Chapitre 40 : Gwendolyne
L'ambiance est étrange dans l'open space depuis la soirée d'hier et je suis doublement soulagée d'être en week-end dans quelques heures. Je n'aurai plus à gérer toutes les âneries de mes projets qui semblent s'être donné le mot pour devenir de plus en plus stupides et je ne verrai pas mon binôme. Nos discussions m'ont troublée et je masque tout ce que je ressens. Ce n'est pas logique de trouver des points communs, de parler, d'échanger sur nos vies avec quelqu'un qui ne sera que de passage. Lorsque je crée quelque chose avec une personne, ce n'est pas pour quelques jours. Et là, je me suis laissé emballer par ses confidences sincères. Certes, je ne pense pas qu'il pourrait me trahir et répéter tout ce que je lui ai dit, mais j'ai la sensation étrange d'avoir été menée en bateau. Pire encore. Je suis moi-même fautive de ce naufrage. Parce que la coque était déjà percée avant de quitter le port et que je n'aurais pas dû monter à bord et partir en mer. Ma logique, fidèle conseillère, m'a abandonnée en des instants cruciaux. Je ne peux pas en vouloir à Raphaël, mais je rage contre moi. Pourquoi a-t-il fallu que j'accepte cette sortie en bar ?
Mon collègue ayant eu une réunion jusqu'à 13h et moi une à 13h30, nous n'avons pas mangé ensemble et j'en suis heureuse autant que dépitée. Il va bientôt être 17h et je prépare mes affaires pour m'éclipser rapidement, sans forcément qu'il ne s'en rende compte. Je ne souhaite pas gâcher son week-end chez sa sœur et j'espère qu'il comprend que je n'ai rien contre lui.
L'ascenseur se ferme doucement, comme toujours à cette heure bien plein et j'ai déjà mon casque vissé sur mes oreilles avec ma musique pour me couper des discussions de travail. A croire que ce n'est qu'arrivés chez eux que certains de mes collègues sortent enfin du boulot... Je ne prête à attention à la dernière personne à monter dans cette boîte de conserve jusqu'à apercevoir des mocassins noirs que je connais bien. Ne pas relever la tête, l'ignorer. Ignore-le, ignore-le, ignore-le...
- Lundi soir, ça te va ?
Malgré la musique et mes yeux fixés sur mon téléphone, je reconnais la voix de Raphaël tandis que je descends de l'ascenseur. Et je sais que je ne vais pas pouvoir l'ignorer.
- Quoi, lundi ?
- Pour aller visiter la boutique de Vic. Je suis disponible lundi soir, si tu veux.
- Ecoute, Raph...
- On en parle en allant au métro ?
Un véritable pot de glue butté. Voilà ce qu'il est. Incroyable ! Il n'arrive pas à lâcher prise et à renoncer. Et je n'ai pas envie de faire une scène alors que nous sommes toujours chez notre client. Alors, je hoche la tête et nous partons tous les deux vers notre moyen de transport.
- Tu sembles fermée depuis la fin de la soirée d'hier...
- Je ne suis pas spécialement fermée. Je t'ai expliqué, je ne tiens pas à m'attacher à quelqu'un pour souffrir, c'est tout. Ce n'est pas à toi que j'en veux, mais à moi.
- Tu aimerais que je te promette de ne pas te lâcher, c'est ça ?
J'accélère le pas, espérant presque qu'il ne me suivra pas ou ne parviendra pas à parler en même temps. Qui suis-je pour lui demander une promesse, alors que je le connais à peine ? Je n'ai aucun droit de prendre une place pour lui ni d'exiger quoi que ce soit.
- Minute, papillon !
Sa voix et la main qu'il a posé sur mon épaule pour me rattraper me sortent de mes pensées et je me stoppe quelques instants pour le fixer.
- Qu'est-ce que tu penses réellement, Gwen ? Dis-le-moi, que je comprenne...
A cet instant précis, j'ai juste envie de lui coller une bonne claque et de m'en mettre une par la même occasion. J'hésite entre me demander s'il est bête ou si je n'ai pas été assez claire avec lui...
- Je te l'ai déjà dit. Je ne veux pas commencer une relation amicale pour trois jours. L'amitié est bien trop précieuse pour moi. Et je n'ai rien à te demander. On se connaît à peine...
- Et au bout de combien de temps a-t-on le droit de demander quelque chose à quelqu'un ?
Excellente question ! Dont je n'ai malheureusement pas la réponse. Peut-être parce qu'il me faut très longtemps avant de faire un minimum confiance à quelqu'un et que la dernière personne en date m'a trahie il y a peu...
- Tu as compris, au moins, que je ne te voulais aucun mal ? Rassure-moi...
- Oui, je le sais. Mais l'Enfer est pavé de bonnes intentions... Si à la base tu voulais me faire passer une bonne soirée, tu pourrais me faire souffrir sans le vouloir. C'est ainsi...
Il reprend sa marche et je le suis, silencieusement. Cependant, il passe devant l'arrêt de métro sans s'arrêter et se dirige vers un petit parc non loin, avant de s'asseoir sur un banc. Je ne comprends pas vraiment pourquoi je ne l'ai pas laissé seul. Il m'aurait été facile de descendre dans le métro et de le laisser seul. Mais je ressens qu'il a besoin de parler.
- Tu es arrivée au moment de ma vie où je me sens le plus perdu. Avec Kristen, il y a eu des hauts et des bas en huit ans. Des crises de jalousie de moindre intensité. A la fac, elle connaissait tous ceux avec qui j'étais, nous mangions tous les midis ensemble, allions à la BU ensemble... Nous n'étions séparés que pendant les cours. Pour mon boulot précédent, la DSI était composée que de mecs, pour faire dans le cliché, à part notre cheffe qui avait la cinquantaine. Depuis que je suis avec Kristen, je n'ai de contacts féminins qu'elle, ma sœur, ma mère et sa famille. Alors, forcément, quand elle t'a vue, elle a craqué... Et le SMS que Vic lui a fait pour lui dire qu'il ne supportait plus son comportement n'a pas aidé à la raisonner... Elle est malade...
J'écoute son monologue avec intérêt, consciente qu'il a besoin de me dire tout cela. J'ai été en couple une fois avec une personne jalouse, et je connais les dégâts que cela peut faire. Mais, contrairement à lui, je m'en suis détachée plus vite et je n'ai pas cédé à tous les caprices...
- Vic me demandait mon avis hier soir, le voici. Ce n'est pas parce qu'elle est malade qu'elle a le droit de te faire vivre l'Enfer et de tout exiger de toi, Pingouin ninja. Tu es une personne, tu as le droit d'être heureux, de vivre pour toi et pour tes proches. Tu as le mariage de ta sœur, tu as Vic et tu as toi, surtout. Ce n'est pas être égoïste de dire stop à un moment donné. Si elle ne veut pas se soigner, tu ne peux rien pour elle...
Mes mots semblent le toucher car il me prend dans ses bras tandis que nous sommes toujours assis. Je lui rends son étreinte en soupirant. Comment un mec qui est loin d'être moche, stupide ou méchant a-t-il pu en arriver là dans sa vie ? Ce n'est pas qu'une histoire de nana jalouse. Je sais que le décès de son ami semble l'avoir bouleversé mais... en quoi en était-il responsable pour s'en vouloir au point de détruire sa propre vie ?
Hello !!!
Je profite avant mes vacances pour vous donner de nouveaux chapitres et vous remercier ! Bientôt 500 votes, ça fait plaisir :)
Alors, qu'avez-vous pensé des idées de Gwen ? De l'insistance de Raph ? Des doutes des deux ? Suite demain, si j'ai un peu de temps ce soir pour écrire un chapitre... avec peut-être un point de vue différent ! Les paris sont ouverts pour deviner lequel ;)
Sanguinement-vôtre,
Gothycka
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