Chapitre 1
Arrivée sur New York depuis moins de deux ans, j'ai commencé à organiser ma vie petit à petit. La ville qui ne dort jamais est remplie de ressources innombrables pour ceux qui veulent les découvrir.
Ayant été embauchée au sein de la Carter corporation, en tant que graphiste, j'ai fait la connaissance de Matt, un bad boy au grand cœur, avec ses cheveux bruns, ses yeux marron vert et son charme de Portoricain. Son humour a illuminé mes journées bien qu'un peu lourd et décalé par moment, mais toujours bien intentionné. Nos échanges étant devenus assez intimes, nombreux sont ceux qui ont pensé à un rapprochement entre nous mais rien de tel. Matt est mon meilleur ami et rien n'est possible entre nous tout simplement parce que je ne l'envisage pas de cette manière. J'ai ensuite fait la connaissance de Lisa, une charmante blonde aux yeux bleus tirée à quatre épingles et qui se trouve être son amie. Le côté candide et délicat de cette jolie blonde m'ont aussitôt touchée et nous sommes devenues très complices et amies assez rapidement. Elle travaille à l'accueil de la boîte, toujours impeccable, souriante et attentionnée. Une perle rare.
Lors de mes débuts, je me débrouillais en anglais sans faire des étincelles pour autant. Mes nombreuses maladresses linguistiques ont été l'occasion d'une bonne tranche de rire pour mes deux nouveaux amis. Leur aide en la matière m'a été bien précieuse et l'occasion de renforcer nos liens. C'est ainsi que j'ai réussi à devenir presque bilingue et à obtenir une carte de résidente permanente. M. Ryan Carter étant pour beaucoup dans l'obtention de ce pass.
Ce matin, Matt déboule devant moi au bureau, armé de son casque de moto et de son blouson de cuir, en m'annonçant tout content, avoir une surprise pour moi ce soir. Étonnée, mais légèrement en retrait, j'écoute son idée avec attention. Matt sait que j'adore la musique et plus exactement le rock. Il me tend alors trois billets pour le concert de ce soir qui se tient dans un bar musical vers le quartier Soho. Excitée par cette idée qui nous donne l'occasion de sortir et de profiter de la bonne musique, j'accepte son invitation sans hésitation. Mon ami énonce le nom du groupe en précisant que ce sont des amis à lui, et ne tarie pas d'éloges à leur égard. Lisa est aussitôt emballée par cette idée, déployant son enthousiasme communicatif.
En fin de journée, en rentrant chez moi, je sélectionne quelques vêtements et attends Lisa, l'experte en la matière. Elle a apporté toute une panoplie de vêtements afin de m'aider à choisir au cas où ma garde robe ne me suffirait pas. Au final, j'ai opté pour un bustier avec un pantalon noir, des bottes cavalières et une petite veste en jean, remonté mes cheveux en queue de cheval et laissé Lisa œuvrer pour le maquillage. Elle s'éloigne juste assez pour admirer son travail puis, satisfaite, elle me tend un miroir. Mon amie a des mains de fée et le résultat est juste sublime.
Vêtue d'un jean bleu, d'un chemisier moulant et de ses escarpins qui lui font des jambes de rêves, mon Américaine préférée retouche une dernière fois son maquillage et laisse ses cheveux retomber sur ses épaules en une cascade de boucles blondes. Sa manucure impeccable n'a rien à envier à la mienne, ornée de noir, comme de coutume. Lisa s'en plaint assez comme ça sans pour autant réussir à me faire porter une couleur plus claire.
Pressées par l'heure, nous nous dépêchons de partir vers le quartier Soho, en direction du Hard Rock café. Les rues sont noires de monde et la ville est déjà à la fête en ce vendredi soir. En avance, nous arrivons au bar en question et prenons place à une table. Observant tout le monde, je détaille chaque coin du bar comme si je le découvrais pour la première fois. Mais il n'en est rien. Cet endroit est le témoin familier de nos nombreuses soirées et beuveries en tout genre. Il plane déjà une odeur suffocante de tabac mélangée à celle de bière, et des volutes de fumée envahissent déjà le plafond. Les rires francs des habitués se mêlent aux conversations animées sur un fond de REM~Losing my religion.
Pianotant en rythme sur la table en bois usé et bancale, j'admire les multiples affiches accrochées au mur des groupes les plus renommés en attendant que l'on vienne prendre notre commande pendant que Lisa me décrit avec attention la carte des cocktails. Elle a fait son choix.
Un serveur, tatoué sur les deux bras, un carnet en main, prêt à écrire, s'avance devant nous. Lisa referme la carte d'un coup sec, commande une Margarita pendant que je me contente seulement d'une Guinness.
Sur la gauche, la scène est balayée par des projecteurs bleutés, les instruments y sont déjà installés et des ombres vont et viennent. Les derniers réglages et préparatifs semblent terminés et Matt se fait encore attendre. Lisa, dont le calme apparent m'étonnera toujours, commence à contrôler l'heure sur sa montre, signe du début de son impatience mesurée.
En retard, essoufflé, mais souriant, Matt arrive enfin. Fringué d'un tee-shirt épousant parfaitement son torse, d'un jean sombre sur lequel pend quelques chaînes et de son inimitable blouson de cuir noir, il se rapproche de notre table, distribuant les sourires aux regards qui se tournent sur son passage. Les grands yeux bleus de Lisa le suivent avec indignation jusqu'au siège où il s'installe nonchalamment.
— Salut les filles ! lance-t-il à la volée tout guilleret.
— On n'y croyait plus ! lui lance Lisa sans ménagement
— Je suis désolé, ce n'est pas de ma faute. Une fille semblait perdue dans New York et mon côté « chevalier servant » se devait de la renseigner, dit-il en posant une main sur son torse.
— C'est jamais de ta faute, chaque fois, Matt, ris-je.
— Voyez-vous ça ! s'exclame Lisa en posant une main sous son menton.
— Non, mais cette fois c'est vrai ! ajoute Matt en se rapprochant de nous.
— Ah parce qu'en plus, parfois c'est faux ! , répété-je en écarquillant les sourcils, faussement offusquée.
Matt se penche vers moi, arborant son air charmeur coutumier. Lisa ne peut retenir un rire face au numéro de notre ami.
— Princesse, avec toi, je suis toujours sincère.
— Reprends ton sérieux, veux-tu ! le poussé-je d'une main sur le torse.
Feignant d'être blessé, Matt s'écarte en plantant son regard mordoré dans le mien. Sûr de lui, il m'adresse un clin d'œil moqueur rempli de promesses. Secouant la tête, je sirote ma Guinness pendant que Matt lève le bras et en commande trois autres.
Le serveur s'exécute sur le champ et fait glisser trois Guinness sur le bois usé de notre table. A ce moment, une cloche retentit, annonçant le début du concert. La musique s'arrête, le brouhaha ambiant cesse et tout le monde se tourne vers la scène. Matt s'échappe de notre table en nous recommandant de le suivre et trace un chemin parmi les nombreuses personnes agglutinées les unes aux autres. Armés de nos bières et jouant des coudes à travers la foule, nous arrivons au devant de la scène.
Les lumières font place à la pénombre et les cries de joie s'élèvent dans le bar. Ainsi plongés dans le noir, seuls quelques sifflements percent le silence qui nous entoure. Tout le monde est dans l'attente. L'excitation à son comble, mon cœur martèle ma poitrine d'une myriades de coups. Une main accrochée à la scène, j'observe les ombres et devine ce que l'on ne peut encore voir : leur visage. Lisa sautille déjà sur place et Matt observe, fier, l'ombre de ses amis en place face à leur instrument. Seules les lumières bleutées des stroboscopes demeurent, laissant planer le mystère, encore. Une lumière argentée illumine enfin tour à tour chacun des membres du groupe : Les Nightmareden, comme me l'avait dit Matt.
Au moment où elles s'immobilisent sur le chanteur, les cris des fans s'élèvent à nouveau. Grand, mince, les cheveux longs noirs de jais et des yeux bleus à la fois fascinants et attirants, il saisit le micro de sa main gauche et salue le public de sa voix suave, occupant ainsi tout l'espace. Son regard balaye le public, puis il le baisse vers sa guitare qu'il pose en bandoulière. Le public devient hystérique, les filles ne tiennent plus en place juste pour un seul regard de cet être énigmatique, hurlant son nom comme si la passion était passée dans leur voix. Le dénommé Colin, comme les fans l'appellent, tourne enfin la tête vers ses deux amis et disparaît dans la pénombre.
Les lumières se déplacent aussitôt vers le batteur. Blonds, les cheveux en bataille, il donne la mesure, puis heurte ses fûts avec fougue. Le cadence est semblable aux battements de mon cœur, rapide et rythmée. Ainsi son visage dévoilé, je me fige, manquant une respiration. Les paupières fermées, il tape sur ses tom's, comme s'il était déjà ailleurs. Il est si beau que des papillons se déploient à tire d'ailes dans mon ventre, ma vue se trouble et mon cœur manque un battement. Il respire la liberté, l'interdit, la passion et mes prunelles ne parviennent pas à s'arracher à leur contemplation. Mon rythme cardiaque s'est calqué sur celui de la batterie et les émotions me submergent librement en un ballet désordonné. Le jeu de lumière rompt aussitôt mon examen, se déplaçant vers la bassiste.
La jeune femme, couverte de tatouages, reste concentrée sur sa basse. Ses cheveux longs bruns sur les épaules, teintés de vert sur leur longueur, encadrent un visage aux traits parfaits. Son style à la fois rock et punk lui donne un charme bien à elle. Je ne peux nier qu'elle a un visage parfait.
La musique nous enveloppe et nous emporte dans un autre monde créant un univers teinté d' imaginaire où tout semble permis. De nombreuses groupies scandent tout l'amour qu'ils leur inspirent pendant que je me laisse bercer par la voix lascive du chanteur et le visage d'ange du batteur.
Mon regard restent braqué sur lui, dont les cheveux volent au rythme de ses mouvements. Je suis déjà ailleurs, sûrement à ses côtés, imaginant des aspects de sa personnalité que je connais pas. Est-il seulement romantique ? A-t-il quelqu'un dans sa vie ?
S'apercevant de mon manège, Matt se penche vers moi, et souffle dans mon oreille, me faisant sursauter.
— Princesse ? Tout va bien ?
Détournant le regard vers de grands yeux marrons verts, étonnée, je le considère un instant et reviens au moment présent. Me répétant sa question dans ma tête, je réfléchis, puis acquiesce d'un signe de tête. Il ne faudrait pas qu'il s'aperçoive de mon trouble.
— Oui..., balbutié-je encore perdue dans mes pensées, j'adore cette musique.
Mon regard coule vers le batteur, au fond, comme aimenté par lui. Matt semble suivre mon regard, tournant la tête vers la scène. J'ai envie de connaître son nom et de tout savoir de lui, mais je ne peux interroger Matt sans qu'il risque de me perdre dans des investigations sans fin. Au lieu de cela, je me contente du silence et observe le beau blond derrière sa batterie.
— On ira les voir en coulisses, ils aiment bien boire un verre après le concert.
Les paroles de Matt résonnent en moi comme une félicité. Je serai tout proche de lui et entendrai le son de sa voix. Mes yeux ne le quittent plus un instant, suivant chacun de ses gestes. Désintégrée sur place, je sens peu à peu la gêne me monter aux joues et une impatience fébrile progresser en moi. Mon cœur pulse dans mes veines cette adrénaline qui me pousse à en savoir davantage à son sujet. Avalant les dernières gorgées de bière, je sens mon corps brûler de l'intérieur.
— Quels sont leur nom ? , demandé-je sans quitter le blond des yeux.
En posant la question de manière générale, je suis certaine de louvoyer à mon aise. Sentant le regard incisif de Matt sur moi, je tourne la tête, rompant le charme absolu. Un sourire moqueur se dessine sur ses lèvres remarquant mon désarroi. J'oublie parfois que Matt me connaît par cœur.
— Alors, dis-moi par lequel des deux es-tu attirée ? Que je sois jaloux une bonne minute et qu'on n'en parle plus !
Matt espère toujours un rapprochement qui se fera jamais. Laissant quelques minutes s'écouler, je n'ose continuer en secouant la tête de dépit.
— Colin ! C'est lui le chanteur, répète Matt.
— Et les autres ?
Le regard de Matt se précise. Il a vu juste. Il connaît plus ou moins mes goûts en matière d'hommes alors inutile de nier.
— Adam! Il s'appelle Adam !
Hochant la tête d'un air entendu, j'attrape la Guinness de Matt et en avale trois gorgées, destinée à me donner une contenance. La tête me tourne soudain et mon champ de vison se rétrécit un peu. N'ayant pas l'habitude de boire, les vapeurs éthyliques me montent facilement au crâne. Je ferme les yeux un instant et laisse passer un moment. La main de Matt se pose sur mon épaule, les cries des groupies s'évanouissent dans l'oubli et la musique s'efface. Juste mon rythme cardiaque qui s'agite et ma tête qui tourne. Posant une main sur le bord de la scène, la bière se fracasse au sol en mille éclats. Au ralentis, je n'ai pas le temps de me baisser que Matt me tire vers lui et m'entraîne loin d'ici. Il me pose sur une banquette, et encre ses yeux presque verts au miens.
— Hey ! Ça va ?
Hochant la tête, un atroce mal de crâne me barre le front et la seule personne en laquelle je pense c'est Adam. Je refuse de partir tout de suite sous prétexte que je ne tiens pas l'alcool.
— Ça va, tout va bien. J'ai juste bu quelques gorgées de suite et j'ai eu la tête qui tourne, mais tout va bien.
— Non. Tu ne vas pas bien. Tu es pâle, le regard limite ailleurs...
— Matt, je te dis que je vais bien. Rassure-toi.
En soupirant, il se place à mes côtés tandis que Lisa nous rejoint, inquiète. Mon amie me pose mille et une questions, débite tellement de mots à la minute que mon cerveau ralenti par la quantité d'alcool n'en saisit que la moitié et se perd. Matt la rassure sur ce fait bien qu'il n'en soit pas convaincu lui-même.
Les cris des fans s'élèvent plus fort encore, les dernières notes de musique sont jouées et lorsque mon regard se pose sur la scène, les trois membres du groupe remercient le public chaleureusement et s'éloignent. Matt me confie à Lisa puis s'éclipse, sûrement vers les coulisses.
Attrapant le serveur au passage, Lisa commande un verre d'eau et une deuxième Margarita. Je me demande comment elle fait pour ingurgiter autant d'alcool et tenir la route. Elle se rapproche de ce dernier, lui glisse des paroles étouffées par le bruit ambiant et celui-ci opine du chef en tournant un regard vers moi.
Le serveur n'a pas traîné. Il pose une carafe d'eau fraîche sur la table avec un verre remplit de glaçon et la Margarita de Lisa. Mon regard coule doucement vers elle.
— Merci, mais je vais bien.
— Oui comme un mort vivant sortant de sa tombe. Allez avale ça et tu te sentiras beaucoup mieux en un rien de temps, dit-elle d'un ton légèrement autoritaire en versant l'eau de la carafe dans mon verre.
Elle pousse ensuite d'un geste précis le verre devant moi en me sommant de boire. Ma main enserre lentement le verre alors que mon regard observe les glaçons frétiller et tinter contre la bord dans ce liquide transparent. Je le porte à mes lèvres et bois d'une traite le contenu et le repose sur la table. Le temps semble s'égrener sans que l'on réussisse à savoir où se trouve Matt. Probablement avec le groupe, mais avec lui, rien n'est sûr. Il pourrait croiser une belle jeune femme et je dirais ainsi adieu à mes chances de faire connaissance avec Adam.
Un moment plus tard, Matt revient suivi du groupe. Le dénommé Colin ne salue personne et s'assoit avec une de ses groupies sur la banquette à côté. Il étale un bras sur le dossier afin de laisser celle-ci se glisser plus près de lui sans se préoccuper du reste.
Doris prend place aux côtés de Lisa, nous adressant un léger sourire. Elle a remonté ses cheveux en chignon, laissant quelques mèches retomber devant ses yeux et lorgne le chanteur d'un regard mauvais. De près, ses traits sont encore plus parfaits.
Matt prend place à ses côtés, levant le bras pour appeler le serveur et nous recharger en alcool. Il observe rapidement le manège qui se tient autour de lui avant de braquer son regard taquin vers moi.
Adam se jette à mes côtés, laissant son bras droit se poser sur le dossier de la banquette, juste derrière moi. Instinctivement, je n'ose plus bouger de peur qu'il ne s'écarte. Ainsi, je peux apprécier la senteur boisée qui émane de lui et entendre sa voix rauque discuter avec Matt et Doris. Je n'ose pas tourner un regard vers lui, craignant qu'il s'aperçoive tout de suite de mon trouble. Je juge bon de rester partiellement dans l'ombre, profitant de sa présence, mais Matt en a décidé tout autrement.
— Steph ! Ça va ? s'enquiert-t-il intéressé
Trois paires d'œil se dirigent vers moi, et c'est à ce moment là que je voudrais disparaître six pieds sous terre. Déglutissant mon trouble, je tente de prendre l'air le plus détendu qui soit.
— Tout va bien.
— Vous avez fait fort ! Steph est une petite nature, elle n'encaisse pas si bien l'alcool, continue Matt en montrant la carafe d'eau.
Fermant les yeux, je laisse Doris et Adam rire gentiment pendant que je tente de rassembler mon courage pour lui répondre.
— Je ne suis pas une puit sans fond mon ami et j'ai l'avantage de rester sobre en toute circonstance, je rétorque en le gratifiant d'un sourire.
Les rires redoublèrent et Matt pose une main sur son visage en signe de rémission. Le serveur arrive à ce moment là et il commande une bière pour tout le monde.
Contre toute attente, le beau blond à mes côtés coule un regard vers moi et se rapproche légèrement.
— C'est bien de ne pas boire. On n'a pas besoin de ça pour profiter d'une soirée, je suis entièrement d'accord avec toi, dit-il en me gratifiant d'un clin d'œil.
— Dit celui qui vide sa bouteille de whisky chaque soir, ironise Doris.
— Ça c'est uniquement lorsque vous êtes là. Il faut tenir le rythme avec vous. Sinon, je suis le mec le plus sobre de la terre !
— A d'autres ! ricane Matt, dois-je te rappeler la dernière soirée ?
— Vos élucubrations ne m'atteignent pas !
Je ne peux me retenir de rire face à leurs échanges et adresse un sourire à Adam qui me le rend. Plus détendue en sa présence, nos regards échangés ont l'avantage de m'ouvrir le champ des possibles. Je l'imagine alors, romantique, tendre, follement amoureux et ... tout ce que je souhaite, en vérité. Je l'idéalise secrètement.
— Non, en effet, Matt a raison. Je ne bois jamais d'alcool et pour preuve lorsque je le fais, je ne tiens pas longtemps.
— La demoiselle boit du coca ! continue Matt en souriant bêtement avec sa mimique habituelle.
Adam se penche vers moi en souriant, puis plonge son regard clair dans celui de Matt.
— Je ne vois aucun mal à ça, bien au contraire. On est libre de faire comme on veut, mon pote. Et toi ? Tu finis rarement dans un état irréprochable à chacune de nos soirées, il tourne un regard complice vers moi, ne l'écoute pas.
Mes lèvres s'étirent en un sourire alors que mon regard se plonge dans l'émeraude de ses yeux. Matt capitule, visiblement pas à son avantage et discute discrètement avec Doris, des uns et des autres, essayant de se caser pour la soirée. Lisa participe à leur petit conciliabule, armée de la plus belle chose qui soit, sa beauté du langage.
Pendant ce temps, Adam m'interroge sur mes goûts, cherchant à en apprendre un peu plus sur moi. J'exprime alors ma passion pour le dessin et l'écriture puis la discussion s'oriente d'elle-même sur le surf et l'océan qu'il me décrit presque comme une religion. Et je bois chacune de ses paroles, comme de l'hydromel, charmée par ses yeux, les traits de son visage, et tout ce qui le représente. Nous nous découvrons un penchant commun pour la musique et échangeons à l'infini. Se dévoile ainsi un homme passionné, aimant sa liberté et qui apprécie de découvrir ce qui l'entoure.
Les verres ayant été vidés, la soirée consommée, tout le monde rentre peu à peu chez lui, laissant derrière eux les vestiges d'une fête bien arrosée. Colin est parti avec sa groupie, Doris s'est évaporée dans la nuit, Matt est parti avec une de ses conquêtes et Adam s'est proposé de ramener nous, Lisa et moi.
Le cœur tambourinant dans ma poitrine, je ramasse mes affaires et m'installe à l'avant tandis que Lisa se met à l'arrière. Adam conduit tranquillement dans les rues illuminées et malgré les verres ingurgités, sa prudence m'étonne. Sous un air lounge, l'ambiance est sobre, presque feutrée. Il est tard, mais je n'ai pas envie de rentrer.
Nous faisons une halte au domicile de Lisa, à Times Square — un célèbre quartier branché de New York. Lorsqu'elle a rejoint son appartement, la camionnette roule paisiblement jusqu'à Greenwich village et Adam poursuit notre conversation sur la musique, me proposant de venir voir le groupe aux répètes un de ces jours. Notre entente est tellement évidente que j'en frissonnerais presque, ponctuée de rires et de sourires, comme si on se connaissait depuis toujours, en somme. Une alchimie qui opère dès le début et m'étonne de part sa rareté. Lorsqu'il arrive dans mon quartier, sur la East 8th street, il se gare et éteint le moteur. Une main sur le volant, il se tourne vers moi et me laisse lui parler de ma passion pour le dessin et l'écriture. Ses yeux verts et son sourire n'en finissent pas de me charmer. Il sort soudain son téléphone de la poche de sa veste en cuir et lève un regard tendre ornant ses lèvres d'un sourire.
— Tu me donnes ton numéro ? Ce sera plus simple pour se voir. Je te montrerai les livres que j'ai chez moi et je pourrais même t'en prêter. Puis, à l'occasion je pourrais te montrer le surf aussi, si ça te tente.
— Bien-sûr, assuré-je en fouillant dans mon sac pour trouver mon téléphone.
Je lui dicte mon numéro qu'il entre aussitôt dans son téléphone puis lève ses deux émeraudes vers moi, en faisant de même. Le ciel bleus ourlé de rose fait son apparition et jour ne va pas tarder à se lever.
— Je vais te laisser. Merci encore pour tout.
— Aucun problème. Je vais aller me reposer aussi, je me lève tôt demain et il faudrait que je dorme au moins quelques heures. Je t'appelle pour le week-end prochain ?
— Aucun problème. Merci pour la soirée, c'était génial.
Descendant de voiture, mon cœur ne cesse de battre à tout rompre. Encore excitée de cette soirée, je mets une bonne heure avant de m'endormir, répondant aux nombreux sms de Lisa qui s'impatiente d'en savoir plus.
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