Chapitre 32 - Révélations
Le plan d'Aleksy commençait dès le lendemain matin. Il avait prévu ce scénario pour que je puisse enfin annoncer ma grossesse à Luke sans pouvoir reculer, une sorte d'embuscade prévue, on peut le dire.
Je me réveillais par chance avant Luke ce qui m'évitait bien des questions et encore un peu plus de mensonges. Je me levais donc avec beaucoup de précautions pour ne pas le réveiller, il fallait que je rentre chez moi pour me changer et... oh non. Non. Non. Non pas maintenant. En posant deux doigts sur mes tempes de chaque côté, j'essayais de contrôler le tsunami qui était en train de ravager mon estomac mais je me rendis vite compte que c'était bien sûr inefficace. À peine étais-je debout que mes nausées commencèrent, si je vomissais ici tout serait fichu, je me voyais mal m'empêtrer encore dans des mensonges. C'est un cercle infernal ! Je me contenais alors au maximum, serrant mes lèvres contre mes dents jusqu'à ce que mes lèvres en deviennent douloureuses. Et courue sur la pointe des pieds jusque dans l'entrée où j'enfilais en vitesse ma paire de baskets avant de filer à peine quelques heures après le retour de ma balade nocturne.
Malheureusement pour moi mon corps a refusé d'attendre d'être à la maison pour se manifester c'est au détour d'une rue que l'envie fût trop forte. Voyons le bon côté des choses, l'avantage c'est que j'étais assez éloignée de chez Luke, pas loin de chez moi et je me sentais mieux. Inconvénients : L'impression d'être une jeune minette de 21 ans après sa première cuite et 2d point noir la honte. Ce n'est quand même pas vraiment glorieux de vomir dans un coin de rue sombre. Mais relativisons c'est important, le verre est plus qu'à moitié plein.
Le seuil de mon appartement a été plus que difficile à franchir mais j'y suis arrivée. Je me suis directement dirigée vers ma chambre où mon portable était encore et j'ai passé quelques coups de fil. Pendant mes discussions téléphoniques, les bras croisés je regardais les passants, la rue en contrebas tandis que des flashs de cette nuit-là se manifestaient. Rien que de passer dans mon quartier m'avait donné des frissons alors être obliger de rester dans mon appartement était une vraie géhenne. Je me sentais tellement peu en sécurité chez moi que j'avais fermé à clef derrière moi avant de me terrer dans ma chambre, c'est pour dire à quel point mon petit coin de paradis s'est transformé en Enfer. Après tous mes petits coups de fil, je m'accroupis près de mon lit et tirais une grosse malle vers moi. Je laissais mes fesses choir lourdement au sol près de mon lit puis l'ouvris comme un vieux trésor. Cette énorme boîte à souvenirs allait bien m'aider... Il se trouve que j'avais gardé tous mes vêtements de ma précédente grossesse. Un soupir m'échappa en sortant les vêtements de leur box avant de me choisir une tenue plus adaptée et disons plus féminine. J'enfilais alors des sous-vêtements appropriés et choisis une robe chemise toute simple avec un lien à la taille qui laissait libre mon ventre, enfin ! Douce victoire. En examinant la pièce mon regard se posa ensuite sur ma ribambelle d'escarpins et je ne pus m'empêcher de faire la moue.
« Je vous aime les filles mais je ne pourrais pas vous supporter une journée entière... Ce ne sont plus des jambes que j'ai mais des lampadaires et pas les petits formats je vous assure. » Me plaignis-je en observant mes jambes alourdies encore un peu plus aujourd'hui.
J'enfilais des bas de contention sous mes collants mais devant le miroir je me rendis compte que le fin tissu révélait bien trop mon petit secret alors j'utilisais ma botte secrète... Une belle paire de cuissardes plates. Sans trop nouer le lacet ça se portait aisément et au moins mon pauvre sang circulera au mieux en toute discrétion. Un rapide tour dans la salle de bain pour me coiffer, me laver la figure et les dents. L'hygiène de base mais cette sensation d'utiliser ces propres produits m'avait trop manqué. Puis au moins j'aurais l'air un tout petit peu fraîche parce que clairement les rayons de la lune ne semblent pas du tout plaire à ma peau. Enfin je pris mon sac à main avant de partir en direction de l'hôpital sans passer par le café, interdit, chouette ça va être long si je commence par des insomnies soignées sans caféine.
Sur la route je repensais au message vocal que j'avais laissé sur le répondeur de Luke. J'étais toujours aussi effrayée mais ce jeu de piste imaginé par Aleksy était amusant je dois bien l'avouer. Je me surprenais même à penser que j'avais hâte que Luke soit au courant, c'est pour dire !
« Minou, c'est moi. Je suis partie un peu vite ce matin... Je suis désolée, j'avais un rendez-vous cependant tu peux me rejoindre à l'hôpital de Salem, directement dans le pôle imagerie, ne t'inquiètes pas hein je vais bien, c'est une visite de contrôle après enfin... Tu sais, quoi. J'ai rendez-vous à 10 h, j'aimerais que tu sois là mais évidemment comme je ne t'ai pas réveillé ta présence n'est pas exigée non plus. Ce serait seulement plus agréable. Bref envoie-moi un texto quand tu auras reçu mon message... Je t'aime. »
Je ne sais pourquoi mais il a bien dû se passer 30 secondes entre le temps où j'ai fini ma phrase et celle où je lui ai dit que je l'aimais. En fait c'était comme si toute mon inquiétude avait surgi à la fin de ma phrase pour se personnifier, en quelque sorte, en moment de vide. 30 secondes de respiration anxieuse. D'un autre côté si on veut continuer à relativiser avec un message pareil en principe il ne peut que me rejoindre !
La suite du projet était donc que je me rende dans l'hôpital où j'attendis très peu de temps avant d'être prise en charge. Aleksy me rejoignit mais il choisit d'attendre dans la salle d'attente pour laisser à Luke son moment. Dans la salle d'examen je me félicitais d'avoir tout bien réfléchi car l'atout second de ma robe, me libérer le ventre étant le premier était sa praticité déconcertante. Elle se déboutonnait jusqu'au sein tellement facilement sans avoir besoin de se tortiller dans tous les sens ou de finir les fesses à l'air. Quand on est à un tel niveau de stress on se raccroche aux branches, toute excuse devient un psaume ou presque. Donc après m'être mise à l'aise ou tout du moins le maximum qu'on puisse l'être le ventre et l'entre jambes quasiment à l'air devant une parfaite inconnue. Allongeais sur le fauteuil d'examen comme me l'avait demandé l'infirmière je l'attendais tandis qu'elle discutait de son Noël avec une collègue à la porte.
Plusieurs minutes plus tard, quand je crus attraper un rhume du nombril, ma petite infirmière en blouse blanche s'avança vers moi et je lui expliquais brièvement pourquoi je venais si tard... Donc en plus d'être particulièrement désobligeante, elle était rustre, je vois que madame a tout pour elle. Je me rendais aussi parfaitement compte de ma mauvaise humeur et du fait que cette pauvre femme avait parfaitement le droit de raconter le Noël monstrueux chez ses beaux-parents.
Mon excuse était évidemment déjà toute trouvée. Je ne suis pas venue avant parce que j'étais à l'étranger bien sûr. Elle ne sembla pas relever et laissa couler son gel sur mon ventre, sa fraîcheur me surprit malgré qu'elle m'ait moyennement gentiment prévenue. À peine avait-elle déposé le moniteur sur moi que la porte s'ouvrit en fracas et Luke glissa sur le sol se rattrapant à la poignée de la porte. Ça pour une entrée c'est royal ! Tout était dans la classe de ce mouvement parfaitement imprévu mais contrôlé avec brio.
Son regard semblait happer par l'écran à côté de moi. Aucun de nous deux n'osait parler, nous n'entendions que sa respiration saccadée et haletante jusqu'à ce qu'il arrive à entendre les battements du cœur des bébés et je perçus d'ici son souffle se couper. L'infirmière lui demanda, toujours aussi aimablement de décliner son identité et il la renseigna sur son statut de petit ami. Les pétillements des cœurs des bébés emplirent la pièce de leur mélodie endiablée tandis que les yeux de Luke ne cessaient de naviguer entre moi, mon ventre et l'écran. Il était sous le choc sans aucun doute mais je ne m'étais pas attendu à un moment si émouvant. Je sentais qu'il n'avait pas de mot parce qu'il était fier tout simplement.
« Je ne savais pas comment te le dire... Mais tu vas être papa... ! »
Il n'attendit même pas la fin de ma phrase pour fondre sur moi me dévorant de baisers passionnés. Un soupir m'échappa entre deux échanges langoureux mais cette fois-ci ça n'avait rien à voir avec ceux de ces derniers temps. Celui-là était un soupir de soulagement ni plus ni moins. Je n'avais plus ce poids immense sur mes épaules, sans parler de la réaction de Luke bien au-delà de mes espérances ! Cependant je remercie intérieurement cette infirmière pour le moins frontale... ! De ne faire aucun commentaire sur le manque affligeant de bonne manière dont Luke et moi faisions preuve. Elle nous offrit même un sourire et pointa du doigt l'écran.
« Je vous félicite vous êtes enceinte de jumeaux ! Il est beaucoup trop tôt pour savoir le sexe mais vous voyez juste là... ? Alors... »
L'infirmière tira des traits sur l'écran alors que mon regard dévia sur Luke ce qui attira son attention une seconde. Il me sourit tendrement avant de prendre ma main dans la sienne.
« Ils mesurent 4 centimètres de long et font 1 gramme chacun environ. Pour vous donner un ordre de mesure quand on se reverra dans 1 mois vos bébés feront 20 grammes chacun et neuf centimètres. Préparez-vous à une grossesse éprouvante des jumeaux ça va très vite ! »
J'adorais regarder Luke, il avait les yeux rivés sur l'écran, serrant ma main de plus en plus fort alors quand mon regard croisa de nouveau le sien je vis des larmes au coin de ses yeux.
« Oh minou... ! »
Je le pris dans mes bras et quelques sanglots lui échappèrent.
« J'avais peur de ta réaction parce que ça a été plus rapide que ce que tu pensais et en plus il y en a deux ! En plus de ça nous n'avons pas encore de chez nous... »
Il releva des yeux étonnés sur moi et prit mon visage en coupe.
« Je t'aime Lucy, tellement... ! Et ces petits loups on en avait parlé, j'étais prêt, je t'assure ! Pour la maison effectivement je vais peut-être devoir réquisitionner ta personne pour la décoration et Aleksy m'a proposé de l'aide quand je lui ai parlé de ma maison alors ne t'inquiètes pas. Cependant je comprends mieux ceci explique cela. » M'avoua-t-il en souriant.
Le plan d'Aleksy s'arrêtait là mais le mien n'était pas tout à fait fini. Il me restait une promesse que je comptais bien tenir.
« Tu veux bien aller chercher Aleksy s'il te plaît. » Lui demandé-je.
Luke regarda l'écran une dernière fois avant de m'embrasser et sortir.
« Je vous laisse j'attends dans la salle d'attente. » Nous dit-il avant de partir.
Luke fit un geste de main à Aleksy pour qu'il rentre dans la salle alors qu'ils se firent une accolade virile. Aleksy le félicita avant d'entrer à son tour dans ma salle d'examen. Il regarda partout autour de lui semblant légèrement mal à l'aise. Cet endroit devait lui rappeler beaucoup de mauvais souvenirs, ce que je peux aisément comprendre...
« Aleksy, regarde l'écran juste là. » Lui demandé-je en captant son attention.
Mon infirmière bien plus sous le charme d'Aleksy lui sourit niaisement en faisant à nouveau deux traits à l'endroit de mes bébés pour qu'il les voie. Quand il comprit les images qu'il était en train de voir des larmes coulèrent le long de sa joue tandis qu'il s'approcha un peu plus de l'écran.
« Aleksy, je te demande devant eux maintenant. Est-ce que tu voudrais être leur parrain ? »
« Je vais vous laisser discuter prenez votre temps. En tout cas ils sont en parfaite santé vous n'avez pas à vous inquiéter. » Me rassura l'infirmière en fermant derrière elle.
Aleksy se jeta sur moi et me prit dans ses bras à son tour. Ah ces hommes, de vraies madeleines !
« Je ne te remercierai jamais assez de tout ce que tu as fait et ce que tu fais encore aujourd'hui... »
« C'est toi qui m'as sauvé Aleksy, sans toi, je ne sais pas ce que je serais devenue là-bas. En plus Luke m'a dit que les remerciements étaient de mise puisque tu as proposé ton aide pour la maison. » Lui avouais-je en poussant une mèche de devant ses yeux.
« Je sais que tu seras le meilleur parrain du monde, si tu le veux bien sûr ! » continué-je un peu émue.
« Je m'en fais déjà une grande joie ! » s'exclama-t-il en observant mon ventre avec amour.
Quand il sortit j'essuyais mon ventre et me rhabillais avant de rejoindre Luke dans la salle d'attente qui avait les clichés de nos bébés dans les mains.
« Luke est ce que ça te dérangerait si je t'empruntais Lucy juste une heure ou deux... J'ai besoin de ces lumières pour régler un petit détail ? »
« Pas du tout ! Prends soin d'elle. »
« Je suis le troisième homme de sa vie et je prends mon rôle avec tout le sérieux qu'il implique ! »
Luke nous sourit avant de frapper doucement l'épaule d'Aleksy, m'embrasser sur la tempe et partir. À peine était-il hors de notre portée que la curiosité l'emporta.
« Tu avais quelque chose à me dire ? »
« Oui mais pas ici... »
Aleksy observa rapidement les alentours avant que je ne le prenne par le bras pour sortir du bâtiment. Quand il se décida enfin à me parler nous étions assis par terre sur une colline sur plombée par les ruines d'un château. Au loin je pouvais presque apercevoir notre maison s'élever.
« Je suis un homme faible... » lâcha-t-il avec un soupir.
« Pourquoi ça ? »
« Je... Je ne voulais pas... Quand on était à l'hôtel Hektor et moi avons énormément discuté de ses dernières décennies de ce qui s'est passé pour lui, pour moi, de sa femme, de ses sentiments et il a essayé de m'embrasser. Je ne veux plus être ce genre d'homme à bafouer mon honneur et ceux des autres personnes. Alors j'ai quelque peu provoqué Hektor et il se pourrait qu'un soir où nous avons confondu le pichet avec la baignoire nous ayons couché ensemble. »
Aleksy était adorablement gêné en parlant de son couple et je ne pus m'empêcher de le prendre dans mes bras alors qu'il râla.
« Tu es beaucoup trop émotive. À mon époque on commençait à parler de comportement hystérique pour certaines femmes je vois à peu près pourquoi... »
Je fis semblant d'être outrée en prenant ses épaules dans mes mains.
« Voilà que le jeune homme dépravé se permet de me faire remarquer que la vitre entre nous n'était pas la pire idée du monde alors que je lui offre mon aide. En me faisant traiter de folle au passage alors que je porte actuellement ses neveux ou ses nièces, je vois la mentalité. Bien. Les gens changent avec la liberté je suppose ! »
Je fis exprès de me donner des grands airs alors qu'Aleksy finit par rire en me prenant dans ses bras nous faisons tomber tous les deux sur le dos. Le regard vers le ciel Aleksy reprit d'un ton sérieux.
« Je ne sais pas si je suis capable de l'oublier Lucy. Il m'a avoué qu'il m'aimait encore qu'il n'avait jamais cessé de m'aimer mais comment choisir entre ce qui est bien et ce qui est juste ? »
« Ce qui est bien c'est le plaisir égoïste que tu en retireras. Le juste c'est ce que la morale altruiste et réfractaire veut que tu fasses. Je n'ai jamais cru qu'on puisse vivre heureux en n'étant pas un tout petit peu égoïste. »
« Mais est-ce la bonne chose à faire ? Je l'aime mais est-ce que je ne l'aime pas suffisamment pour savoir ce qui est mieux pour lui ? Et un vieux chien enfermé toute sa vie n'est pas la compagnie qu'il mérite. »
Je tournais ma tête en direction d'Aleksy juste à côté de moi. Il était en intense réflexion observant les nuages distraitement.
« C'est justement pour cette raison que je peux te dire que tu as enfin le droit au bonheur Aleksy. Ne le laisse pas filer une seconde fois. Discutes-en avec Hektor pour savoir ce qu'il pense de votre couple dans l'avenir et profite enfin de tous les plaisirs que la vie a à t'offrir parce que tu le mérites tellement. »
« Quand je suis parti du manoir ce matin c'était un peu tendu car il semblerait que nos ébats aient inspiré sa femme. Puisque malgré le fait que nous nous soyons cachés dans une maison de chasse en rentrant Hektor a surpris Hope dans le lit de ton père. »
« Oh non c'est pas possible ! Que de révélations et il n'est que 11 h 30 ! C'est la villa des cœurs brisés un peu chez vous en même temps. Personne n'est avec la bonne personne »
Aleksy rit avant de mettre ses mains derrière sa tête.
« Alors selon toi je devrais céder et me laisser aller à une vie douce et heureuse avec Hektor ? »
« Allez arrête ! Je suis sûr que Drago a dû prendre un malin plaisir à te montrer comme se servir d'un ordinateur, internet tout ça. Et comme je sais que tu es quelqu'un de très curieux tu as forcément dû aller sur YouTube... ? »
« Oui c'est vrai et donc ? Suis-je en état d'arrestation ? »
« Pas du tout ! Mais tu as trouvé ça comment un mariage gay ? »
« C'est parfait putain, j'en veux un ! »
Nous avons tous les deux ri alors qu'Aleksy commençait déjà à prendre ses marques dans notre monde. Nous avons encore discuté un moment de sa culpabilité d'être attiré par les personnes comme lui et il était toujours aussi dur à convaincre sur la chose la plus importante. Qu'il soit heureux. Et puis aux alentours de midi nous sommes redescendus pour qu'il me dépose devant le restaurant que m'avait indiqué Luke par texto.
Une fois devant c'est Aleksy qui me prit dans ses bras.
« Je te remercie encore d'être toujours là pour moi. Tu n'imagines même pas le soulagement que c'est de savoir que j'ai quoiqu'il arrive une alliée dans ce monde. »
Je me lovais un peu plus dans ses bras avant qu'il ne prenne mon visage en coupe et dépose un baiser sur le bout de mon nez.
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