Sur le chemin du retour, Nicolace avait insisté pour conduire, Drago à côté de lui sur le siège passager. Hektor entre Hope et Aleksy et j'étais sur la banquette encore derrière entre Luke qui n'avait pas ouvert la bouche depuis les révélations de mon père et mon dit père. Pete, lui avait insisté pour s'allonger dans la remorque du van dehors, qui ressemblait fondamentalement à un gros pick-up. En même temps il n'y avait plus vraiment de place dans la voiture et je pense qu'il lui fallait aussi un peu de solitude pour digérer tout ça.

Je tombai de fatigue à l'arrière malgré l'ambiance pesante qui régnait du fait des révélations choquantes de mon père. J'avoue que même moi je ressentais le besoin de faire le point. Donc les aptitudes que j'ai sont dues à une très vieille grand-mère du nom de Tituba qui était la servante d'une des 5 sorcières les plus puissantes. Mes pouvoirs semblent être activés mais je n'ai aucune envie de m'en servir. Ma grand-mère et ma mère portaient toutes les deux un lourd secret qui les ont emmenés à se suicider me laissant seule avec mon père et j'étais enceinte. D'accord on va commencer par la base, la respiration. Inspire, expire profondément ça va aller. Je jetais un coup d'œil à côté de moi, mon père ronflait tout ce qu'il savait et je me suis dit que ça a dû être dur pour lui. Deviner pendant 1 tiers de sa relation que sa femme a un secret dont elle ne veut pas parler même à lui. Le 2/3 elle lui avoue enfin mais ma grand-mère et leur bébé meurt pour finir le dernier tiers avec une femme complètement dépressive et bipolaire qui finira par se suicider alors qu'il lui a dédié sa vie entière... Je ne sais pas à qui j'en veux le plus finalement. Mon père qui ne m'a jamais rien dit me laissant croire que j'étais folle de m'imaginer des pouvoirs ou ma mère qui m'a abandonné sans se soucier de moi ? Quel passé charmant aurais-je à raconter à mes bébés... Du coup j'espère seulement que ce sera des garçons pour qu'ils échappent à cette espèce de malédiction qui ne touche que les femmes vraisemblablement. Un soupir m'échappa alors que Luke me regarda un sourire attendri sur le visage avant de me prendre par les épaules afin de me blottir contre lui. Ce geste aussi anodin paraît-il me fit sourire, sa chaleur, le fait de pouvoir le sentir me faisait du bien. On n'imagine pas la douleur que c'est d'avoir quelqu'un avec soi mais d'avoir pour seul contact physique des brutes une fois toutes les 2 semaines, c'est comme si on avait l'impression de ne plus exister. C'est complètement absurde mais malgré le dialogue avec Aleksy je me rendais compte maintenant que ça avait peut être était un facteur de ma dépression. Je me souviens des paroles d'un homme très sage qui disait : le pire désespoir c'est l'indifférence. À présent je savais que c'était vrai. Machinalement en pleine réflexion je caressais mon ventre tandis qu'Aleksy se retourna à ce moment et suivit mon geste du regard. Je me rendis brusquement compte de la situation et soupirai d'aise en me blottissant un peu plus contre Luke, lui signifiant du regard de ne pas insister. Je crois qu'après ses révélations il me fallait juste un petit délai déjà pour être sûr qu'il voulait toujours de moi avec la case sorcière sur mon curriculum vitæ. Et qu'il sera prêt à digérer que non minou ce ne sera pas dans un an finalement mais tout de suite...!

Plusieurs heures de route plus tard nous étions enfin arrivés dans un hôtel à mi-chemin pour au moins fêter Noël. Alors à midi environ 16 heures après notre évasion Hektor avait insisté pour s'arrêter dans un bon hôtel et nous offrir le repas. Les garçons allèrent en premier à table tandis que je demandais seulement quelques minutes dans une chambre pour prendre une bonne douche chaude. Seul mon père me suivit.

« Je peux t'acheter au moins une tenue Sisi pour changer de ce pyjama horrible ? »

Je déposais ma main sur son biceps en lui souriant.

« Ce serait super papa mais te ruine pas, hein ! »

Il me fit un clin d'œil avant de partir et finalement se retourner à mi-chemin.

« Toujours du S ? »

« Hum... Non du M. Je me sens un peu ballonnée »

Mon père m'observa avec une moue dubitative qui accentua ma gêne.

« Quoi ? Je ne rentre plus dans tes critères de beauté ? » Ris-je.

« Ta mère aussi était "ballonnée" je suis père et ton père tu ne me la feras pas à moi. Et au vu de ton sourire je suppose que c'est de l'imbécile heureux qui te sert de petit copain ? »

« Papa ! »

« OK ça va on en reparlera de toute manière »

Je le remerciai avant de m'enfermer dans la chambre un sourire béat imprimé sur le visage. La chambre autour de moi sentait bon les fleurs, une feuille de menthe fraîche avec un chocolat était même posée sur les oreillers avec une vue sublime par les fenêtres. Sans plus perdre de temps je filais sous la douche et tous mes muscles se détendirent au contact de l'eau chaude sur mon corps. Tout était prévu dans la douche, gel douche, shampoing, après shampoing tous d'odeurs neutres ce qui m'arrangea au vu de l'odorat surdéveloppé que j'avais en ce moment. Devant la glace je me trouvais amaigri du haut et du bas mais au milieu grossi sans grand étonnement. Je passais une main sur mon ventre avant d'enfiler un peignoir. Un mot à côté provenant de l'hôtel notifiait qu'une maquilleuse pouvait venir sur demande pour une prestation en chambre.

Soudain quelques coups résonnèrent à la porte. J'allais tout de suite ouvrir et mon père me tendit une tenue emballée.

« Non papa il ne fallait pas je t'assure c'est... »

« Je ne t'ai pas habitué à discuter mes ordres jeune fille ! On a tous commandé des costumes c'est un après-midi chic que nous allons passer. J'ai même un peu bidouillé au vu de ton état qu'on reste jusqu'à demain. Comme ça on passera l'après-midi tranquille dans un petit salon, le soir on dînera tôt et tu pourras te reposer dans un bon lit. »

Je pris mon père dans mes bras alors qu'il accrocha la robe sur la poignée de la porte pour me serrer contre lui.

« J'ai eu tellement peur pour toi Sisi. Et tu avais raison je suis plus qu'heureux d'être avec toi pour Noël. Je t'aime tellement ma chérie. »

Une larme m'échappa alors que je dézippais la protection de la robe, abasourdi par la beauté du tissu.

« Papa... Je ne sais pas quoi dire...! »

« Simplement merci Sisi. Je te souhaite un joyeux Noël. Oh et il se pourrait que quelqu'un vienne frapper d'une minute à l'autre tu ouvriras, c'est de la part d'Hektor. »

Il me réserva encore un de ses superbes clins d'œil avant de filer dans une chambre, pour se changer je suppose. Je pris la robe avec moi avant de la déposer délicatement sur le lit en enlevant soigneusement sa protection. C'était une superbe robe rouge en soie fluide. En regardant le dos je me demandais pourquoi je ne m'en suis pas doutée. Mon père a toujours voué une admiration à la beauté et l'élégance de Vikki Doukan celle qui a inspiré la fameuse Jessica Rabbit. Alors au regard de cette information ma robe tout à fait classique à l'avant cachait un décolleté plongeant dans le dos outrancier. Je rougis me cachant le visage avec le tissu avant de filer dans la salle de bain pour l'enfiler. À peine l'avais-je enfilé qu'on frappa de nouveau à ma porte. Me remémorant la discussion avec mon père j'ouvris sans me méfier. Mais au moment où la porte s'ouvrit je me retrouvais face à une parfaite inconnue.

« Bonjour je m'appelle Irène je suis votre maquilleuse ! »

Je suppose que maintenant qu'elle est la je peux profiter, non ? En voyant ma serviette sur la tête elle me proposa tout de suite de me coiffer aussi et j'acceptais avec plaisir parce que franchement lever les bras me donnait envie de vomir. Elle me recoupa même les cheveux qui avaient poussés n'importe comment en me faisant la discussion. Je me sentis un peu sotte de lui avouer que j'étais enceinte alors que je n'arrivais pas à le dire à la personne la plus importante de ma vie. Mais il fallait qu'on ait cette fameuse discussion avant de lui dire quoi que ce soit à propos des bébés. Il était hors de question que je lui impose ces enfants s'il ne voulait plus de moi, quitte à les élever tout seul. Elle fut d'agréable compagnie jusqu'à la fin et en partant j'étais sublime, une vraie fée cette Irène.

Elle m'avait refait mon carré long en le bouclant. Ce qui me faisait une petite bouille adorable et au niveau du maquillage elle avait tout misé sur les yeux et le rendu était époustouflant. J'avais un smoky eyes charbonneux qui donnait au vert de mes yeux une teinte prononcée presque reptilienne. Je soufflais un bon coup en me regardant. Heureusement que je misais sur le dos et que la robe était fluide parce qu'une petite bosse commençait à se former au niveau de mon bas ventre. J'arrangeai rapidement mes cheveux devant le miroir avant de sortir de la chambre.

À peine ai-je fermé la porte que je sentis deux mains enserrait ma taille, ses mains se faufilèrent dans le tissu de ma robe avant que sa tête ne vienne se mouvoir dans mon cou.

« Luke... On doit descendre, non... » murmuré-je d'une voix à peine audible.

« Rien ne presse, Hope a proposé de se retrouver plus tard pour que chacun puisse un peu souffler »

Je nouais mes bras autour de sa taille avant qu'il ne me pousse gentiment à l'intérieur de la chambre. Je ne pus m'empêcher de rire puis je m'assis sur le lit et tapais la place à côté de moi. Luke ne sembla pas arriver à détacher son regard du mien, il semblait comme hypnotisé. Malgré tout il avança avant de se mettre à genou devant moi, sa tête sur mes jambes.

« Tu m'as tellement manqué que je pourrais rester des heures rien qu'à te contempler. »

« Tu te rends compte qu'il faut qu'on parle Luke ? »

Il sembla surpris mais ne bougea pas d'un pouce tandis que je passais mes mains dans sa tignasse épaisse.

« À quel sujet ? »

« À propos de tout ça, de moi, de nous »

Il soupira mais resta silencieux toujours fixé sur mon visage.

« Je voudrais qu'on parle des révélations de mon père pour savoir si ça ne remet rien en question de ton côté. Si tu veux toujours de moi, tu sais même après tout ça, le fait que je sois supposément une sorcière, que j'ai apparemment une malédiction aussi enfin tout. Je veux dire regarde mon père il a cru en ma mère jusqu'au bout et le voilà seul comme les pierres aujourd'hui avec pour seule compagne des souvenirs atroces. Parce que je me souviens bien de ce jour-là. Je rentrais du lycée nous étions le jour d'Halloween. Je suis tout de suite montée dans ma chambre pour essayer une dernière fois mon costume et quand je suis allée dans le dressing pour aller voler une paire de talons à ma mère, mon père l'avait dans les bras et la corde se balançait au plafond. Il ne s'est jamais remis de son suicide et moi j'ai encore du mal parfois à l'assimiler et à parler de ma mère au passé. Alors je ne dis pas que je suis dépressive ou que j'ai des envies de suicide je mets simplement en lumière le fait que j'ai une ascendance avec des fragilités mentales et rien ne dit que j'y échapperai... »

Luke prit ses mains dans les siennes et les mit sous sa tête.

« Tu sais ce que j'ai découvert moi hier soir ? C'est que j'ai la chance d'avoir retrouvé la personne que j'aime le plus au monde. Que cet être humain est l'extraordinaire femme que je recherche désespérément depuis quelques mois, grâce à toi et ta famille je vais pouvoir commencer mon prochain bouquin et quelle meilleure inspiration que la femme que j'aime pour ça ? Et ensuite pour les antécédents de ta famille je ferais juste plus attention à toi c'est tout mais je sais que tu es une femme forte, tu sais l'effet cataclysmique qu'a le suicide sur une famille alors je te fais confiance pour prendre les bonnes décisions et me parler s'il y a la moindre, chose, le moindre problème, d'accord ? Je ne veux pas qu'il y ait de secret entre nous. »

Aie. Niveau honnêteté et estime personnelle j'étais au plus bas et j'avais peur que si je ne lui dis pas maintenant il ne m'en veuille. Après tout ma mère avait fait ça. Elle a repoussé et je ne peux pas dire que ça lui ait grandement réussi de cacher des choses à mon père. Alors peut-être devrais-je sauter le pas et oser... Je pris une grande inspiration caressant le dos de sa main avec mes doigts.

« À ce propos justement Luke... Il faudrait que je te dise que... »

« Sisi tout le monde est prêt tu viens ? Si Luke est avec toi c'est encore mieux. »

Mon souffle comme ma résolution se dégonfla comme un ballon alors que Luke me sourit.

« On a bien 2 minutes pour que tu me fasses ton aveu ? »

« Je t'aime tout simplement. »

Semi-mensonge, demi-vérité. Il se releva avant de mettre ses poings de part et d'autre de mes hanches pour me voler un baiser avant de tendre sa main vers moi.

« Si mademoiselle veut bien se donner la peine. »

Je m'amusais de sa galanterie alors que nous avons rejoint le salon où tout le monde nous attendait. Hope était à côté de mon père à l'opposé de Hektor ce qui me surprit tout de suite. Lui était assis à côté d'Aleksy très mal à l'aise mais extrêmement élégant dans son costume. Drago et Pete se chamaillaient sur la manière de porter la cravate. Pete semblait bien plus détendu que tout à l'heure. Luke et moi nous sommes assis dans cette ambiance plus calme mais avec une pointe d'amertume. Nous nous sommes tous laissé bercer par l'ambiance chaleureuse que cet hôtel proposait, évidemment nous étions les seuls mais c'est bien ça qui en faisait tout son charme.

Nous avons finalement tous bien ri même Aleksy s'est laissé aller à quelques blagues mais je commençais à le connaître, quelque chose le tracassait. Je ne voulais pas le bousculer ou le braquer alors je ne dis rien mais à la fin du repas quand nous nous sommes tous séparés pour le thé, la sieste pour certain je me suis discrètement approchée d'Aleksy en frottant son bras.

« Si tu as besoin de quoi que ce soit tu sais que tu peux me parler n'est-ce pas ? »

« Les choses ne sont pas si simples... »

« Elles peuvent l'être Aleksy. En tout cas n'hésite pas d'accord ? »

Il hocha affirmativement de la tête avant de déposer un baiser sur mon front. Je lui adressais un dernier regard avant de suivre Luke dans notre chambre. J'avais beau être sublime, la beauté a besoin de repos alors comme ce n'était que pour une sieste je m'allongeais dans les draps en sous-vêtements. Luke ne manqua rien du spectacle sauvage que je lui offris involontairement avant de le rejoindre sous les couvertures. Une fois tous les deux à l'intérieur, Luke me serra contre son torse et à cet instant j'ai compris que tout mon calvaire se finissait là dans ses bras. Je pouvais sentir son odeur si particulière, caresser cette cicatrice qui était l'objet de tous mes rêves, dessiner le contour de chacun de ses muscles saillants.

« Je vois que mon père t'apprécie, je n'aurais pas pensé. Non pas que je remette en doute tes qualifications de gendre idéal mais disons que mon père s'est un peu renfermé depuis ce qui m'est arrivé avec mon ex-fiancé donc je ne m'attendais pas à ça. Mais c'est tant mieux ! »

Le rire de Luke emplit mon oreille et me donna la chair de poule. Rien que ce son si innocent et indomptable soit il me remplissait d'une joie que je n'aurais pu quantifier d'une quelconque manière.

« Oh disons que nous sommes partis sur ces bases à lui. C'est-à-dire qu'il est tombé sur ton appartement saccagé, moi dedans assis en me tenant la tête et les déductions sont trop vite arrivé. Il m'a pris par le col de la chemise et m'a collé son point dans la figure comme j'en ai rarement reçu. Mais en me relevant il a vu que j'étais dévasté et que je ne réagissais pas à ces poings. Nouvelles déductions je n'étais peut-être pas un homme violent finalement. Alors il m'a jeté sur ton canapé et m'a sommé de m'expliquer rapidement avant que et je le cite "ma bouche ne ferme plus étanche et que je la ferme à jamais". Je t'avoue qu'il ne m'a pas fait mince impression tout de même. »

Je mis une main devant ma bouche horrifiée avant de me confondre en excuses.

« Oh non ! Je suis désolée. En plus je ne me rappelle plus si on en avait parlé et même si on l'avait fait, une visite de mon père ça se prévoit, on se prépare, il y a des répétitions ! » Ris-je à moitié sérieuse.

« Non ne t'excuses pas c'est normal ! Après tout ce qu'a traversé ton père je trouve qu'il gère d'une main de maître sa famille. Ou du moins d'un poing de maître. »

Nous avons ri ensemble avant que Luke ne me caresse la joue et m'embrasse passionnément.

« Pourquoi on parlait de mon père déjà...? » lui demandé-je pour le taquiner.

« Je ne sais pas ! »

Nous nous sommes confondues en étreinte, baisers et caresses. Jusqu'à atteindre des sommets que je ne pensais plus pouvoir toucher un jour. Nos soupirs se faisaient de plus en plus lascifs comme si nous implorions la fin de cette douloureuse mais satisfaisante torture. Pourtant même après nos ultimes souffles nous ne pouvions plus nous lâcher et je crois bien que nous nous sommes endormis dans les bras de l'autre nos corps ne pouvant supporter d'être éloigné une minute, une seconde de plus.