Chapitre 1
"Comment ça un problème avec la distribution des appartements?"
L'homme en face de moi se gratte la nuque pour toute preuve de son ignorance. Il jette un dernier coup d'oeil inutile vers ses papiers et vers les clés suspendues dans le vide par le bout de mes doigts pour se donner une contenance.
"Écoutez, il y a beaucoup de pensionnaires cette année et malheureusement le problème nous a échappé. Nous essayerons d'arranger tout ça au plus vite, je vous l'assure."
Je referme mon poing sur ces maudites clés et me retourne dos à cet homme qui me met les nerfs à vif. Je serre les dents et regarde par la porte vitrée l'activité qui se déroule en dehors de l'immeuble.
"J'avais demandé une chambre seule."
L'homme soupire, je sens bien qu'il est exaspéré. Mais dans le fond je m'en contre fiche, JE viens de découvrir que je vais devoir partager ma chambre avec un parfait inconnu. Et par dessus le marché, je dis bien UN parfait inconnu!
Ce ne sont ni plus ni moins que des visions d'horreur qui défilent dans ma tête à cet instant précis. Je n'ai en aucun cas besoin de vous préciser ces visions, je suis certaine que vous comprenez.
"Nous n'avons pas eu le choix... Ce sera comme ça, ou alors essayez de trouver un autre immeuble. Et je peux vous assurer qu'à Londres, ce n'est pas chose facile."
Je me retourne vers lui,en colère. Non, vraiment? Évidemment que ce n'est pas simple! Mes parents ont dû se plier en quatre pour pouvoir me payer ces études à l'étranger. Ils ont pu me prendre un appartement dans les alentours du campus, je ne peux pas leur en demander plus.
Il jette un oeil à mes clés et alterne avec mes yeux. Ça va, j'ai compris.
"Très bien." Dis-je en signant le contrat et en lui versant l'enveloppe du loyer.
Je m'avance ensuite vers l'ascenseur et appuie sur le bouton d'appel.
"Mais je vous préviens." J'entre dans cet espace confiné et mal éclairé. "Si je tombe sur un psychopathe tueur en série, vous le regretterez avant qu'il ne me coupe en rondelles et qu'il ne me cache dans son frigo."
Sur ces belles paroles, les portes de métal se referment sur moi dans un claquement sonore. Les cliquetis des rouages usés se font entendre et l'ascenseur monte vers le troisième étage.
***
Un point positif; il y a de l'eau chaude.
Un point négatif; il n'y a pas encore de wifi dans mon appartement.
Super, donc si mon futur colocataire m'agresse à coup de couteau de cuisine, je ne pourrais même pas envoyer un message à quelqu'un par Facebook du style; "à l'aide, on me découpe en rondelle! #VDM"
Et à qui de toute façon? Je suis à des kilomètres des gens que je connais. Seule dans la capitale anglaises.
Une vague de bonheur mélangée à de la peur s'empare de moi. Ce qui, au passage, donne un résultat plutôt étrange d'un mélange entre un sourire et une grimace. Heureusement que personne n'est là pour me voir.
Un deuxième point négatif, j'ai laissé mon repas sur le feu alors que je suis actuellement sous la douche. Bravo Mercy.
Oui, Mercy c'est mon petit nom. J'ai 18 ans et je pars étudier à Londres. Pourquoi? J'avais le mal de mon pays d'origine. Je l'ai trop vu et je n'en pouvais plus, de plus, Londres m'a toujours fasciné.
Voilà, vous en saurez plus sur moi plus tard, il n'empêche que vous ne pourrez que remarquer que je suis quelqu'un qui n'est pas vraiment gêné avec les gens... Je ne sais pas si c'est une qualité ou un défaut.
Et de toute façon, je m'en fiche.
Une fois que j'ai bien pris la peine de subtiliser toute l'eau chaude, je sors enfin de la douche et sens sans surprise une légère odeur de brûlé. Quel dommage, un si bon gratin de chicons que maman m'avait préparé... Notez le sarcasme.
J'enroule une serviette autour de mon corps et sors de la petite salle de bain embuée en sechant mes cheveux à l'aide d'une deuxième serviette. Je sors de cette pièce par pure précaution, je ne voudrais pas incendier mon nouveau chez moi dès le premier soir. Alors je fais mon entrée dans la cuisine en poussant violemment la porte à l'aide de mon coude en continuant de sécher ma chevelure brune.
Je m'attendais à tout sauf à un cri de douleur.
***
"Je suis tellement désolée!" Dis-je en plaquant une main sur ma bouche.
Le jeune garçon qui se trouve derrière la porte n'a pas l'air d'apprécier l'accueil que je lui ai fait... Du moins c'est ce qu'il le semble. Et puis, ça me parait logique.
Il est assis sur le sol, une main par terre et l'autre se fottant le front, les sourcils froncés exprimant une grimace de douleur imprimée sur son visage.
"Bonjour, oui, moi aussi ça va bien. Je suis également heureux de te rencontrer." Dit-il en se relevant de façon éprouvante.
Je rougis sans cesser de danser d'un pied sur l'autre tant je me sens stupide... Et n'oublions pas que je suis en serviette de bain avec des cheveux dégoulinants qui trempent le sol en formant une petite marre autour de moi.
"C'est vrai qu'il y a mieux comme accueil." Dis-je en levant les yeux vers lui.
Un petit sourire se dessine sur ses lèvres alors qu'il se frotte toujours la tête.
"Ce geste, c'est pour me faire culpabiliser, pas vrai?" Dis-je en riant à moitié.
Il s'interrompt et baisse le bras en le tendant vers moi.
"Thomas Sangster, psychopathe tueur en série assigné."
Mes yeux s'agrandissent en une fraction de seconde alors que mes joues prennent feu. Comment sait-il? Jamais Ô grand jamais je ne m'étais sentie aussi bête, j'aurais très bien put faire un petit résumé de cette situation et l'envoyer à un des ces magazines pour adolescents qui proposent des rubriques du style "ma plus grosse honte". Mon article aurait été écrit avec les plus gros caractère et bien mis en avant dans les gros titres, j'en suis convaincue.
"Mercy Adams, professionnelle question gaffe et catastrophe."
Il plisse le nez.
"Ça sent le brûler non?"
Je me pince les lèvres et le fixe droit dans les yeux en me disant que cette soirée ne pourrait pas être pire.
"Possible." Dis-je d'une voix mal assurée.
Je tourne vivement la tête vers le four, nullement surprise de voir un filet de fumée argentée s'en dégager; je m'approche alors doucement pour regarder avec désespoir le spectacle effroyable d'un gratin de chicon en train de se faire carboniser au sens propre.
Je sens mon nouveau colocataire s'approcher derrière moi, se pencher et me susurrer à l'oreille.
"Ce n'est rien, je pourrais toujours te découper en morceaux et te cacher dans le frigo pour me faire une repas ce soir..."
Je ne me retourne pas mais mon expression de pitié se dégrade petit à petit pour laisser place à une grimace d'effroi. Voilà qui conclut une magnifique première discussion avec son colocataire. Sur ses paroles bien placées, le nommé Thomas éclate de rire et se retire dans sa chambre pour déballer ses affaires.
Moi, je vais aller faire un tour dans le bottin pour me renseigner sur les pizzerias qui livrent à domicile les plus proches.
***
Je me suis vêtue d'une chemisette et d'un short de sport que je porte habituellement pour dormir. Mes cheveux sont enfin sec et retombent sur mes épaule. Je passe une main dedans en souriant; quelle fille n'aime pas le résultat de ses cheveux, lisse, brillants et soyeux, après avoir essayé un nouveau shampoing? Oui, comme dirait Balou, il en faut peu pour être heureux! Du moins pour mon cas de fille heureuse à long terme. C'est bien simple, je n'aime pas bouder, être triste où penser négativement. Alors j'ai décidé d'être heureuse tout simplement! Ça m'arrange bien, je vis bien, mais les autres prennent chère de ma bonne humeur incessante et du moulin à parole que je fais. Moi je dis; tant pis! La sonnette retentit, je vais ouvrir au livreur de pizza avec l'eau à la bouche. Cette carbonisation de chicon m'a redonné le sourire! Non franchement, je n'en voulais pas de ces horreurs de légumes verts. Je me précipite vers la porte pour aller arracher les deux cartons de pizzas au livreur. Je lui souris poliment, le paye et claque la porte pour aller sautiller jusqu'au canapé tout neuf du salon. Je m'installe avec la télécommande et change de chaine jusqu'à trouver une série policière à mon goût tout en mâchouillant ma part de pizza. J'entends une porte s'ouvrir, Thomas pointe son nez dehos.
"J'ai entendu sonner, le plat est là?"
Pour toute confirmation je lève ma part en l'air. Il hoche la tête en riant et vient s'asseoir sur la canapé à côté, puis me détaille de bas en haut. Je l'interroge du regard.
"Tu es déjà en pyjama?"
Je hoche la tête en gardant les yeux rivés sur la télé.
"Oui, tu vas devoir vivre avec moi, autant commencer à t'habituer tout de suite. De toute façon je ne peux pas faire pire impression alors laissons tomber les manières, tu veux?"
Il hausse les épaules et prend une part de pizza avant de se mettre enfin à l'aise. Je le sens plus détendu. Il devait s'attendre à une fille stressée et obstinée à vouloir faire bonne impression, s'était préparé à bien se comporter face à elle... Et bien non. Autant mettre les pieds sur la table dès le début! Au moins il peut se détendre... Enfin je l'espère. Avec moi ce sera difficile je crois, j'aime bouger et parler, le jour où on pourra se détendre en ma présence c'est que je serais certainement dans le coma.
Il tourne la tête vers moi.
"Je voulais te dire, mes amis avec lesquels j'étais censé vivre habitent à l'étage au dessus. Si tu préfères, je pourrais aussi aller dormir chez eux."
Je hausse les épaules.
"Même si c'est une erreur, tu vis ici. Mais rien ne t'empêche de passer du temps chez eux. Tant que tu me supportes c'est ce qui compte, moi je n'ai pas de problème avec ta présence... Pour l'instant."
Il sourit et mord dans sa pizza.
On passe la soirée à regarder des vieilles séries policières en se moquant des acteurs qui jouent mal et aux effets spéciaux qui n'ont aucune crédibilité. Je suis contente de pouvoir m'ouvrir à lui et pouvoir rire sans me prendre la tête. Je perçois un léger accent britannique dans sa voix, c'est plutôt séduisant je dois dire. J'apprécie avoir déjà noué une certaine affinité avec ce garçon. Si il est vraiment un psychopathe tueur en série, il cache bien son jeu, ce qui me fait d'ailleurs bien peur. Vers vingt-trois heure je lui dis bonne nuit et me retire dans ma chambre sans commentaire. Il ne me faut pas dix minutes avant de m'endormir comme une masse. Il a réussit la première étape, j'ai envie d'apprendre à le connaitre. J'espère qu'il ressent la même chose par rapport à moi malgré cette première approche désastreuse. Ensuite, je verrais si je peux lui faire confiance et si une amitié potentielle pourrait se lier. On verra bien.
Londres m'a appellé, je l'ai sentis !
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