A peine descendu du bus, je me mis à courir. Comme tous les jours. Parfois, je parvenais à arriver pile à l'heure. Mais aujourd'hui était de ces jours où mon bus était en retard. Donc j'étais obligatoirement en retard moi aussi. Ca arrivait malheureusement bien trop souvent. Je finis par m'asseoir à ma place en soupirant discrètement. Pile à l'heure. La prof entra au moment où j'ouvris mon sac pour récupérer mes affaires. Je jetai des coups d'oeil autour de moi, comme à mon habitude. Je voulais vérifier qui était présent et qui ne l'était pas. Visiblement, celle qui était habituellement assise devant moi était en retard ou absente. Je soupirai encore quand la prof commença son cours.

La journée se déroula sans plus d'ennui. Je n'aimais pas spécialement aller en cours, mais je faisais toujours des efforts pour être un minimum attentif et sérieux. Mes parents faisaient tout pour que je puisse étudier le plus possible, je devais leur faire honneur. Mon plus gros problème était mon désintérêt total pour ce que l'école me faisait faire.

Malheureusement pour moi, le reste de la semaine ne se passa pas aussi bien. En raison de travaux sur la ligne, j'arrivai en retard tous les autres jours. Jusqu'à ce que mon professeur référent décide que c'en était assez. Il me convoqua juste avant la fin de ma pause déjeuner.

- Monsieur Jung, je suis heureux de vous voir à l'heure ce midi.

Je baissai la tête, me pinçant les lèvres. Je savais que ça allait arriver un jour. Mais c'était gênant. Je me sentis obligé de me justifier même si ma réelle raison n'était pas valable.

- Je suis désolé pour tous ces retards, monsieur. Je ne prends plus le même bus qu'avant et il y a souvent des problèmes sur la ligne. Cette semaine est particulièrement perturbée à cause de travaux.

- S'il n'y avait que vos retards, je pourrais encore comprendre. Mais vos notes ne suivent pas. Il va falloir vous reprendre. Et dès maintenant.

Je baissai encore la tête, honteux. Pour cela, je n'avais aucune excuse. Je me sentis rougir. Je n'aimais pas ce que j'étais en train de devenir mais la situation m'échapait. Je me sentais prisonnier des événements.

- Mais vous avez de la chance, je vais vous donner une chance de vous rattraper. Vous n'êtes pas sans savoir que l'école organise un festival pour le printemps. Vous aiderez un de vos camarades à monter et tenir un stand.

Je me retins de gémir pour protester. Je n'avais pas envie de ça. Et puis, c'était quand même une punition, son idée. Je pouvais déjà deviner la suite. Il y avait peu d'étudiants qui travaillaient à ce festival. Et le plus engagé dans ma classe était Seokjin. A qui je n'avais pas envie d'adresser le moindre mot. Comme une sentence, il reprit et confirma mes doutes.

- Vous travaillerez avec Kim Seokjin, il est déjà prévenu. Il vous attendra dans le hall à la fin de votre journée de cours. Il vous expliquera tout. Allez à votre place, le cours va commencer.

Je me retins encore de soupirer et allai m'installer à ma place. Il ne fallut que quelques minutes pour que les autres n'arrivent. Lorsque Seokjin entra, je détournai le regard de la porte. Il me cherchait. Je l'avais vu commencer à me fixer. Il savait que je savais. Je ne voulais pas faire ce travail avec lui. Mais je n'avais pas vraiment le choix. Si je ne voulais pas décevoir encore plus mes parents, je devais me plier aux exigences de mon professeur. L'après-midi se déroula à une lenteur extrêmement douloureuse. Chaque minute me rapprochait de ma punition et mon ventre se tordait. Je ne me sentais pas bien. J'allais me retrouver seul avec celui que je tentais d'éviter depuis des semaines. Bien sûr, personne ne le savait et mon professeur encore moins, mais moi ça me faisait du mal. Seokjin était quelqu'un de bien pourtant. Trop bien. Il était beau, gentil, doué, généreux et populaire. Tout le monde l'aimait. Moi compris. Peut-être même un peu trop. C'était ça le problème. Alors que je ne le connaissais pas tant que ça. Enfin, un peu quand même, mais j'avais pris peur dès que j'avais compris que quelques chose n'allait pas.

Je m'appliquai à ranger les affaires dans mon sac avec une extrême lenteur. Je sentais son regard me brûler la peau. Il m'attendait à côté de la porte de la salle. J'expirai un bon coup avant de me diriger vers lui, effaçant toute expression de mon visage. Tout allait bien se passer, je devais m'en convaincre. Il me sourit quand j'arrivai à son niveau et je dus retenir mon sourire. Je n'y pouvais rien, mes réactions étaient spontanées avec lui. Il me laissa sortir avant lui et me repassa devant dans le couloir. Je le suivis en baissant la tête. Il m'emmena dans une pièce et je fermai la porte derrière moi à sa demande. Le cauchemar. Je me sentais rougir et paniquer. Il était toujours souriant et prit la parole d'une voix douce.

- J'ai bien conscience que tu n'as pas envie d'être ici, Hoseok, mais ce n'était pas ma décision. J'aimerais que tu ne sois pas en colère contre moi. Est-ce que tu penses pouvoir faire ça ?

Il me prenait pour un enfant ? Je n'étais pas idiot, je savais parfaitement que ce n'était pas de sa faute. Je hochai la tête timidement. Ce n'était pas de la colère que je ressentais envers lui, de toute façon.

- Bien. Tu as une obligation d'une heure avec moi. Tu peux faire tes devoirs ou autre chose, je ne te forcerai pas à m'aider.

Je restai interdit, ne sachant pas quoi lui répondre. Il s'installa derrière l'unique ordinateur de la salle et se mit à faire des recherches. Pendant les dix premières minutes, je restai là, ne sachant quoi faire. Il ne prêtait pas attention à moi et c'était tout ce que j'avais espéré. Mais maintenant, je me sentais un peu déçu. Déçu d'être ignoré de la sorte mais aussi déçu de moi-même. Je finis par soupirer et me lever. J'allai vers lui et il tourna la tête dans ma direction en entendant mes pas. Son sourire me fit encore cet effet que je détestais tant.

- Je ... je peux t'aider à quelque chose ?

Il soupira.

- Et bien ... Pour l'instant, à part trouver une idée, il n'y a rien à faire.

- Tu n'as toujours pas commencé à préparer ton stand ? Mais c'est dans quelques semaines, normalement tu devrais ...

- Je sais. Me coupa-t-il. J'ai eu un imprévu et je dois recommencer depuis le début.

Je hochai la tête et m'assis à côté de lui. Pendant le reste de l'heure, je l'aidai à chercher. Nous avions quelques idées mais rien d'exceptionnel. Dans notre école, cette fête était très importante. On devait absolument faire quelque chose de bien. En sortant, Seokjin m'interpella.

- J'aime le printemps, je crois que c'est de ma saison préférée. Et toi Hoseok ?

- Je préfère l'automne même si j'aime beaucoup le printemps. Ce sont des saisons pleines de couleurs, de goûts et d'odeurs. Des saisons qui représentent la vie.

- Tu as raison.

Il me sourit encore et je me permis de répondre à son sourire.. Il hésita quand il se rendit compte que je n'allais pas dans la même direction que lui. Puis il haussa les épaules avant de s'éloigner de moi.

Le lendemain, j'arrivai à l'heure. Seokjin n'était pas libre après les cours à cause du sport qu'il pratiquait, aussi j'étais libre. Le lendemain encore, il était là, motivé. Un grand sourire aux lèvres. Je n'eus même pas le temps de le saluer qu'il prit la parole.

- J'ai trouvé une idée ! C'est grâce à toi Hoseok, merci beaucoup.

Je me retrouvai à ne pas savoir quoi lui répondre. Mon coeur s'emballa face à lui. J'avais pu l'aider. Et maintenant, il m'en était reconnaissant. Seokjin me remerciait, moi qui ne faisais rien d'autre que d'être là par obligation. Je haussai les sourcils pour l'interroger du regard, maintenant que le silence était retombé. Il se pencha vers moi et je reculai légèrement. Puis il prit une voix et une expression mystérieuses.

- On va tenir un stand avec les goûts et les odeurs du printemps. Le but sera de les reconnaître. On pourrait même faire gagner des prix. Oh, tu crois qu'on pourrait aussi faire un petit questionnaire sur les événements du printemps ? Avec ce qu'il se passe dans la nature et tout ?

- Euh, commençai-je. On devrait peut-être se concentrer sur les goûts et les odeurs ? Ca sera déjà pas mal je pense ...

Un grand sourire s'étala sur son visage.

- Au boulot alors !

Seokjin me dépassa pour quitter le hall et rejoindre la petite pièce dans laquelle on travaillait. Je le rejoignis assez rapidement. Pendant près de deux heures, nous travaillâmes sur le projet. Nous décidâmes de ce que nous voulions présenter et des prix que les participants pouvaient gagner. Ne restait plus qu'à trouver comment tout mettre en place et à contacter les entreprises capables de nous aider. Il y avait encore pas mal de travail mais nous en étions capables. Je ne vis pas le temps passer. Lui non plus. Nous nous fîmes virer à la fermeture de l'école. Il se dirigea vers son arrêt de bus et je m'arrêtai, interdit. J'allais sûrement faire le tour du quartier pour perdre un peu de temps et prendre le bus suivant voire celui d'après. Je ne voulais pas monter dans le même bus que lui. Quand il se rendit compte que je ne le suivais plus, il se retourna et m'interpella.

- Ca te dit qu'on aille boire un verre pour fêter notre avancée ? Je te raccompagnerai chez toi si tu veux, ça ne me dérange pas de prendre une autre ligne de bus.

J'hésitai un instant. Je ne pouvais pas monter dans un bus qui n'était pas le mien et me retrouver je ne savais où pour ça. Je réfléchis rapidement, j'allais bien finir par trouver une idée. Et si c'était moi qui le raccompagnais chez lui ? Comme ça, je pouvais prendre le bus que je prenais habituellement, et il me suffirait de prendre le suivant après l'avoir raccompagné. J'habitais plus loin que lui du lycée, je montais trois arrêts avant lui.

- J'accepte à une condition : c'est moi qui te raccompagnes chez toi.

- Quoi ? Mais je suis le plus âgé ! Ce n'est pas à toi de t'assurer que je rentre chez moi.

- Et bien, tant pis pour le verre alors, une autre fois peut-être ?

- Bien, tu as gagné.

Seokjin reprit son chemin pour se diriger vers le café le plus proche. Il y en avait un à quelques centaines de mètres, et ce n'était pas très loin d'un arrêt de notre ligne. Je m'étonnais moi-même d'avoir osé marchander avec lui, lui qui m'intimidait tant. Mais j'étais aussi fier de moi. Pour une fois, j'avais réussi à lui tenir tête. Après quelques minutes de marche, nous arrivâmes devant l'établissement qui nous intéressait. Nous bûmes un thé tous les deux et Seokjin m'offrit ma consommation. Nous discutâmes d'un peu tout et j'en appris beaucoup sur lui. Il n'aimait pas spécialement le sport qu'il pratiquait mais ça allait lui permettre d'obtenir une bourse d'études, alors il se donnait à fond, parce que ses parents n'avaient pas trop les moyens de l'aider. Il avait un grand frère et une petite soeur, mais sa petite soeur avait des problèmes de santé assez graves, raison pour laquelle ses parents n'avaient pas beaucoup d'argent. Seokjin était un stéréotype à lui tout seul. Le héro d'un film à l'eau de rose. Le mec souriant et populaire, qui faisait tout, qui se battait sur tous les fronts, qui gagnait tous les combats, et qui menait une vie très difficile avec une famille soudée mais souffrante. Et moi, j'étais l'héroïne stupide éperdue d'amour pour cet homme si charmant. Au final, je parlai assez peu de moi, évitant de répondre à ses questions. Je ne voulais pas risquer de dire quelque chose que je regretterais. Quand il commença à m'interroger sur ma vie amoureuse, je me sentis très rapidement rougir. Que pouvais-je bien lui dire ? "Je suis amoureux d'un garçon ultra populaire qui ne se rend compte de rien et qui a toutes les filles à ses pieds. J'hésite entre me résigner à passer ma vie seul, me forcer à être dans une relation hétéro ou me rouler en boule pour mourir dans un coin." Non, impossible d'évoquer ce sujet, c'était bien trop dangereux. Pour échapper à la discussion qui commençait à me déplaire, je fis mine d'avoir quelque chose à faire chez moi. Il ne posa pas plus de question et nous partîmes.

Je montai dans le bus avec lui, stressé. J'avais peur qu'il ne se rende compte de quelque chose. Il ne me voyait plus prendre son bus, et je pensais bêtement qu'il s'en était rendu compte. Je m'imaginais qu'il pensait que j'avais déménagé. Pire encore, qu'il avait compris que je l'évitais. Non, il ne serait pas aussi amical avec moi. Comme prévu, je le raccompagnai jusque devant la porte de sa maison. Il me salua en souriant, me souhaitant une bonne soirée, puis il disparut. Sa maison était une belle maison, relativement grande mais pas si luxueuse que ça. Ses parents devaient gagner relativement bien leurs vies, mais les soins de sa soeur accaparaient tous leurs revenus. En retournant à l'arrêt de bus, mon coeur se serra. J'avais passé une bonne soirée avec lui, c'était indéniable. Mais maintenant, je devais m'avouer autre chose : j'étais encore plus amoureux de lui. Ce que je cherchais à éviter venait de se produire.

J'eus du mal à dormir cette nuit-là ainsi que les nuits suivantes. Travailler avec Seokjin relevait à la fois du bonheur et de la torture. Plus les jours passaient, plus il se montrait proche de moi. Il était tactile, j'avais pu le remarquer en l'observant avec ses amis. Etais-je donc maintenant dans cette case, celle des amis ?

Le festival du printemps arriva à grands pas et nous fûmes prêts. Mon professeur était content de moi, il disait que mes notes avaient augmenté même si j'avais moins de temps pour réviser les cours. En fait, je faisais de gros efforts pour faire rentrer toutes leurs connaissances dans mon cerveau. Un jour, Seokjin avait vu une de mes copies et m'avait sous-entendu que je devais essayer de travailler un peu plus. Je n'avais pas osé lui dire que ça ne m'intéressait pas, et pour l'impressionner, je m'étais mis à travailler. Tout allait pour le mieux, du moins en apparences. Moi, jour après jour, je me retrouvais noyé dans mes sentiments sans savoir comment faire pour m'en sortir vivant. Parce qu'une fois le festival passé, tout ça allait se terminer. Les soirs passés avec Seokjin, les verres pour fêter nos avancées. Dans trois jours, tout ça allait prendre fin et mon coeur allait se briser.

La journée fatidique arriva et j'aidai Seokjin à installer notre stand de très bon matin. Comme d'habitude, il était très joyeux, mais moi j'étais malheureux. Il s'en rendit compte très rapidement et son visage changea quand il commença à s'inquiéter pour moi.

- Ca ne va pas Hoseok ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Je peux faire quelque chose ?

Je soupirai. Je ne voulais pas lui dire. Je voulais garder mes sentiments secrets jusqu'à finir par tomber amoureux de quelqu'un d'autre ou mourir de chagrin. Je secouai la tête pour lui signifier que je ne voulais pas en parler, sentant les larmes me monter aux yeux. Quand il perçut que je me retenais de pleurer, il me serra dans ses bras et je voulus le retenir pour toujours. Mais je me forçai à ne pas réagir. Puis il me lâcha et se recula un peu pour me regarder dans les yeux.

- Je sais bien que je vais te manquer, mais faut pas pleurer pour ça !

Il rit de sa blague sans se douter un seul instant que c'était vraiment ça le problème. De mon côté, je ne pus empêcher quelques larmes de couler et je ne répondis pas, incapable de prononcer le moindre mot.

- Désolée, je voulais te faire rire, mais on dirait que c'est raté, reprit Seokjin. De toute façon, on pourra toujours aller boire un verre de temps en temps, c'est pas parce qu'on a plus le festival qu'on a plus de raison de se voir.

Ses paroles me réchauffèrent un peu le coeur mais ça ne réglait pas mon problème. Nous voir n'allait certainement que me faire souffrire d'avantage. J'allais devoir mettre fin à notre amitié sans qu'il ne s'en rende compte, pour mon propre bien. Je secouai la tête pour chasser ma mauvaise humeur et je me remis au travail silencieusement.

- Si jamais tu as besoin de parler, rajouta doucement Seokjin, sache que je suis là pour écouter. Je n'aime pas te savoir aussi triste.

Nous finîmes d'installer le stand et la journée pût commencer. De nombreuses personnes vinrent tester nos goûts et nos odeurs et ce fut un grand succès pour nous. Notre professeur passa même nous féliciter pour notre travail. Mais plus la journée avançait, plus je sentais une boule grossir dans mon estomac. Quoi que Seokjin pouvait en dire, à la fin de cette journée, quelque chose se terminerait entre nous. Mais je m'efforçai de sourire en attendant, je ne voulais décevoir personne.

A l'issu du festival, j'aidai encore Seokjin à tout ranger, ce qui était complètement normal, même si j'avais envie de fuir le plus loin possible de lui. Aussitôt la foule éparpillée loin de nous, son visage changea encore pour reprendre cet air inquiet que je ne lui connaissais pas vraiment. Seokjin était vraiment un battant, il aimait la vie et faisait toujours en sorte de donner le sourire aux autres. C'était moi qui le mettais dans cet état et ça me déplaisait. Je ne voulais pas qu'il se soucie de moi, j'allais finir par croire que j'avais de l'importance à ses yeux.

Une fois tout rangé dans la petite pièce dans laquelle nous travaillions, je l'attendis silencieusement en priant pour qu'il ne pose pas plus de questions. Au lieu de sortir, il ferma la porte et me fit signe pour me faire comprendre qu'il voulait qu'on parle. Son expression était douce et rassurante.

- Hoseok ... Je ne sais pas ce qui ne va pas, et je ne vais pas te forcer à me le dire. Mais j'ai l'impression qu'il y a quelque chose de grave et je m'inquiète pour toi. Si tu as des ennuis, s'il te plaît, parles-en à quelqu'un, même si ce n'est pas à moi. C'est important. Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose, tu comprends ?

Je baissai la tête et me mis à pleurer encore une fois. Je ne voulais pas le perdre, mais je ne pouvais pas supporter de n'avoir que son amitié. Je m'assis alors contre la porte pour me calmer un peu. Seokjin en fit de même et s'assit contre moi, légèrement tourné dans ma direction. Je pris un petit moment à me calmer légèrement.

- Je vais ... Je vais régler ça, après ça ira mieux ...

Instinctivement, Seokjin passa un bras autour de mon épaule et je déposai ma tête sur la sienne. Il me serra contre lui et je me laissai faire. Pour la dernière fois, je pouvais bien me laisser aller. Demain allait être un autre jour. Après de longues minutes à pleurer dans ses bras, je finis par délicatement me reculer de lui. Mais il opposait une résistance. Il ne voulait pas me lâcher. Je ne savais pas ce qui lui prenait, mais c'était difficile à gérer. Ma poitrine me faisait affreusement mal et s'il continuait, c'était moi qui allait finir par ne plus vouloir le laisser partir. Avec un peu plus de force et une pointe de violence, je réussis à me dégager de son étreinte et je remarquai qu'il pleurait lui aussi. Le si solide Seokjin pleurait par ma faute, je ne pouvais pas accepter ça.

Nous nous observâmes un instant. J'étais sur le point de lui dire que je m'en allais quand il essuya délicatement mes joues, me retirant toute capacité de parler. Sa tendresse m'était jusque-là inconnue et je me sentais perdu. Ses mains encadrèrent mon visage encore mouillé et ses yeux plongèrent dans les miens. Avec une lenteur douloureuse, son visage se rapprocha du mien. Je compris immédiatement ses intentions, et même s'il était lent, je ne parvins pas à réagir. J'étais tétanisé. Il m'embrassa avec tant de douceur que je me demandais même si nos lèvres étaient réellement en contact. Mais c'était bien le cas. Seokjin était en train de m'embrasser et moi je ne faisais rien. Quand il se recula après quelques secondes de baiser sans réponse, je sentis le vide me happer. Il me manquait déjà. Alors j'agis sans réfléchir. Je franchis la distance qu'il venait de mettre entre nous pour sceller nos lèvres de nouveau. Il fut d'abord surpris mais me répondit rapidement.

De longues minutes s'écoulèrent alors ainsi. Nous nous embrassâmes, encore et encore, jusqu'à ce que son téléphone sonne et nous interrompe. Gêné, il ne répondit pas mais la personne qui tentait de le joindre insista. Il se résigna à répondre en me souriant timidement. Il allait devoir y aller. J'étais déçu, j'aurais voulu rester ici et l'embrasser pendant des heures encore. Seokjin m'aida à me relever et me serra dans ses bras une fois debouts.

- Je suis vraiment désolé, je n'ai pas le choix, je dois rentrer à la maison. Ma mère est retenue au boulot et ma soeur va rentrer, quelqu'un doit s'occuper d'elle.

- T'as pas à t'excuser, c'est normal. Je ... Je peux te raccompagner ?

- J'osais pas le demander.

Je me décalai et Seokin ouvrit la porte. Il ne devait plus y avoir grand monde dans l'école, tout le monde était toujours pressé de partir. Avant de sortir de la pièce, Seokjin me sourit beaucoup plus franchement et me tendit sa main. Je clignai des yeux, ne comprenant pas dans un premier temps. Puis je finis par glisser mes doigts entre les siens et il poussa un soupire satisfait. Après quelques mètres, je l'arrêtai. J'étais gêné à l'idée qu'on puisse nous voir main dans la main alors que je ne savais même pas ce que nous représentions l'un pour l'autre.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Interrogea-t-il doucement.

- C'est ... ça veut dire quoi ? Demandai-je en levant nos mains entrelacées devant ses yeux.

Seokjin rit légèrement et déposa un baiser rapide sur mes lèvres.

- On vient de passer vingt minutes à s'embrasser comme si notre vie en dépendait, Hoseok. Pour toi, ça veut dire quoi ? A moins que je ne me trompe complètement et que je ne sache plus reconnaître quelqu'un qui a des sentiments pour moi, je dirais que je suis en droit de montrer à tout le monde ce que tu représentes pour moi.

- Tu ... Mes sentiments sont réciproques ?

J'écarquillai les yeux. Evidemment, on venait de passer un bon moment à s'embrasser, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il parte du principe qu'on était déjà en couple ou quelque chose comme ça. Et je m'attendais encore moins à ce que ses sentiments pour moi soient assez forts pour qu'il veuille le montrer au monde entier dès maintenant. Seokjin m'embrassa encore, visiblement il ne pouvait pas s'en empêcher.

- T'es long à la détente Hoseok. Bien sûr que oui ! J'attendais que tu fasses le premier pas depuis un bon moment, et c'est pour ça que j'ai suggéré à monsieur Kang de te faire travailler avec moi. Je pensais que ça allait t'aider mais au lieu de ça, je t'ai fait pleurer. Je pensais t'avoir envoyé des signaux assez clairs pour que tu comprennes ...

J'encaissai difficilement ses révélations. Seokjin avait organisé tout ça ? Il avait manipulé notre professeur pour me forcer à monter ce stand avec lui. Il était bien plus calculateur que je ne le pensais. Ca voulait donc dire qu'il avait des sentiments pour moi depuis plus longtemps que ça. Il m'interrompit dans ma réflexion.

- Sors avec moi. Si tu ne veux pas t'afficher en public, si tu préfères garder ça entre nous, je comprendrais. Mais sors avec moi.

Cette fois, ce fut à moi de l'embrasser.

- Tu peux crier au monde entier ce que je représente pour toi, si tu veux. Tant que tu me le dis à moi encore plus souvent.