A l'extérieur de l'appartement, je m'arrête face à la porte semi-ouverte. Jugeant cela anormal, je sors mon arme de mon holster et me tiens sur mes gardes. La porte ne semble pas avoir été fracturée, c'est une bonne chose. D'un pas lent et sans faire de bruit, je la passe et à petits pas je gagne le salon. L'appartement parait vide et je ne ressens aucun danger.

_Hope a du oublier de fermer la porte, ce n'est pourtant pas son genre, elle n'est pas tête en l'air ! Me dis-je à voix haute.

Une fois rassuré, je range mon arme dans mon holster puis m'apprête à sortir lorsque je vois un corps allongé sur le canapé. Celui-ci est immobile, le soulèvement de sa poitrine me laisser penser que cette personne est endormie mais le léger son qui s'échappe de ses lèvres et que je viens juste d'entendre m'indique que non. Elle semble fredonner du bout des lèvres, ça ressemble à une mélodie, peut-être une sorte de berceuse, c'est presque plaintif et à  peine audible, mais en même temps tellement doux et reposant. Mon visage prend alors une drôle d'expression en pensant à ce que je vais pouvoir faire : la surprendre car elle ne semble pas m'avoir entendu entrer ni parler, trop concentrée à fredonner. Ma bouche se fend d'un large sourire. Tel un tigre en chasse, j'avance lentement en direction du canapé et de ma proie qui ne se doute pas de ma présence. Elle s'arrête subitement de fredonner et laisse échapper un profond soupir.

_Connor....lâche-t-elle presque comme un murmure, murmure que je n'ai aucun mal à percevoir tellement je ressens sa douleur dans sa plainte, car il s'agit bel et bien d'une plainte, mais il est bien trop tard. Tel un prédateur en chasse, je me suis déjà jeté dans sa direction pour la surprendre et surtout l'effrayer.

_Hope ma jolie brindille ...! m'écrié-je en atterrissant à ses pieds.

Prise au dépourvue, elle n'a pas le temps de réagir, ni de se redresser et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, j'ai déjà mes mains sur elle. C'est alors que je sens une aura meurtrière tout autour de moi, son aura meurtrière.

_Kai...ôtes tes sales pattes immédiatement de là avant que je ne te tue, me dit-elle d'une voix dure et empreinte d'une terrible colère.

Elle est allongée sur le canapé et je me trouve à demi allongé sur elle, et cette position me convient parfaitement. Voyant que je ne veux pas m'exécuter et face à mon sourire libidineux, d' un geste brusque elle pose ses mains sur ma poitrine et me pousse violemment en arrière pour que je finisse aux pieds du canapé. Je m'écrase telle une crêpe sur le sol et sur le dos. Folle de rage, elle se relève, mais c'est sans compter sur ses jambes tremblantes qui plient sous le poids de tout son corps. Je m'empresse de me relever. Elle s'apprête à tomber en avant sur la table basse en verre du salon lorsque je la saisis par la taille de mes bras et la ramène tout contre moi.

_Reste avec moi ma belle !

L'espace d'un court et rapide instant, nous nous retrouvons l'un en face de l'autre, le regard plongé dans celui de l'autre percevant presque le souffle chaud de l'autre sur son visage. Ces brèves secondes me suffisent pour sonder son regard et son âme meurtrie, son regard me trouble. On dit que le regard en dit long sur la personne, qu'il est le reflet de son âme et cela n'a jamais été aussi vrai qu'en cet instant. Son regard l'a trahie. Elle a pleuré, ses yeux sont encore humides bien que non rougis, mais ils sont inexpressifs et éteints. L'espace de ce moment, au contact du corps froid de Hope qui contraste terriblement avec mon corps chaud, je la sens trembler tout contre moi, c'est un instant fugace qui ne dure que quelques secondes, mais elle semble en avoir besoin, alors je resserre mon étreinte sur elle pour qu'elle se sente en sécurité et surtout épaulée. Mon regard lui dit, je te tiens, je ne te lâcherai pas et cela semble lui suffire car je la sens se blottir tout contre moi. Elle me donne l'effet d'être un petit animal apeuré et frigorifié, alors je passe ma main sur son dos comme pour la réchauffer. Son extrême pâleur que je remarque juste m'effraie. Elle n'a rien de la jeune femme pleine de vie que je côtoie et connais au regard pétillant et expressif, à l'aura douce et bienveillante. Mon regard perçant a capté le sien pour ne plus le lâcher, pour l'analyser et surtout recueillir tous les indices qu'elle concèdera à me donner, vide, peine, douleur, angoisse,agitation, anxiété et peur. Deux regards, un souffle, pour un effet miroir. Face à mon insistance, elle finit par baisser les yeux mal à l'aise et mettre un terme à notre échange visuel.

_Assieds-toi, Hope ! lui dis-je le plus tendrement possible. Il s'en est fallu de peu !

Je la maintiens et avec des gestes attentionnés je l'aide à prendre place sur le canapé.

_Oui,...merci Kai ! Ça va déjà mieux.

Elle détourne son regard du mien et baisse la tête. Elle se sent comme une enfant prise en faute et j'aime cette fragilité qu'elle tente de me dissimuler et qu'elle ne révèle presque jamais. Mes yeux se perdent dans la candeur de ses prunelles marrons malgré l'assurance qu'elle tente de se donner en se reprenant. Elle ment, elle me ment ouvertement et je n'aime pas ça car ce n'est pas dans son habitude, ni dans son tempérament de me mentir. Elle ne va pas bien, tout en elle me le crie, son regard embué, ses mains tremblantes et gelées ainsi que sa pâleur. Elle me cache quelque chose, mais quoi ?

_Tu ne te sens pas bien, serais-tu malade ? Le timbre de ma voix traduit toute mon inquiétude. Je pose ma main sur son front afin devoir si elle a de la fièvre.

_Je vais bien Kai.

Elle pose sa main sur la mienne afin de me rassurer, son geste est ferme et direct malgré le léger tremblement de sa main que je perçois et ôte ma main de son front. Je sens la froideur du bout de ses doigts gelés s'infiltrer en moi, à ce contact un peu comme une décharge électrique qui me rappelle à l'ordre.

_Je t'assure, insiste-t-elle en accentuant la pression sur sa prise. C'était un simple étourdissement, j'ai du me lever trop vite, cela mêlé au fait que tu m'aies presque étouffée de tout ton poids.

Sa voix est douce, rassurante et elle me parle calmement comme pour me rassurer, mais je ne marche pas.

_Je devrais t'emmener voir Hanna. Je serai plus rassuré.

_Kai, tu t'es écrasé sur moi tel un bull doser, je te signale !

_Regarde, tes mains tremblent. Reste là, je vais te chercher un verre d'eau. Je m'éloigne d'elle après l'avoir enveloppée d'un chaleureux regard et reviens quelques secondes plus tard avec un verre d'eau dans les mains. Tiens bois ça, je lui ordonne.

_Merci, me dit-elle sans relever la tête.

Elle m'offre son plus beau sourire afin de me rassurer, mais je ne suis pas dupe. Elle tend la main afin de se saisir du verre et face à ses tremblements, elle se saisit de celui-ci avec ses deux mains.

_Ça va mieux ?

Elle se contente d'un signe de la tête pour toute réponse alors que je m'accroupis face à elle et pose une main sur son genou.

_Tu es pâle Hope, regarde-moi, lui ordonné-je.

Elle ne veut pas relever la tête pour ne pas se retrouver face à mon regard bleu perçant. Je sais lire en elle comme personne, et elle ne veut en aucun cas que je perçoive son trouble. Voulant briser ce silence, elle prend la parole afin de mener la discussion sur un autre sujet qu'elle.

_Au fait, qu'est-ce qui t'amène ?

_Je suis passé prendre Ken.

Je me redresse alors et prends place à ses côtés.

_Il n'est pas là, il est sorti très tôt ce matin.

_Tant pis pour lui et tant mieux pour moi. Au lieu de cela c'est toi que je trouve, faut dire que j'en suis ravi ! La porte était ouverte alors je suis entré et c'est là que je t'ai vue, allongée et offerte sur ce canapé. La suite tu la connais.

_Allongée et offerte..., répéte-t-elle en haussant le ton.

_Ok, peut-être pas offerte mais allongée pour sûr !

En disant cela mon visage se fend d'un drôle de sourire que je freine immédiatement lorsqu'elle m'envoie une petite claque derrière la tête afin de stopper le film porno qui est en train de se jouer dans ma tête avec elle dans le rôle principal. Je me rapproche d'elle et passe mon bras autour de son épaule afin de la sentir tout contre moi. Elle se tourne alors vers moi et plante son regard dans le mien.

_Qu'est-ce que tu fais ? me demande-t-elle en me fixant d'un regard mauvais.

_Je m'assure que ton pouls est régulier, lui dis-je en laissant glisser mon bras le long de sa taille.

_Ah, et depuis quand il se trouve au niveau de mes fesses ?

_Oh, pardon ! Je suis descendu un peu trop bas ? Je lui demande en la gratifiant d'un clin d'œil complice.

_Un peu en effet, et arrête de me prendre pour une idiote ! Là, elle me donne un coup de coude dans les côtes qui me fait me plier en deux, signe qu'elle se sent mieux pour mon plus grand soulagement et surtout retirer ma main qui s'est voulue baladeuse.

_Je m'inquiète pour toi, lui dis-je à bout de souffle en me massant les côtes, et voilà comment tu me remercies, lui reprochè-je en feignant d'être vexé et en remettant de l'ordre dans mes vêtements.

_Cesse de faire l'idiot. J'ai hâte de voir Hanna pour lui parler de ton inquiétude à mon égard ainsi que de toute la sollicitude dont tu as fait preuve. Je me demande quelle punition elle te réservera, me taquine-t-elle en m'offrant son plus vicieux sourire.

_Tu ne ferais pas cela Hope.... ma petite brindille, ma jolie brindille, j'en rajoute pour la gagner à ma cause même si je sais que c'est peine perdue.

Je me rapproche d'elle et me saisis de ses mains. Mon visage est redevenu tout ce qu'il y a de plus sérieux. Je l'enveloppe d'un regard séducteur, celui qui la fait fondre et rougir en même temps. Ce regard qui la fait succomber à chaque fois sauf cette fois.

_Tu veux parier ? me défie-t-elle du regard.

_Joli coeur.......! tenté-je en pleurnichant tout en penchant la tête sur le côté.

_Oui, Kai.

Elle relève un sourcil s'attendant à ce que j'en rajoute des tonnes, mais au lieu de ça je la tire par la main vers moi brusquement pour l'avoir face à moi. Elle s'écrase alors tout contre mon buste.

_Mais je suis ton ami Hope, ton meilleur ami ! je lui rétorque en la suppliant du regard ce qui me donne envie de rire, mais je me retiens et surtout lui offre ce regard de chien battu auquel je sais qu'elle est incapable de résister.

_Oui et bien vu ton comportement des fois je me le demande et tu sais quoi Hanna aussi est mon amie. Elle a le droit de savoir comment tu te comportes en son absence et inutile de sortir ta panoplie de séducteur à la gomme ou celle du chien battu. Tu ne parviendras pas à m'amadouer avec ce sourire, ni avec ses baises mains et encore moins avec ce regard. Réserve cela pour les autres femmes, celles qui ne te connaissent pas. J'ai rendez-vous avec Bella, et je suis en retard par ta faute.

_Par ma faute ! je reprends vivement.

_Oui ! Parfaitement par ta faute, m'annonce-t-elle avec un naturel et un aplomb déconcertant en se dégageant de mon emprise et en se relevant comme ci de rien était.

_Mais quelle mauvaise foi ! Je m'indigne en l'imitant aussitôt.

Le regard noir qu'elle me lance fait que je me reprends très vite.

_Je te dépose si tu veux ? Lui dis-je en me plantant à ses côtés et en passant mon bras autour de sa taille pour la ramener tout contre moi.

_Merci, ça me fera gagner du temps, mais avant j'aimerais passer voir Erin à l'EDEN. Tu veux bien arrêter de me coller Kai ! Et tu serais gentil de me lâcher !

Malgré ses protestations je ne desserre pas mon étreinte, et je reprends très vite comme ci de rien n'était.

_Ils sont rentrés quand ?

_Erin m'a appelé hier matin pour me dire qu'ils étaient rentrés, m'annonce-t-elle en se dégageant.

_J'en connais un qui n'a pas dû s'ennuyer durant sa lune de miel !

_Passe la bague au doigt d'Hanna et toi non plus tu ne t'ennuieras plus jamais, me dit-elle alors en s'arrêtant et en se tournant vers moi pour me faire face et là, elle m'offre le sourire le plus sincère dont elle est capable en cet instant.

Elle me lance un regard sans équivoque en haussant les sourcils et je me contente pour toute réponse d'un signe de la tête tout en esquissant un timide sourire. Cette femme sait me percer à jour comme personne. J'aime Hanna de tout mon coeur, mais je ne suis pas encore prêt à me passer la corde au cou.

_C'est bien ce que je me disais ! finit-elle par me lancer en agitant sa tête de droite à gauche d'un air déçu. Tous les mêmes ! Soupire-t-elle en relâchant ses épaules résignée telle une fatalité.

_Après toi très chère, lui dis-je en lui tendant mon bras pour lui faire une courbette.

_Pour que tu reluques mes fesses, hors de question ? Tu passes le premier, m'ordonne-t-elle de toute sa stature en se reculant.

Nous nous faisons face. Elle me pousse et pose ses deux mains sur ses hanches ce qui lui confère encore plus d'autorité et la rend encore plus sexy. Cette femme n'a aucune idée de ce qu'elle dégage sans le vouloir. Elle pourrait avoir tous les hommes à ses pieds si elle le voulait et sans faire le moindre effort.

_J'aime quand tu me donnes des ordres ! je minaude en plissant les yeux sans la quitter du regard.

_Idiot ! Me dit-elle en me souriant, peut-être son premier vrai sourire.

_Tu me fais de la peine Hope, penser que j'ai d'aussi viles pensées. En disant cela, je porte ma main sur mon cœur afin de donner plus de poids à ce que je viens de dire. Ça c'est plutôt une attitude qu'aurait eu Ken. Quelle image négative tu as de moi !

_Et à qui la faute !

Elle me sourit de nouveau et me pince légèrement le bras.

_Aïe ! Je hurle en me massant le bras.

_Mais oui je vais te croire, je t'ai fait mal ! Mon pauvre petit chéri !

_J'aime quand tu utilises des petits surnoms d'amour quand tu me parles aussi amoureusement.

Pour toute réponse, elle me pince de nouveau avant d'ajouter : Et ça aussi tu aimes ?

_Brute ! Lui dis-je en me massant plus longuement cette fois car elle y a mis de l'intensité contrairement à la première fois.

_Je sais et le pire c'est que je sais que tu adores ça quand je te martyrise, va falloir que j'arrête.

_Je te l'interdis ! N'arrête jamais de me martyriser. Je le reconnais, plus c'est fort et plus j'aime. Je devrais peut-être t'offrir un fouet.

Je passe devant elle en lui tirant la langue tout en esquivant sa prochaine attaque face à ma remarque sur le fouet et je lui offre un sourire qui en dit long, un sourire plein de sous entendu. Elle me suit et referme derrière nous la porte de son appartement tout enlevant les yeux au ciel.

_Fais-toi plaisir ! Lui dis-je alors en haussant les sourcils avant de lui lancer un sourire carnassier et du regard lui montrer mes fesses.

_Pardon ?

_Te prive surtout pas de me reluquer les fesses si l'envie t'en prend, j'aime quand tu laisses glisser ton regard sur moi et encore plus sur cette partie de mon anatomie.

_Qu'est-ce qui ne faut pas entendre ! Des fois je me dis qu'il vaut mieux être sourde que d'entendre des conneries pareilles. Tu dis vraiment n'importe quoi !

_Menteuse. 

_Idiot!

_Avoue plutôt que tu envies Hanna !

_C'est pas faux, sur certain point seulement.

_Genre mon regard de braise, ma gueule d'amour, ....non mon physique de rêve ou mes capacités hors norme au lit !

_ Tu t'entends ?! Moi j'aurais dit pour sortir les poubelles, changer une ampoule, faire les courses....etc. De ce qu'elle m'a raconté, t'a vraiment pas de quoi te vanter je te signale, me dit-elle en baissant mon regard sur son entrejambe et en levant un sourcil.

_Tu veux que je te montre, je la défie en posant mes mains sur la boucle de ma ceinture prêt à la défaire.

_Vas-y, et je me ferai un plaisir de le dire à Hanna, me dit-elle en croisant ses bras sur sa poitrine attendant que je passe à l'action et en me toisant du regard. Elle rajoute alors : c'est bien ce que je me disais ! Que de la gueule......

_Rassure-moi, tu lui répètes pas tout ce que je te dis et te fais ?

_Qu'est-ce que tu veux que je te dise, me répond-t-elle sans me quitter du regard et en haussant les épaules ? Solidarité féminine oblige dans ce monde régis par les hommes.

_Tu es donc plus l'amie d'Hanna que la mienne ?

_Tu ne le savais pas ! m'annonce-t-elle avec évidence.

_Je t'ai connue le premier, je te signale.

_Faut croire que j'ai plus d'affinités avec elle.

_Tu ne sais pas ce que tu rates.

_Des fois je me dis que tu es irrécupérable et je plains cette pauvre Hanna de devoir te supporter me lance-t-elle sourire aux lèvres en passant devant moi et en me laissant derrière elle excédée par mon attitude.

_Je n'ai certes peut-être pas réussi à t'attendrir, mais j'ai réussi à te faire sourire et tu ne penses plus à ce qui t'a rendue si triste tout à l'heure, me dis-je mentalement avant de la suivre.