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Chapitre 12

Chan avait malheureusement repris la routine après sa petite journée de détente et patrouillait actuellement avec Hyunjin. Ils avaient essuyé une attaque la veille et ils partaient à la recherche des potentiels disparus.

Le froid était de plus en plus mordant, décembre se rapprochait à grand pas et bouger après une courte nuit immobile devenait de plus en plus difficile. Les membres paralysés, les extrémités gelées et les reniflements incessants les attendaient chaque matin aux premières lueurs de l'aube.

La vapeur s'échappait de leurs lèvres malgré le tissu qui les couvraient jusqu'au nez, la terre gelée crissait sous leurs bottes et leurs doigts étaient crispés autour de la crosse et du canon de leur armé plaquée contre le torse.

Il n'y avait pas âme qui vive dans les environs et les deux hommes commencèrent à remettre en cause l'utilité de cette patrouille. Ils s'apprêtaient à faire demi tour quand Chan aperçut une silhouette au fond d'une cuvette face à eux.

- Hyunjin attend... Il y a quelqu'un en bas...

- T'es sûr que c'est un de nos soldats ?

- C'est ce qu'on va découvrir...

Chan commença la descente en essayant de ne pas glisser sur les feuilles afin d'éviter de se retrouver à dévaler la pente d'un coup. Les deux hommes étaient sur leurs gardes, ils pouvaient très bien s'agir d'un soldat ennemi prêt à leur tirer dessus.

Plus ils se rapprochaient, plus la silhouette se faisait détaillée. L'homme était contre un arbre et semblait inconscient, tout danger était donc écarté pour le moment. Et puis le visage se dessina un peu plus et Chan eut comme un petit voyant qui s'alluma dans sa tête.

- Changbin ?

- Qui ?

- C'est Changbin... !

- Chan attend !

Le brun s'était presque précipité vers le corps du noiraud, laissant son cadet derrière plus que perplexe. Chan tomba presque à genoux aux côtés de Changbin et vérifia directement son pouls. Par chance, il respirait encore, mais du sang à moitié coagulé tâchait son pantalon et il semblait gelé. Chan tira le tissu qui couvrait le bas de son visage et découvrit que ses lèvres avaient pris une teinte bleue et que ses joues étaient encore plus pâles que d'habitude.

- Hyunjin vient m'aider à le réchauffer, il doit être en hypothermie depuis le temps qu'il est là.

Ledit Hyunjin poussa un long soupir et s'approcha tout de même car Chan en plus d'être son ami, était son supérieur. Il se glissa contre l'arbre pour se coller au soldat nord-coréen pour essayer de le réchauffer un minimum. Le brun quant à lui, avait eu l'intelligence d'acheter des petites bouillottes de poches lors de son escapade en ville et il les sortit de ses poches avant de craquer la petite pastille.

Il attendit qu'elles se réchauffent avant d'en mettre une dans le cou de Changbin et fit glisser la seconde dans son haut. Il ne restait plus qu'à espérer que cela suffise et qu'il se réveille rapidement. En attendant, il fallait s'occuper de sa jambe.

Chan prit son couteau qu'il avait toujours sur lui et déchira un peu le treillis pour avoir une vue sur la plaie. Ce n'était pas très beau à voir, sûrement une grenade au vu des marques de brûlures et des petits éclats sur sa cuisse.

La mâchoire crispée et les sourcils froncés, le brun commença par nettoyer la plaie avec l'eau de sa gourde et retira un maximum de petits morceaux. Hyunjin à côté avait les yeux perdus dans le vague, en train de réfléchir à pourquoi son ami se donnait tant de mal pour ce soldat qui avait anciennement leur prisonnier. Mais il savait que Chan ignorerait toutes ses questions jusqu'à ce qu'ils soient rentrés au camp.

Avec le vieux tissu blanc sale qu'il arborait toujours à son bras lors des patrouilles, Chan en fit un bandage improvisé en le nouant autour de la cuisse du noiraud, faisant attention à ne pas trop serrer, le but n'étant de ne pas lui faire un garrot.

Les deux hommes patientèrent de longues minutes avant que le noiraud ne daigne ouvrir les yeux. Aucun mot n'avait été prononcé et ils s'étaient contentés de se perdre dans les méandres de leurs pensées, à la conquête d'Utopia.

Et enfin, il y eut un signe de vie de la part de Changbin. Il commençait à peine à émerger, ses joues avaient repris quelques couleurs, mais il semblait toujours frigorifier. Ses yeux ne manquèrent pas de s'écarquiller quand il remarqua les deux soldats sud-coréens à ses côtés et il se redressa peut-être un peu trop brusquement.

Chan sortit de ses pensées en le voyant bouger et il fit à Hyunjin qu'il pouvait se lever pour aller se réchauffer et qu'il s'occupait de tout à présent. Le plus grand ne se fit pas prier et les laissa tous les deux tranquilles.

- Qu'est-ce que vous faites là... ?

- On patrouillait et on t'as vu inconscient alors on est venu t'aider... Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Changbin fronça les sourcils, tentant de remettre tous les éléments à leur place pour avoir un récit un minimum construit, tout était tellement brouillon dans sa tête.

- C'était pendant l'attaque de la veille... Je m'étais un peu éloigné mais des soldats ont crû que je voulais les contourner pour attaquer votre camp alors ils m'ont pris en chasse. J'ai réussi à leur échapper mais pas à leur grenade... Ils ont dû me croire mort...

- J'ai bien crû que tu l'étais aussi vu dans quel état on t'as trouvé... Comment t'es arrivé là ?

- C'est un peu plus flou... J'ai dû perdre l'équilibre et dévaler dans cette cuvette et sûrement me cogner quelque part...

- Bon... Le principal c'est que tu sois en vie maintenant...

- Merci... Mais t'as pas peur que ton camarade se pose des questions ? T'es encore plus imprudent que moi !

- Je te soigne et je me fais gronder... Mais Hyunjin sait tenir sa langue quand il faut tu n'as pas à te soucier de lui. T'as un moyen de contacter quelqu'un ?

Changbin regarda autour de lui et lui montra son matériel de communication réduit en miettes à cause de tout ce qu'il avait subi. Il n'y avait donc aucun moyen pour le Nord-Coréen de contacter un potentiel ami pour se sortir de là.

- Bon... Tu connais la fréquence radio d'un des soldats ? Je vais essayer de m'y connecter pour le contacter.

Chan suivit toutes les directives et réussit à joindre un certain Yang Jeongin. Il ne déclina pas son identité mais précisa le lieux et l'état du noiraud avant de couper la communication assez rapidement après avoir eu la confirmation du jeune soldat. Il voulait réduire le plus possible le risque d'être pisté. Il décrocha ensuite un feu de détresse à sa ceinture et l'alluma avant de planter le bâton dans le sol.

Une épaisse fumée rougeâtre s'éleva dans l'air, signalant la position de Changbin, Chan ayant pris soin de prévenir son propre camp que c'était normal pour éviter de rameuter tout le monde ici et sortit une dernière chose d'une de ses poches. C'était un vieux portable à clapet, complètement démodé mais toujours fonctionnel et il le glissa dans les mains du noiraud.

- Si tu veux me contacter, ça sera plus facile et personne ne s'attend à voir une telle antiquité... Mon numéro est déjà dedans...

- Merci... Mais... Pourquoi tu fais tout ça pour moi ?

- Bonne question... J'ai bien une petite idée mais...

- Chan ! On devrait y aller maintenant !

- J'arrive !

Le brun adressa un dernier sourire à son cadet avant d'être pris d'une soudaine envie et de déposer furtivement ses lèvres au coin des siennes et de se relever pour rejoindre son coéquipier qui s'impatientait plus loin.

Le contact, aussi infime soit-il, avait réussi à redonner de belles couleurs aux joues de Changbin, la menace de l'hypothermie n'était plus qu'un lointain souvenir contre la chaleur qui irradiait son visage.

Changbin :
Je veux partir Chan... Je veux quitter ce pays de merde... S'est ça mon rêve. 

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