.

Qui pourrait me sauver la vie à cet instant où je ne souhaitais que mourir ? Voilà une nouvelle infamie de la vie ! Elle te tue et te vient en secours concomitamment. Absurde. Si c'est pour me maintenir en vie et me faire subir d'autres soucis, elle n'a qu'à me la reprendre. J'en avais assez, oui. Vraiment assez.

Bénis soient ceux qui disaient que j'étais mort et que Karim était bel et bien vivant !

Les sages partent, les ignorants demeurent et les apprenants ne savent plus où puiser. C'était bien la situation incongrue de la société.

Ah oui, je comprends tout maintenant : Karim n'était pas mort. C'est sûr et certain, c'est lui-même l'ange qui m'avait sauvé la vie. J'en avait le cœur net. Pourquoi diable, encore, me mentir ? Était-ce le meilleur remède ? Du n'importe quoi ! Karim avait raison donc quand il me disait de ne pas trop faire confiance à personne, même à lui-même. Il venait de me montrer qu'il ne méritait pas que je lui fasse confiance. Qu'importe ! Qu'il soit encore vivant était plus louable que tout, actuellement, dans mon univers terrestre.

Quelques minutes après, l'infirmière rentra à nouveau. Je n'avais pas fermé l'œil.

- Ah Salim, tu ne dors pas ?

- Dites-moi Madame, pourquoi vous sembliez trop attristée tout à l'heure quand vous me racontiez ce qui s'était passé ? Je pensais que ceux qui travaillent dans les hôpitaux étaient devenus insensibles, à force de recevoir des malades qui souffraient affreusement.

- Tu veux dire qu'on n'a pas de cœur ?

- Non, pas du tout. Mais ça m'a paru étrange et même bizarre quand-même.

- Nous sommes tous des humains, et qui que nous soyons, notre nature humaine ne nous quittera jamais.

On ne pleure pas parfois pour le mal qu'on voit sous nos yeux ; parfois, nos larmes sont dues à un souvenir de notre propre vie qui se répète ou quasiment sous notre regard impuissant.

- Cela est, sans conteste, vrai.

- Donc, j'ai pleuré non pas parce que mon fils est mort dans les mêmes situations que ton ami Karim...

Elle n'avait pas terminé sa phrase. Je me sentis coupable de son mal et j'avais honte, oui, sincèrement. Elle reprit sa phrase et poursuivit.

- J'ai pleuré non pas parce que mon fils est mort dans les mêmes situations que ton ami Karim, mais parce que sa petite sœur, ma fille, vient de sauver une vie. Je l'ai appelée et lui avais demandée de me rejoindre à l'hôpital sur le champ quand j'ai appris que tu avais le même groupe sanguin qu'elle et que tu étais dans le besoin pour ta survie. Elle se dépêcha sur les lieux et nous avions assuré le reste.

- Oh désolé Madame, je ne savais pas que votre fils est mort. Je m'excuse vraiment du fond du cœur.

- Non, tu n'as pas à t'excuser, tu n'y es pour rien. Mon fils est mort il y a à peine quelques mois et ici même, sous mes yeux impuissants.

- J'aimerais voir votre fille pour la remercier. Je lui en suis vraiment reconnaissant, et je ne saurai jamais comment lui rendre la monnaie.

- Non, ne t'en fais pas Salim, c'est son devoir. Elle l'aurait fait si son frère avait le même groupe sanguin qu'elle. C'est ainsi la Loi Divine.

- Je peux la voir si elle est là ?

- Oui bien sûr, elle était juste partie acheter quelque chose. Un instant je l'appelle. Je reviens avec elle.

Et elle ressortit à nouveau. Quelques minutes plus tard, elle rentra en premier et s'en suivit sa fille.

- Elle est là, me dit l'infirmière.

Mon Dieu !

Saly m'avait sauvé la vie.

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