Chapitre 28 - Joyeux Noël
« Je vois que nous ne sommes pas logés dans le même home. » Rétorqua Aleksy.
Il m'arracha un rire franc alors que je continuais mes explications en allant cacher ma paille sous mon futon.
« 7 de mes repas seront sucrés, et 7 salée. Si on compte 3 portions de légumes, 2 portions de crudités il me restera 2 portions de viande. Je demanderais de la viande rouge tous les jours, saignante et je te la donnerai. Alors il se peut que tu ne digères pas la viande mais le sang sera quand même là. Au pire des cas si je n'arrive pas ou pas assez régulièrement mon petit tour, tu auras déjà un peu plus de fer. »
« Ingénieux. » Réfléchit Aleksy.
« Ça nous laisse 2 semaines pour te remettre sur pied. »
« J'espère que l'esprit de Jésus continuera à t'habiter ma chère. Mais dis-moi tu ne t'inquiètes pas pour ton bébé ? Il a peut-être besoin de cet apport ton... Bébé. » Me demanda Aleksy.
Je ris nerveusement, c'est vrai qu'avec tout ça je n'avais même pas pris le temps de le mettre au courant.
« C'est si dur de dire bébé et pas bâtard, Aleksy ? Et avec tout ça j'ai oublié de te dire il y en a deux en fait ! Et non je ne m'inquiète pas. Le père, Luke n'est pas tout à fait un loup-garou. Il est habité par l'esprit d'un loup certes mais il n'a subi aucun changement dans son ADN donc mes enfants seront parfaitement normaux. »
« Ce n'était peut-être pas le meilleur endroit pour nous faire une paire. Je vois, une sorte de rituel satanique... ? J'en ai entendu parler à mon époque. »
« Bon, écoute tu trouveras à te plaindre vers quelqu'un d'autre parce que moi je n'y suis pour rien. Et tu as intérêt d'être gentil parce que ce sera toi le parrain ! »
« Je te demande pardon ? »
Aleksy prit la pleine mesure de mes mots et sembla ému. Je lui promis à nouveau de sortir d'ici et nous sommes restés là comme deux imbéciles assis l'un contre l'autre.
Première semaine avant la fuite. La semaine passa rapidement, comme prévu je donnais chacune de mes viandes à Aleksy qui avait au début énormément de mal à la digérer. Mais à défaut d'autre chose c'était pas mal surtout que je n'ai pas réussi à refaire mon petit tour avec l'eau. Ces abrutis n'étaient jamais venus rechercher leur verre d'eau et la paille. Je suppose qu'ils avaient été bien trop occupés à se faire incendier par un des médecins. D'ailleurs en parlant de docteurs ils s'occupent tous personnellement de mon cas et ils se relaient pour m'emmener à manger. J'avais toujours le choix de ma viande et une grande quantité d'eau maintenant. D'ailleurs quelqu'un était même venu me réparer mon robinet. Donc l'eau était un peu à volonté à présent malheureusement c'est de mon côté que ça coinçait... Je n'arrivais pas à comprendre comment j'avais fait. Sinon Aleksy avant quand même repris des couleurs ça faisait plaisir à voir alors notre plan s'annonçait quand même pas mal. Pas l'idéal mais pas mal.
Moi par contre c'était tout le contraire je m'enfonçais toujours un peu plus dans une dépression profonde et Aleksy était parfaitement impuissant. J'avais besoin de Luke, il me manquait terriblement et vivre cette grossesse dans une prison était la pire chose que j'avais imaginé. Je m'en voulais tellement de cette situation, d'avoir essayé de jouer l'intrépide alors que je n'en étais clairement pas capable.
En plus de ça mes seins étaient douloureux et l'absence de soutien-gorge me tirait rajoutant un peu plus de sensations de tiraillements mais apparemment au vu de ma dépression il me l'avait retirée par « mesure de sécurité ». Donc avec ce joyeux moral s'accompagnait 15 heures de sommeil par jour environ, ce qui est sûr c'est que je passais plus de la moitié de ma journée à dormir. Pour couronner le tout, des brûlures d'estomac s'ajoutaient petit à petit à mon calvaire quotidien bien évidemment de plus en plus intense, sans parler de mes nausées. En revanche je savais que mes bébés faisaient la taille d'un têtard chacun et je trouvais ça mignon c'était un peu comme un rayon de bonheur que je pouvais chérir quand le moral était trop bas et que dormir ne fonctionnait pas.
Semaine 2. Aleksy se portait toujours aussi bien, il découvrait discrètement ses pouvoirs qui réapparaissaient avec sa force. On se préparait tous les deux à la suite c'était dans le courant de la semaine prochaine.
« Je n'y arriverai pas Aleksy ça me rend dingue ce truc avec le verre. Je n'en sais absolument rien. La manière dont je m'y suis prise la semaine dernière... J'ai tout essayé et rien ne fonctionne ! En même temps je ne sais pas ce qu'il m'a pris de me prendre pour une sorcière alors que j'ai les mêmes pouvoirs qu'une huître ! »
J'étais hors de moi et je voulais tout casser dans cette pièce. Comment ai-je pu être assez stupide pour croire que ça fonctionnerait ?
« La seule chose qui te manque comparé à la semaine dernière c'est du lâché prise Lucy. Ce jour-là on aurait dit que tu avais presque mis un bout de ton âme dans ce soupir. On n'en a cure que tu sois une sorcière ou non, l'important c'est que tu puisses le refaire alors arrête d'être aussi sympathique qu'un dimanche sans pain et lâche prise. »
Côtoyer Aleksy était la chose la plus drôle qui soit parfois, ces expressions étaient toutes d'une image et d'une justesse hilarante. Alors je lui souris tandis qu'un garde entra dans sa cellule. Je priais pour que ça ne soit que son repas et ce le fut.
« Ça te fait plaisir j'espère V-6-2-6, mes petites visites surprises. »
Aleksy le regarda dans les yeux très sérieusement avant de lui répondre.
« Oh vous savez, la visite, ça fait toujours plaisir. Si ce n'est pas quand ils arrivent c'est quand ils partent. »
Le garde le regarda d'un air meurtrier avant de lui déposer son verre et partir.
Malgré tout, mon moral était toujours au plus bas, en prenant un peu de recul je me dis que ça devait être les hormones qui amplifient ce que je ressens. OK je me sens seule, j'ai peur et Luke me manque mais en temps normal je n'aurais pas fait une dépression pour ça. On en a longuement parlé avec Aleksy ces temps-ci et je suis d'accord, il faut que je fasse de mon mieux pour essayer de maintenir ma tête hors de l'eau. Alors pour Aleksy je rassemblais la masse de conseil qu'il m'avait prodigué, je réfléchis à des moments heureux, à la force qui coulait dans mes veines, à mon pouvoir celui que je connais depuis toute petite. Une expiration bruyante m'échappa et une brise s'engouffra dans la cellule d'Aleksy. Étrange. Je jetais un coup d'œil au verre mais c'était toujours de l'eau. Je tournais la tête vers lui pour lui signifier mon échec quand il se retourna brusquement alerter par la trappe de sa chasse d'eau qui bougeait toute seule. Il s'en approcha doucement et souleva d'un coup le couvercle. Il passa sa main dans le liquide avant de se retourner vers moi me montrant sa main d'un rouge pourpre, le regard totalement ahuri.
« Tu as réussi ! Je savais déjà à mon époque que pendre les sorcières n'était pas la solution ! »
Il ria alors que j'étais complètement sous le choc. Peut-être que j'aurais dû le faire finalement ce tour aux archives.
« Je ne suis pas une sorcière ! Je le saurais je crois sinon. »
« Oui oui, enfin maintenant il va falloir passer par le chas d'une aiguille »
Et il avait raison. Dans très peu de temps il allait falloir que nous soyons efficaces et je n'avais pas vraiment envie que notre plan échoue simplement à cause de mes hormones, c'était hors de question, pas après tout ce que j'ai vécu ! Sinon niveau symptôme de grossesses, toujours des nausées abominables, les jambes lourdes sont apparues. J'ai l'impression qu'elles pèsent une tonne chacune et Aleksy me soutient qu'il faut que je fasse des exercices pour faire circuler le sang alors que je ne vois que par mon lit. Après tout il va faire quoi si je ne lui obéis pas ? Être enquiquinant ? À la bonne heure.
Autres symptômes persistants j'ai soif, je suis assoiffée constamment, je me lève même la nuit avec la gorge sèche et une envie irrépressible de boire tout en aillant une envie folle d'uriner. Mes bébés font la taille d'une lentille apparemment je les ai vus à ma seconde échographie. Par contre je remercie quand même leur matériel ultra sophistiqué parce que normalement les deux premiers mois les vérifications du bébé sont faites par sonde vaginale alors bon pour le coup, j'ai plutôt apprécié ne pas devoir me déshabiller devant eux. Juste la cage et l'ambiance ce n'était pas génial, mais on se fait la malle bientôt alors peu importe.
Quelques jours avant la fuite et Noël. Me voici à ma 7e semaine de grossesses, la dépression a laissé place à une irritabilité notable. Je suis constamment sur les nerfs, ce qui n'est pas des plus réjouissants pour Aleksy qui prend ça à la rigolade disant que si je pouvais garder cette niaque jusqu'à la fin de la semaine se serait utile. Il se moque mais je sais qu'on fond de lui il a eu peur pour moi pendant ma phase dépressive alors me voir redevenir normal (ou presque) ça le soulageait et moi donc.
Une réelle amitié est née entre nous en même temps nous nous connaissions depuis 7 semaines comme mes bébés finalement, nous n'avions que l'un et l'autre en cas de baisse de moral, d'envie de rire, pleurer, espérer. Cette expérience dramatique nous a rapprochés et j'étais fière de pouvoir le compter dans mes amis et alliés sur qui je pouvais compter. D'ailleurs nous nous étions fait une autre promesse, celle de toujours être ensemble même dehors et ça me plaisaient bien.
Du coup pour prévoir au mieux notre évasion ces quelques jours j'avais particulièrement fait attention à moi mais je n'avais constaté aucun changement au niveau de mes symptômes. C'était toujours les mêmes en fait, à part les jambes lourdes qui allaient mieux grâce à mes médecins et leurs remèdes miracles. Quelle ironie. Donc en gros mon cycle de vie, ma routine se résumait à manger, dormir, boire, faire pipi. Je ne m'ennuyais pas dans ma prison dorée contrairement à ce qu'on pourrait penser. J'avais des journées bien rempli du moins mon sommeil remplissait mes journées et ce n'était quand même pas rien. Mes bébés pesaient maintenant environ 1 gramme chacun. Je me suis mise à penser à toutes ces choses dans le monde qui font 1 gramme parce que comme ça on ne se rend pas bien compte.
« 1 gramme... » Réfléchit Aleksy à voix haute.
« Ce serait comme deux petits poids de balance, tu vois ? »
« Oui c'est... »
Il s'arrêta en plein milieu de sa phrase pour observer sa paume ouverte devant lui.
« Je ne me rends pas compte non plus. » Lui souris-je.
Depuis le début de cette nouvelle semaine, tous les jours nous rapprochant un peu plus du jour fatidique, Noël. Nous avions échappé au pire Aleksy aillant repris des forces avec sa cuvette pleine de sang, les médecins voulaient le ramener au plus vite dans leur laboratoire de torture mais je m'y étais opposée prétextant qu'il m'aidait pour ma dépression. C'était un grand moment de cinéma, d'ailleurs il me tarde de connaître la liste des nominés aux oscars. Enfin ce n'était pas tout à fait faux non plus mais disons que j'avais sorti les violons à outrance et le médecin qui était là n'a pas résisté et est parti en claquant la porte mais sans Aleksy. C'était une petite victoire.
Le jour J. Nos cœurs battaient la chamade, parce que j'avais des palpitations mais aussi à cause de ce qu'on allait faire, l'adrénaline était à son maximum et me semblait me brûlait les veines. Remarque peut-être que celui d'Aleksy ne palpitait pas, je n'en sais rien, bref. L'essentiel est que nous avions décidé de faire ça à 18 h. En principe, si tout fonctionnait comme prévu nous sortions quand notre petit écosystème nous indiquera la nuit et que mon soigneur de zoo viendra nourrir sa lionne enceinte pour la dernière fois avant de passer le relais. Nous avions calculé que mon nourrisseur rentrait chez lui tout de suite après moi et que son acolyte arrivait une heure après, les dimanches. Je suppose que ce cas de figure s'applique aussi les jours de fête, nous étions le jour de Noël donc c'est encore pire enfin j'espère.
La moitié de la journée devait bien être passée, maintenant, et je m'ennuyais ou tout du moins j'étais trop impatiente. Il me tardait que l'heure tourne plus vite. Je n'avais même pas faim, au-delà de mes symptômes, j'avais une boule au ventre de stresse. Par contre je savais que quand tout ça serait fini mon ventre gargouillerait à la mort c'est inévitable.
« Je comprends que tu veuilles festoyer après Lucy, mais tu n'as tout de même rien mangé encore, aujourd'hui, et il va arriver d'une minute à l'autre. » S'inquiéta Aleksy.
J'avais pris l'habitude de me mettre contre la paroi à l'endroit exact d'Aleksy de l'autre côté et ça me faisait du bien, à force je pouvais presque sentir sa présence en fermant les yeux. C'était tout ce que j'avais trouvé de plus rassurant en cas de baisse de moral ou d'envie de chaleur humaine, si je puis me permettre le terme.
« Allez ton dernier repas. Je me casse la future baleine ! »
La voix de mon garde me réveilla brusquement tandis que je somnolais contre la vitre et je savais ce que j'avais à faire, c'était maintenant.
« Attendez, tout à l'heure il s'est plaint de plus pouvoir respirer et il est tombé raide. En plus l'autre fois quand ils l'ont emmené pour faire mumuse, ils lui ont enlevé les deux poumons demandant explicitement à ce qu'il ait toujours de l'air pour que ces poumons se reconstruisent correctement. »
Il jeta un coup d'œil à Aleksy face contre terre. Il jouait très bien le type raide mort et je jouais très mal la codétenue inquiète.
« Fais chier. »
Il ferma ma porte et ouvrit celle d'Aleksy. À peine la porte fût poussée qu'il se jeta sur le garde en un éclair et lui fracassa la tête au sol à plusieurs reprises avant de se gorger de son sang et prendre ses habits. Il s'apprêtait soudain à partir.
« Ce n'était pas vraiment nécessaire de boire son sang Aleksy. Et n'oublie pas son doigt. Il nous faut son doigt pour l'ascenseur ! »
« Ma cuvette est vide depuis hier soir. »
« Mais pourquoi ne me l'as-tu pas dit ? »
« Pour ne pas que tu somatises ! Mais pourrait-on cesser ces palabres pour enfin se concentrer sur notre objectif ? »
« Ça me paraît faisable. » Ris-je en attendant qu'il ouvre ma cellule.
Le plan devait se dérouler ainsi. Garde dans ma cellule, garde dans sa cellule, garde à terre, clé sur le garde, ouverture de ma cellule, fermeture des cellules et ensuite nous avions décidé de prendre l'ascenseur. Il est tellement emprunté qu'il serait surement moins surveillé que les escaliers. Aleksy fit un pas en arrière et lui arracha carrément la main d'un coup sec. Il la brandit dans ma direction en faisant coucou avec une bouche aguicheuse ce qui me fit inévitablement rire malgré l'horreur même de la scène. C'était peut-être ce mélange d'absurde et terriblement déplacé qui nous faisait sourire. Ou peut-être le fait que la porte était enfin ouverte. Aleksy ne fit pas prier pour sortir et ouvrit tout de suite ma porte.
« On s'évade ! On est presque aussi bon que Mickaël Sco... Tu ne connais pas ce n'est pas grave. » Lui dis-je en courant vers lui.
À partir du moment où j'ai mis un pied en dehors de ma cellule, il me prit par le bras comme si j'allais aller faire des analyses et nous nous sommes dirigés vers l'ascenseur. Il avait enfilé la blouse blanche de son cadavre et ça lui allait très bien au teint je dois dire. Une fois au bout du couloir, Aleksy sortit la main de sa poche et activa l'ascenseur.
« On va à quel étage ? » me chuchota-t-il.
« Le 1er »
Il appuya alors lui-même sur le 1er cependant une voix robotique se fit entendre.
« Échec de la reconnaissance digitale merci de bien appuyer sur le bouton ou vous essuyer les mains avant de vous en servir. »
Aleksy me regarda, paniqué avant que je ne lui prenne la main d'entre les siennes et qu'avec l'index de notre cadavre j'appuie sur 1.
« La fin de votre garde est bien notée, au revoir ! »
Ouf. L'ascenseur ferma ses portes et démarra son ascension. Dans ce petit espace clos nous pouvions entendre les battements assourdissants de nos cœurs à cent à l'heure et mon ventre qui gargouillait.
« Tu vois je t'avais dit qu'il fallait au moins de sustenter un peu. »
« C'est vraiment le moment Aleksy ? » lui demandé-je en arquant un sourcil.
Il soupira avant de lever les yeux au ciel. Je savais qu'il était aussi stressé et tendu que moi, il ne faudrait honnêtement pas grand-chose pour qu'on s'entretue dans cet ascenseur tellement nos nerfs sont à rudes épreuves. Nous savions tous les deux qu'il ne fallait pas que l'ascenseur s'arrête, même si nous avions rangé la main n'importe qui travaillant ici nous reconnaîtrait. Surtout Aleksy à vrai dire, qui faisait partir des murs ici.
Nos cœurs étaient désormais silencieux, en attente mais l'ascenseur tinta, comme prévu à notre étage. À peine les portes étaient-elles ouvertes que nous sommes partis en courant en direction de l'accueil plonger dans la pénombre. Soudain mon corps percuta violemment ce que je compris être un torse. Aleksy se stoppa net derrière moi et mon menton se mit à trembler frénétiquement. Je ne voulais pas y retourner ni même penser à ce qu'ils nous feraient en représailles, d'avoir osé essayer de partir en plus d'avoir commis un meurtre...
« Pitié... » implorée-je à mon inconnu en fondant en larmes.
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