Chapitre XXV
Amin était au chevet de Méda. Il était tard mais le capitaine ne pouvait la laisser seule. Après avoir reçut les soins des guérisseurs, son amie avait plongé dans un long sommeil. Un vilain coup épée lui barrait le bras et lui avait fait perdre beaucoup de sang. Lorsqu'il avait observé la plaie, le guérisseur de chef avait été fortement étonné qu'elle ai pu, Dieu sait comment, nettoyer et bander en plein milieu du champ de bataille. Ces soins basiques avaient pu empêcher les saignements et avaient déjà enclenché la cicatrisation. Méda avait été félicité mais l'ermen était tombée de fatigue.
Les Cracheurs de Feu avaient pris les légionnaires par surprise, ils s'étaient sacrément bien organisés et avaient facilement pris l'ascendant sur eux. Après s'être éloignée des roulottes, Méda avait lancé le signal de repli.
Amin haïssait ces rebelles. Ils avaient élaboré ce plan pour s'attaquer à de pauvres marchands alors qu'ils criaient vouloir les défendre dans les rues de Jayal. Cela le répugnait autant que son frère qui restait aveugle face à tout cela. Une fois que Méda serait remise, Lionel et lui tenteraient une énième fois de raisonner le Général.
Quelque chose tracassait tout de même le capitaine. Qui était ce Cracheur au Don de la terre qui avait bien pu arrêter Geron de le tuer ? Geron et son ami Godfred étaient prêt à l'achever. Mais ce Cracheur les avait arrêtés. Il lui semblait que c'était le même individu qu'il avait lui-même faillit tuer. Il portait une grande sacoche. Ce n'était pas du tout pratique pour se battre, que faisait un fuyard dans un champ de bataille ?
Soudain Méda marmonna quelque chose. Elle émergeait de son sommeil.
- Qu... Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je me rassurais que ma fidèle camarade se rétablissait bien.
Méda tenta de se redresser sur son lit un grimaçant.
- Je ne sais pas qu'elle botte cachée tu nous a sorti, fit Amin, mais ta plaie était propre quand nous t'avons amenée ici.
Méda ne répondit pas tout de suite. Elle ne semblait pas tout à fait sortie de son sommeil. Le capitaine l'observa, sans rien dire.
- Amin, finit-elle par articuler, Lila est vivante.
Un pincement vint prendre le cœur du capitaine et son visage jusque là fatigué mais joyeux se renferma comme un huître.
- C'est effectivement ce que je lui souhaite, répondit-il.
- Ce n'est pas moi qui ai nettoyé ma blessure. Tu sais très bien que je serais capable d'aggraver mon cas en confondant deux herbes. Lila était là.
Méda raconta alors à son ami sa rencontre avec la jeune guérisseuse. Personne dans Jayal n'avait de formation de guérisseur en dehors de ceux vivant à la caserne.
- Elle se battait contre nous mais révulsait de laisser qui que ce soit mourir de n'importe quel camp, cela ressemble fortement à la description que tu me faisait d'elle.
Amin hocha la tête. Tout portait à croire que Lila était présente à ce moment là. Il fit alors le lien avec le Cracheur qui l'avait aidé contre Geron et Godfred.
- C'est elle qui m'a sauvée, réalisa-t-il. Je ne pourrais jamais lui montrer ma reconnaissance.
Un apprenti guérisseur les interrompit.
- Capitaine, le Général est ici et demande à vous parler.
Amin contrôla sa surprise et après un vif échange de regard avec son amie, il suivit le guérisseur.
Lila avait fouillé la capitale. Elle était partie dans l'obscurité en laissant Geron et Godfred à leur profond sommeil. Il faisait sombre et les nuits étaient encore fraîches. Certaines lumières provenant des fenêtres des riches maisonnées avaient permis à Lila de se repérer dans l'immensité de la capitale. Pour éviter de croiser trop de gardes, la jeune fille était passée par les hauteurs de la ville. Au fond d'elle, elle remercia ses entraînements au sein des Cracheurs de Feu qui l'avaient bien aidé à développer ses capacités à simplement se déplacer en toute circonstance. Ces exercices lui avait permis d'apprendre à palier à sa peur des hauteurs. Maintenant, elle se déplaçait presque avec aisance. Elle prenait garde à garder le regard fixé en l'air mais ses prises étaient bien plus assurées et lui permettaient d'avancer calmement mais de manière discrète jusqu'au rempart intérieur.
Cependant, en grimpant sur les toits, la jeune fille avait beaucoup réfléchi. Les réactions de ses amis l'intriguait. Ils l'avaient sorti des griffes des zurks, lui avaient montré tous les malheurs des habitants de Jayal et l'avaient aidé à installer son infirmerie. Pourtant, ils semblaient avides de confrontation quand il s'agissait du Général ou des nobles ermens. Peut-être avait-elle mal compris les réelles intentions des Cracheurs de Feu ?
C'est là qu'elle aperçut un ensemble de bâtiments un peu reculé des habitations et entouré d'un grand mur. Cela devait être la caserne des légionnaires. Lila s'approcha discrètement et sans difficulté. Des petites lumières émanaient derrière quelques fenêtres. La jeune fille les évita soigneusement afin de rester dans l'obscurité.
Lorsqu'elle fut au niveau du mur, aucune maison ne pourrait lui permettre de passer au dessus. Elle descendit donc et trouva un endroit hors de vue depuis l'extérieur. La jeune fille se prépara à utiliser son Don. C'est alors qu'elle entendit des légionnaires s'approcher de l'autre côté du mur. Ils semblaient marcher comme s'ils faisaient une ronde. Lila patienta et dès que leur voix lui semblèrent assez loin, elle se propulsa au dessus du mur et pénétra dans la caserne.
La jeune fille se déplaça alors sans bruits dans le repère des légionnaires comme si elle avait fait ça toute sa vie. Elle contourna des grands bâtiments desquels sortaient de grands éclats de voix. Lila prit soin de rester loin des fenêtres puis, derrière l'une des bâtisses elle aperçut une sorte de dôme avec de grandes baies vitrées. Par l'une d'elle, Lila aperçut des feuillages.
- La serre. Je l'ai trouvée ! Chuchota-t-elle à elle-même.
Elle marcha à pas feutré dans sa direction. La serre se trouvait plongée dans le noir car à cette heure, presque tous les guérisseurs étaient endormis. Certains pouvaient rester à l'infirmerie pour surveiller les malades mais la majorité devait être plongée dans leur sommeil.
C'est alors qu'elle remarqua que le bout de la serre était timidement éclairé par une bougie. Il y avait donc au moins une personne, elle allait devoir être discrète. La jeune fille pris soin de se positionner à l'autre bout du dôme. Elle repéra une fenêtre dont le loquet était apparent. Elle se cacha derrière un mur. De ses doigts qu'elle articula gracieusement, elle fit glisser quelques poussières de terre qui se solidifièrent pour renverser le loquet et entrebâiller la fenêtre.
Lila se glissa alors dans la serre.
Lorsqu'Amin apparut dans la pièce, Thémis l'attendait, soigneusement assis à un bureau et accompagné de son fidèle garde qui restait debout à ses côtés. Pourquoi n'était-il pas dans son propre bureau, Amin l'ignorait. Tout était très sombre mais il devina qu'ils se trouvaient dans la serre, au vu du nombre incalculable de plantes dont les silhouettes se démarquaient dans l'éclairage de la lune. Sur le bureau, devant le Général, se trouvait une petite bougie qui éclairait leur deux visages.
Le capitaine salua d'un signe de tête le garde resté dans l'obscurité derrière le Général et se tourna vers son frère. Thémis avait le regard froid. Ce regard qu'Amin détestait par dessus tout et qui lui rappelait que trop lorsque leur père les grondait lorsqu'ils étaient enfants.
- Vous n'êtes pas venu me faire votre rapport, capitaine.
Sa voix était aussi froide que son regard.
- Je t'ai envo...
- Je suis ton Général.
Amin retint un soupir.
- Je vous ai envoyé Lionel qui a dû vous faire un rapport détaillé de la situation.
- Je veux l'entendre de ta bouche.
Amin tiqua en entendant le tutoiement mais il savait pertinemment que ce n'était que de la provocation. Il devait laisser la supériorité à Thémis afin de pouvoir tenter de lui expliquer la gravité de la situation.
- Les Cracheurs de Feu nous ont tendu une embuscade. Ils ont pris le dessus, nous avons dû nous replier. Il y a eu quelques pertes mais la majorité des légionnaires et des marchands ont survécu. Demain, j'enverrai une équipe pour récolter les marchandises que les Cracheurs auront laissées.
Tout à coup, Thémis se leva et regarda son petit frère droit dans les yeux.
- Le grand capitaine de la quatrième division, le frère du Général, aurait échoué face à des Cracheurs de Feu ? Encore ?
Amin bouillait d'envie de lui en mettre une. Son poing faillit partir lorsqu'il senti un courant d'air froid remplir la pièce. Thémis le senti aussi car il se retourna vers le fond du dôme qui formait la salle. Soudainement, le capitaine avait l'impression que chaque branche, chaque feuille, chaque fleur pouvait être un intrus. Il aperçut alors une fenêtre entrouverte.
- Cette fenêtre était-elle ouverte à ton arrivée ? demanda Amin alors qu'il s'avançait, la main posée sur son épée, suivit de près par le garde du Général.
- Pour sûr que non, il fait bien trop froid.
Il y eut un temps de silence où les trois supposés seuls membre dans la pièce scrutaient chaque bruit , chaque pulsation différente des leurs.
Soudain Thémis souleva un rond de terre.
- Il y avait quelqu'un ici même, dit-il les dents serrées.
Le capitaine aussi l'avait senti. Amin fit un signe au garde de contourner la rangée de plantes pour prendre l'intrus en sandwich.
Les deux légionnaires avancèrent discrètement tandis que Thémis faisait voler des ronds de terre là où il ressentait des pulsations. Mais jamais il n'arrivait à débusquer l'intrus, comme si celui-ci savait à l'avance ce qui était ordonné à la terre.
Amin arriva dans la rangée deux secondes avant le garde. Deux secondes pendant lesquelles il ne put croire ce qu'il voyait. Il avait devant les yeux une jeune fille blonde, les yeux bleus durcis mais avec toujours autant de bienveillance que la première fois qu'il les avaient vu. Une jeune fille qui le reconnu. La surprise l'empêcha de réagir.
- Mais qu'est-ce que tu fabriques ?! s'écria Thémis.
Lila était en train de fuir par la fenêtre lorsqu'Amin eut repris ses esprits.
Lila était là.
La jeune fille courut. Elle tenait contre elle son sac dans lequel elle avait pu ramasser trois précieuses racines de Glum.
Amin était un très bon combattant. Au vu de la précision des attaques de la part de Thémis que la jeune fille avait eu du mal à éviter, Lila ne doutait pas que le Général était tout aussi doué, si ce n'est plus, que son frère. Quand au troisième, elle n'avait strictement aucune idée de ses capacités mais elle avait tout sauf envie de les découvrir.
Lila courait donc à perdre haleine pour trouver une sortie. Malheureusement, aucun mur ne pouvait être grimpé sans qu'elle soit rattrapée.
La jeune fille hasarda un regard en arrière. Amin allait la rattraper d'un instant à l'autre.
Alors qu'elle continuait de courir, un mur se dressa face à elle. Lila se concentra et fit voler la barrière de terre pour qu'elle se reconstruise derrière elle. Elle vira à gauche au coin d'un bâtiment. C'est là qu'elle aperçut une ombre en haut du mur qui entourait la caserne.
Lila reconnu immédiatement Geron. Le jeune homme lança un sceau d'eau tandis que l'ombre de Godfred apparaissait derrière lui.
Lorsque Lila arriva à leur niveau, Geron et Godfred soulevèrent l'eau tombée au sol afin de créer une cascade opaque. La jeune fille profita que la vue de ses poursuivants soit obstruée pour se projeter sur le mur qui entourait la caserne. Les trois amis disparurent ensuite, laissant les légionnaires face au vide.
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