
III
Raph serrait la main de Troye, elle savait toujours lorsqu'il avait besoin d'elle et il se calmait la gratifiant d'un signe de tête. Elle avait cette capacité à voir les problèmes des autres mais surtout à les comprendre. Raph était un livre, un histoire d'une complexité infinie à elle seule. Je pense que c'est ce qui la rendait encore plus différente que ce qu'elle laissait paraitre. Lorsque le sol s'écroulait sous nos pieds, que l'on se sentait prêts à tout lâcher, elle était la première à relever la tête pour nous traîner derrière ses pas voulus confiants.
Elle m'avait toujours énormément impressionnée mais je savais qu'elle n'était pas parfaite. Si elle ne se dévoilait pas beaucoup, en la connaissant on comprenait ses sous-entendus et la mélancolie dans ses yeux. Une fois, elle avait voulu que l'on s'aligne tous les trois devant le grand miroir de ma chambre et qu'on détruise nos reflets. Troye affirmait que ça portait malheur mais cela ne nous avait pas arrêté, de toute façon nos vies ne pouvaient pas être pires que ça. Nous avions écrasé violemment nos poings contre le verre qui s'était alors brisé, marquant nos mains à jamais de traces rouge sang.
Ensuite, une autre idée plus sombre a germé dans la tête de Raph, notre mort. Si on y pensait en permanence chacun de notre côté, on aurait jamais imaginé en faire une fin collective si poétique, nous trois pour l'éternité. Si elle le disait ça ne pouvait qu'être juste, on le voulait tous après tout. Elle avouait à voix haute les vérités que l'on n'osait pas chuchoter tout bas, elle n'avait pas peur des mots contrairement à notre société qui discutait par euphémismes.
– Comme si atténuer notre façon d'exprimer les choses, atténuait le sens. Un clochard reste un clochard, vous pensez vraiment qu'il se sent mieux si on l'appelle par politesse SDF. Et le vieux croulant de la résidence d'en face décédé la nuit dernière ? Pourquoi mentir à sa famille en leur racontant le monde merveilleux dans lequel il est parti, ce n'est pas un voyage merde ! s'exclama-t-elle. Enfin bon mourir ça vaut peut être mieux que de rester ici à attendre que le vide se comble.
Elle agitait beaucoup ses bras quand elle parlait, ça donnait l'impression qu'elle tenait un discours des plus important. Elle aurait pu être présidente mais au fond je crois qu'elle n'était qu'une gamine, époustouflante certes, mais surtout capricieuse et peut être légèrement manipulatrice.
Si ma mère l'avait connue, je suis sûre qu'elle clamerait haut et fort qu'elle est responsable de mes actes, qu'elle m'a obligé à la suivre comme un pantin articulé au bout d'un de ses fils maléfiques. Elle se tromperai assurément, c'est pourquoi je me tais encore, je suis et j'étais conscient de tout ce que j'ai pu faire. Pardon Maman de ne pas te laisser blâmer et accuser la Terre entière mais je préfère que tu en veuille au vrai coupable, moi car j'avais pris ma décision.
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