18- L'armistice ou le livre de la bête -II-

Partie seconde
« Je crois qu'en tout homme, il y'a un autre homme. Un conspirateur, un rusé »
Stéphan king
N A: On est passé du vert au rouge. J'espère que vous voyez les problèmes arriver ...
Omniscient
Deux jours étaient maintenant passés depuis que Khadijah avait rejoint sa belle-famille. Entre ce mari qu'elle ne reconnaissait plus, sa belle-mère qui ne ratait pas une occasion pour la rabaisser plus bas que terre, et finalement Ibrahima Ndao qui l'ignorait comme ignorerait un courant d'air croisant notre chemin, la nouvelle mariée se sentait étouffer dans cette demeure.
Ce matin-là, sans aviser qui que ce soit, elle décida donc d'aller rendre visite à Nour. D'abord pour décompresser, et ensuite pour honorer sa promesse de découvrir la véritable identité derrière cette femme qui disait liée à sa meilleure amie par les liens du sang. Bien sûr, cet acte irresponsable serait cher payé. Mais les conséquences, elle y penserait tantôt. Pour l'heure, elle voulait juste se scier une brèche dans les barreaux de sa cage dorée.
Il était midi tapante lorsqu'elle arriva enfin à la villa saarène, conduite par un chauffeur privé, bien chaussée, bien habillée, mais surtout l'air épanouie.
Elle avait vêtu son masque, celui qui était indispensable à la vie en société. Non pas ce morceau de tissu qui nous protégeait des infections. Non! Ce masque-ci était un sourire « siliconé », une voix faussement enjouée, des yeux vidés de toutes larmes et de la confiance en soi qu'on feignait. Ce masque excluait tout sentiment, toute sensibilité. Ce masque-là servait à camoufler les âmes brisées.
Son arrivée magistrale coïncida avec le retour de Nour Sadiyah Sarr d'un énième entretient raté. Fauchée comme une gueuse, elle avait du se résoudre à rentrer en car rapide, décor qui contrastait beaucoup avec son élégant tailleur crème. Pire encore, en plus de l'omniprésence d'un sentiment d'échec, elle devait aussi gérer les regards indiscrets. Quoi ? Depuis ce fameux gala pour l'autisme, elle était devenue une véritable vedette de la presse people. Mais toute publicité n'est pas bonne à prendre. Il y'a une réelle différence entre « notoriété » et « célébrité ». Et comme pour empirer les choses, quand l'apprenti vint lui demander de verser le prix de son trajet, elle se rendit compte en plongeant sa main dans son porte-feuille qu'il ne contenait plus qu'une pièce de cent francs, une carte d'identité et des tickets de caisse. Ce qui n'étais visiblement pas assez! Heureusement qu'il y'eu cette vielle dame qui compléta la somme sans rechigner, ni se demander pourquoi la fiancée de Mr Aïdara Fils n'avait pas de quoi payer. Comme quoi, au pays de la teranga, il y'avait toujours un cœur désintéressé pour vous tirer de ce genre d'emmerdes.
Khadijah vint directement la prendre dans ses bras et lui faire la bise. Nour n'était pas vraiment d'humeur mais ne fit rien qui pu offenser son amie.
- Tu as une sale mine toi, releva Khadijah. Tu as eu un nouvel accrochage avec Chemsseddine ?
- Non, non, répondit-elle en secouant la tête. Je sors d'un entretien. Depuis l'histoire de l'article, c'est d'autant plus difficile pour moi de trouver un boulot, continua-t-elle honteuse. Mais ce n'est rien, Dieu est grand ! Et toi, comment vas-tu ?
Khadijah fit un tour complet sur elle-même en souriant :
- Bien sûr que je vais bien ! As-tu vu à quel point je suis radieuse?! Je crois que le mariage m'a embelli. Tu trouves pas ?
Bizarrement, le cœur de Nour Sadiyah se serra.
- Oui ... euh, tu viens de revenir à Dakar non ? Tu aurais du prendre des jours de repos supplémentaires.
- Je t'avais promis de t'aider à enquêter sur ta famille. Eh bien voilà Inspecteur gadget pour te servir. * En la poussant vers le portail * Allez, rentrons ! Nous avons du pain sur la planche !
Nour ne lui parlerait pas de l'accord qu'elle avait conclu avec Chemsseddine, c'était décidé! Pourquoi devrait-Elle passer pour plus misérable qu'elle ne l'était déjà ?
En ce moment, sa vie s'ébranlait. Elle échouait tous ce qu'elle entreprenait. Elle voyait ses rêves s'envoler en fumée. Et bientôt elle serait enchaînée à un homme qu'elle haïssait.
Khadijah elle, avait une carrière prometteuse dans une très grande boîte, quoique dirigée par des corrupteurs. Elle avait épousé l'amour de sa vie qui même s'il était une enflure née, au moins semblait la rendre heureuse. A l'issu de cette comparaison, Nour se demanda à quelle moment elle avait perdu le contrôle de sa vie.
Nos amis ne sont pas parfaits, mais les vouloir irréprochables ne ferait-il pas de nous des monstres d'égoïsme? Nous aussi succombons aux sept péchés capitaux, nous aussi succombons à l'envie. Nous jalousons leur bonheur, leurs réussites. En vérité, ce n'est pas que nous soyons fondamentalement mauvais. Au contraire, nous craignons juste que si nous nous plantons partout où leur belle étoile éteincelle, alors nos amis nous glisseront des doigts.
*
- Alors quel est ton plan ? Interrogea Nour assise en tailleur sur son lit.
- Bon, ton père risque de s'énerver si tu lui poses des questions aussi intimes sur ta mère. Le reste de ta famille a les idées tellement arrêtées qu'ils n'ont pas pris le temps de s'intéresser à la vie d'une bijoutière. Il nous reste donc qu'une seule issue!
- Laquelle? s'enquit Nour.
Sans répondre, Khadijah hurla le nom de Mactar qui débarqua aussitôt dans la chambre, l'air ennuyé.
- Quoi ? Pourquoi cries-tu comme si nous étions dans une jungle ? Tu n'as donc aucune civilisation ? Lança ce dernier, toujours obligé de chambrer Khadijah Aw.
- Oh là! Cesses le bavardage et rends toi un peu utile pour une fois. Appelle ta mère, ordonna-t-elle.
- Pourquoi ? Qu'as-tu à lui dire ? Tu crois que c'est ta copine ? La provoqua-t-il.
Nour qui en avait par-dessus la tête de leurs chamailleries vint s'interposer.
- Mactar, ignore ses gamineries s'il te plaît! C'est important pour moi alors fais ce qu'elle te dis. En tous cas, ça m'aiderait énormément, le pria-t-elle.
Le petit génie de l'informatique ne comprenait rien à ce qui se tramait. Ces deux-là mijotaient toujours quelque chose d'étrange. Toutefois, comme l'affaire avait l'air de tenir à cœur sa cousine, il décida d'obéir sans trop poser de question.
Il vint s'asseoir au pied du lit, releva sa tête en arrière pour plonger son regard dans celui de Nour l'air de dire « Est-ce que tout vas bien ? ». Comme cet échange visuel faisait sottement accélérer son rythme cardiaque, il ramena vite ses yeux vers son smartphone et composa le numéro de Tante Mariétou.
- Hey mum ! Comment vas-tu ? Et Papa ? Entama-t-il comme tout être civilisé.
- Don't call me mum ! ( Ne m'appelle pas mère!) Pourquoi, vous jeunes gens, êtes vous toujours irresponsables? Réprimanda sévèrement Tante Marietou. Ou ne peut t-on pas vous laisser deux minutes sans surveillance sans que vous ne mettiez tout sens dessus dessous?
- Maman, pourquoi es-tu si contrariée ?
- La question est pourtant vite répondue. Non, elle ne mérite même pas d'être posée! Mon fils, j'avais laissé Nour sous ta responsabilité pour que tu sois son support, son conseiller, son grand-frère. Et qu'est-il advenu d'elle ? Voilà qu'elle a de nouveau sa tête placardée sur tous les écrans. Alors oui Mactar, je suis très en colère contre toi. Mais celle qui m'as causé le plus de peine, c'est bien Nour Sadiyah elle-même. Ces histoires hurluberlues qui circulent sur son sujet, ces prétendues fiançailles avec Mr Aïdara, tout ça, je le vis comme un échec cuisant ! Aïcha n'espérait que sur moi pour prendre soin de sa fille... Dis-lui Mactar, si tu ne lui transmet pas mon message (...)
- Ma tante, parles moi de vive voix : je t'entends, répondit Nour. Tu n'as rien à te reprocher, s'il ne s'agissait que de toi, ma défunte mère reposerait en paix. Néanmoins, ne me condamne pas non plus aussi durement alors que tu ne sais de l'histoire que les propos fallacieux* que les médias ont bien voulu transmettre.
- Je n'en ai cure de savoir ce qui est vrai ou ne l'est pas, Nour. Je t'avais prévenu de ce qui t'attendrait en t'engageant dans cette guerre contre cette famille opulente. Sourde, aveugle, décérébrée, tu as nié les paroles de ton aînée et brandi ta plume comme on brandirait une arme. Vois comment les mots se sont retournés contre toi. Mais tout cela c'est fini, j'ai déjà réservé mon billet pour Dakar, je te ramène aux USA.
« Tout cela sera fini ». Cela se voyait que sa tante ignorait qu'elle avait signé un pacte avec le Diable . Et pour qu'elle respecte sa part du marché, il la traquerait sous tout les cieux.
- Ma tante, je ne retournai pas en Californie. Déclina-t-elle, catégorique.
- Et pourquoi ça ?manqua-t-elle de s'étouffer. Plus rien ne te retient au Sénégal. Tu n'as plus de boulot, plus de famille, si ce n'est ton frère et cette association de vautours dépourvus d'empathie. Où es-tu assez naïve pour croire que l'héritier de la famille Aïdara va vraiment t'épouser au bout d'une valse ?
- Ma tante s'il te plait, n'insiste pas, je peux pas laisser Djibril seul ici. Et puis je ne t'ai pas appelé pour parler de ça !expliqua t-elle en éludant gracieusement la dernière question de Mariétou Sarr.
- Récemment, elle a reçu l'appel d'une femme disant connaître feu Ta Aïcha, et comme vous étiez proche d'elle, nous voulions vous demandez si vous connaissiez une certaine Fatou kiné Agne, continua Khadijah.
- Lâne? Quoi? Quel misérable nom viens-tu de prononcer ?Ah il fallait bien qu'elle débarque maintenant! s'offusqua tante Mariétou. Nour, reste loin de cette bonne femme. Bloque son numéro d'ailleurs, elle ne t'apportera que des problèmes !
Marietou Sarr semblait surprise, inquiète et dépassée par la situation. Mais son interdiction stricte montrait bien que cette dame ne lui était pas étrangère.
- Alors tu la connais ! Soupira Nour. Elle m'a dis que c'était la soeur de ma mère, j'ai une chance inestimable de renouer contact avec sa famille...
- Oh, ne te fais pas de fausse joie, Nour. Cela n'arrivera, en tous cas pas moi vivante ! Ces gens-là ne sont pas biens intentionnés, je ne les laisserai pas te berner. Gni nga yakaar souniou bakhone yakh sa rak dji di ngene toumranké nii ? (Crois-tu que dans le cas contraire ton frère et toi passeriez pas des momentsaussi dures sans qu'ils ne vous aident?) Ta mère n'a fait qu'une « erreur », si l'on peut appeler ça ainsi et cette prétendue famille l'a rayée de leur vie, impitoyable.
- Peut être qu'ils ont des regrets... supposa Khadijah.
- Des regrets ? S'indigna Tante Marietou. Aux funérailles d'Aïchatou, pas un seul d'entre eux n'a posé un pied au cimetière. Ils n'ont jamais chercher à connaître Nour qui est pourtant de leur sang!
- Mais ça se trouve, ils n'étaient pas au courant de tous ces événements comme ils avaient coupé les ponts avec Tante Aïcha!
- Fi ci mim rew, Lo beugg kham khamko. (Dans ce pays tout se sait.) Tu vas pas me dire que quand le problème de ma nièce avec la famille Aïdara a fait le tour du Sénégal, il n'en ont pas eu échos. Maintenant qu'il y'a cette rumeur de fiançailles avec riche héritier, tout d'un coup, il n'est plus difficile de retrouver les gens qu'ils avaient abandonné à leur sort !
Nour était mitigée. Il est vrai que les arguments de Tante Mariétou semblaient irréfutables. Cependant, elle ne voulait pas rater l'occasion, sûrement unique, d'en découvrir plus sur le passé de sa mère. L'apparition soudaine de cette tante maternelle lui avait fait prendre conscience qu'elle ignorait encore beaucoup de chose sur son compte. A vrai dire c'était une femme très discrète et qui n'aimait pas s'épancher sans réserve. De plus, en rachetant les locaux de sa bijouterie, Chemsseddine avait fait disparaître le plus grand vestige de la courte existence de sa mère.
Tout le long de l'appel, Marietou Sarr avait essayé tant bien que mal de convaincre sa nièce de retourner vivre avec elle et de rompre tout contact avec Fatou Kiné Agne. Elle avait très peur que ce climat de toxicité finisse par mener sa petite protégée à bout.
-Moi je pense que tu devrais aller voir la sœur de ta mère d'abord et ensuite te faire ton propre avis, conseilla Khadijah une fois que l'appel téléphonique prit fin.
- Un jour, ma cousine finira au fond d'un puit et ce sera exclusivement à cause de tes conseils à la noix ! S'énerva Mactar. N'as-tu pas entendu tout ce que ma mère vient de dire ? Cette Fatou Kiné est une opportuniste. Et une fois qu'elle se rendra compte que les fiançailles avec le roi des tocard, j'ai nommé Chemsseddine Aïdara ne reposent que sur du vent, elle prendra ses jambes à son cou.
Ces éternels chien et chat continuèrent à se quereller de façon à ce qu'ils ne remarquèrent même pas que leur amie était désormais absorbée part tout autre chose. Nour Sadiyah Sarr venait de recevoir message, qui comme les trompettes de l'apocalypse sonnait l'heure fatidique : « Le moment est venu de payer ta dette. Comme je vois que tu n'es pas disposée à tenir ta promesse, je t'attends devant chez toi. Vois cela comme une aubaine que je ne sois pas directement passé aux sanctions. Descends avant que je ne m'impatiente. ».
Il ne s'agissait pas d'un contact pré-enregistré mais nul besoin d'être le génie de la lampe pour savoir de qui ceci provenait.
Nour appliqua des techniques de respiration et d'inspiration pour se calmer le temps de trouver une « solution-miracle ». Par l'intermédiaire de Mlle Arane Sall, elle avait reçu un mail détaillé expliquant l'adresse de Chemsseddine Aïdara en début de semaine. Nour était bien consciente que son « promis » avait une idée sournoise derrière la tête et que si elle plongeait yeux et tête baissée, elle se romprait le coup. (Ce qui est assez logique).
Elle avait donc essayé de reprendre contact avec son prétendu « sauveur » qui normalement devait avoir un plan pour la hisser hors de ce merdier. L'ange gardien en question ne prit aucun de ses appels, ni ne répondu à aucun de ses mails. Exédée, elle lui avait laissé un message assez agressif :
« Qu'avez-vous à snober mes appels à la fin ? Vous qui vous présentiez comme ma bonne fée, pensez vous pouvoir me plonger dans une situation aussi délicate et me laisser seule à mon sort ? Vous n'êtes pas sans savoir que si je commets une gaffe à la signature du contrat pouvant nous trahir, on trinquera tous les deux. Et vous connaissez la cruauté de votre cousin mieux que moi ! ». Même à ça, il ne donna pas suite. Pourquoi lui avoir laissé tous ses contacts pour ensuite se volatiliser ?
Elle décida se pendant de jouer la carte de la prudence et de ne pas revoir Chemsseddine sans l'aval d'Ibrahima Aïdara. D'ailleurs, elle comptait lui poser un lapin aujourd'hui en utilisant son entretient comme alibi. Ma foi, elle n'avait pas prévu qu'il se ramena dans son quartier.
« Peut-être que si je l'ignore, il s'en ira... » se persuada-t-elle naïvement.
Elle fit donc comme si de rien n'était et s'ajouta à la conversation de Mactar et Khadijah. Toutefois, elle n'avait pas l'esprit tranquille et ses doigts tremblaient légèrement.
*
Un quart d'heure ainsi passa. Alors que le rythme cardiaque de Nour Sadiyah commençait à se refaire régulier, un raffut comme il n'y en avait pas eu depuis belle lurette à la villa Saarène se déclara. On distinguait bien la voix de Tante Sokhna et de Tante Nafi. À chaque fois que ces deux-là se réunissaient, c'était signe de mauvais présage. Après tout, toutes les rumeurs de la cité naissaient, mûrissaient et mourraient sur leurs lèvres.
Les jeunes gens rejoignirent la cour pour savoir de qui le linge sale serait aujourd'hui exposé :
- Mais Khadijah que fais-tu là ? Et ton ménage ? Et ta belle-famille ? S'enquit Tante Sokhna dès qu'elle aperçu sa fille aux côtés de cette « enfant du pêché* ».
- Et toi, d'où viens-tu aussi essoufflée ? On dirait que tu as couru jusqu'ici! s'étonna Khadijah. Et cette bassine vide, décharge-la un peu de ta tête.
Tante Sokhna abandonna l'objet sur le sol et ramena ses mains au dessus de sa tête.
- Alors ce qui se dit est donc vrai ? Nour va réellement épouser un milliardaire ! Thiey Yallah meuneu djay nit deug deug. (Quel étrange destin pour une « sang mélée » ! Releva Tante Sokhna en faisant de grands gestes et en écarquillant grand les yeux comme si elle espèrerait que le vent en soufflant dedans la réveille de ce rêve des plus fantaisistes.
- Toi aussi vas-tu croire tout ce que ces calomniateurs de journalistes écrivent ? Cette photo où l'on voit Mr Aïdara Fils en compagnie de Nour, le jeune homme dans son altruisme légendaire voulait juste montrer qu'il n'éprouvait aucun égo à se mélanger aux gens de classe sociale différente, spécula Nafissatou Sarr avec tant de vigueur qu'on aurait cru qu'elle avait assisté à la scène où pris connaissance des états d'âme de Chemsseddine à travers de la télépathie.
Puis elle continua sur le même ton sarcastique :
- Tu l'as dit toi-même ! Ne serait-ce pas étrange qu'une fille de bijoutière puisse finir avec l'héritier d'une famille aussi noble et respectée. Jamais ! Même pour cirer leurs chaussures, on ne l'y embaucherait pas.
- Non ! Non !Non ! Je sais bien de quoi je parle, rétorqua la mère de Khadijah catégorique. Figure-toi, Nafissatou, que j'étais sorti faire le tour du pâté de maison pour trouver de l'eau, et comme la pressions toujours était meilleure ici, je suis venue chez vous . J'ai vu garé en face de la maison un des ces bolides ! Une telle carrosserie, il n'en roule pas deux sur les routes mal goudronnées du Sénégal. Lorsque je suis passée devant, eh bien, le chauffeur a baissé la vitre. Il m'a demandé si je vivais là et si je pouvais demander à Nour de descendre car son patron l'attendait avec impatience.
- Bon sang, ça ne prouve rien ! s'énerve Tante Nafi.
- Mais attends un peu que je développe, souffla l'autre commère. En jetant un coup d'œil à l'arrière du véhicule, j'ai pu reconnaître Mr Aïdara fils, lui-même !
- Il... Il est toujours là bas ? Balbutia Nour Sadiyah.
- Ayoo*ma fille, vas vite le rejoindre ! Les petits du quartier s'agrippent à sa voiture de sport tandis que les adolescents la mitraillent de clichés photographiques. Les vielles peaux, sont perchées sur leur balcon à la recherche de nouveaux commérages. Le pauvre, poli comme il est, il se contente de leur sourire à tous malgré que gêné, confia Tante Sokhna à Nour, le regard maternel.
C'est comme ça au pays de la teranga. L'enfant qui échoue et apporte la honte n'est que celui de sa mère, et même le père peut dès lors s'en laver les mains.
L'enfant qui réussit et apporte la gloire dans le foyer est l'enfant de tout le monde, même de la rue.
Nour Sadiyah voulu gerber devant autant d'hypocrisie mais elle avait d'autres besognes plus urgentes comme son « fiancé » qui l'attendait en héro dans son véhicule hors de prix.
Elle retourna dans sa chambre, fouilla dans ses anciennes affaires d'école et en sorti un cutter qu'elle camoufla ensuite dans une poche de son tailleur.
Dès que Nour eu franchi le portail, les curieux se dispersèrent. Premièrement, parce qu'elle était réputée « non fréquentable ». Secundo, le regard plein de colère et froideur qu'elle avait en moment là , était pire que dissuasif.
Il ne restait plus alors dans la ruelle qu'un groupe de jeune garçon jouant au foot au loin.
Belle, élégante surs ses hauts talons, ses mèches volant au vent, elle s'avança jusqu'à la petite merveille tout droit sortie du salon de l'automobile. Elle offrit à Chemsseddine, qui la dévidageait depuis son fauteuil de cuir, un sourire criminel avant de dégainer son arme blanche.
Un grincement et le cœur de Chemsseddine fit un triple salto-arrière.
Nour Sadiyah venait de faire une large rayure sur son pare-chocs avant. Noireau qui faisait office de chauffeur lui-même, ne pu réfréner un cri d'étonnement. Nour trouva qu'elle n'en avait pas assez fait. Elle s'accroupit jusqu'aux niveaux des roues qu'elle entreprit de crever.
Chemsseddine Aïdara quitta la véhicule en claquant la portière. Fort heureusement, Il retint la main de la jeune fille à temps. Nour secoua son poignet énergiquement et se défit de son étreinte. Puis se releva-t-elle pour faire face à son promis. Chemsseddine Aïdara retira ses lunettes de soleils pour la soumettre à son regard stricte et mécontent avant de saisir le cutter et l'envoyer valser contre le sol.
- Pauvre demeurée ! Veux-tu que je rajoute le prix de cette voiture à la tonne de dommages et intérêts que tu me dois ? Alors tu n'auras pas fini de payer même dans l'après tombe. Et puis aies un peu de jugeote !
Il la prit par les épaules et l'orienta vers le balcon de la villa Saarène où Tante Sokhna, Nafissatou Sarr et Khadijah l'observaient.
- Tous tes faits et gestes sont scrutés, et il ne s'agit pas seulement d'elles. Tes voisins eux aussi, lorgnent sûrement dans un coin. A partir du moment où ton image est associée à la mienne, l'anonymat est le seul luxe auquel tu n'as plus droit. La fiancée de Chemsseddine Aïdara ne peut pas se permettre de faire des scènes.
- Foutez moi la paix, vous n'aviez qu'à ne pas vous ramener ici ! D'abord vous me faites suivre, ensuite vous me pistez depuis chez moi. C'est du harcèlement bon sang ! S'énerva Nour.
- Que cela soit bien clair, je n'aurais pas fait le déplacement si tu avais respecté ta part du marché. Maintenant ne fais pas d'histoire et monte dans la voiture. Je suis déjà assez sur les nerfs à cause de la saloperie que tu as faite à ma caisse.
- Chemsseddine... Vous avez fixé l'heure du rendez-vous dans l'après-midi. Il est actuellement 13h30. Je me suis donc pas en retard alors veuillez baisser d'un ton !
- Je considère que dès que l'horloge n'affiche plus midi , nous sommes dans l'après-midi. Alors selon mes standards, tu souffres d'un sérieux manque de ponctualité. Par contre, je suis ravi de voir que tu connais mon prénom.
En effet, c'était la première fois qu'elle l'interpellait sans utiliser « Monsieur Aïdara » ou chose semblable.
- Bien sûr que je le connais, c'est juste qu'il est une souillure à bouche.
Une souillure ? Comme il l'a trouvait incroyablement sotte de penser cela de son merveilleux nom qui voulait dire « soleil de la religion », il ne s'en offusqua guère. À la place, il laissa échapper un rictus.
- Pense ce que tu veux. Cela n'a pas grand impact dans ma vie. L'important c'est que tu montes dans cette voiture et ça au plus vite! ordonna-t-il.
Nour le dévisagea de façon insolente avant de se plier à sa volonté. Il n'y avait pas d'autre choix raisonnable à faire. Chemsseddine lui ouvrit la portière et plaça sa main en haut de celle-ci pour la protéger des UV.
Nour était exaspérée, pourquoi jouer au gentlemen lorsqu'on était un porc sans cœur ?
En grimpant dans la voiture de sport elle frôla donc sa main et le vent vont porter à elle son odeur à la fois douce, agréable et virile.
Nul ne sait comment et pourquoi Mactar avait à ce moment-là débarqué en furie, tel un preux chevalier pour sauver sa cousine de son ravisseur. Sûrement ne savait-il pas que cette demoiselle-là avait elle-même consentie à subir sa détresse. L'informaticien attrapa Nour par le poignet et la tira en arrière.
Chemsseddine roula des yeux excédé. Il avait l'impression que le monde tout entier complotait pour lui faire vainement perdre son temps. Encore une fois, son dernier nerfs allait bientôt lâcher.
- Où croyez vous l'amenez comme, sale lunatique ? Questionna un Mactar des plus colériques.
- T'es qui toi ? répondit Chemsseddine en le dévisageant. Vas jouer plus loin gamin et lâche un peu sa main !
- Vous avez beau être pété de tune, et intoxiquer tous les médias avec vos fiançailles qui n'existent que dans vos songes malsains, cela ne changera rien à la réalité : Nour vous emmerde! Allez donc vous trouvez une femme de substitution avant je ne vous refasse le portrait ! Menaça Mactar avec un air de défi dans les yeux. Il ramena ensuite la jeune fille derrière lui en lui disant : « Nour, on retourne à l'intérieur. ».
Cette dernière ne savait plus où se mettre. Certes, cela la touchait beaucoup que Mactar tienne à ce point à la protéger, mais il ne faisait que se couvrir de ridicule. En effet, peut on sauver quelqu'un qui a précipité sa propre perte ? De plus, elle craignait que la situation ne dérape entre les deux hommes.
- Mactar, je ... avait elle alors tenté d'expliquer pour qui ne s'attire pas inutilement les foudres de son « fiancé. Mais un cœur qui aime devient têtu.
- Je sais qu'il a essayé de t'intimider pour que tu le suives, mais si tu baisses ta garde juste une fois, alors se sera la fin. Tu t'es trop battue pour abandonner. Tu as une épaule sur laquelle te reposer. Je ne laisserai personne te faire du mal !
Les paroles de Mactar lui redonnait du baume au cœur. Cette dévotion sans faille lui filait la chair de poule et elle s'en voulu même d'avoir baissé les bras.
- Arane m'a parlé d'un couillon désespéré qui ne cesse de te tourner autour. Ne serait-ce pas lui ? Demanda Chemsseddine à Nour d'un ton moqueur, de façon à ce que Mactar se sente méprisé.
- Espèce de bâtard! souffla le jeune homme entre ses dents. Dominé par une pulsion , il lui donna un coup à la mâchoire. Noireau courru s'interposer entre les deux mais Chemsseddine avait définitivement perdu son sang froid.
Le body guard se retrouva propulsé en arrière, près de Nour qui elle n'en croyant pas ses yeux, semblait pétrifiée. Les spectatrices quittèrent leur loge surélevée ( Khadijah et les vielles pipelettes), paniquées.
Mactar voulu porter un deuxième coup mais Chemsseddine retint son bras, le tordit et le poussa contre le mur de façon à ce que sa tête se heurta quelque peu violemment. Ensuite lui jeta un regard hautain, insultant, limite déshumanisant. Mactar lui cracha à la face, il n'éprouvait aucune peur face à lui, et pour le bien-être de Nour, il aurait cogné avait plaisir encore soixante et onze fois l'amas de brique. Ou plus. Du moins jusqu'à ce que son crâne cède.
La mâchoire de Chemsseddine se serra davantage quand il s'aperçut que Nour avait les larmes aux yeux et grimaçait de douleur par procuration.
Maintenant il croyait fermement en son hypothèse, cette fille était tout ce qu'il y'avait de plus hypocrite et de plus chiant. Il fut tenté de recommencer pour savoir si elle s'évanouirait, ou en mourrait - ce qu'il pour lui serait une aubaine pour toute la création – comme elle aimait feindre l'hypersensibilité et la bonté.
La réalité était pourtant tout autre, la jeune sérére avait le cœur meurtrie. Depuis l'enfance, Mactar et elle se vouaient beaucoup d'affection. Tous ce qui affectait l'un, affligeait l'autre. Elle ne pouvait plus supporter qu'il souffre pour elle. Elle ne le méritait pas...
- Chemsseddine, je t'en prie lâche-le !
Sourd face à sa prière, il tint Mactar plus fermement par le col. C'était certes un robuste gaillard, mais Chemsseddine avait plus de technique comme il avait pratiqué des années de boxe thaï durant son séjour à Dubaï.
Nour posa sa main sur sa large épaule pour attirer son attention. Le titan quasi-rouge de colère resta aussitôt statique. Des vaines saillantes se dessinait sur ses avant-bras couleur ambre.
- Je t'en supplie arrête. Je vais venir avec toi, c'est ce que tu veux non ? Laisse-le , ce que tu fais ne rime à rien ! Insista t-elle à nouveau.
Vu qu' il ne voulait pas paraître comme un personnage antipathique face à sa future belle-famille, il se rétracta. Sorti le mouchoir qui ornait la poche de son costume et essaya son visage avec. Ensuite, il fit un signe de tête à Tante Nafissatou ainsi qu'à la mère de Khadijah suivi d'un faible « salam ».
- Je t'attends dans la voiture, lança t-il à l'égard de Nour. Celle-ci hocha faiblement la tête puis son fiancé s'éclipsa.
Elle ressentit une boule se former au fond de sa gorge. Elle n'osait plus croiser le regard de Mactar tant elle avait honte.
- Tu vas vraiment partir avec lui Nour ? Pourquoi ? Sa voix était faible. Sa question sonnait comme une plainte, elle résonnait de douleur, de déception, d'incompréhension. On aurait dit qu'on lui arrachait un bout de son âme. Ce qui empêchait sa terre à lui de craqueler, son ciel à lui de s'effondrer, ce qui faisait vibrer son cœur sous une plaisante harmonie, son porte bonheur c'était l'oiseau de mauvaise augure. C'était sa petite Nour Sadiyah.
- Qu'Est-ce qui t'as fait changer d'avis sur lui ? Demanda à son tour Khadijah, déboussolée.
- Eh bien, comme tu me l'a un jour appris : on finit tous par tomber dans la gueule du lion et alors on ne s'en échappe jamais.
Sur cette parole revêtu d'un voile de mystère, Nour Sadiyah s'en alla sans regarder en arrière.
*
Le temps dit-on est relatif. Pour Nour, le trajet sembla durer des heures. Elle était restée engouffrée au fond de son siège tout le long durant , tandis que lui, malgré qu'il fut en train de passer un appel urgent à son bureau ne cessait de l'observer du coin de l'œil. La jeune fille se mit admirer le bleu du ciel, le vol majestueux des oiseaux et à humer l'odeur de l'Alizée pour se défaire de la tension qui résultait de son regard fixe.
Les points de Chemsseddine étaient rougis par endroit, mais il semblait avoir décoléré. Ce qui n'était pas du tout le cas de Nour Sadiyah.
Elle lui en voulait follement. Pour qui se prenait-il? Comment osait-il lever la main sur Mactar? Après tout, il ne voulait que la tirer de ses griffes alors pourquoi
devrait -il en sortir blessé. En plus d'être un monstre sans empathie, il s'avérait être violent. Nour prit peur pour son avenir, bientôt ils seraient mariés, elle n'avait aucune envie de rejoindre la tristement longue liste de femme qui subissent des violences conjugales.
La carrosserie infernale prit la route des almadies. Elle s'arrêta devant une grande tour qui avec ses multiples baies vitrées ressemblait à un gigantesque iceberg de diamant aux facettes parfaitement polies, qui se dresserait fièrement au milieu de cette mer urbaine. La jeune fille n'en croyait pas ses yeux, tout autre sénégalais de la moyenne classe en aurait fait autant. À Dubaï, aux États-unis, ou autre part cette tour aurait paru anodine. Alors que son pays immergeait dans la misère comme aspiré par des sables mouvants, l'existence d'immeubles aussi prestigieux n'était-il pas un crachat à la face du peuple ?
Quand le pétrole et le gaz ont été découvert au Sénégal, Nour Sadiyah Sarr avait cru que ce serait l'aubaine qui sortirait sa nation du sous-développement. Voilà pourquoi elle avait décidé de suivre cette branche dans ses études, comme beaucoup de jeunes d'ailleurs. Cependant ce n'étaient que de faux espoirs, après le début de l'exploitation, les riches sont devenus encore plus riches et les pauvres de plus en plus misérable. Mais elle avait beau être écoeurée, l'histoire lui avait bien montré que l'argent était plus fort que le sens de la justice et l'équité.
La voiture se gara dans un parking où siégeaient déjà beaucoup de ses consœurs à valeur de centaines de millions CFA. Chemsseddine descendit et fit le tour pour lui ouvrir la portière, mais Nour dans puérile nature, se dépêcha de sortir avant qu'il n'aie le temps d'arriver à elle et se dirigea vers l'intérieur. On lui bloqua bien sûr le passage comme elle n'avait pas de carte à présenter.
L'homme souffla un grand coup pour se retenir de l'éventrer, puis fit un signe aux agents de sécurité, leur indiquant qu'elle était avec lui et qu'ils pouvaient donc la laisser entrer.
Cette fille lui donnerait sûrement de fil à retordre...
Nour Sadiyah Sarr :
Etage après étage, l'ascenseur aux parois en verre prenait de la hauteur, il semblait conduire jusqu'au toit du monde. Comme l'homme de main lui aussi était avec nous, je dus partager un espace serré avec Chemsseddine. Il était si près qu'il devait sûrement entendre ma respiration irrégulière et mon cœur battre à tout rompre...
Intérieurement je psalmodiais quelques versets. Dieu seul sait ce qui pourrait advenir de moi dans cet appartement, seule face à ces deux êtres malfaisants.
L'ascension achevée, Mr Aïdara ouvrit les portes de sa demeure à l'aide d'une carte munie d'une étrange technologie. Un bip sonore se fit d'abord entendre, ensuite se dressa devant nous un décor digne des penthouses de Manhattan. L'endroit était un nid de modernisme perché en hauteur, recouvert d'immenses baies vitrées garantissant une bonne luminosité. Aussi était-il d'une superficie considérable. Le sol était revêtu d'un parquet parfaitement ciré, les meubles quant à eux se caractérisaient par leur style minimaliste. Des escaliers en spirale donnaient sur une chambre à coucher et on apercevait une large terrasse aménagée en jardin avec une piscine intégrée. Il y'avait sûrement d'autres pièces grandioses mais c'était tout ce à quoi mon œil avait accès.
Malgré la décoration épurée, il émanait de cet appartement une certaine chaleur. Il embaumait d'une odeur de camomille, et de mente. Une touche propre qui rappelait son propriétaire. Ce n'était pas juste un tas de brique au sommet du monde, c'était aussi un foyer, une maison.
L'homme à l'accoutrement lugubre - J'ai cru entendre Chemsseddine l'interpeller à travers l'étrange acronyme de « Noireau »- décida de rester à l'extérieur pour monter la garde. Comme ceci était différent de tous ce que j'avais pu voir au paravant, j'étais moi aussi restée immobile tel un garde rouge, ne sachant ou mettre mes pieds. Chemsseddine saisit ma main – qui devait être présentement moite à cause de ma nervosité – pour me faire avancer. Je la retirai immédiatement, particulièrement outrée.
- Qui y'a-t-il ? Souffla-t-il. Je ne faisais que t'inviter à rentrer vu que tu restais béate d'admiration !
Tous mes gestes semblaient l'exaspérer. Tant mieux, c'est lui qui avait insisté pour m'avoir.
- Êtes-vous obligé de me toucher pour cela ? Pestai-je. Ne recommencez en aucune manière.
Il allait rétorquer quelque chose, sûrement allait-il me rappeler à quel point il me trouvait répulsive et chiante, et quoi encore ? Qu'avait-il dit de plus la dernière fois ? « Impulsive » et « sans aucune manière » ?
Contre toute attente, il se rétracta et contenta de ranger sa main dans sa poche.
- Peut importe... Attends-moi dans la salle de séjour. Ne touches à rien je te prie, je reviens tout de suite, Ordonna t-il. D'un signe de la tête, il m'indiqua la direction à prendre avant de s'éclipser.
Mes ancêtres séréres venez me secourir, pourquoi cet homme se montrait-il d'un coup aussi courtois ? Qu'avait- t-il à ne pas être méprisant et exécrable comme à l'accoutumée? Quel était le sens de cette hypocrisie après avoir passer à tabac mon très cher cousin sans retenue? Pourtant nous étions seuls, il n'avait plus besoin de jouer de rôle.
Cette histoire devenait de plus en plus flippante. Peut-être était il parti chercher un couteau dans sa cuisine pour m'immoler ?
Et si c'était un tueur en série à ses heures perdues ?
Je décidai d'obéir pour éventuellement contrer ses pulsions criminelles. A ma plus grande surprise, la salle de séjour n'était pas inoccupée. Une jeune fille aux cheveux bouclés, assise en face d'une caméra, un trépied, de lumières artificielles et d'une tonne de cosmétiques se filmait. Camille ? Mais qu'est-ce qu'elle fait ici ? Je ne savais pas que Chemsseddine était du genre à cohabiter avec sa famille.
- Bon...Bonjour, Ai-je hésité à l'interrompre.
Elle se retourna vers moi avec un sourire chaleureux. Sa chevelure virevoltaient au grès de ses mouvements et ses yeux noisettes brillaient d'une lueur très humaine. Thione Seck avait raison de dire que le mérou et la sardinelle avaient beau avoir la même mère, l'océan, ils n'avaient pas le même goût.
- Oh salut ! S'exclama-t-elle quelque peu surprise. Je ne savais pas que Chemssou aurait de la visite.
Camille se leva pour mettre la caméra en pause et par la même occasion, me serrer la main.
- Chemssou ? Ai-je répété,perplexe.
Elle me dévisagea quelques secondes avant de me sourire de plus belle.
- Oh mais tu es la fille du gala ! Je t'en prie fais comme chez toi, viens t'asseoir, me dis t-elle en bousculant presque vers le canapé .
- Oui c'est bien moi, répondis-je un peu gênée. Tu es sûre que je peux ? Je ne voudrais pas te perturber dans ton travail !
- Mais bien sûr ! J'adore la compagnie. Et puis tu n'es pas n'importe qui, tu es ma future belle-sœur ! Elle termina sa phrase avec un clin d'œil.
Je voulus être ensevelie vivante.
Cette fille était un très enjouée, excitée comme une puce, et limite gênante. Toutefois elle avait l'air plutôt sympathique, ce qui était étrange pour quelqu'un qui partageait le même sang que Mr Aïdara. En vérité, son attitude contrastait beaucoup avec celle du roi des glaces. Et puis j'étais soulagée qu'elle soit là. Au moins je ne serais pas toute seule, dans l'antre du diable.
Nous nous assîmes et elle continua son bavardage :
- J'espère que tu ne nous prendras pas pour des arnaqueurs, les membres de la fondation et moi. Nous avons remis l'intégralité l'argent collecté lors du gala aux familles des enfants autistes mais te concernant, Chemssou m'a dit que ce n'était pas la peine. Il se chargerait d'aider Djibril avec ses propres fond comme tu es une proche, expliqua-t-elle, en insistant sur le mot « proche ».
Moi et Chemsseddine, des proches? Il ne m'avait pas donné un seul sous voyons! Quel menteur éhonté. Bien sûr, se disait-il sûrement que si je touchais l'argent des dons, je serais capable de rembourser une partie de mes dettes et de venir en aide à ma famille et donc il n'aurait plus main-mise sur moi. Cet homme est tout bonnement répugnant!
- Je dois t'avouer qu'au début je n'y croyais pas trop même si tous les sites affichaient des photos de vous deux en mode « couple goal » ! Rajouta Camille sans attendre ma réponse. Mais comme mon grand frère t'a amenée ici, je dois donc en déduire que cette affaire est sérieuse. Tu sais, il ne laisse pas beaucoup de gens venir dans cet appart, seuls les personnes qui lui très sont intimes .
- Vraiment ? M'enquis-je. Cette fille est une véritable pipelette en plus d'être adorable. Peut être pourrais-je recueillir d'avantages d'information sur Mr Aïdara grâce à elle ...
- Oui, vraiment ! Répéta-t-elle en souriant. Deux petites fossettes déformèrent alors sa joue. Je demande comment tu as fait pour séduire mon frère ! Certes tu es très belle mais ce gars a deuxième cerveaux à la place du cœur. Et puis t'es pas trop son style, d'habitude il préfère les connasses tirées à quatre épingles.
Elle haussa les sourcils, l'air de résoudre une équation complexe dans sa tête.
- Je ne saurais comment te l'expliquer ... Ça doit être un coup de foudre, ai-je balbutié nerveusement, de peur que son esprit ne l'aie guidé jusqu'à l'humiliante vérité.
- Un coup de foudre ? Ça m'étonnerait beaucoup , c'est bien de Chemsseddine Aïdara que l'on parle !
J'avalai ma salive difficilement. Comment pouvait-elle affirmer cela avec tant de spontanéité ! Si j'avais vraiment aimé mon « fiancé » , j'aurais été blessée par sa remarque enfin !
- Et toi dis-moi, tu l'aimes beaucoup, Chemssou ? Me questionna-t-elle avec un sourire conspirateur.
Il ne manquait plus que ça...
- Non au contraire, je le déteste ton frangin. C'est de la pourriture pure et dure, la honte de l'humanité. Je ne connais point d'être qui puisse être aussi mauvais. Même le Diable est étonné par les stratagèmes de cette vile créature. D'ailleurs je me demande vraiment comment ce monstre peut être le frère d'une fille aussi douce que toi ! C'est ce que j'aurais voulu lui répondre mais comme je ne le pouvais pas, je me contentai de changer de sujet. Je n'avais pas la force de mentir davantage à une bouille d'ange pareille.
- Oh, ce font de teint de hourglass, ils en ont fait une nouvelle édition !
- Que c'est mignon ! Elle est timide ... Se moqua-t-elle. Je te laisse éluder ma question parce que je t'aime bien! Tu t'y connais en make up ?
- Euh oui... J'ai travaillé comme maquilleuse dans un salon « sénégalais » en Californie comme job étudiant. De plus j'ai une meilleure amie obsédée par cela. Elle a fini par un peu me transmettre le « virus ».
Nous nous mîmes à papoter des derniers réassorts de maquillages et de mes péripéties en tant qu'esthéticienne dans ce salon quelque peu « illégale » - aucune des prestataires de service n'avait un diplôme quoi que nous fûmes assez douées-. Le courant passait plutôt bien et sa bonne humeur contagieuse avait même faillit me faire oublier ma présence en terres ennemies.
L'arrivée de ce trouble-fête de Chemsseddine Aïdara interrompit notre prise de contact. Il avait le chic pour arriver en grande pompes et mettre fin aux moments joyeux. Une fois qu'il pénétrait un endroit , nul ne pouvait détourner ses yeux de son regard tant il happait toute force et inhibait ainsi toute tentative de lui résister. Le pouvoir hypnotique du Diable n'était donc pas un mythe. Pourtant Mr Aïdara avait troqué son éternel ensemble costume contre un chandail blanc et un pantalon gris. Ses cheveux noirs étaient plus bouclés que d'habitude, sûrement venait-il de sortir de la douche.
Une petite serviette en micro-fibre était installée autour de son cou, quelques gouttes d'eau perlaient toujours sur son front. C'était la première fois que je le voyais vêtu de manière aussi décontractée. Toutefois sur un corps aussi athlétique, même ce look négligé et ces tons froids n'entravaient rien à son charisme.
- Il est beau mon frère, hum ? me taquina Camille.
- Hum ? Dis-je en sortant de ma torpeur.
- Rien, ça fait juste vingt secondes que tu baves devant lui... continua le jeune fille sur le même ton espiègle. À titre d'information, cette resplendissante beauté que tu vois-là est un héritage familial dont on nous fait don de génération en génération . Et puis, c'est ton fiancé! Depuis le temps que vous vous fréquentez, n'es-tu donc pas habitué à le voir?
Alors qu'on soit clair, je m'étonnais simplement de la création divine. De toute façon, il n'y est pour rien s'il est né avec un physique pas trop désagréable. Pas besoin d'accroître son égo! Et puis la beauté de l'âme prime sur la beauté du corps. Qu'est-ce un homme séduisant si sa froideur, sa méchanceté et sa mesquinerie neutralisaient tout son charme? Absolument rien qui ne vaille le détour!
Sans y être invité, ce dernier vint s'installer près de moi. Je le dévisageai discrètement du coin de l'œil mais il ne donna aucun crédit à mon mécontentement. Je ne comprenais pas pourquoi ils nous imposait cette proximité que lui comme moi détestions. Il est milliardaire non? Eh bah, il devrait avoir une bonne centaine d'autres chaises où poser son postérieur? Ce n'était pas les fauteuils qui manquaient dans cette penthouse ! Alors pourquoi envahir mon espace personnel ?
Ou était-ce une autre moyen de ne déstabiliser ?
- Imane Kamisokho, arrête un peu tes bêtises. Tu ne vois pas que la met mal à l'aise. Retourne dans la chambre d'ami s'il te plaît, ta présence ici n'est ni nécessaire ni requise. Ordonna -t-il froidement.
- Non, laisse-la rester s'il te plaît! le priai-je presque. J'effectuai en même temps une translation vers la droite pour échapper à son aura oppressante.
Il me fit un regard réprobateur et se rapprocha de plus belle en étalant son bras sur le dossier du sofa, c'est à dire juste derrière moi.
Espérer que j'accomplisse des prouesses d'actrice telles que feindre une quelconque intimité avec lui tandis que chaque particule de mon corps me criait de m'enfuir, c'est un peu me sur-estimer !
Ce rustre ne savait même pas se montrer gentil avec sa propre sœur. Pourquoi voulait-il congédier Imane alors que le seul qui me mettait mal à l'aise ici, c'était bien lui !
- Tu vois le rabat-joie ! Il n'y a que toi qui ne veuilles pas de ma compagnie et puis il y'a tout mon matériel de tournage ici. Répliqua Camille sur un ton enfantin.
- Imane Kamisokho Aïdara, combien de fois je vais devoir te répéter de ne pas filmer chez moi ? Ce n'est pas chez ton père ici ! Tu veux que je la fasse passer par la fenêtre, ta caméra ? S'écria Chemsseddine.
- Très bien, je pars vlogger dehors! Si le froid de Février à l'extérieur me terrasse, alors tu auras ma mort sur ta conscience l'indigne grand frère, conclua-t-elle de manière théâtrale avant de s'en allait.
Noooon ! Camille, je t'en prie ! Trop tard... Mon dernier espoir de survie était partie.
N'en pouvant plus d'inhaler l'odeur de son parfum, ni de sentir son bras frôler mon dos, je ne pu m'empêcher de pester tout en prenant à nouveau de la distance :
«Vous disposez d'un si vaste appartement par la grâce divine. Pourquoi faut-il que vous veniez vous agglutiner à moi ? ».
- Réfléchis un peu! Comment
veux-tu que notre histoire soit crédible si nous nous conduisons de manière distante? À moins que tu ne veuilles que tout chacun sache que ce mariage n'est en fait qu'un « contrat », répondit-il nonchalamment.
« Réflechis un peu. »
Je déteste cette façon qu'il avait de me prendre de haut comme si j'étais une écervelée à qui il fallait tout expliquer.
- Avec le background que vous avez, c'est difficile de jouer le jeu tout en me sentant en sécurité, lançai-je pour l'enquiquiner. En réalité, je crois bien ne pas être la première femme avec laquelle vous faites la une des tabloïds.
- Naturellement, ce même background devrait te conforter dans l'idée que je ne m'entiche guère d'herbes sèches et sauvages, je prèfère les fleurs raffinées. Je crois que tu sais dans quelle catégorie te classer, contre-attaqua t-il avec la même désinvolture.
Je vais le buter. Je vais le buter. Je vais le buter.
Ma malchance étant légendaire, c'est ce moment précis qu'Ibrahima Aïdara choisit pour enfin m'appeler.
Maintenant que j'étais dans l'antre du lion.
Maintenant que Chemsseddine se trouvait à deux pas.
Maintenant qu'il ne pouvait m'être d'aucune utilité sinon m'enfoncer davantage.
Je déclinai aussitôt l'appel mais un message s'en suivi. Jamais mes yeux n'avaient parcouru l'écran aussi rapidement.
« Je suppose que vous avez déjà entamé les négociations avec mon cousin c'est pour cela que vous ne pouvez répondre. Écoutez-moi bien, faites tout pour ne pas ratifier ce contrat aujourd'hui ! Si vous m'en envoyez une copie ultérieurement , je pourrais le faire analyser par des experts juridiques au préalable. C'est impératif car on ne peux jamais faire confiance à Chemsseddine. Mais dans la mesure de l'impossible, si vous êtes sous pression, alors faites intégrer vos intérêts économiques dans ce contrat. N'ayez peur de paraître cupide, à la guerre comme à la guerre ... Et le plus important, demandez à Chemsseddine de laver toutes les fausses accusations qui pèsent sur votre nom, et je parle là d'un engagement à l'écrit. N'oubliez pas, je suis derrière vous et avec un peu de confiance en vous, vous saurez vous imposer même face à ce monstre.».
Mr Aïdara qui m'observait du coin de l'œil se redressa et se pencha vers mon portable. Je l'éteignis aussitôt .
- Qui est-ce ? Me questionna t-il sans gêne.
- Comme si je vous devez des comptes, soufflai-je. C'est de ma famille. Il s'agit de nouvelles du garçon que vous avez frappé tout à l'heure. Il est mal au point vous savez, n'ai-je pu m'empêcher d'ajouter pour donner plus de profondeur à mon mensonge. Vous êtes au moins de six ans son ainé, cela ne vous mets pas à l'honneur. Je devrais d'ailleurs rentrer vérifier son état !
- Si c'est dans l'optique de me faire culpabiliser, cela ne m'atteint point, rétorqua-t-il, le regard toujours fixé sur moi. Et bien, il apprendra par cette occasion à ne plus lever la main sur ses « aînés » comme tu dis... Et puis n'exagérons rien, il n'en crèvera pas.
Je me mis à entrecroiser mes doigts de manière nerveuse. Je dois trouver un autre moyen de me barrer et vite.
- Euh... Si votre avocat n'est pas encore disponible, je peux revenir un autre jour.
S'il vous plaît acceptez! Comme ça je pourrais joindre votre cousin d'ici là. Et ensemble nous concocterons un plan pour vous rouler dans la farine.
- Ce double jeu, Je trouve cela terriblement agaçant.
Cette phrase qui peut sembler anodine, une fois sous la cible de son regard glacial et prononcée par sa voix grave avait des allures de menace de représailles.
Et s'il allait vu le message...
Quelle sotte ai-je été de le lire en sa présence! Me voilà foutue!
- Quoi ? De quoi parlez vous ? Ai-je demandé abasourdie.
- Cesse de triturer tes mains. Et pourquoi t'entêtes-tu à vouloir me vouvoyer alors qu'à l'avenir, nous seront appelé à beaucoup nous côtoyer? Cette air faussement timide, ça m'horripile jusqu'au plus haut point, me fustigea-t-il.
Ouf ! Il ne s'agit que de cela . Je peux respirer un grand coup !
- Chemsseddine Aïdara, je ne suis pas là pour vous écoutez... Pour t'écouter me faire des remontrances, me rectifiai-je. Le vouvoiement avait pour vocation de signifier le respect, mais tu as raison, tu ne le mérites pas. Et je te le répète donc en ces termes, si ton avocat n'est pas disponible, laisse-moi partir. J'espère que tu ne m'as pas amenée ici en vain!
Il se courba vers moi réduisant l'écart entre nous deux. J'enfonçai mes mains dans le cuir du canapé pour garder l'équilibre tout en m'éloignant autant que possible. Ses yeux avaient la couleur d'un océan en colère, et paradoxalement son toucher, la texture d'une fleur de coton.
À nouveau ma respiration s'accélérait. À nouveau pénétrait en moi la fragrance des champs de camomille et du musc mentholée d'Arabie, l'exquise odeur du danger.
Jesus, Nour qui t'as envoyé dans appartement de garçon ? Hein? Voici la punition divine. Prends tout ...
- Moi contrairement à toi, je n'aime pas agir vainement, Mlle Sadiyah. Répondit-il à ma dernière accusation, sa voix n'était alors qu'un murmure qui mourrait sur une vibration. Par exemple, si tu comptais obéir à la fin, pourquoi avoir pris la peine de me faire toute cette élocution sur le vouvoiement et sa signification?
- Grossier personnage... Écartes-toi de moi, ou je te ferai subir le même traitement qu'à ton apprenti espion!
Oui, je suis fière de mon attaque à coup de Nivéa.
- Ou encore, pourquoi avoir autant fait durer ce jeu du chat et de la souris alors qu'il était évident que tu céderais incessamment sous peu? Un peu d'argent, une réputation, si c'est ce que tu cherchais depuis le début, pourquoi ne pas avoir accepté l'arrangement à l'amiable que je t'avais proposé avant la publication de ton article, ce jour-là, dans les locaux d'AMC?
Son élocution était lente, saccadée, comme il savait que chacun de ses mots était un coup porté à mon orgueil. Il faisait alors allusion à notre première rencontre. La première fois où j'avais du faire face à son regard ténébreux*.
- Tu te rappelles n'est-ce pas ? Ton silence contre une brillante carrière de scientifique à l'international, rajouta-t-il en effleurant ma joue. Mais toi, tu es le genre de femme insatiable, celles qui en désirent toujours plus ! Ou me voulais-tu moi aussi dans tes filets ?
- De l'argent ? Une réputation ? Est-ce si difficile à croire que je voulais seulement faire ce qui était juste alors que c'est l'option la plus logique ? Vous prendre dans mes filets et puis quoi encore ? Je n'aurais jamais songé à avoir une quelconque relation avec vous si vous ne m'aviez pas imposé ce semblant de mariage! m'insurgeai-je. Tout le monde n'est pas calculateur comme vous.
Il se mit a rire de manière désobligeante.
- C'est vrai que tu es trop bête pour avoir fomenté tout ça toute seule... repliqua-t-il en replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille. En plus d'être répulsive...
Je vais le buter. Je vais le buter. Je vais le buter. Passez-moi un flingue.
Je posai une main sur son torse pour le repousser et agrippait l'autre à son chandail afin d'éviter de basculer en arrière. Je ne pouvais pas à nouveau laisser les choses devenir hors de contrôle... Cependant une voix masculine intervint avant que je n'aie le temps de faire quoique ce soit.
— Voyons les amoureux, doucement sur les contacts physiques avant le mariage !
- T'as intérêt à la mettre en veilleuse. Déjà que tu es retard! gronda Chemsseddine en se remettant droit.
Bien sûr que la position suggestive dans laquelle nous étions pouvait pousser à confusion. Toutefois, je me fichais pas mal de ce que ce clown d'avocat pouvait penser, tant que je moi je savais que je n'avais pas outrepasser mes principes. Mais peut-être que cette remarque pouvait être ma porte de sortie.
- Oh, tu es en train de porter atteinte à ma crédibilité d'avocat devant cette charmante demoiselle. Nour, cessez de fixer vos pieds, il ne faut pas prendre tous ce que dis au sérieux, s'excusa le dénommé Djamil.
- Non, cette fois-ci vous avez raison ! Ce n'est pas parce que j'ai baissé ma garde le soir du gala ou que j'ai accepté de venir ici que tu dois me méprendre avec tes « amies de petite vertue ». J'ai accepté d'être ta femme, pas que tu me manques ouvertement de respect. Tu m'enverras le contrat par mail et j'y apposerai ma signature électronique. Je ne reste pas ici! Sur ce, je m'en vais, bonne fin de journée, ai-je conclu en me dirigeant vers la porte de sortie, fière de mon stratagème.
Il y'a dans le cœur de chaque être, au moins, une petite part de malice. Les vertueux l'ensevelissent sous un jardin d'intentions pures, mais jamais entièrement, elle ne disparaît. Elle attend le moment opportun pour se réveiller.
- Mademoiselle Sarr, désolé si mes paroles vous ont offensée. Je sais bien que mon ami est ici, le seul dépravé de l'histoire. Ma plaisanterie est allée trop loin. Je vous prie de rester pour la signature du contrat de mariage. Je vous promet dorénavant de me montrer strictement professionnel, tenta de me dissuader Djamil.
- Laisse-la s'en aller si elle y tient tant! Je pense que j'ai fait preuve d'assez de patience en prenant la peine d'aller la chercher chez elle et en supportant ses caprices jusque là. Je lui offre une chance inestimable de repartir sur de bonnes bases mais je crois qu'elle préfère à l'armistice, persévérer dans une guerre qui finira par l'achever. Ce contrat se signera aujourd'hui, dans cette pièce, où il ne le sera jamais. Mais n'oublies pas qu'il ne s'agit pas que de toi. N'oublie pas que je t'ai pris tant de choses et que d'un simple claquement d'un doigt, je peux te retirer tous ce qui te reste. Si tu passes cette porte Nour, alors il n'y aura pas de deuxième chance.
Ainsi même les plus intègres savent ruser.
Mais ceux qui ont longtemps œuvrer sur le chemin de la malice maîtrisent à force l'art de se défaire de tous les pièges à leur pieds dressés.
*
On finit tous par tomber dans l'antre du lion, et alors on n'en ressort jamais. Oui, cette phrase prenait désormais tout son sens. Alors qu'il y'avait quelques minutes, je me tenais devant le pas de la porte, je me retrouvais à nouveau assise face à Chemsseddine et son avocat. Seule une table basse où était installé le MacBook de ce dernier nous séparait. En réalité les mots de Mr Aïdara Fils m'avaient donné froid dans le dos. Ibrahima Aïdara par précaution lui-même m'avait recommandé d'obtempérer si toutefois j'étais acculée. Il ne fallait pas éveiller de soupçon, ni fâcher Mr Aïdara Fils.
- D'abord, je vais vous lire le contenu du contrat établi avec mon client. Si les deux parties sont satisfaites, je l'imprimerais enfin que vous puissiez tous deux apposer vos signatures, expliqua Mr Djamil Seck tout en consultant son ordinateur .
- Avant que vous ne commenciez votre lecture, il y'a quelques conditions que j'aimerais moi aussi y adjoindre afin d'assurer mes arrières. En tant qu'homme de loi, vous n'y verrez sûrement aucun inconvénient. Un contrat ne saurait être uniquement le dictat d'une des parties, ai-je eu le courage de revendiquer.
- Ça y'est, elle vient d'atteindre mon dernier nerf, ria nerveusement Chemsseddine. C'est que tu as du culot quand même ! Ce soir-là, à l'hôpital, ta promesse était pourtant limpide : J'intervenais en faveur de ta grand-mère et toi tu acceptais de m'épouser. Il n'était pas question de chartes supplémentaires que je saches! Qu'est-ce qui te fait croire que tu es en position de poser des conditions ?
- Chemsseddine, je t'en prie, écoute d'abord ce qu'elle a à dire, essaya de le raisonner son avocat.
Il obtint en retour un regard meurtrier. Mais après un moment de silence où il semblait réfléchir à de sombres idées, il abdiqua, un sourire narquois sur le coin des lèvres :
- Soit, voyons quelles belles propositions Mademoiselle Sadiyah a en réserve. Sûrement elle est persuadée d'être dupée, alors voyons par quels stratagèmes astucieux va-t-elle « assurer ses arrières ». Peut être ai-je sous-estimé son intellect ?
Djamil, tu noteras ses conditions au fil et à mesure qu'elle parlera, ensuite je verrai si on les laisse dans le document final.
Je m'éclaircis la voix avant de prendre la parole, l'air confiante, je l'espère. En effet, mon avenir et celui de mes proches durant les prochains mois dépendront de ce que je vais dire dans les minutes qui suivent.
Je devais être rusée, opportuniste, et aussi stratège que lui.
- Premièrement, (...)
- Parce qu'il y'aura un deuxièmement ? lança t-il sûrement pour me déstabiliser.
- Tu as voulu te marier avec moi, ce sera cher payé, rétorquai-je le regardant dans le blanc des yeux. Alors je disais, premièrement, tu devras prendre en charge les frais hospitaliers de ma grand-mère et t'assurer qu'elle soit transférée dans un hôpital à la pointe des nouvelles découvertes sur l'oncologie*. Et puis tu n'es pas sans savoir que mon petit frère souffre d'autisme, tu devras donc t'occuper de sa scolarité dans un établissement adapté ainsi que de ses consultations hebdomadaires. Dans le cas où je devrais emménager chez toi après le « mariage », il est hors de question que ce soit sans lui.
- Si je comprends bien, tu décharges tous tes fardeaux sur mes épaules. J'aime mieux ça, enfin tu retire ta fausse auréole dorée. Cela ne me coute rien de t'accorder ces avantages, par contre, je n'aime pas m'entourer de personnes superflus. Le petit Djibril restera avec votre père.
Il connaît son nom ? Je me demande à quel point il a eu à enquêter sur ma vie ? À quel point me connait-il vraiment ?
- Ceci n'est pas négociable Mr Aïdara. Notre père, eh bah, je ne saurais d'écrire son manque d'intérêt à notre égard. Le petit est orphelin de mère, il n'a plus que moi. Ce serait amoral que de vouloir nous séparer.
Il posa son bras sur l'accoudoir du canapé en laissant sa tête nonchalamment retomber sur sa paume.
- Supposons que toute cette histoire digne d'un mélodrame m'aie touché et que je décide de te faire cette faveur, quelle est ta seconde requête ? Demanda-t-il fort impatient de conclure cette affaire.
- J'y viens ! La boutique de ma mère, tu sais celle que tu as faite fermer injustement (...)
- Injustement ? J'ai racheté l'immeuble, j'ai bien le droit de faire évacuer ce commerce en faillite pour des locataires plus réguliers, rétorqua-t-il.
- Peu importe... tu vas la faire réhabiliter.
- Nour Sadiyah, sois rationnelle ! L'immeuble est en ruine et sans vouloir t'offenser, quoique je n'en ai cure comme il s'agit de la profonde vérité, tes performances en vente étaient lamentables. Crois-tu que j'aie de l'argent à perdre dans ce projet voué à l'échec ?
- Cette bijouterie a une valeur sentimentale importante pour moi. Mais toi les sentiments, tu ne connais pas sûrement, répondis-je éméchée par ses commentaires sur mon chiffre d'affaires. Cependant, comme tu es si performant en marketing, tu devrais pouvoir en faire une affaire pérenne.
Ceci serait mon assurance qu'à l'issue de ce mariage je ne serais pas laissée sans ressource.
Mon ton de défi lui arracha un sourire moqueur ou de stupéfaction , je ne saurai le dire. J'étais alors moi-même étonnée de mon assurance.
- Et pour finir Mr Aïdara, tu vas effacer la tâche qui souille désormais mon nom et mettre fin aux calomnies que tu as émises à mon encontre et qui jour après jour me porte davantage préjudice. Ainsi je pourrais me refaire une place dans le marché du travail.
- Ce sera tout ? Demanda-t-il en levant un sourcil.
- Ce sera tout. Répondis-je avec la même froideur.
- Bien, Djamil, nous pouvons passer aux choses sérieuses ! Normalement, nous devions établir le contrat devant un notaire mais étant donné que le temps presse et qu'il n'a pas beaucoup de disponibilités ces temps-ci pour se déplacer , tu iras le voir dans son bureau demain pour le faire légaliser . Si tu lui dis que tu viens de la part de la famille Aïdara, sûrement il ne se fera pas prier.
Quel plouc arrogant... Et puis n'existe-t-il qu'un seul notaire à Dakar ? Mais puisque cette racaille ne verse que dans des plans foireux, il est normal qu'il ne veuille se rendre que chez un notaire qu'il a au préalable fidélisé.
Avec ses talents d'orateur, Djamil seck entama la lecture :
« Contrat de mariage
Entre les soussignés ,
D'une part Mr Cheikh Ahmed Tidiane Aïdara, né à Saint-Louis au Sénégal, âgé de 29 ans, vice président des bureaux D' Aidara's Mining Company au Sénégal,
Et d'autre part, Mlle Nour Sadiyah Sarr, âgée de 24 ans, née à Dakar au Sénégal, Ingénieur en pétrochimie.
Il a été convenu ce qui suit :
Article 1: En s'engageant à épouser Mr Cheikh Ahmed Tidiane Aïdara, Mlle Sarr, se trouve exonérée de toutes dettes à l'égard de ce dernier que celles-ci résultent d'un litige judiciaire ou d'une autre affaire.
Article 2: Le mariage en question s'étalera au minimum sur une durée de deux ans, en cas de divorce avant la fin de cette échéance, l'annulation de la dette sera remise en cause.
Article 3: Le fait que ce mariage soit basé sur un contrat offrant des avantages économiques à l'une des parties, doit resté strictement confidentiel. Dans le cas échéant, l'annulation de la dette sera remise en cause. »
Je ne pu m'empêcher d'interrompre son élocution en ce point précis :
- Désolé de vous couper la parole, mais on dirait que la seule chose que j'entends en boucle depuis le début c'est: « l'annulation de la dette sera remise en cause ». Ce contrat ne devait-il pas être une assurance pour mon avenir, cependant il ne garantit rien avec certitude...
Chemsseddine me dévisagea l'air de dire « Si tu n'es pas contente, la porte est toujours grandement ouverte. » avant de demander à son avocat de poursuivre.
Ma requête ayant étée ignorée avec succès, ce dernier reprit :
« • Article 4: Tous ce qui passe dans l'intimité de la famille Aïdara doit rester strictement privé. A ce titre Mlle Nour Sadiyah Sarr devra signer un contrat de confidentialité qui si rompu, pourra impliquer un procès et l'annulation de la dette sera remise en cause.
• Article 5: Nour Sadiyah devra préserver l'honneur de la famille Aïdara, à cet effet tout comportement susceptible de provoquer un scandale tel que l'adultère, problèmes avec la justice, ect. rendront l'annulation de la dette caduc.
• Article 6: Mlle Nour Sadiyah Sarr devra suivre son époux dans ses apparitions publiques, et dans ses déplacements à l'étranger.
• Article 7: Mr Aïdara, lui s'engage à prendre en charge le traitement de Mme Salimata Sarr qui se fera dans des conditions optimales tant que le contrat de mariage sera en vigueur.
• Article 8: Mr Chemsseddine Aïdara s'engage à s'occuper de la scolarité de Djibril Sarr, ses frais de santé ainsi que tous ce qui nécessaire à son épanouissement tant que le contrat sera en vigueur. Pour cela, Mlle Sarr devra placer l'enfant sous sa tutelle.
• Article 9: Mr Chemsseddine Aïdara s'engage à subvenir aux besoins de Mlle Sarr ainsi qu'à ceux de sa famille en leur versant une rente mensuelle , à valoriser leur bijouterie familiale en faisant une franchise de la marque « les petits trésors de Camille* ». A cet effet, Mlle Nour Sadiyah Sarr devra permettre à son époux de gérer ses finances par procuration.
• Article 10: Mr Chemsseddine Aïdara fera une apparition médiatique pour aider Mlle Nour Sadiyah Sarr à restaurer son image et à gagner en notoriété dans le secteur de l'extraction mais cependant si seulement si, elle aussi dément publiquement son article accusant AMC et la personne de Mr Chemsseddine Aïdara de malversations.
• Article 11: Si des enfants venaient à naître de cette union, en cas de séparation, ils seraient à la garde exclusive du père. »
- Nous aurons l'air d'une belle bande d'idiot devant le monde si nous nous mettions à affirmer l'un comme l'autre une chose et son contraire, ai-je commenté quelque peu interpellée par le contenu de l'article 10.
- N'oublie pas que je suis passé maître dans l'art d'influencer l'opinion publique, rétorqua Chemsseddine avec son habituelle arrogance. Les choses seront faites de manière subtile. Ne t'inquiètes pas, nous obtiendrons tous deux gain de cause!
Mr Djamil Seck relia ensuite sa machine à une imprimante. Il sortit du ventre de la bête trois pages encore chaudes. Maintenant que je les touchais, je me rendais vraiment compte que ces quelques mots écrits en police time new romans, couchés sur des feuilles blanches, prête à recevoir nos signatures, détermineraient désormais nos vies durant les deux années à venir.
Bien sûr que dans biens des aspects, ce contrat m'indisposait fortement. Premièrement pourquoi opter pour une séparation des biens et ensuite vouloir gérer mes comptes ? Ça sentait la douille à plein nez.
Ensuite, cette histoire de rente ne plaisait guère. Toute ma vie durant j'avais travaillé d'arrache-pied pour pouvoir m'offrir le « luxe » d'être une femme indépendante. Voilà à quoi maintenant j'étais résolue, dans le gouffre profond où je me trouvais.
Concernant la dernière clause, il était hors de question que je donne un héritier à la famille Aïdara. Faire naître un enfant d'un père aussi ignoble, ce serait lui cracher dessus avant qu'il n'aie poussé son premier cris. Ce mariage était basé sur la haine, la ruse, la logique, et non sur l'amour. Je ne pouvais décemment pas concevoir dans ces conditions.
Il avait était décidé qu'il n'y en aurait qu'un seul exemplaire - de manière unilatérale bien sûr-, et une fois que le document serait passé chez le notaire, il serait ensuite gardé dans le coffre fort de l'appartement de Chemsseddine et il n'en sortirait plus jamais.
*
L'affaire bouclée, je décidai de rentrer au plus vite. Chemsseddine et son avocat m'accompagnèrent en dehors de l'appartement. Sur le pas de la porte nous rencontrâmes Camille qui rentrait de sa virée.
- Belle-sœur, tu rentres déjà ? On n'a même pas eu le temps de faire plus ample connaissance ! S'exclama-t-elle en faisant une moue adorable.
- Une autre fois peut-être! lui ai-je sourit. Là je dois vraiment y aller car il fera bientôt nuit. Les rues se font sombres.
- Dans ce cas reste dormir! rétorqua-t-elle, enthousiaste, comme s'il s'agissait d'une évidence.
Non mais elle est un peu allumée par contre...
- Kamisokho ne sois pas têtue. Quand elle sera officiellement mon épouse, vous pourrez faire autant soirées pyjama qu'il vous plaira mais pour l'heure il est plus sage qu'elle rentre, a tenté de raisonner Chemsseddine.
- Rabat-joie ! Moi qui voulais t'arranger un coup, répondit Imane en faisant un clin d'œil.
Sentant que son frère s'était crispé suite à sa provocation, elle alla se réfugier derrière Mr Djamil Seck.
- Dou da nga eupeul rek, ( Ça t'apprendras à être aussi sans filtre), se moqua se dernier. File à l'intérieur, je t'ai ramené le smoothie dont tu me parlais hier.
Imane sourit de toute ses dents avant de courir à la penthouse.
- Je vais demander à Noireau de te raccompagner. Dans les semaines à venir, je te contacterai pour fixer une date pour rencontrer nos familles respectives et ultérieurement la demande en mariage, expliqua Mr Aidara.
- D'accord, j'attendrai de tes nouvelles. Et je m'en passerai de la compagnie de ton bodyguard, je ne me sentirai que plus oppressée. Sur ce bonne fin de soirée, Mr Aïdara, Mr Seck ! Répondis-je en tournant mes talons.
- Mlle Sadiyah, une dernière chose ! Cet accord est un moyen pour nous de repartir sur de nouvelles bases. Si tu te montres coopérative et joues franc-jeu, il pourrait changer ta vie à tout jamais et cela de la manière la plus positive qui soit ! Alors ne gâches pas cette chance, d'accord ?
Sa voix semblait presque bienveillante. Mais on pouvait pas lui faire confiance, n'est-ce pas ? Je hochai la tête sans oser me retourner. Je faisais tout sauf jouer franc-jeu. Je profitais de cette courte trêve pour complotais contre moi et sûrement faisait-il pareillement.
- Ah ! Si tu tiens à ton cousin, demande-lui de rester en dehors de mes affaires. Tu sais bien ce quiconque s'attaque à un Aïdara ne peut s'en sortir indemne.
- So dé Yallah tawal kherr*, lui lançai-je avant de quitter les lieux, à deux doigt de craquer J'aurais juré l'avoir entendu chuchoter à son ami : « Que vient-elle de dire ? ».
*
Les jours qui suivirent cette entrevue, j'eus à m'entretenir avec Ibrahima Aïdara , allias « mon sauveur ». J'étais plutôt anxieuse par rapport au fait d'avoir laissé les reines de mes finances à Chemsseddine mais lui était d'avis que je n'avait pas d'inquiétude à avoir à ce sujet. En effet, un contrat était des lois consacrée entre des parties, il ne pouvait donc pas être supérieur à la loi consacrée dans la constitution. Si jamais il m'arnaquait, ce serait jugé comme abus de confiance. Et puis d'après, Chemsseddine ne me piègerait jamais de façon aussi grossière, le maléfice serait quelque chose de subtile et qui glisserait entre les lignes. Comment diable pouvait-il être aussi confient ? Cette histoire devenait usante à la longue. Elle me donnait des sueurs froides.
Le temps fit son chemin jusqu'à la dernière semaine de février. Vivre à la villa Saarène était devenue quelque peu compliqué. Non, il ne s'agissait plus des manigances de Tante Nafi et de sa fille, cela faisait belle lurette que cela ne m'atteignait plus. Il était plutôt question du mal aise qui s'était installé entre Mactar et moi. En effet, depuis qu'il s'était battu avec Chemsseddine, nous ne nous étions plus parlé. Ou plutôt je faisais tout pour éviter que cela n'arrive.
Je me faufilais entre les couloirs comme un cambrioleur. Je passais le plus clair de mon temps enfermée dans ma chambre. J'avais même modifier les horaires de mes repas pour ne plus le croiser. La raison était simple : je n'avais pas la force de justifier mes actes devant lui. Mactar est quelqu'un de très déterminé, voire plus que moi, si je venais à lui raconter les dessous de l'histoire, les choses allaient sûrement dégénérer. De plus je voulais le protéger de Chemsseddine. Je savais bien par expérience ce qui arrivait lorsque l'on s'attirait ses foudres.
J'avais donc conclu que la chose la plus sage à faire était d'instaurer une sorte de distance. Cela permettrait de désamorcer la situation et peut-être que lorsque l'eau aura coulé sous les ponts, son « attachement » envers moi, revêtira sa forme initiale, c'est-à-dire l'amitié.
Toutefois, on ne pourrait éviter indéfiniment quelqu'un dans l'espace de quatre murs, dans le périmètre limité de cette villa. En effet, seules les montagnes ne se croisent pas.
L'heure que je craignais tant finit par arriver. Ce matin-là, malgré qu'il ne fît pas bon temps, j'étais allée sur la terrasse de la villa Saarène pour étendre le linge de Djibril. Dans ce temple de silence, je fus tellement absorbée par le calme et la vue, que je n'entendis point le bruit de pas s'intensifier derrière moi. Ainsi, lorsque je me rendis compte que Mactar avait lui aussi rejoint l'endroit, la porte des escaliers avait déjà été refermée par ses soins. Aussi se
tenait -il devant moi, m'en interdisant l'accès, m'empêchant de le fuir, encore et indéfiniment.
Petite, lui et moi montions sur ce toit pour échapper aux remontrances de nos aînés, une fois que nous avions fini de commettre milles et une bêtises. Mais ce matin-là, le vent souffrait fort, il hurlait jusque dans ma cage thoracique. Peut-être ce lieu, témoin de notre amitié, m'en voulait lui aussi de la laisser ainsi se dégrader...
- Mactar, à quoi tu joues ?! Laisse-moi passer ! Ai-je ordonné en ramassant mon panier à linge.
Il me prit l'objet des mains et le reposa à terre.
- C'est moi qui devrait plutôt te poser cette question, tu ne crois pas ? Répliqua-t-il. Nour, à quoi tu joues ? Depuis l'autre bouffon s'est ramené ici, tu m'évites comme la peste. Pourtant s'il y'a un problème, quelqu'il soit, il est plus simple d'en discuter comme des adultes...
- Je n'ai rien à te dire dire Mactar ! Rétorquai-je, l'air blasée.
- Tu n'as rien à me dire Nour ? s'exclama t-il en riant nerveusement.
- Absolument rien ! Ai-je alors confirmé froidement. Arrête donc de tout répéter comme un perroquet sans cervelle et cède moi le passage.
Il se recula en passant sa main sur sa tête, complètement abasourdi.
- J'ai du mal à te suivre Nour ! Dois-je te rappeler toutes les crasses que ce psychopathe t'as faites ?
Il remettait le sujet épineux sur la table. Je ne répondis rien. Il ne lâcha pas pour autant l'affaire.
- Nour ! Scanda-t-il pour me faire réagir. Ce Chemsseddine Aïdara raconte partout que vous deux êtes fiancés, et toi, tu acceptes de partir avec lui dans sa voiture comme pour donner du crédit à ses paroles?
- Et si je te disais que tout ceci est vrai ?Commençai-je la voix hésitante. Je ne vais pas te le cacher plus longtemps, je vais réellement me marier avec Mr Aïdara. Mais après tout je suis une adulte responsable de mes choix. Alors aussi tiré par les cheveux que cela puisse te paraître, je t'en conjure, ne demande pas pourquoi et n'essaie pas de l'enpêcher. C'est tout ce que je te demande !
- T'es tombée sur la tête ma parole ! s'écria-t-il. Comment espères-tu que puisses digérer ça sans te demander tes motivations ?
Il souffla un grand coup comme pour se ressaisir et plaça ses mains sur mes épaules.
- Nour, je sais qu'il te pousses à bout et quelque part, tu te dis que c'est déjà perdu d'avance. Mais toi et moi, on s'était promis de se battre... T'es pas seule tu sais, Nour Sadiyah essaya-t-il de me convaincre d'une voix douce.
Voilà tout ce que je ne voulais pas, qu'il me fasse sentir coupable d'avoir baissé les bras... Je me contentais de fixer là panier à linge sans rien dire. Il releva mon menton avec son index pour me forcer à le regarder dans les yeux avant de retirer sa main.
- Je te laisserai pas détruire ta vie Nour, promit-il avec autant de fougue que ma peur s'accentua. Si c'est par rapport à l'argent, je vais recontacter l'entreprise française et leur donner les droits de mon travail. J'obtiendrai une dizaine de millions, bien sûr le prototype vaut plus mais ce n'est pas important si ça peut permettre de rembourser ce connard de Chemsseddine. Ensuite, je t'amènerai en dehors du Sénégal, le temps que cette histoire se tasse. Je ne te parles pas de retourner chez mes parents aux USA, on ira là où tu voudras et tu pourras même reprendre ton travail entre temps. Je te rendrai heureuse, Nour, comme la vie ne t'a jamais donné la chance de l'être.
Des mots ne suffiraient pas pour décrire ô combien ses paroles me touchaient. Mais je ne pouvais pas me permettre d'être aussi égoïste. Je l'ai vu claquer des nuits entières sur ce projet et le mener à bien avec passion, je ne méritais pas un sacrifice aussi grand.
- Je ne veux pas que tu fasses ce genre de chose pour moi Mactar. Lui répondis-je. Ce n'est pas aussi simple que ça de se défaire des tentacules de Mr Aïdara, tu sais. En plus je n'ai plus envie de me battre Mactar, j'ai assez souffert. Désolé de te décevoir, mais ce qui est fait est déjà fait et je ne reviendrai pas sur ma décision.
Il retira ses mains de mes épaules visiblement très contrarié.
Il ne comprenait pas pourquoi je rejetais son offre.
- Purée Nour, je te proposes une solution et toi tu me dis que tu veux toujours épouser ce batard ? Quoi ? T'es comme les autres toi aussi ? Il te fait miroiter Quelques milliards, des véhicules luxueux et tu vends ton honneur ? C'est parce qu'il est riche, c'est ça ? Se mit-il à crier.
Avait-on déjà vu de la pluie en Février dans ce pays ? Pourtant un éclair fendit le ciel, comme la colère avait fendu son visage. De fines gouttes ruisselèrent mais nous restâmes là à nous dévisager, tous les deux transis d'émotions destructrices.
Nos amis ne sont pas parfaits. Mais quand notre destin est un tableau peint de pigments sombres et de nuances ténébreuses, et qu'ils soient prêt à sacrifier de leurs couleurs pour en faire une image plus radieuse, la seule chose juste, c'est de les éloigner de soit. Alors pour les protégeait de nous quelques fois, il faudra faire preuve de cruauté. Il frauda blesser leur sentiment plus que jamais... Il faudra atteindre leur orgueil. Voilà pourquoi j'ai décidé de réveiller le diable qui sommeillait en moi et de dire ses mots qui une fois prononcé, rien ne serait plus pareille. Le tonnerre viendra gronder et creuser entre nous un abysse profond.
- Oui Mactar, c'est pour l'argent. Comment bien de temps crois-tu que je vais encore bouffer la poussière ? lui demandai je avec cynisme, plus je m'enfonçais dans mon mensonge, plus ma voix devenait intransigeante. J'en ai marre vois-tu, que tout ce voisinage puisse me regarder de haut, et me traiter de fille maudite. J'en ai ma claque de voir mon frère se faire traiter comme un attardé mental, lui non plus ne mérite-t-il pas mieux ? Et enfin, Cette famille m'a fait autant de mal que Chemsseddine ne pourra jamais m'en faire. Alors si aux larmes je suis condamnée, ici comme à ses côtés, autant pleuré sur des literies de premier choix et essuyer mes larmes avec des mouchoirs de soie. Même les murs de cette villa me donnent la gerbe tant j'y ai trimé ! Cette sueur qui perle sur mon front, cette mauvaise fortune qui me colle à la peau, j'ai décidé de m'en défaire.
Il me dévisagea comme s'il n'en croyait pas ses oreilles. La douce pluie, le ciel gris, nos vêtements qui nous collaient à la peau, le silence des oiseaux. Tous les éléments s'accordaient pour ajouter à cette déchirure du mélancolisme.
- Arrête Nour, je sais que c'est faux, insista-t-il, toutefois offusqué de ma réponse. Je te connais si bien...
- Erreur ! Tu connais ce que je veux bien te montrer de moi, rétorquai-je. Quoi ? Qui serait assez conne pour refuser ce bonheur inespéré qu'on lui tend sur un plateau sertie de diamants ? Alors regarde bien cette larme car elle sera ma toute dernière. Cet argent, ces jets-privé, tous l'or qui croupit dans les mines de sa famille, ces quelques milliards comme tu le dis, je les mérites. Parce que depuis mon premier souffle, la vie a été impitoyable avec moi. Un « tiens » dit-on, vaut mieux que deux « tu l'auras ». Alors je ne me satisferai pas de tes promesses Mactar. Si tu es assez bête pour liquider ton travail, au moins utilises le pour toi, ta mère et les gens que t'aimes. Pas moi.
- Mais tu sais que tu en fais parti Nour. Même si nous n'en avons jamais parlé, tu sais bien que je t'aime, renchéri-t-il avec une certaine pudeur. Depuis le temps où je t'appelais « ma petite sorcière » et maintenant, beaucoup de choses ont changé. Nous avons grandi et mes sentiments avec... Je (...)
- Arrêtes de dire ces horreur ! L'ai-je interrompu dans sa lancée. Sur mon visage se lisait le dégoût.
- Des horreurs Nour ? Répéta-t-il les sourcils arqués. Là, il avait l'air blessé. Profondément blessé. Toutefois c'était un mal nécessaire.
J'enfonçais le poignard dans sa plaie tandis que c'est mon cœur à moi, qui le plus saignait :
- Oui, Mactar ! Des horreurs, des abominations que je n'en peux plus d'entendre. Quoi ? Ne me regarde pas avec cet air de chien battu. C'était ton choix de m'aimer alors accepte la douleur de me perdre. Je ne veux pas de ton amour Mactar, encore moins de ton aide. J'ai toujours fait semblant de ne rien voir alors pourquoi m'exposes-tu tes sentiments qui sont comme un crachat à mon visage. Je croyais que tu étais mon ami, mais je crois que maintenir cette relation ne fait qu'accroître tes faux espoirs. À l'heure d'aujourd'hui, la seule chose que tu puisse faire, c'est rester loin de moi !
L'expression qu'il avait sur son visage était indescriptible. Alors c'était ça que d'avoir le cœur brisé. Je le contournai et pris le chemin des escaliers. J'aperçus en partant des gouttelettes d'eau danser sur sa joue, c'est les mêmes qui perlaient sur les miennes. Et pour rassurer nos cœurs, nous mettrons tous deux cela sur le compte de la pluie. Lui, resta là, debout comme figé comme le froid de février. Moi je regagnai ma chambre et me roulai en boule ; je venais de perdre mon meilleur ami.
Oui, l'amitié c'est le pardon. Oui l'amitié c'est le don de soit pour l'autre. Mais s'il s'avère que nous sommes un fief de toxicité l'un pour l'autre, une bombe à retardement instable menaçant de s'autodétruire à tout instant, il vaut mieux détruire les fils qui nous rattachent l'être cher pour être seul dans sa décadence.
Peut-être que dans un montre, j'aurai pu apprendre à l'aimer....
*
La lune recouvrait de son joli reflet la villa Sarrène. Mactar, entendait sur les escaliers qui bordaient la devanture. Son oncle ne rentrait que très tard de son errance quotidienne. Comme un électron libre, il s'absentait toute la journée tandis que son foyer peu à peu, s'ébranlait. Quand Aïcha était encore vivante il était déjà pleinement irresponsable, mais maintenant il semblait totalement perdu. Il n'en avait cure de ne pas pouvoir donner la dépense quotidienne à sa femme, il n'en avait cure que son fils autiste soit déscolarisé, il n'était même pas au courant que sa fille s'était fiancé au monstre qui sûrement détruirait sa vie, alors que même les oiseaux perchés sur leur niche ne parlaient plus que de ça. Fuyard, il noyait ses problèmes dans la rue, les grandes places et le jeu.
Comme prévu, Ousseynou Sarr n'arriva que quelques minutes avant l'aurore. Mactar se leva pour le saluer respectueusement, même s'il n'en était pas tout à fait digne. Son oncle troqua ses « marakiss » pour des claquettes, retira son couvre-chef et prit le chemin de sa chambre. Mactar le fixait toujours du regard, désemparé, brûlant de colère, de tristesse et de peur :
Oui, il avait terriblement peur car quelque soit ces motivations, Nour se ferait bouffer toutes entière par ce connard prétentieux et son entourage de rapace. Lors de leur « bagarre », ce qu'il avait vu dans ses yeux l'avait térrifié, cette lueur, elle était dénuée de toute humanité.
Oui, il était triste parce en avouant cet amour des plus sots , il venait sûrement de perdre sa plus belle et sincère amitié. Et cette colère dévorante était due à ce douloureux rejet. Nour lui préférait son bourreaux, et pourtant il lui avait tout donné, il l'avait tant aimé. Tant bien que mal, contre vents et marées, il l'avait protégeait de tout et aujourd'hui il la sauverait d'elle-même.
- Mactar, qu'as-tu à me suivre partout avec ce regard de chien battu ? Tu fais peine à voir, vas plutôt te reposer mon fils, lui conseilla son oncle en posant une main sur son épaule.
Un geste paternel qui l'irrita davantage. Il se dégagea, aujourd'hui Mactar n'avait même pas la force de sauver les apparences. Après tout s'était en partie à cause d'Ousseynou Sarr que la femme qu'il aimait était en détresse.
- Mon oncle, si vous avez quelques minutes à m'accorder, veuillez me suivre dans le salon. Je dois m'entretenir avec vous d'un sujet de la plus haute importance, annonça-t-il avant de le devancer dans la salle séjour.
Une fois que les deux hommes furent installés sur des fauteuils adjacents, Mactar se lança :
- La proposition que vous m'aviez faite, commença -t-il avant d'inspirer douloureusement, est-elle toujours valable ?
- Laquelle, celle d'épouser Nour ?
Un sourire malicieux naissait sur ses lèvres. La vie allait-elle enfin le décharger de ce terrible poids ?
- Oui, mon oncle, répondit Mactar à demi-voix. Une partie de lui se sentait toujours coupable.
- Eh bien, enfin tu reviens à la raison mon fils ! S'exclama joyeusement Ousseynou Sarr. Je n'ai qu'une seule parole, ma fille n'épousera personne d'autre que toi. Tu es le fils de ma très chère sœur, en plus je vois chez toi des vertus inestimables.
- Et si elle se montre réticente ?
- Oh cette fille est inconsciente, elle ne sait pas ce qui est bon pour elle. Je ne la laisserai pas ruiner complètement sa vie, tu es sa dernière chance, promit Ousseynou Sarr à son neveu.
Il lui fis une tape dans le dos avant de continuer :
- Si c'est pour ça que tu as renfrogné ton visage, alors tu peux dès lors recommencer à sourire. Nour deviendra ta femme. Tu n'as qu'à en parler à tes parents et la date que vous déciderez sera la bonne. Degnene meune teranga nakk* ( Je sais que vous généreux) mais je ne vous exige pas une grande dot. Sept cent milles et ses os lorsque la vie l'emportera, je ne te demande que ça ! Tu peux considérer que Nour est déjà tienne.
« Tu peux considérer que Nour est déjà tienne. ». Combien de fois Mactar avait-il rêvé d'entendre cette phrase ? Combien de fois avait-il vu en songe sa cousine en robe de mariée, lui adressant un sourire étincelant auquel il répondrait ?
Oui Mactar était désemparé car si aujourd'hui son rêve se réalisait, Nour pourrait l'haïr à tout jamais. Cependant c'était la seule solution qui s'offrait à lui. Que faire ? Pourquoi devait-il se sentir aussi coupable de l'aimer ?
Chemsseddine avait tissé une toile autour de Nour pour que jamais de ses fils elle ne puisse s'échapper. Mactar lui avait eu recour à l'ultime stratagème en passant par son père. Chacun des joueurs dégainait ses pions, pourtant il n'y avait qu'une seule reine sur l'échiquier.. Deux mariages alors se profilaient pour une lune de fiel.
Fallacieux*: Qui cherche à tromper, à nuire ; perfide : Arguments fallacieux.
Enfant du péché*: Cette expression qui normalement désigne un enfant hors mariage et des fois utilisé en ces termes « domou ndiallo » pour signifier enfant issue de caste différente. Cette expression montre à quel point la société sénégalaise réprouve ce mélange entre les castes.
So dé Yallah tawal kher*: Expression signifiant littéralement « Si tu es Dieu, tu n'as qu'à faire pleuvoir des pierres. ».
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Alors D'après Ousseynou Sarr, sa fille serait une inconsciente qui ne sait pas ce qui est bon pour elle, mais cela lui donne-t-il vraiment le droit de la donner en mariage sans son consentement?
Il est illégal de marier une femme contre son gré, en la contraignant ou sans son consentement. En effet, l'Islam a octroyé à la femme le droit de choisir son époux, tout du moins d'y consentir.
D'après le hadith prophétique : « La femme ayant déjà été mariée a plus de droit sur elle-même que son représentant légal (walî). Et la femme vierge doit donner son accord pour son mariage, accord qu'elle peut exprimer par son silence. » [1]
A savoir qu'à l'époque certaines femmes éprouvaient de la gêne à dire Oui de vive voix, voilà pourquoi le silence est considéré comme une forme de consentement.
On rapporte également que le Messager de Dieu — paix et bénédiction sur lui — annula le contrat de mariage d'une femme médinoise s'appelant Al-Khansâ' Bint Khidhâm car son père l'avait mariée contre son gré. Sa main avait été en réalité demandée par deux hommes, le premier étant le noble Compagnon Abû Lubâbah Ibn Al-Mundhir et le second étant un homme de son clan. La femme préféra Abû Lubâbah, alors que son père penchait pour le second prétendant à qui il maria sa fille sans le consentement de cette dernière. Al-Khansâ' se rendit alors chez le Messager de Dieu — paix et bénédiction sur lui — et se plaignit à lui en ces termes : « Ô Messager de Dieu, mon père a dépassé ses limites avec moi et m'a mariée sans tenir compte de mon avis. » Le Messager dit : « Son mariage est nul. Épouse qui tu veux. » D'après une autre version, Al-Khansâ' dit : « Mon père m'a mariée à son neveu malgré mon refus. » Le Prophète dit : « Tu peux entériner ce qu'a fait ton père. » Elle répondit : « Mais je n'aime pas ce qu'a fait mon père. » Le Prophète — paix et bénédiction sur lui — déclara : « Va, son mariage est nul. Épouse qui tu veux. » Elle reprit : « J'entérine ce qu'a fait mon père. J'ai néanmoins voulu que les gens sachent qu'il n'appartient point aux parents de forcer leurs filles à se marier avec quiconque. »
Cette femme ( Allah lui fasse miséricorde) est un vrai modèle de leadership féminin dit donc!
Il est du devoir du mari, s'il est au courant du refus de la femme, de ne pas avancer dans les procédures du mariage, même si le père de celle-ci lui facilite les choses. Il doit craindre Allah et ne pas accepter une femme qui ne veut pas de lui, même si son père prétend qu'elle n'est pas forcée. Il est de son devoir de s'éloigner de ce que Allah lui a interdit, car le Prophète, prière et salut d'Allah sur lui, a ordonné de demander la permission à la fille.
Sources:
• Extrait de la Fatwa de Cheikh Ben Baz concernant les femmes.
• islamophile.org
Important: S'il vous plaît répondez aux questions. Ça permettra de savoir comment nous améliorer.
Alors est-ce que vous aimez la manière dont avance l'histoire?
Dites-moi ce qui pourrez améliorer votre expérience en tant que lecteur?
Team Mactar, Chemsseddine ou quelqu'un du futur pour le coup?
Qu'attendez-vous pour la suite?
Quels thèmes de société pourrait-on inclure dans l'histoire?
Oubliez pas de voter, commenter et partagez l'histoire autour de vous. Un grand merci pour le temps que vous accordez à l'histoire et n'oubliez pas que c'est vous qui faites vivre ce livre, sans vous Mactar, Chemsseddine et Nour ne seraient que de vulgaires mots sans signification aucune. ❤️
Ah et oubliez pas de follow la page insta pour plus de contenu en exclusivité !( @ladysuzyta_01)
By Suzyass
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