8-La tingo
J'ai ouvert les yeux. Ma tête me faisait mal. Ma vision était floue. Quelque chose de souple et froid s'agitait sur mon visage en répandant un liquide gluant. Je me suis redressé vivement. Un jappement a retenti et l'animal qui me léchait la figure a reculé de plusieurs mètres. Je l'ai regardé attentivement en me massant le crâne. C'était lui ! Le dingo à courte queue ! Mais qu'attendait-il donc pour me dévorer ? Non, l'animal était plus petit, son pelage plus foncé, sa gueule plus mince, et pas la moindre tâche sur ses pattes. Ce dingo était encore plus sale que le courte-queue, il avait une queue normale et ne possédait pas de pénis. Une femelle. J'ai eu un mouvement de recul mais elle ne me voulait pas le moindre mal et elle pencha sa tête vers le côté en poussant un petit ronronnement plaintif et implorant.
-Voyons mistinguette, que veux-tu ? j'ai demandé, méfiant.
Elle a ouvert la gueule en remuant la queue, signe qu'elle avait faim. Je lui ai sacrifié le poulet que je me réservais pour le lendemain midi et elle eut tôt fait de le dévorer en lâchant des rots entre deux bouchées à la façon des émeus. J'ai appelé Yan au téléphone. Il n'a pas tardé à décrocher, avec toutefois un peu de mauvaise foi.
-Oui ? Il est 13h je te signale ! Je mange, moi ! Bon sang !
Il avait l'air contrarié d'être dérangé, mais j'insistai.
-Désolé, mais ce que j'ai à te dire est urgent...
Je lui racontai tout ce qui s'était passé depuis son départ.
-Une tingo solitaire ( Dingos : les mâles sont appelés dingos et les femelles tingos ) ! Qui t'a sauvé du dingo à courte queue ! Eh bien, en voilà une histoire ! grommela Yan.
-Oui. Je lui ai donné à manger. Elle va bientôt repartir. Viens vite ici, il faut qu'on parle. Je vais essayer de retenir un peu Tickie avant qu'elle ne parte. Dépêche-toi !
-Tickie ? Joli nom ! commenta Yan avant de raccrocher.
En vérité, Tickie ne souhaitait pas se sauver à en juger par la façon dont elle me suivait partout en testant les moindres recoins de la maison, canapés, fauteuils, en cassant au passage vases et vaisselle. Elle creusait des trous dans le jardin et renversait les étagères. C'est pourquoi j'eus beaucoup de rangement dans les bras en attendant l'arrivée de Yan. Celui-ci sonna à 13h11. Voici un résumé de notre conversation :
-Comment un dingo peut-il être solitaire ? Ils vivent en meute !
-Je n'en sais rien, répondit Yan. Il y a plusieurs raisons possibles. C'est à Tickie qu'il faudrait le demander, ironisa Yan.
En entendant son nom, la tingo vint sagement s'asseoir à côté de moi et elle observa Yan sans bruit.
-Alors, ma jolie, comment se fait-il que tu sois seule ? demandai-je en caressant son doux pelage châtain et soyeux.
Et là, à ma grande surprise, Tickie s'approcha de mon fusil et se mit à le renifler. Puis elle monta sur la table ou Yan et moi prenions un café pour humer mes cheveux. Je lançai un coup d'œil à l'explorateur calme et silencieux, buvant nonchalamment à petites gorgées.
-Johann, traduisit-il simplement.
-... ! m'étranglai-je de surprise.
-Cheveux bonds, fusil de chasse, énuméra Yan, ça ne fait aucun doute, la meute de Tickie a été confrontée à la bande à Johann. Demandez maintenant à votre chien de nous raconter la suite.
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