Chapitre 48
– Comment ça tu pars ? Ils m'ont dit que tu pouvais rester !
Tamryn passa nerveusement les mains dans ses cheveux avant de répondre :
– S'il-te-plaît, ne complique pas les choses encore plus qu'elles le sont.
– Mais... pourquoi ?
– Ce sera mieux pour nous deux si je m'éloigne un peu.
– C'est à cause de la Mafia.
– Oui. Enfin non ! C'est un tout Soraia.
– Je suis vraiment désolée de ce qu'ils t'ont fait si tu savais !
Le blond sourit, soupira et lança :
– Je l'ai probablement un peu cherché.
– C'est à cause de Prokhor !
– Mon père a perdu la tête...
Les deux jeunes gens observèrent la pièce autours d'eux. C'était leur maison, maintenant, puisque le cinquantenaire venait de se faire virer. Les hommes de main d'Inacio et Joâo s'étaient chargés de vider ses affaires, pour ensuite expédier l'homme à l'autre bout du Portugal. Sans dire à aucun de ses enfants où leur tuteur avait été envoyé.
– Tamryn, reste avec moi...
Sa voix était suppliante. Elle aimait cet homme de tout son cœur, de tout son âme, et refusait de le perdre. La brunette avait bien trop peur qu'il vire mal, qu'il devienne quelqu'un d'autre, qu'il soit encore une fois influencé par une personne mal intentionnée.
– Merde arrête ! Je... c'est déjà assez difficile pour moi cette décision ! Ça fait une semaine que j'ai été enfermé par tes mafieux chéris, que je me suis fait casser le nez, menacé de mort, que j'ai vu mon père se faire tabasser ! Ils lui ont coupé la main ! Et il m'a quand même fallut une semaine pour me convaincre que c'était la meilleur solution ! Tout ça parce que je sais que ça va m'être insupportable d'être loin de toi. Je suis perdu sans le soutien que tu offres à ma vie, et maintenant que je t'ai retrouvé, que je peux de nouveau m'appuyer sur toi, c'est mon être tout entiers qui me hurle de partir. Ho, Soraia, si tu savais comme j'aimerais rester... Mais je ne peux pas. Je ne peux pas...
Larmes, aux yeux, la portugaise se jeta sur le garçon pour le serrer dans ses bras. Celui-ci lui rendit son étreinte, plongeant sa tête dans son cou pour sentir cette odeur qu'il aimait tant. Leur câlin se fit en silence, durant de longues minutes, jusqu'à ce que la voix étranglée de la femme brise celui-ci :
– Ils lui ont coupé la main...
C'était une interrogation. Une interrogation remplie de panique, et son interlocuteur la serra encore plus dans ses bras, sentant le petit corps féminin trembler contre lui.
– Pourquoi restes-tu avec eux ?
– Ils lui ont vraiment coupé la main ?
– Que croyais-tu ? Ce sont des meurtriers !
Elle renifla, comprenant alors pourquoi Inacio lui avait demandé si Prokhor était droitier ou gaucher. Un frisson glacial s'empara de son corps à ce souvenir.
– J'ai peur. Chuchota-t-elle d'une voix étranglée, remarquant qu'elle s'avouait à elle-même ce dilemme intérieur. L'homme lui frotta doucement le dos en l'embrassant sur le front.
Avait-il envie de poser ses lèvres sur les siennes ?
Sans aucun doute.
Mais il n'était pas idiot et savait que ça allait autant être mauvais pour lui que pour elle. Leur couple était trop dangereux, ils allaient finir par s'enfermer dans leur bulle jusqu'à s'auto-détruire.
Il y avait tellement d'alternatives, aucune limite. Soraia se perdrait dans les tourments de l'informatique et finirait par se faire tuer, Tamryn en mourrait de tristesse.
Ou bien c'est ces histoire de Mafia qui finiraient par les mettre à mort.
Prokhor pourrait aussi causer leur perte.
Peut-être même que pris dans la folie passionnelle de leur couple, ils finiraient par se suicider ensemble, ne voyant que cette alternative pour s'échapper des douleurs de ce monde et vivre ensemble à tout jamais.
Il se pourrait aussi que l'instabilité affective de Tamryn finisse par les rendre fou.
Qu'aucun des deux n'ait les épaules pour supporte le poids d'une telle relation, alourdie d'invincibles émotions.
Mais en fait, dans le fond, il avait beau se faire ces milliers de triste scénarios, ils savaient très bien que ce phénomène presque apocalyptique qui les liait ne pouvait pas être expliqué.
Pour pouvoir survivre ensemble, ils devaient se contenter de cette amitié fusionnelle et incomprise de leur entourage. Gardant toujours en tête que l'un de pouvait exister sans l'autre.
– Fuis. Dit-il calmement, relevant la tête féminine pour plonger ses yeux dans les siens. Pour tout réponse elle soupira, visiblement découragée.
– Tu ne veux pas partir c'est ça ?
Elle acquiesça.
– Mais pourquoi ?
– Je... je ne sais pas. C'est comme si... j'ai l'impression de me sentir à ma place avec eux.
– À ta place ? Mais Soraia toi tu es une hackeuse talentueuse, ce n'est pas au même niveau que leurs statuts d'assassins !
– Ça se complète tu ne trouves pas ? Dit-elle en esquissant un faible sourire.
Il pencha la tête sur le côté, soupira tristement avant de répondre :
– La seule chose que j'ai remarqué, c'est qu'ils donneraient n'importe quoi pour coucher avec toi et que j'ai bien l'impression qu'il y en a un des deux qui a réussi.
La jeune femme fronça les sourcils :
– Comment ça ? Pourquoi parles-tu de ça ?
– Parce que la seule raison pour laquelle tu te sois absolument entêtée à rester avec eux, elle se trouve là-dedans. Dit-il en désignant l'emplacement de son cœur. La portugaise rougit et répondit nerveusement :
– Non je te jure ce n'est pas que à cause de ça !
– Alors j'avais en partie raison. Dit-il en laissant s'afficher un petit sourire sur son visage, montrant toute la douleur qui s'emparait de lui. Ça faisait mal, quand même, de voir qu'il n'était plus le seul homme vers qui était dirigé son amour.
– Je suis désolée... Soupira-t-elle en baissant la tête.
– Je parie que tu te tapes de leader.
– Le leader ?
Il fronça les sourcils, étonné qu'elle ne sache pas lequel des deux hommes avait une hiérarchie supérieur à l'autre :
– Oui, du moins celui qui se comportait comme étant le leader. Le plus âgé des deux, mais plus petit en taille.
Joâo...
Elle soupira, croisant les bras sur sa poitrine :
– On ne couche pas ensemble.
– J'avais quand même raison. Ça se voyait dans son regard qu'il avait devancé l'autre sur ce plan-là. Niveau possessivité physique. Il marqua un silence avant de rajouter :
– Mais il ne t'aime pas.
– Il n'a aucune émotion, tu sais.
– J'ai remarqué. Moi j'en ai trop, lui pas du tout. Il me fait flipper ce mec.
– Moi aussi...
– Ho, mais tu as bien plus peur de l'autre.
Elle frissonna, et grimaça avant de répondre :
– Comment sais-tu.
– Je te connais par cœur. Et ce n'est pas parce que je n'arrive pas à gérer mes propres états d'âmes que je n'ai pas de facilités à décrypter ceux des autres.
Il s'appuya contre le mur, observant silencieusement le plafond, yeux tournés vers le ciel pour mieux ramener ses larmes à l'intérieur de lui.
Ça faisait si mal.
Il dit ses paroles d'une voix cassée :
– Il a des sentiments pour toi, le deuxième. Et toi ?
– Ho Tamryn, je suis désolée... Avait-elle répondu d'une voix étranglée, venant encercler l'homme de ses bras. Il passa ses mais derrière le dos féminin, se contentant amplement de cette réponse. Sa mâchoire se crispait d'un mélange de rage et souffrance, alors qu'il laissait l'odeur de lilas qui enveloppait la jeune femme monter jusqu'à ses narines pour le calmer un peu.
Au même moment mais à la villa, les deux frères et leur père discutaient dans le bureau du futur Parrain.
– Si Anastasia lui a bien appris une chose, c'est la loyauté. Getulino venait de parler, et continua en voyant qu'ils avait l'attention de ses deux fils :
– Je l'ai vu dans ses yeux. Elle est fidèle à votre Cygne c'est indéniable. Elle le sera pour vous également. Elle connait la valeur de la loyauté et les risques qui s'ensuivent d'une trahison.
En effet, durant le passage à tabac de Prokhor et Tamryn, puis la visite accordée à Soraia dans les cachots la semaine dernière, Getulino était présent. Juste derrière la vitre sans teinte de la pièce, il avait observé la scène avec attention. Fier de ses fils qui avaient su prendre la situation en main, quoique très étonné qu'ils n'aient pas abattus les deux hommes.
Cette unique pensée le crispait.
Ils les avaient éduqués pour qu'ils n'aient jamais de point faible.
Et voilà que cette violette semblait en devenir un.
C'était de son devoir de protéger ses enfants. Ses héritiers. Non pas en tuant la brunette. Ni en la manipulant, bien que la façon soit très alléchante. Mais en l'intégrant petit à petit dans leur rang.
Que du statut de talon d'Achille elle passe à celui de bouclier.
– Elle souligne le fait de ne pas vouloir appartenir à la Mafia. Remarqua Inacio tout en tirant une taffe sur le cigarette qu'il tenait en main, pour ensuite passer celle-ci à son frère.
– Ça s'arrangera. Avait alors répondu Joâo d'une voix neutre. Voyant que son cadet attendait un développement, il continua :
– Sa peur d'insécurité, son désir de protection, son attirance pour le piratage. Elle ne le sait pas encore mais en réalité elle meurt d'envie de se joindre à nous.
– Comment en être certain ?
– Anastasia a l'habitude de nous cacher plus de la moitié des choses. Elle la connait mieux que nous deux rassemblés, alors si je suis parvenu à cette conclusion en si peu de temps, les raisons de notre cher Cygne pour l'avoir envoyé ici son profondément fondées et solides.
Le deuxième fils et son père acquiescèrent, convaincus. Ce dernier rajouta :
– Il y a néanmoins une limite.
Les frangins se regardèrent, sachant très bien ce que leur géniteur allait dire :
– Tamryn. Le Parrain de la Mafia observa quelques instant le paysage derrière la fenêtre avant de continuer :
– Méfiez-vous. Car si sa loyauté est considérable, elle a des failles. À choisir entre vous et ce garçon, elle aurait à peine à réfléchir qu'elle vous tournerait le dos.
– Elle partira, mais après un lourd dilemme. Justifia cependant Inacio. Son père l'observa avant d'hausser les épaules, peu convaincu.
– Faites attention à ce russe. Vivent-ils ensemble ?
– Il est de passage au Portugal, venu pour la voir.
– Vous avez dit qu'ils étaient très fusionnels.
– Oui, Anastasia a enfin daigné nous dire toute l'histoire à son sujet.
– J'imagine qu'ils vont vivre ensemble maintenant, étant donné que vous ne l'avez pas banni.
C'était un ton de reproche qui sonnait dans la voix du blond. Reproche de ne pas avoir éloigné cet obstacle comme il aurait été, à son avis, judicieux de le faire. Mais voilà, les deux hommes s'étaient préoccupés du bien être de leur femme à tout faire. Avant le leur. Encore une preuve soulignant qu'elle était un point faible pour eux.
– Nous l'avons fait surveiller, ainsi que Prokhor. Tamryn ne reste pas au Portugal, il rentre en Russie.
– Ah oui, intéressant.
– Nous pensons que les évènements le font un peu paniquer, il a besoin de prendre des distances. Il a des relation là-bas, pour des petits boulots, et habite dans leur ancienne maison, qu'ils n'ont jamais vendu.
– Quand ?
– Il a un avion de Lisbonne jusqu'au Kraï de Perm le 20 janvier.
– Bien. Satisfait, le Parrain réajusta sa cravate noire :
– N'oubliez pas, ce soir, comité au musée national des arts.
Les deux hommes acquiescèrent, et n'ayant plus rien à dire, leur père leur adressa un signe de tête avant de quitter la pièce.
Cette soirée mondaine avait lieu dans le plus grand et le plus anciens musée d'œuvre d'arts antique et contemporaine du pays, situé à Lisbonne. Et l'un des business de la Grande Mafia Européenne était la contrefaçons d'œuvre d'arts, voir même le vol de temps en temps. Ce comité allait leur permettre de viser certaines de leurs prochaines cibles, mais aussi traiter et rencontrer certains de leurs clients.
Et comme tout ce genre de réunions, vous étiez mieux vu et venant accompagner. Une femme et un homme, un homme et un femme.
Vers dix-neuf heures trente, Joâo et Inacio se retrouvèrent dans la chambre de ce dernier. Tout deux en costume noir, jusqu'à la chemise qui avait une couleur ébène. Ils descendirent calmement jusqu'au salon où devaient déjà les attendre les deux femmes, arrivées presque deux heures plus tôt pour se préparer.
Soraia et Anastasia étaient bien là. Eblouissantes. Un mince sourire s'étira l'espace d'une fraction de secondes en apercevant la blonde et la brunette. Elles avaient mis la même robe, d'un splendide tissu opaque et épais qui brillait à la lumière. Épaules dénudées, quelques mèches blondes sortaient d'un élégant chignon qu'Anastasia s'était fait pour tomber dans son dos. Le carré plongeant de Soraia était lâché au naturel. La tenue était longue, accompagné d'un traine. Le jupon élargissait la robe à partir de leur hanches, et on devinait les talons qu'elle avaient chaussées, faisant grandir leur taille.
Elles étaient vraiment sublimes. La robe d'Anastasia était rouge flash, ce qui se mariait à merveille avec son profil de femme fatale et sa peau blanche. Soraia, elle, avait un tissu bleu roi, élégant arrangement avec sa peau hâlée et ses yeux violets.
Ils se dirigèrent tous les quatre jusqu'à la Range Rover d'Anastasia, garée devant la villa. Comme sortit de nulle part, car Soraia n'avait toujours pas compris où il rangeaient tous leurs véhicules.
La mafieuse laissa à contre-cœur Joâo prendre place au volant. Elle n'aura de toute façon jamais pu conduire avec tous les encombrants pans de sa jupe. Elle s'assit donc à la place passager, laissant Inacio et la portugaise à l'arrière. Ils démarrèrent calmement, les pneus crissèrent sur les gravillons. Il faisait nuit noire à cette heure-ci en hiver, et l'homme alluma donc les phares, éclairant le paysage autours d'eux.
C'est d'un coup qu'une paire d'yeux brillants apparut devant eux. L'aîné des deux frères freina d'un seul coup en jurant.
Une deuxième paire d'yeux arriva.
– Putain. Grogna Inacio.
Soraia elle, était fascinée par ce qu'elle voyait. C'était deux chiens, qu'elles distinguait peu mais visiblement magnifiques, et qui se baladaient tranquillement dans la propriété.
Elle savait bien que ses patrons avaient des canidés quelque part.
Captivée par sa passion pour les animaux, elle avait déjà posé la main sur la poignée pour ouvrir la porte et aller à la rencontre des chiens. Mais à peine eut-elle entrouvert celle-ci qu'Inacio la tira brusquement en arrière, passant par-dessus elle pour verrouiller la portière et lui jeter un regard noir.
– N'essaie même pas.
– Mais depuis quand vous avez des chiens ?
Inacio haussa les sourcils et elle entendu Anastasia ricaner, avant que le jeune homme ne réponde :
– Depuis toujours.
– Je peux aller les voir ? Demanda-t-elle d'un air suppliant à craquer, reposant déjà les yeux sur ces yeux brillants qui se reflétaient à la lueur des feux.
– Non merci je n'ai pas envie que tu perdes un bras. Grogna-t-il tout en sortant son téléphone, alors que Joâo ouvrit la fenêtre pour gueuler quelques mots en italien en direction des canidés. Ceux-ci relevèrent la tête avant de détaler comme des lapins. Le premier des deux fils accéléra alors, arrivant très vite jusqu'au portail qu'il dépassa, attendit qu'il se referme avant de s'élancer sur la route.
À côté d'elle, Inacio venait de passer un coup de fil, probablement à un proche ou membre de la famille :
– Les deux bêtes se sont enfui, rentre-les on n'a pas le temps.
Et il avait immédiatement raccroché, rapportant son attention sur la route.
– Pourquoi vous me les cachez ?
– C'est les nôtres pas les tiens, ils t'encombreraient.
– Mais j'adore les animaux !
– On sait.
– Vous me les montrerez ? Insista-t-elle, ce à quoi l'homme à ses côtés répondit froidement :
– Non.
– Pourquoi ?
– Ce ne sont pas des jouets. Grogna-t-il. La brunette s'indigna :
– Je sais !
Coupant cours à cette discussion qui lui cassait les oreilles, le futur Parrain prit alors la parole :
– Ils sont agressifs envers les inconnus. Maintenant arrêtez de nous casser les couilles, on va bientôt arriver.
Enervée par cette réponse, Soraia croisa les bras sur sa poitrine en posant yeux sur la route tout en se plongeant dans ses rêveries.
Elle soupira, se rendant compte qu'elle ne savait même pas où ils allaient.
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