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10-Morts sanglantes

Oui, le déjeuner fut exquis, et Yan, qui avait réussi à capturer le lézard à collerette et à le mettre en cage, qu'il avait l'intelligence d'avoir emmené dans sa voiture, me donna l'honneur de voir l'animal de près et de me le présenter. Avec sa très longue queue, sa couleur grise orangée, ses fines pattes étoilées, et sa large collerette, le reptile me faisait beaucoup penser au dinosaure Dilophosaurus, du jurassique américain. Pendant que j'examinais l'animal, qui poussait des cris étranges en frappant les murs de sa cage avec ses petites pattes, Yan me soumit à un interrogatoire sur l'animal malgré moi.

-Sais-tu quel est le deuxième nom des lézards à collerette ?

-Chlamydosaures. On les nomme les chlamydosaurus.

-Pour nous, c'est la fin de l'été. Mais pour eux ?

-Pour eux, septembre et octobre, c'est la saison des amours. Comme les kangourous, les mâles se livrent à de féroces combats. D'ailleurs, j'ai bien l'impression que votre copain appelle sa femelle, vous ne croyez pas ?

Yan se tourna vers la cage et écouta les hurlements.

-C'est bien possible, dit-il en souriant. Savez vous que la température à laquelle les œufs de chlamydosaures sont sujets influe sur le genre des petits ?

A ce moment-là, une guêpe passa au front de Yan et rentra dans sa bouche par la large entrebâillure de ses lèvres. Yan déglutit et se mit à suffoquer. Après dix secondes de bataille, il devint horizontal et ne fit qu'un avec le sol, la peau colorée par la mort. Je me précipitai vers lui et le giflai avec force, tout en lui expliquant que la nuit n'était pas encore tombée.

-Yan ! Yan ! Réveillez-vous bon sang ! Yan ! Yan Shosa !

-C'est inutile, dit une drôle de voix grave derrière moi.

Je fis volte-face pour me retrouver nez à nez avec le spectre du kangourou. Il brandissait son bâton et s'étirait vers les cieux.

-Comment ? ai-je prononcé. Vous avez parlé ? Qu'avez-vous dit ?

-Ce que vous faites est inutile. Votre ami ne se réveillera pas.

-Qu'est ce que vous y connaissez, vous ? Rien du tout !

Mais je dus me relever car le spectre se jetait sur moi, ouvrant sa longue gueule richement édentée. Le kangourou me rattrapa en quelques enjambées, et d'une poigne de fer il me jeta à terre. Mon front se trouva au contact de la pierre froide et dur qui se colora de rouge. Je me relevai lentement et me tournai vers le fantôme. Il rugit, et se précipita vers moi avec la vitesse d'un lion et l'agilité d'un singe. Cette fois-ci je fus plus rapide que lui. Je lui saisissais ses longues oreilles et les tirais de toutes mes forces. A ma grande surprise, la tête passa avec les oreilles et se décolla du corps. Un instant plus tard je tenais dans ma main un masque de kangourou, râpeux, épais et sale. Et ce qui s'était tenu sous le masque était le visage d'une jolie femme au teint pâle et à la chevelure d'or. Voilà ce qu'était le kangourou ressuscité : une femme déguisée...

-Quoi ? Quand... ? Où... ? Qui ? Comment... ? Pourquoi ?

Voilà à quoi se résumait toutes les questions qui trottaient dans ma petite tête. La femme me répondit, non plus avec la voix grave du spectre, mais avec une belle voix agressive :

-Vous m'avez démasqué ! Vous, et tous les chasseurs, je vous déteste ! Je vous hais ! Je vous méprise !

-Attendez, madame ! l'ai-je interrompu. Vous vous méprenez ! Je ne suis pas un chasseur. Non, bien sûr que non ! Pas ces répugnants petits...

Je lui tendis la main chaleureusement en lui faisant un beau sourire.

-Non, madame ! Permettez-moi de me présenter : Basile MacRan, explorateur ! Et enchanté de rencontrer enfin une légende australe !

-Ça alors, répondit la spectre en me serrant la pince vigoureusement. Moi aussi, je suis exploratrice. Enfin, j'étais exploratrice... Oui, j'étais... J'étais...

Son visage se renfrogna et elle s'assit sur un rocher, la main calée sous le menton, et elle resta quelques instants silencieuse le regard pointé sans le voir sur le sommet du Kosciusko.

-J'ai toujours eu un faible pour la nature, parla-t-elle enfin. En particulier pour les animaux. Je m'appelle Louann Calish. Lorsque ma sœur s'est lancée dans la chasse, et que d'autres chasseurs l'ont suivie, j'ai décidé de protéger les kangourous, avec lesquels je m'entendais si bien. J'ai décidé de faire fuir les chasseurs. Alors j'ai fondé une légende. J'ai fondé la légende... du spectre du kangourou.

Voilà pourquoi elle s'était enfoncée dans l'incendie forestier, pour sauver les koalas et les autres animaux ! Elle était complètement givrée ! Mais je l'admirais, car moi, pour tous les ornithorynques du monde, je n'aurais osé pénétrer dans le brasier. Surtout que je n'apprécie pas trop ces animaux venimeux... Tickie câlinait le spectre, comme s'ils étaient de bons amis. Je réalisai à quel point cette Louann était sensible à la beauté de la création. A ce moment là dans mon dos vécu l'écho d'un sifflement. D'une mélodie que je connaissais bien. Johann ! Les chasseurs ! Des coups de feu sifflèrent à nos oreilles et des formes incertaines apparurent en contrebas.

-A terre ! hurlai-je à la spectre, qui s'exécuta aussitôt.

Tickie se coucha en glapissant, et une seconde plus tard, des éclats de voix d'hommes résonnèrent, distingués du timbre aigu et insupportable de Johann. Moi, Louann et Tickie, nous relevâmes et pendant une éternité, Johann et Louann restèrent là, face à face à se regarder, bouche bée. Alors enfin Johann éclata de rire et s'adressa aux chasseurs.

-Ainsi donc, dit-elle entre deux rires, voici le spectre du kangourou ! Riez ! Riez ! Et n'ayez pas peur, ce n'est que ma crétine de sœur ! Louann Calish ! Je te croyais morte, et j'espérais ! Voilà où tu avais disparu, sous ce masque à longues oreilles ! J'aurais pu te tuer à coup de fusil, mais je dois avouer que tu me faisais un peu peur. C'est dommage que tu ne sois pas morte... Vraiment dommage !

-Comment ma sœur peut-elle me dire des choses aussi horribles ? riposta Louann. Je n'ai fait que protéger la nature !

-Ferme-là ! Tu n'es qu'une pauvre merde ! Je ne comprends pas comment ça se fait que tu aies toujours été la chouchoute de maman Mariann !

Johann était hors d'elle, tandis que Louann avait les larmes aux yeux. Moi je me souvenais de mon aventure au-dessus du vide. Trente mètres au-dessous de moi, il y avait eu une route sur laquelle des véhicules roulaient à fond la caisse. Le spectre du kangourou m'avait désigné le moyen d'escalader la roche pour remonter là-haut... Elle m'avait sauvé. A présent, c'était à moi de lui venir en aide contre sa charognarde de sœur, qui ne savait que répliquer.

-Qu'est-ce que tu attends ? lança Louann à Johann.

-Pourquoi faire ? bredouilla Johann gravement.

-Pour me tuer. Tu as l'arme, ton fusil, et tu as ta victime, ta chère petite tête de piaf, moi. Mais peut-être n'as-tu pas assez de quotient intellectuel pour faire le lien entre les deux ?

La raillerie sonnait fort, et mon admiration pour le spectre du kangourou redoubla d'intensité. Autour de nous, les arbres ne bougeaient pas d'une feuille, et se penchaient sur la conversation en écoutant attentivement. Les oiseaux nous observaient, et tentaient de comprendre pourquoi la grosse madame avec le fusil était aussi rouge qu'une perruche mixée. Mais en parallèle de ce silence improvisé, des branches craquelaient, et des silhouettes blanches et mouvantes grimpaient en notre direction en lâchant des hurlements à mi-chemin entre le T-rex affamé et le lion séducteur. Les nouveaux évènements me laissèrent stupéfaits. Ce qui arrivait, était certes, une meute de dingos, mais des dingos très marginaux. Pour commencer, ils dominaient fortement Tickie de leurs tailles et leurs pelages comportaient des poils d'un blanc éblouissant, plus denses, et aussi longs que les cheveux de Johann. Ils couraient aussi plus rapidement, et n'économisaient pas cette vitesse. Certains dingos, charognards et flemmards, se contentèrent de la chair qu'offrait le corps de Yan, déjà attaqué par les mouches. Mais les carnassiers les plus intelligents et affamés jugèrent que le corps frêle de Sosha ne remplirait pas un dixième de leurs appétits exigeants, alors ils se fixèrent sur les chasseurs affolés, qui se propulsaient aussi loin que leurs jambes ne leurs permettaient. Certains épaulèrent leurs fusils : mauvais calcul, les dingos étaient trop proches d'eux, et ils les transformèrent en boucherie. Les fuyards s'armaient de bâtons et allaient se cacher, mais les dingos les rattrapaient, les terrassaient, les brisaient, et les dévoraient goulûment. Les envahisseurs se disputaient les meilleurs morceaux, et ceux qui nourrissaient les attablés hurlaient et ouvraient de grands yeux, suppliant leurs agresseurs de stopper là cette agonie douloureuse. C'était gore, ignoble et sanguinolent. Je me demandais pourquoi les réalisateurs s'emmerdaient à imaginer des monstres pour animer leurs films d'horreur, alors qu'il y avait, sur terre, à portée de main, devant moi, les éléments nécessaires. Un des dingos blancs s'élança sur Johann, et elle poussa un cri déchirant. Elle n'avait pas eu le temps de recharger son fusil, et déjà elle se vidait de son sang. Celui qui la dévorait se redressa, la bouche en sang, et de son énorme ossature, il s'avança vers Louann, avec un visage qui exprimait la gourmandise et la cruauté. Il avait l'air de dire : « Et maintenant, au tour de la sœur ». Louann courut vers sa sœur, choquée par sa mort brutale, même si elle la détestait. Le corps de Yan était aux trois quarts décomposés, alors qu'il voulait être incinéré. Louann se précipitait au chevet d'agonie de sa sœur, mais elle fut rattrapée en chemin par le dingo massif qui la renversa et se plaça sur elle en bavant. Le choc du sol créa une fuite de sang dans le crâne de Louann. Elle ouvrit les yeux et parla doucement au dingo :

-Du calme, Maurice. C'est moi, maman Louann ! La dame qui est venue il y a quelques jours !

Maurice s'en fichait, il avait faim. D'un rapide coup de gueule il arracha la tête du spectre. J'en avais les larmes aux yeux. Tickie vint à mes côtés. Je décidai de l'abandonner, la sueur trempait comme d'habitude mes vêtements. Mais la peur est le tombeau du loup, et Tickie le comprit, un peu tard. Trois dingos se mirent sur elle, et elle eut beau hurler, se débattre et mordre ses prédateurs, j'étais déjà à vingt mètres, la laissant à son triste sort. Ils étaient tous mort : Johann, Louann, Tickie, Yan, les chasseurs. Je pleurais à en avoir mal à la tête. Je sprintais à en perdre haleine. J'avais honte de ce que je tramais. J'ai couru cinq minutes, le diable à mes trousses, mais je ne savais plus très bien si ce n'était pas plutôt moi, le diable. J'ai regardé en arrière. Le calme, le calme et le calme. Pas âme qui vive. Je me trouvais dans un lieu étroit cerclé de rochers haut et coupants. Je maitrisai mon souffle. Les herbes grimpaient parmi les nombreuses pierres. Ma respiration était saccadée, et accélérée par la remémoration des derniers évènements. Une pierre me toucha entre les deux omoplates. Je jetai un coup d'œil en arrière. « Salut, mon vieux. Je t'avais dit qu'on se retrouverait. » A deux mètres au-dessus de moi, placé sur l'arête d'un rocher, le dingo à courte queue me narguait. Le réflexe fut de m'enfuir sur le côté, mais la brute à quatre pattes sauta sur mon dos en grognant et m'aplatit sur la face d'un roc. La plupart de mes os explosèrent, du sang me sortait de la bouche et j'étais à demi conscient, malgré ça la douleur était insupportable. Le dingo se dégagea et se mit à tourner autour de moi. Avec mes dernières forces, je me mettais sur le dos, pour contempler le ciel une dernière fois d'en bas, mais l'animal ne me laissa pas ce plaisir. Après avoir déchiré ma capuche, il remit ses sales pattes sur moi, favorisant la douleur que causaient mes os craqués, et de nouveau je revis la gueule béante, les quarante-deux crocs jaunes, l'horreur de ses yeux emplis du rouge de la haine, ainsi que ses griffes aiguisées... Puis, toujours triomphant, le warrigal à courte queue porta le coup fatal et les eaux de la Murray inondèrent le souvenir de mon histoire et de ma vie.

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