
IV
Raph tremblait, elle était si pâle, impossible de masquer des cernes si immenses. Elle passa sa soirée assommée par les cachets de Doliprane, la tête près de la cuvette.
- L'avantage d'avoir les cheveux aussi court qu'un mec ? Je peux vomir en paix sans qu'un lourd plein de compassion ne me les tienne. nous hurla-t-elle fière de son ironie légendaire et de son féminisme sans limite.
De toute façon, même sans cette coupe, elle ressemblait à un garçon, elle était ce qu'on appelle androgyne et pouvait facilement se faire passer pour un individu masculin en camouflant ses quelques formes. Peut être sous un des pulls de Troye ? Ce dernier discutait d'ailleurs avec moi riant jaune à sa blague de mauvais goût criée depuis le repère de notre amie, autrement dit ma salle de bain. C'est la seule fois où je l'avais vue dans cet état, deux jours après j'avais la grippe et en constatant combien j'étais épuisé je me suis interrogé sur la raison qui l'avait poussée à me rendre visite malgré sa maladie. Peu importe. Ce jour-là, Troye et moi avions dégusté seuls nos bonbons bleus, rompant une tradition sacrée. Il emportait partout où il allait ces sucreries au coca qui colorent la langue, il avait beau toujours oublier ses affaires, jamais il ne manquait ce rituel de mettre trois confiseries dans sa poche avant de venir. Cette fois-ci, il a juste rangé celle de Raph dans son long manteau noir espérant que ça la réconforterait tandis que je me disais juste qu'elle allait sûrement se forcer à le manger pour ensuite dégobiller une substance bleue. J'ai compris deux choses à ce moment, une essentielle, l'autre moins: Troye était amoureux d'elle et ça ne m'étonnait pas plus que cela.
– C'est évident quand on réfléchit, lâchai-je alors.
– Quoi donc ? m'interrogea-t-il surpris.
– Rien, sifflai-je tirant ma langue bleue à l'intention de Raph qui nous observait accoudée à la porte.
Mon ami me lança un regard interrogateur, il pensait que je leur cachai quelque chose. Pourtant j'en étais incapable.
Je me lève et fais chauffer de l'eau dans la bouilloire. Ma mère continue de suivre des yeux le moindre de mes mouvements. Si rien ne se passe ici et maintenant, dans ma tête je réécris l'histoire. Je sais à quel point elle aimerait que je me confie, que je pose ma tête sur ses genoux et laisse entre ses mains vernies tout ce qui me tracasse. Carmen l'aurait fait elle, parce qu'elle est ma grande sœur parfaite, celle qui ne commet jamais d'erreur. Moi je suis le pire de tes gosses et j'ai réalisé la pire des conneries, en temps que parent, à quel point peut-on supporter d'être démuni.
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