P✧S
La nuit venait de tomber, avalant dans sa gorge le soleil et toute la lumière de l'empyrée. C'était l'heure, l'heure pour tout le monde de retourner dans leur belle maison et de finir pour la énième fois une journée de routine.
Tout le monde sauf pour un jeune homme, habillé d'un ciré jaune trouvé dans une boutique de vêtements bretonne. Il restait droit, les poings serrés et ses yeux argentés fixés devant l'océan agité, mais ce n'était pas pour autant un signe de détermination, loin de là. L'eau salée léchait le bout de ses baskets, il ne le remarquait même pas, sans doute trop absorbé par le flot des vagues qui lui faisait penser à un tableau de Van Gogh, son peintre préféré.
La Lune le regardait dans le blanc des yeux, dévoilant de sa lueur blafarde les yeux dans le vide du jeune homme. Le garçon repensait encore à son après-midi, se repassant en boucle chaque détail de sa journée.
Qu'est-ce qui s'était passé ? Qu'avait-il fait de mal ? De toute façon, ça faisait longtemps qu'il avait l'habitude. C'était les filles, les filles, toujours les filles, pourquoi ça finissait toujours de la même manière ? Toujours cette même partie de cache-cache, celle où c'est lui qui doit compter jusqu'à dix, celle où c'est lui qui doit la chercher partout, mais où ça ne le mène nulle part, celle où ça tourne mal.
Il avait fouillé partout pourtant, pour retrouver la jolie fille aux cheveux ébène ; dans le placard à balai, sous le tapis en forme de nuage, derrière la porte, sous le lit - avec un peu d'appréhension, on ne sait jamais ce qu'on peut trouver là-dessous - mais rien n'y faisait. Le garçon avait vite compris : c'était encore une amoureuse qui s'était tiré, qu'il avait perdu. C'était quoi son problème pour toutes finir par les perdre ?
Au loin, des voix et de la musique forte se firent entendre, sortant le jeune homme de ses drôles de pensées et de sa contemplation.
« Encore des foutus désœuvrés qui sont obligés de s'asseoir à chaque nouveau banc parce qu'ils ne tiennent plus sur leurs deux jambes » pensa-t-il.
Mais non, les voix entendues appartenaient à un groupe d'adolescents qui s'avançaient vers lui, bien en forme et avec toutes leurs forces, sans doute parce que ce n'était que le début de la soirée.
Tandis que l'air marin lui chatouillait les narines, le garçon essaya de saisir les bribes de conversations qui s'approchaient petit à petit de lui, quand soudain une voix forte et masculine se fit entendre :
— Vous avez vu, les gars ? Regardez ce vieux péquenaud avec son ciré jaune !
Certains rièrent, d'autres crièrent « chut ! », faisant taire tant bien que mal les gloussements de leurs amis.
Le garçon au ciré jaune sourit avec eux ; il savait que ce n'était pas pour se moquer méchamment.
Certaines personnes lui firent des signes de la main, auxquels il répondit comme s'ils se connaissaient depuis toujours.
Une d'entre eux s'approcha à quelques mètres de lui et le jeune garçon fut surpris par ses magnifiques yeux aussi profonds que des trous noirs. Il commençait déjà à s'empourprer, un peu intimidé par la jeune fille.
— C'est quoi ton nom ? demanda-t-elle le plus naturellement du monde.
— Pluton.
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