Je regarde Stella monter en haut d'un arbre pour décrocher quelques saletés que les joueurs se sont amusés à lancer.

- Fais attention à ne pas tomber, chuchoté-je.

Elle ne répond rien et lance une bouteille en verre d'alcool. J'avance les bras et la bouteille tombe pile dans le sac poubelle.

Demain soir, ce sera le deuxième Soir de Concertation. On nous a prévenus que deux assistants seront chargés de s'occuper du corps. Si j'ai bien entendu, il va falloir le décapiter, garder la tête et faire brûler le reste puis aller jeter le crâne dans la cave aux os.

J'espère ne pas être désigné... avec les autres assistants, la nuit avant de s'endormir, certains parient pour des repas lequel des joueurs sera prochainement tué. Certains pensent que ce sera Jodie...

Je tourne la tête vers sa chambre.

Sait-elle que je suis ici ?

Je serre les poings et me retiens de ne pas aller la voir.

Elle a de nouveaux amis, maintenant je ne dois plus compter pour elle...

Soudain, j'aperçois le Maître du Jeu sortir de sa chambre et reboutonnant sa chemise. J'écarquille les yeux et le regarde se recoiffer avant de partir vers sa maison à lui.

Qu'est-ce que... non...

Jodie et le Maître du Jeu... ?

Je souffle en baissant la tête. Je comprends mieux maintenant pourquoi elle voulait tellement le voir, elle l'aimait...

Mais lui, il doit sûrement se servir d'elle ! C'est... quelqu'un comme lui ne peut aimer Jodie ! C'est... impossible...

Soudain j'entends un cri et vois Stella tomber comme une pierre dans mon sac poubelle.

- Tout va bien ?! m'écrié-je.

Elle grogne et je pose le sac à terre pour l'aider à sortir. Quand elle pose son pied droit à terre, elle pousse un petit gémissement et je remarque que les bouts de bouteilles cassées se sont enfoncés dans sa jambe.

- Merde... soufflé-je, je...

Elle attrape les bouts et les enlèvent en gémissant. Le sang se met à couler à flot mais, à par gémir, elle ne pleure même pas. Je la regarde, impressionné. A sa place j'hurlerai à la mort avec tout ce qu'elle a.

- Continue de nettoyé, me dit-elle.

- Tu ne veux pas quelque chose pour essuyer le sang ?

Elle secoue la tête en marmonnant qu'elle n'a pas besoin de moi, je fais celui qui n'a pas entendu et continue le nettoyage.

Stella a appris pour le pari entre Dylan et moi. J'ai beau m'être excusé une centaine de fois, elle ne veut plus me parler...

Je m'en veux car elle s'est vraiment sentie blessée quand elle l'a appris et je regrette avoir pu faire un tel pari, malheureusement, ce n'est que maintenant que je me rends compte que c'était stupide.

Je m'avance doucement vers la chambre de Jodie tout en ramassant des papiers à terre. Quand je suis près de sa fenêtre, je regarde à travers celle-ci et manque de lâcher un sanglot.

Jodie... c'est la première fois depuis une éternité que je suis si près de toi... j'ai tellement envie de te prendre dans mes bras et de m'excuser... tu me manques tellement...

Je la regarde silencieusement tandis que mes larmes coulent le long de mes joues.

Jodie, de dos à moi semble bouillonner de rage. Je le sais car quand elle est recroquevillée comme ça, tête vers le sol, c'est qu'elle est sur le point d'exploser et de tout foutre en l'air.

Il faut que j'aille l'aider !

Je me relève et me dirige vers la porte, quand je pose ma main sur la poigné, une autre main se pose sur mon épaule et me tire en arrière. Le Maître du Jeu secoue la tête tout en m'écartant, il a des griffures au visage et même un bleu sur la mâchoire...

Qu'est-ce qu'ils ont vraiment foutu là-dedans... ?

- Ce n'est pas ton boulot, me dit-il avant de rentrer et de refermer la porte derrière lui.

Q-quoi ?! Jodie est mon amie ! bien sûre que si c'est mon boulot d'aller la calmer !

Je m'avance à nouveau vers la fenêtre et les observent, le Maître du Jeu pose quelque chose sur la tête de Jodie avant de sortir un torchon et d'essuyer son visage.

Se seraient-ils battus ? Mais pourquoi ? Qu'est-ce Jodie a encore foutu pour en arriver encore à là ? Je croyais qu'en étant ici sans moi, elle allait quand même se calmer, mais là, je crois que c'est pire... S'en prendre au Maître du Jeu... Jamais je ne l'aurai cru capable d'une telle chose...

Le Maître du Jeu, face à moi, me regarde droit dans les yeux tandis qu'il oblige Jodie à se coucher dans son lit. Puis il sort de sa chambre et se dirige directement vers moi.

- Ne t'approches plus de la chambre de Jodie, compris ?

- Q-quoi ? pourquoi ?

Il lève les yeux au ciel en soufflant.

- Tu le sais très bien. Si Jodie te vois, je suis sûre qu'elle va péter un câble et, en plus, je peux parier tout ce que tu veux que tu vas lui parler. Donc en plus de devoir supporter une crise d'hystérie de sa part, je vais devoir te tuer et trouver un remplaçant.

J'ouvre la bouche, mais rien ne sort, le Maître du Jeu parle de cela comme-ci c'était normal pour lui...

- Maintenant va faire ton boulot, me dit-il en essuyant du sang qui coulait d'une griffure.

Je serre les poings.

- Monsieur... soufflé-je.

- Oui ?

- Prenez soin de Jodie... s'il vous plaît...

Il reste quelques secondes silencieux et je baisse la tête en chuchotant des supplications. Il souffle soudainement en secouant la tête.

- Ce n'est pas mon boulot, Jodie a des amis qui prendrons soin d'elle, je ne suis pas là pour ça.

- S'il vous plaît...

- Non, maintenant va travailler avant que je m'énerve.

Puis il tourne les talons en me laissant seul. Je ferme les yeux et pose ma main devant ma bouche pour m'empêcher de sangloter.

Il ne faut pas que je fasse trop de bruit, si Jodie m'entends, je ne sais pas comment je réagirai...

Je retourne vers Stella qui a fini d'enlever les bouts de verre. Elle se relève et m'attrape par le bas de mon T-shirt. Nous nous mettons à marcher doucement pour rentrer, elle gémit à certains moments mais ne prononce aucun mot. Moi, je continue de chialer, je m'inquiète pour Jodie. Je sais qu'elle a une arme, mais j'ai peur qu'elle l'utilise au mauvais moment...

- Pourquoi tu pleures ? demande soudainement Stella.

- Euh... je... Jodie, ma meilleure amie, me manques...

- Celle qu'on voit à la télé ?

- Oui...

Elle lève la tête vers moi et fronce les sourcils.

- Et c'est pour ça que tu pleures ?

- Oui mais... la dernière fois que je lui ai parlé, je lui ai brisé le cœur et je m'en veux... j'ai envie de la revoir et de lui demander pardon...

Nous entrons dans la forêt et la nuit m'empêche maintenant de voir le visage de Stella.

- Stella, soufflé-je, pour le pari, je...

- Tu penses tellement à Jodie que tu en oublies tes priorités... tu l'aimes ou c'est simplement une amie ?

- Je... non, je ne l'aime pas... Jodie est comme ma sœur...

Stella se racle la gorge puis gémis.

Ne supportant plus de l'entendre souffrir, je me baisse et passe un bras sous ses jambes et un autre dans son dos. Elle est toute légère...

- Qu'est-ce que tu fais ? s'écrit-elle.

- Je t'aide, ce serai vraiment méchant de ma part de te laisser comme ça.

- Tu as pourtant préféré me laisser seule pour aller voir ton amie il y a quelques instants.

J'arrête de marcher en me rendant compte de mon erreur. Je ferme les yeux et sanglote.

- Désolé... je suis vraiment un raté, Stella... je fais tout de travers, je suis tellement con...

Stella ne répond rien à cela mais pose sa tête sur mon épaule et secoue la tête.

- Rentrons.

J'hoche la tête et sort du sentier pour me diriger vers l'entrée du sous-sol.

Le cœur de Stella bat vite, ce doit être à cause de sa blessure, j'espère que ce n'est pas trop profond et que ça ne va pas s'infecter. Si les gardes remarquent qu'elle n'est plus capable de travailler, j'ai peur qu'ils ne la tuent.

Surtout que ces gardes sont vraiment ignobles, ils obligent les assistantes à porter des jupes très courtes pour pouvoir toucher leurs derrières quand elles passent près d'eux. Le pire c'est qu'elles ne peuvent rien dire. Daphné s'était engueulé avec Gwendoline, une garde qui s'est amusée à lui baisser sa jupe devant tout le monde. Résultat : elle s'est faite tabassée et ils l'ont emmenée quelque part pendant une soirée entière, la rumeur court qu'elle s'est faite violée par tous les gardes, mais elle ne veut pas nous dire ce qu'il s'est réellement passé et, depuis elle ne dit plus rien quand un garde la traite comme une chienne.

A ce que je vois, c'est plus dur d'être une fille ici qu'un gars, nous, à part se prendre des coups de fouets ou des coups de matraque quand on traine aux lieux de travailler, nous ne subissons rien d'autre...

- Stella ? demandé-je, un garde t'a déjà fait du mal ?

- Comment ça ?

- Bah... avec les mini jupes que vous êtes obligées de porter, un garde a déjà essayé de...

- Non.

- Et un assistant ?

Elle ne répond rien et baisse la tête en s'agrippant au col de mon T-shirt.

Je continue de marcher, ne demandant pas plus d'explication, son silence m'en révèle déjà trop.

Dans tous les cas, que puis-je faire à part garder le silence ? Rien. Nous sommes dans un monde injuste où les plus faibles doivent fermer leur gueule. J'ai beau être grand, je suis faible face aux autres.

J'ai besoin d'une personne forte comme Jodie pour survivre...

Maintenant qu'elle n'est plus là pour moi, je ne peux plus rien faire à part baisser la tête et me taire quand je me fais marcher dessus.

...

Du coin de l'œil, j'observe Gwendoline soigner Stella. Elle a beau dire ne pas vouloir lui faire de mal, qu'elle fait ça pour qu'elle puisse se remettre à travailler au plus vite, je ne lui fait pas confiance.

- Qu'est-ce qu'elle a, Stella ? me demande Dylan qui fait la vaisselle à côté de moi.

Je souffle en secouant la tête.

- Elle est tombée sur des bouts de verre quand on nettoyait, en haut.

- Aïe... d'ailleurs, t'as pu discuter avec elle ?

- Non, pas vraiment, elle a toujours du mal à me pardonner...

- Pff, elle est grave susceptible, quand même !

Je le regarde en fronçant les sourcils.

- Pourquoi tu dis ça ?

- Bah moi je l'aurai pris à la rigolade, ce pari. Ce n'est pas comme-ci je t'avais demandé de coucher avec elle !

Je ris en secouant la tête.

- Dans tous les cas, j'aurai refusé !

- T'as raison, il faut vraiment avoir des préférences pour la pédophilie pour accepter le pari !

- C'est pas seulement pour ça, c'est juste que je ne paris pas sur des trucs comme ça.

- Ah bon ? dit-il avec un grand sourire, je paris que t'arriverai même pas à coucher avec... Daphné !

Je secoue la tête.

- Avec ce qu'elle a dû subir, je pense que ces trucs dans ce genre c'est fini pour elle !

- Alors avec Gwendoline ?

Je regarde Dylan et explose de rire.

- Tu veux vraiment que je meurs, toi !

- Non, mais si tu t'y prends bien, peut-être pas !

Je refuse et jette un coup d'œil vers Stella.

- Alors avec Stella ? propose Dylan.

- Je t'ai déjà dit que non !

- T'es pas marrant ! attend, je suis sûre qu'on va tous crever ici, les marques de sang sur les murs du dortoir, ça doit appartenir aux anciens assistants de l'année dernière ! si on doit mourir, autant prendre notre pieds avant de crever !

Je lève les yeux au ciel en soufflant.

- Si t'as envie de prendre ton pied avec quelqu'un, vas-y ! mais moi j'ai trop de respect pour Stella pour jouer avec ses sentiments !

- Pff... rabat-joie...

Je secoue la tête et continue de nettoyer les plats tout en gardant un œil sur Gwendoline qui fait maintenant un bandage à Stella.

J'ai mal dormi à cause de sa blessure, je m'en veux car si j'avais été plus attentif, elle ne serait pas tombée à l'intérieur et j'aurai pu la rattraper... ça m'a aussi fait peur car Gwendoline a attendu une nuit entière avant de désinfecter sa blessure, j'ai peur qu'elle ait attrapé une maladie à cause de tout ça...

Soudain, une sonnerie que je n'ai jamais entendue résonne. Les gardes arrivent avec une vingtaine de sac rempli.

- Que se passe-t-il, demandé-je.

Gwendoline attrape un sac et me le pose entre mes mains.

- Un joueur a du dévoilé sa carte à un autre.

- Q-quoi ?! ça veut dire quoi ça ?!

Elle me regarde droit dans les yeux avec un sourire sadique.

- Aujourd'hui, nous aurons le droit à une mise à mort.

Hey !

Vous pensez que c'est pour qui la mise à mort ??? ^^

Bisous !!!