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Cela faisait quelques minutes que la clairière était plongée dans le noir presque total. Mercure avait eu une idée, la première de la soirée ; il avait décidé d'éteindre toutes les lumières, disant que ça donnerait une ambiance plus angoissante. Il avait jeté l'eau de la mer sur le feu de camp et tout le monde avait mis en veille son téléphone, respectant ce qu'avait décidé le garçon aux drôles d'idées. Seules les étoiles et la Lune n'avaient pas joué le jeu, continuant à les éclairer de leur pâle lumière.
Pluton s'était allongé pour contempler, derrière la cîme des arbres, le ciel étoilé qui semblait vouloir le tomber sur la tête. Ce qui n'a pas fait ; il était bien trop lourd pour les frêles épaules du garçon pensif.
Autour de lui, tout le monde discutait et riait entre eux et même Terre souriait légèrement. Vraiment, le plan de Mercure avait foiré, l'atmosphère était tout sauf angoissante.
— Les gars, c'est quoi votre plus grand rêve ? demanda Pluton, coupant les discussions joyeuses des autres, trop curieux d'en connaître davantage sur ses nouveaux amis.
Saturne se leva d'un bond comme électrocutée par un éclair de génie ; elle appuya sur la tête rousse de Mars, en imitant le bruit d'un buzzer. Le garçon poussa un grognement, plus amusé qu'énervé.
— Moi je rêve d'avoir des rêves ! s'exclama-t-elle, pleine d'entrain.
— C'est beau ce que tu dis, Saturne, murmura Uranus de sa voix rocailleuse.
Ses mains tatouées tenaient celles de Neptune tendrement.
Mars haussa un sourcil.
— C'est surtout pas elle qui l'a inventé, s'esclaffa-t-il en tapant les cuisses de la blonde qui s'occupait encore une fois de l'enceinte.
Rêves d'avoir des rêves de Nekfeu résonnait maintenant dans la clairière, sans doute assez fortement pour réveiller tous les animaux en hibernation.
— Ça reste quand même mon rêve le plus cher, se plaignit Saturne en se rasseyant auprès de Mars.
Elle lui donna un coup de coude et redirigea ses prunelles couleur moka sur Pluton.
— Et toi, c'est quoi ton rêve ?
Le garçon fit mine de réfléchir même s'il connaissait déjà la réponse.
— Marcher sur la Lune, je dirais.
— Ah bon ? s'interrogea Vénus qui ne lui avait pas adressé la parole depuis un moment.
Pluton était toujours autant troublé par ses yeux trous-noirs.
— Tu peux demander à Uranus le chemin pour y aller comme il est tout le temps dans la Lune, l'empêcha de répondre Jupiter, un grand sourire aux lèvres - un peu moins grand quand le concerné le fusilla du regard.
La question de Pluton avait bien inspiré tout le monde ; tous les adolescents se confiaient leur plus grand rêve, des étoiles pleins les yeux. Seule Terre ne répondait pas et personne ne semblait l'avoir remarqué, sauf Pluton.
Il interrogea la jeune fille du regard qui se contenta de lui répondre par un sourire rassurant, un sourire qui se fâna aussi vite qu'il n'était apparu.
Les yeux gris acier de Pluton furent attirés par les mains de Terre qu'elle rangea alors dans les poches de son pantalon. Le regard du garçon passa de ses mains à ses bras, et là, il comprit.
Terre avait la peau bleue. Bleue comme ses yeux inexpressifs, bleue comme les rêves de la bande d'amis, bleue comme son âme, mais surtout bleue comme les coups qu'on lui avait sans doute tant de fois portés. Des coups aussi lourds que le ciel et une peau glacée de tâches rondes comme des cratères. Terre était bleue.
Les yeux de Pluton se détournèrent de ses bras sombres, pour se poser sur le visage de la jeune fille qui ne semblait pas avoir remarqué les regards insistants du garçon.
Un frisson parcourut Terre et celle-ci enfila son sweat à capuche qu'elle avait abandonné sur ses genoux, recouvrant ainsi ses bras comme pour masquer sa propre tristesse. Pluton, lui, arrêta de la regarder et, lâchement, fit mine de n'avoir rien vu.
Et puis, il y eut une violente bourrasque qui transporta les rêves des adolescents, les dures réflexions de Pluton et les maux silencieux de Terre.
On entendait juste une voix qui résonnait au loin :
— Les gars, je sais quoi faire pour réaliser le rêve de Pluton !
C'était Mercure qui avait une nouvelle idée derrière la tête.
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