Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 40

[Je vous présente une nouvelle fois le dessin achevé. Ici, vous avez Nausicaa et Tybalt, son fiancé (Tome 1), enlacés.]

Artell aurait préféré se tromper.

Plus il approchait du couvent, plus le doute s'estompait. Il n'eut bientôt plus de raisons d'être.

Artell découvrit d'abord la neige piétinée du chemin qui menait au couvent. Les coupables n'avaient même pas pris la peine d'effacer leurs traces. Celles-ci ouvraient la voie au général de sorte qu'il lui soit impossible de se méprendre.

La question qui s'inscrivit au creux de sa conscience lorsque de hautes flammes succédèrent au nuage opaque résonna longtemps dans le silence de la forêt : pourquoi ?

Sa monture, effrayée par le feu qui rongeait la structure vieillie de l'établissement, refusa d'aller plus loin. Sentait-elle la terreur de son cavalier ? Ce dernier n'eut pas d'autres choix que de mettre pied à terre. Face à l'immensité de la structure du couvent qui brûlait, il se sentait insignifiant et vulnérable. Plus encore que cela, il se sentait impuissant. Le soldat n'avait jamais failli devant le danger, mais les crépitements des flammes qui se tordaient dans l'air en une danse folle, le gémissement du bois qui cédait, et la neige qui perdait du terrain sous l'étreinte brûlante de l'incendie, tout cela lui ôta tout sens de la mesure. Enivré par l'odeur des braises, par la flagrance des premières cendres chaudes, par celle du bois carbonisé, il esquissa un pas en avant, puis un second en arrière.

Le général se confrontait à son cauchemar personnifié. Une représentation intime de ce que devait-être son enfer. Cela ne manquait pas de cynisme, pour un lieu qui honorait une vision utopique du monde, d'un refuge qui accueillerait les âmes les plus pures. L'auteur de ces actes avait manipulé la force des métaphores.

Le craquement terrible du bois arracha à Artell un sursaut. Une poutre qui soutenait un pan décharné du toit s'écrasa au sol dans un chaos de braises incandescentes et de bois à moitié consumé. La porte avait été enfoncée et les éclats répandus sur le seuil témoignaient de la violence de l'intrusion.

Ce fut peut-être ce seul détail qui convainquit Artell d'entrer, d'outrepasser la peur irrationnelle qui chauffait à blanc les chairs brûlées de son visage. C'était comme si sa peau se souvenir de la langue des flammes sur elle et que la proximité de celles-ci répondait aux anciennes blessures. Parfois, le général avait l'impression que sa joue le tiraillait.

Ce jour-là, il crut que sa chair brûlait une seconde fois.

Il avança jusqu'à ce qu'une poignée de mètres le sépare de la porte. L'ombre du couvent s'était dissipée et celle des flammes, rougeoyantes, se déposait par touches vives. Un masque d'effroi qui l'accompagna jusqu'aux portes du couvent. Il songea dès lors à revenir sur ses pas. Qu'espérait-il trouver à l'intérieur de l'enceinte sacrée ? Un miracle ? Le visage d'Iesan s'imposa à lui, comme un reproche.

Artell avait laissé les flammes le marquer, il ne les laisserait pas lui voler sa mère.

Il pressa un pan de son écharpe contre sa bouche et son nez après avoir pris une profonde inspiration. Il se fit violence, ne pensa pas, ne s'interrogea pas. Il agit en parfait soldat en pénétrant à l'intérieur du couvent dont le toit avait disparu par fragments entiers sous les foyers qui progressaient. D'ici à quelques minutes, les poutres s'effondreraient pour ne laisser que les murs intacts. Le squelette de l'établissement.

Le long corridor qui succédait à l'entrée introduisait les premières pièces communes. Artell s'attarda quelques secondes sur le premier corps qu'il découvrit, avachie non loin de la porte éventrée. Le visage avait été lézardé de profondes griffures, au point où le général peina à reconnaître la femme qui avait souhaité profiter de la faiblesse de Lyssandre pour faire de lui son pantin. La religieuse avait sans doute été l'une des premières victimes et le carnage de chairs ouvertes qui découvraient les os ne laissait peu de doute sur l'auteur de ces actes et sur l'état de reste des lieux.

Amaury avait ordonné cette attaque et Artell n'avait qu'à considérer le cadavre à ses pieds pour se figurer la teneur de ses indications. Aucune pitié pour les locataires du couvent, pourtant sans défense. Les soldats devaient être sommés de ne faire preuve d'aucun état d'âme.

Le général ne s'attarda pas plus sur la violence qui avait ôté la vie à la vieillarde. La pointe de la lame qui l'avait défigurée avait raclé l'os, sans doute pour la contraindre à abandonner la lutte. Un traitement qui n'avait pas seulement servi à rayer ses traits et à les effacer en découpant grossièrement la chair. La nonne avait résisté de toutes ses forces, en témoignait les traces de luttes qui marquaient ses avant-bras ainsi que l'acharnement dont elle avait fait l'objet.

Artell pressa le pas et ne ralentit pas avant que le corridor ne s'ouvre sur une antichambre. S'y amoncelaient une demi-douzaine de cadavres. Les flammes pénétraient la pièce par l'orifice encastré dans le mur et le général progressa sans ralentir. Il évitait de s'attarder sur les flammes. Il les regardait à peine en face.

Il déboucha sur l'élément central du couvent, à savoir le lieu où l'office se tenait, où le culte était rendu. La première chose qui happa l'attention d'Artell fut l'assemblage de sculptures qui culminaient à plusieurs mètres de haut. Son ensemble évoqua au général celles qui décoraient la plus ancienne cour de Yersach, avec ses corps indiscernables et ses symboles qui se liaient, et se déliaient aux figures moins abstraites. La construction était monumentale au point où Artell ne remarqua qu'ensuite le corps, minuscule en comparaison, échoué contre elle.

Il le vit, s'invita entre les bancs renversés, et reconnut la femme qui gisait entre la statue de la Paix et les sculptures qui bordaient le mur.

Les cheveux d'Iesan se répandaient sur son visage, sur ses épaules, échappés du voile qu'il lui avait donné son nouveau nom. Le voile reposait à côté d'elle et la dépouillait de cette identité imposée. Artell attrapa son épaule pour la tirer vers lui. Si son visage devait être aussi méconnaissable que celui de la gardienne des lieux, il ne le supporterait pas. Les traits d'Iesan étaient intacts, à peine froissés par la main de la douleur. Les yeux vitreux de la vieille femme naviguèrent dans le vide qui la séparait de sa chair avant s'arrimer au visage d'Artell.

— Vous êtes déjà là.

— Qui ? s'enquit Artell, d'une voix qui ne lui ressemblait pas. Qui vous a attaqué ?

Elle inclina le visage comme elle avait habitude de le faire lorsqu'elle trouvait la question particulièrement sotte. Le général renonça à obtenir une réponse et passa une main sous les aisselles de sa génitrice.

— Tenez bon, nous sortons d'ici.

— Non. Je n'irai pas loin ainsi.

Elle désigna d'un mouvement du menton ses jambes inertes. Du sang ruisselait et le regard d'Artell accrocha deux plaies situées au-dessus du genou. Les hommes d'Amaury s'étaient assurés qu'elle ne marcherait plus et qu'elle ne s'échapperait pas.

Elle capta le regard terrifié qu'Artell adressa aux flammes qui approchaient.

— Je n'ai pas peur des flammes, fils.

Artell, à genoux devant Iesan, la considéra avec stupeur. Elle ne s'était jamais adressée à lui de la sorte. Le général avait de fait toujours pensé qu'elle nourrissait à son égard un peu d'affection, sans le considérer pour autant comme son fils. On l'avait arrachée à elle dès la naissance et Artell n'avait jamais réclamé la plus petite reconnaissance.

L'homme l'observa, incrédule, et la pression des doigts d'Iesan entre les siens s'amoindrissaient déjà. Elle avait tenu, s'était accrochée jusque-là.

— Je pars et là où je vais, les flammes ne me feront plus mal.

Un sourire presque mutin ponctua ses mots. Il y avait presque du soulagement dans ses mots et Iesan trahissait un calme à en faire pâlir les meilleurs soldats de Loajess face à la mort. S'habituait-on à l'idée de la mort dans un lieu de foi ? Artell avait rencontré bien des soldats qui prétendaient ne pas craindre la mort. Lorsque celle-ci approchait, lorsque le sang qui s'écoulait les en approchait, ils finissaient toujours par se débattre entre les mains de la mort.

Iesan semblait l'inviter, comme si elle avait attendu un demi-siècle que cette figure encapuchonnée l'arrache à cette existence volée.

— N'ai plus peur, fils.

Artell n'eut guère le temps de l'implorer de l'attendre un peu, qu'elle s'abandonna dans un sourire soulagé. Enfin comblé.

Iesan mourut entre ses bras.

***

Lyssandre avait été rejoint par Artell après avoir ordonné sa présence à ses côtés. La proximité du général avait toujours représenté une sorte de garanti aux yeux du roi. Ce jour-là, il s'agissait d'un poids. Lyssandre entendait fourmiller les sombres pensées d'Artell jusqu'à ternir les siennes.

— Le trésor des Meauvoir est parvenu sans encombre à Yersach, déclara Lyssandre, non une certaine maladresse.

Artell ne lui en tint pas rigueur. La mine sombre, il était adossé à la rambarde qui délimitait les dimensions de l'immense cour inférieure de Yersach. Des familles roturières y vivaient et animaient l'existence de la forteresse des cris des enfants, des discussions enjouées. D'un calme qu'Amaury menaçait, à chaque instant, de dissiper d'un claquement de doigts.

Lyssandre avait décortiqué les raisons qui avaient poussé Amaury à incendier le couvent. Des symboles neutres de Loajess, les instances religieuses n'étaient pas toujours les plus vertueuses, mais elles n'avaient pas feint de prendre parti. Elles étaient restées neutres, si l'on excluait le fait qu'elles aient permis au prince égaré de survivre quelques semaines à l'abri des regards.

Amaury avait peut-être souhaité s'attaquer à ce qui s'opposait, par principe, à sa vision du monde guerrière et conquérante. Ou encore railler le symbole de la Paix de ce monde, se venger d'un quelconque fait, ou encore attirer leur attention pour une raison qui échappait à Lyssandre. La vengeance pouvait elle aussi justifier un acte d'une telle violence, un parjure aux yeux de tous ceux qui alimentaient leur foi.

Le roi avait mis la main sur une dernière explication, pas moins sensible. Les hommes qui avaient mis le feu au couvent répondaient à des ordres. Des ordres qui venaient du haut de la hiérarchie. Amaury avait peut-être voulu se débarrasser, en plus du reste, tu vestige du passé, de temps reculés, plus lointain encore que la naissance de Loajess, cinq cents ans plus tôt. D'un craquement d'allumettes, il réduisait en cendres plusieurs siècles d'Histoire et il n'existait pas pire sort que celui qui privait un peuple des traces de son passage.

Lyssandre y songea, encore et encore.

— Les soldats de votre oncle ont su que les religieuses vous avaient couvert. J'ignore comment.

Lyssandre referma ses doigts sur la rambarde dentelée, aux arêtes rognées par le temps. Il devait se cramponner à quelque chose de palpable. La rambarde, escortée par deux pinacles, constituait un point d'ancrage bien solide.

Il n'avait pas uniquement le sang des femmes avec lesquelles il avait vécu sur les mains. Il avait aussi la perte de vestiges précieux, d'un pan de la mémoire de Loajess, déjà en partie rognée, sur les bras.

— Il a agi par vengeance, traduisit Lyssandre.

— Il n'y a pas que cela, dut reconnaître Artell.

Appuyé contre la rambarde, adossé au vide, le roi acquiesça. Pourquoi le feu ? Destructeur tout désigné, Amaury l'avait préféré à une mise à mort plus traditionnelle des traîtres. Il aurait pu réserver la corde aux nonnes, ou encore l'épée, mais en plus d'abattre la majorité d'entre eux, il avait tenu non pas à effacer les traces, mais à taire la bâtisse qui avait accueilli le roi. Les rites funéraires du culte de la Paix refusaient l'incinération, le geste de brûler un corps s'approchant sensiblement trop de l'enfer, comme l'avait confié Iesan à Lyssandre. Amaury avait refusé à ces femmes un passage digne vers l'au-delà.

Lyssandre jeta une œillade en biais à son ami. Il lut dans son regard une soif de revanche qui le prit de court. Il était familier de la sagesse de cet homme et de ses talents de stratège. Il ne lui avait jamais connu une telle colère. Un courroux capable de rayer ses principes d'un trait.

— Retenir mon attention, énonça le roi, dans un souffle. Amaury avait l'intention de retenir mon attention et de m'attirer droit dans un piège.

— Vous ne pouvez pas en être certain.

— Non, en effet, mais je commence à cerner le fonctionnement de mon oncle. Il aime attirer ses cibles dans des pièges d'apparence grossier et celui-ci a été conçu pour nous pousser à l'erreur. Plus la douleur nous aveugle, plus nous manquerons de discernement. Plus nous gardons la tête froide, plus les chances de le prendre à son propre jeu augmentent.

Le regard d'Artell dégoulinait de suspicion. L'amateur des raisonnements alambiqués considérait celui de Lyssandre un peu trop tordu.

— Miriild est morte, Nausicaa n'est que l'ombre d'elle-même, Tryarn a été tué, et à présent votre mère... Nous n'avons pas le temps de reprendre notre souffle, d'enterrer nos morts, et l'événement que mon oncle a organisé à Halev a été maintenu pour cette raison. Il nous pousse à l'erreur.

— Mettez-moi aux arrêts, Sire. Je pourrais devenir cette erreur si je ne prends pas gare.

Lyssandre savait combien la bataille de Farétal avait fragilisé Artell. Le général y avait survécu, mais il n'avait plus jamais été exactement le même homme. Le roi devinait les contours de cette faiblesse tapie en lui, aussi invisible que les marques charnelles de ces combats étaient indéniables. Ces contours suivaient le tracé exact des cicatrices.

— Vous avez raison, admit Lyssandre, dans un soupir, mais je ne peux pas vous l'accorder.

Artell vibra d'une colère aussi brutale qu'elle ne se dispensa d'aucune façon.

— J'ai besoin de vous.

Lyssandre ressentait le désir de s'effondrer, lui aussi, d'exiger quelques éternités pour guérir des blessures qui striaient son âme.

Artell se redressa et dénoua ses doigts de la rambarde avec raideur avant d'articuler :

— Halev ?

— Là où les seigneurs se réuniront. Vous êtes le neveu de Tryarn, votre présence interrogera, mais personne n'aura l'audace de vous questionner.

Lyssandre avait besoin des yeux et des oreilles d'Artell pour s'assurer la réussite de son projet. Le détail de la distribution des rôles au sein de celui-ci n'avait pas encore été tout à fait établi et le souhait du roi n'aurait pas pu plus mal tomber.

Le général répondit pourtant, avant que son regard ne soit absorbé par la course d'un flocon jusqu'au creux de sa main.

— J'y serai avant que la partie commence.

Sur la peau brûlée d'Artell, les premiers flocons de la journée s'échouèrent comme les premiers signes d'apaisement.


Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro