Chapitre 38
Entendant un bruit étrange retentir encore et encore, je poussais un juron, resserrant dans mes bras mon coussin favori. Je soufflais contre ses cheveux qui me chatouillaient le nez.
— Cinq secondes. Dépêche, murmura une toute petite voix, tandis que je frottais ma tête contre elle.
— Je dors...
Violette me pinçait ma main qui barrait son ventre, cet étrange bruit continuant de se faire entendre. Désormais j'entendais des pas se rapprocher au même rythme de ce tapan incessant, commençant à m'inquiéter de plus en plus. Je commençais à peine à ouvrir une paupière que déjà, la porte claqua en un vacarme monstre. Mon cœur sursauta en même temps que je sentais mon corps s'expulser inconsciemment du lit. Je me retrouvais désormais par terre, nu comme un vers, totalement paniqué.
— Allez debout ! Le petit-déjeuner est servi depuis longtemps ! s'exclama cette sorcière aux cheveux rouges, tandis que je restais encore écrasé sur le sol, le cœur en vrac.
Non mais je vais crever avant la fin de ce séjour. J'en suis certain.
— Mamie... râla Violette sur ma gauche, avant de se surélever légèrement.
Elle clignait des yeux, se les frottait, puis tournait sa tête vers moi. Elle changeait directement de regard et sa bouche s'ouvrait.
— Je rêve encore, s'il vous plaît... l'entendais-je marmonner, alors que je jetais un regard à la grand-mère.
Elle aussi me fixait, mais contrairement à sa petite-fille, elle ne semblait pas perturber le moins du monde. Droite comme un piquet, elle tenait encore sa casserole et sa cuillère en bois dans ses mains, l'air toujours aussi sérieux.
— Toi, va t'habiller. Je ne suis pas gérante d'un club de nudiste. Mets-toi un truc sur le cul et descendez ensuite. Ça va refroidir, déclara-t-elle de sa voix ronchonne, en se retournant ensuite.
L'air de rien, exactement comme hier lorsque je m'étais rendu dans sa chambre, elle partait de la pièce. Ah. Visiblement rien ne pouvait choquer cette grand-mère. En même temps vu l'âge, elle avait dû vivre une tonne d'expériences dans sa vie et ce n'était sûrement pas la première fois qu'elle voyait un mec à poil.
Enfin. Quand même. C'est fou de ne pas réagir à ça !
— On va faire comme si cette scène ne s'était jamais passée, intervenait Violette d'une voix solennelle. Tu vas gentiment t'habiller et jouer le bon petit garçon pour cette journée qui s'avère déjà très longue, d'accord ?
Une main plaquée contre ses yeux, elle attrapait une couverture, récitant limite des incantations quand elle s'avançait à l'aveugle jusqu'à moi.
— Mon père, aidez cet enfant s'il vous plaît... Son corps est déjà trop imprégné de cette aura noire... se chuchota-t-elle, avant de me lancer la couverture sur moi.
— Euh, merci... dis-je tout bas, en l'observant encore invoquer les Dieux.
— Il est trop jeune pour finir comme ça ; il faut l'aider... Oui c'est ça, juste un tour chez le psychologue et ça devrait être bon, mais oui...
Violette attrapait quelques vêtements et partait dans la salle de bain, sans me lancer aucun regard. Quant à moi je restais un moment seul, remerciant mes bonnes étoiles d'être encore en vie aujourd'hui. Prenant donc ça comme un bon début de matinée, je prenais des affaires à moi que j'avais placées dans sa valise, me dirigeant ensuite vers la salle de bain. J'ouvrais la porte, la refermais à clef, croisant donc Violette qui s'apprêtait à aller se doucher.
Étant un gamin, je la poussais sans trop de force, me débarrassant ensuite de la couverture. Je me jetais vite fait dans la douche, puis activais l'eau brûlante.
— Ah que ça fait du bien... Chouchou, tu peux me passer un shampooing s'il te plaît ?
— Tu as cru que j'étais ta servante ou quoi ? répliqua-t-elle, agacée.
— Non pas du tout. S'il te plaît ; au moins j'irai plus vite et on pourra descendre rejoindre ta grand-mère, repris-je, en l'entendant farfouiller quelque chose derrière.
Violette ouvrait la cabine de douche, me tendant donc un shampooing. Je la remerciais, puis continuais donc ma petite douche matinale. Je sifflotais en même temps que je frottais mes cheveux, pendant que Violette restait étrangement dans la pièce, à trafiquer je ne sais quoi.
— Tu veux me rejoindre ? demandais-je, souriant.
— Non, j'irai après. Mais dépêche-toi car il te reste cinq minutes et pas une de plus, répondît-elle, l'air assez détendu.
Visiblement, elle s'était désormais habituée à me voir à poil. Tant mieux, puisque ce ne sera pas la dernière fois ; elle arrêtera enfin de me taper à chaque fois qu'elle verra un bout de mes fesses. Je finissais ma douche quelques minutes plus tard, sortant ensuite avec une serviette autour du bassin. Avant je rinçais la dernière mousse qui traînait, comme un gentil garçon bien éduqué, me rendant compte que l'eau avait quand même une drôle de couleur.
Rouge, orangé, m'ouais... bizarre.
Désormais les pieds sur le tapis, je voyais Violette se retourner vers moi. Un sourire étirait mes lèvres, amusé de la voir m'observer de tous les côtés. C'est vrai que j'étais beau. Je m'approchais d'elle pour poser mes bras sur ses épaules. Je déposais un baiser contre sa joue, remarquant qu'à son tour elle m'offrait un énorme sourire. Ses yeux bleus marqués de malices m'indiquaient pourtant qu'un truc n'allait pas.
— Quoi ? Pourquoi tu te retiens de rire ?
Violette posait ses mains autour de mon cou, se levant ensuite sur la pointe des pieds. Elle rapprochait sa bouche de mon oreille, son souffle chaud me provoquant comme toujours un frisson.
— Tu es tellement sexy comme ça, me chuchota-t-elle, avant de m'offrir un baiser.
Elle partait ensuite dans un fou rire, tandis que je restais un moment sans bouger, à réfléchir. Il me semble que je n'ai rien fait d'étrange à part prendre une douche ? Violette m'a juste passé un shampooing et...
Putain. L'eau était rouge orangé.
Je me dirigeais rapidement vers le premier miroir qui me venait, perdant presque ma serviette au passage tant j'étais pressé. Devant celui-ci, j'ouvrais grand la bouche, espérant que tout ceci était bien une grosse blague.
— J'ai les cheveux orange-bleus, oh la vache ! » criais-je totalement choqué, en passant mes mains dans ma chevelure de licorne ratée.
Je frottais mes cheveux dans tous les sens, espérant que cela disparaîtrait en une seconde. Mais rien n'arrivait. J'avais toujours cette couleur immonde qui s'était mêlée à ma couleur d'origine. Plus je me regardais, et plus je constatais que quelques gouttes orange parcouraient ma nuque.
L'horreur ! Je ressemblais presque à la grand-mère !
— Violette putain ! Je vais te défoncer ! hurlais-je à pleins poumons, avant de me rendre dans la chambre.
Directement je la cherchais du regard, comprenant vite le fait qu'elle s'était déjà barrée. Énervé, je m'habillais en moins de deux, descendant à vive allure les escaliers. J'évitais au passage la brosse à chiotte, qui commençait déjà à me bouffer la jambe, et continuais ma route. Quelques secondes passées que je retrouvais enfin Violette qui était attablée, l'air de rien. Elle buvait son chocolat chaud, puis attaquait sa tartine en me lançant un regard. Un nouveau sourire apparaissait sur son visage, avant qu'elle ne m'offre un pouce en l'air pour me désigner mes cheveux.
— Toi ! Je vais t... !
Ma phrase se coupa en même temps que mamie Fleur se retourna. Un couteau dans la main, elle me dévisageait avec sérieux, me faisant inconsciemment déglutir.
— Que vas-tu faire à ma petite-fille ? Ça m'intéresse beaucoup, tu sais, répliqua-t-elle sèchement.
— Je... je vais l'aimer comme jamais aucun homme ne l'a jamais aimé. Oui c'est ça, haha... repris-je, pendant que Violette lâchait un rire.
— Trop mignon chouchou, se moqua ma coiffeuse hors pair. Ne t'en fait pas, moi aussi je t'aime beaucoup plus que tes anciennes conquêtes.
Bordel j'en ai marre de ces femmes...
Ne voulant pas être sculpté par la vieille, je prenais place à côté de Violette. Fais chier ! Je ressemble à une orange qui pourrie vers un vieux bleu ! Rah ! Elle m'énerve avec ses vengeances !
— Je te le ferai payer... murmurais-je à son intention, en mangeant avec hargne mon pain d'épices.
La mamie sorcière venait soudainement me taper l'épaule, ce qui me coupait de mes pensées meurtrières.
— Quoi ? Un problème ? pestais-je sans gêne, agacé.
— Il est bon ou pas ? me demanda-t-elle, en me montrant de tête son pain d'épices.
— Ouais c'est nickel. Vous me donnerez la recette ; j'en ferai pour Violette mais saupoudré de quelques épices de mort au rat...
L'âge ne l'ayant pas aidé, la mamie ne comprit pas le reste de mes paroles. Cependant, je remarquais qu'elle avait un petit sourire en coin. Hum. Elle peut être mignonne, donc. Il fallait juste la féliciter sur sa nourriture.
— Ça part au bout de dix shampooings, c'est une couleur éphémère, intervenait Violette une fois sa grand-mère repartit aux fourneaux. Puis l'orange te va bien. Tu restes le plus beau pour moi.
— Pourquoi l'orange en plus ? C'est horrible, maugréais-je. Et merde ! Je ne me suis rendu compte de rien dans la douche.
— Ma mamie avait les cheveux orange avant de passer au rouge. Il lui restait quelques shampoings et je me suis dit que tu aimerais bien. Et finalement, t'es assez choubidou comme ça.
— C'est hideux. Tu as intérêt de me repayer une coloration sinon un jour tu risques de te réveiller avec les cheveux jaunes. Je me venge souvent, sache-le fleuriste.
— J'aime bien le jaune. Ce sera cool de tester. Puis au moins on sera assorti... répliqua-t-elle, en me donnant une légère tape sur la cuisse.
—Tu es vraiment une sale petite pes...
— Tiens-toi droit et dépêche-toi de manger, le gosse ! me coupa encore la folle aux cheveux rouges. Après on va se balader et on ne va pas y aller lorsqu'il fera nuit.
Je m'étouffais presque avec mon morceau de cake, lui lançant un nouveau regard noir. Ouais, en fait c'est elle la pire. Pire que l'autre aux cheveux violets, c'est certain.
Attaque titi, attaque ! s'exclama-t-elle encore, totalement hilare.
— Putain mais arrêtez ou je le balance dans le lac ! répliquais-je, en évitant une nouvelle fois la morsure du clebs.
Je faisais un petit saut, me dépêchant ensuite d'attraper un bâton pour faire une diversion. Le cabot arrêtait enfin de me chercher, préférant donc s'amuser avec cette vulgaire brindille. J'ai eu chaud. Comme d'habitude. Je me retournais vers les deux complices, qui se lançaient un grand sourire suivi de quelques rires.
— Haha que c'est drôle ! On se fend la poire dites-moi, raillais-je vers elles, tandis que Violette m'offrait un clin d'œil.
— On se fend plutôt l'orange, si tu vois ce que je veux dire...
Évidemment les deux partaient dans un petit fou rire, aimant comme toujours se foutre de ma gueule. Tu m'étonnes. Je suis devenu leur mascotte. Avec moi elles ne s'ennuient plus. Surtout la vieille.
Après ce moment de moquerie, nous reprenions notre balade bucolique pour digérer la tartiflette de mamie. Plus tard, je recevais un étrange coup de téléphone, celui-ci me redonnant aussitôt le sourire. Un shooting photo au bord de la plage, pour une très grande marque qui m'a repéré ? Mais quand ils veulent ! Même si je suis en vacances, ce n'est pas grave ! On y va ! Ravi, j'acceptais en vitesse, puis raccrochais pour tout raconter à Violette.
— C'est un shooting sur la plage, pour une marque de maillot de bain. Ça ne dure pas longtemps et c'est à une demi-heure d'ici. Tu m'accompagnes chouchou ? lui expliquais-je, pendant que la grand-mère s'approchait de nous.
— Mamie Fleur peut aussi venir, repris-je pour les amadouer. Au moins elle verra que je peux servir à quelque chose dans la vie.
— Il y aura des filles ? me demanda Violette, une pointe de jalousie pouvant largement se faire ressentir dans sa voix.
— Ah ça on verra bien... De toute façon, je suis habitué donc bon ; une ou six de plus, j'accepterai mon sort, répondais-je avec engouement, avant de les voir s'avancer vers moi.
Les deux m'offraient en même temps une claque sur la tête, n'ayant pas trop apprécié ma réponse.
— Je rigole, il n'y en aura pas ; calmez-vous, précisais-je. Bon vous venez ou pas ?
— Ouais. J'ai envie de voir comment tu te débrouilles, claqua la grand-mère, alors que je jetais un regard à Violette.
Elle acquiesçait finalement de la tête, et quelques minutes plus tard nous partions enfin en direction de ce shooting.
— Vous n'aviez pas les cheveux bleus, normalement ? me demanda la maquilleuse, alors qu'un petit rire étouffé résonnait derrière moi.
À travers le miroir, je croisais le sourire de Violette, visiblement amusée que l'on me repose cette question pour la trentième fois. Heureusement que cela ne gênerait pas ce shooting puisqu'il couperait mon visage. Et d'ailleurs, quelqu'un d'autre avait eu la chance de rejoindre cette grande campagne. La Violette revenait sur le devant de la scène, encore une fois. Les directeurs de l'agence avaient totalement craqué sur sa bouille de bébé et ses cheveux colorés. Elle allait donc poser avec moi, dans un maillot de bain que j'avais très hâte de voir sur son corps. Et même si j'avais pensé qu'elle refuserait, sa grand-mère l'avait pourtant poussé à le faire.
Enfin. L'autre raison, aussi, qu'on se le dise, c'est que je ne poserai pas avec d'autres nanas. La fleuriste m'avait donc pour elle toute seule. Elle ne risquait pas d'être jalouse et de me faire la gueule pendant trois mois.
— Vous allez poser avec votre petite amie ? me demanda la maquilleuse, amusée de me voir faire un doigt d'honneur dans le miroir à l'intention de Violette.
— Ouais, on dirait bien ouais, répondis-je, en observant ma petite amie adorée me rendre mon geste.
— Vous êtes très mignon ensemble. Et vos cheveux colorés apportent même un plus à votre couple, rigola-t-elle, en rangeant ses pinceaux.
— Effectivement. Un couple qui s'aime à la folie, ça c'est clair... marmonnais-je, avant de me lever.
Je la remerciais pour le maquillage et les cheveux qui étaient un peu mieux qu'avant, puis rejoignait ensuite le staff sur la plage. Mamie Fleur était assise à l'ombre, sur sa chaise, lunettes de soleil en place et chapeau de duchesse. Elle sirotait son sirop à la fraise tout en me faisant un simple signe de la main. Je lui offrais un faux sourire, puis partais ensuite me mettre en place. Quelques minutes passées, je voyais finalement cette chevelure violette se rapprocher, mon cœur faisant soudainement un étrange bond.
Oh la vache. C'est qu'elle est super canon dans ce maillot de bain !
Enfin. Même un peu trop, en fait. Les regards des mecs ne me plaisaient pas trop à vrai dire. Ils bavaient un peu beaucoup, là. Agacé, je m'avançais jusqu'à elle, l'attrapant déjà en moins de deux.
— J'ai envie de te balancer dans l'eau, dis-je, ce qui lui faisait aussitôt émettre un rire.
— J'ai compris que tu étais jaloux. Ça se voit dans tes yeux. Trop mignon le petit Cielou qui commence à avoir des sentiments, me chuchota-t-elle, en venant me pincer les joues.
— N'importe quoi, murmurais-je, avant qu'elle ne vienne soudainement m'embrasser.
Étonné par ce soudain élan, je me laissais néanmoins faire, remarquant que beaucoup de personnes regardaient notre échange. Violette s'apprêtait à repartir, mais directement je la ramenais contre moi, l'embrassant à mon tour.
— Tu restes avec moi et personne d'autre. Y a un peu trop de mecs malsains ici, dis-je, les mains calées derrière son dos.
— Oui je sais. Il y'en a d'ailleurs un en face de moi, se moqua-t-elle, avant de me laisser.
Violette se rendait dans l'eau, sous les nombreux regards masculins
Rah fait chier. Je m'attachais de plus en plus à elle. Elle est forte. Très forte.
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