La prisonnière doit commencer à délirer...
Elle braille des chansons peu catholiques pour "passer le temps", dit-elle.
- Mais vas-tu te taire à un moment ??
- Bah non, ça risquerait de te faire plaisir.
Mais quelle sale petite coureuse de remparts...
- Je vais devoir te poser quelques questions.
- Pas envie.
- Tu y seras bien obligée, que tu le veuilles ou non.
Elle s'esclaffe.
- Mais c'est que notre petit lèche-gamelle se rebelle ! Prochaine étape : Envoyer les bourges qui te servent de supérieurs se faire foutre !
- Jamais je ne ferai ça ! Ils m'ont accueilli et c'est grâce à eux que je puis vivre convenablement. Et cesse avec ces insanités, c'en est répugnant.

Je tire mon tabouret devant la grille qui lui sert de porte et m'assois dessus.
- Bien, commençons... Nom, prénom, âge de la détenue.
Elle reste muette.
- Allez ! Plus vite ce sera finit plus vite tu pourras retourner à tes préoccupations.
- TU VAS QUITTER TA BONNE MÈRE, POUR T'EN ALLER DANS UN BOXON. JE NE TE RETIENS PAS MA CHÈRE, SI C'EST LÀ TA VOCATION. SUIS BIEN LES CONSEILS DE TA MÈRE, AVANT TOI JE FIS CE MÉTIER. TU N'AS JAMAIS CONNU TON PÈRE, C'ÉTAIT PEUT ÊTRE TOUT LE QUARTIER. ADIEU, FAIS-TOI PUTAIN. VA T'EN GAGNER TON PAIN. ADIEU ! MA FILLE, ADIEU ! A LA GRÂCE DE DIEU ! ÉVITE SURTOUT LA VÉROLE, CHANCRES, POULAINS, ET CÆTER...
- BOUCLE-LA! NE MÊLE EN RIEN NOTRE SAINT PÈRE EN TES HORRIBLES CHANSONS !
- Pff... Même plus le droit de rire ici...
Je soupire et renverse la tête en arrière, tentant de retrouver mon calme.

- Bien... Reprenons... Où en étions nous ?
- J'essayais de te prévenir des dangers de la prostitution mais bon...
Elle éclate de rire.
- Tes parents ne t'ont jamais dit à quel point tu étais épuisante ?
- A ton avis, comment je me suis retrouvée là ?
- Intéressant...
- Et toi ?
- Nous ne sommes pas là pour parler de moi. Quel est ton véritable nom ? Et quel âge as-tu ?
Elle semble hésiter, lèvres pincées.
-... Matilda...
- C'est bien différent de Liam.
- Liam est le nom que j'aurais eu si j'étais un homme. C'est le nom que mon père me donnait, c'est plus simple d'avoir un mec pour gagner de l'argent. Ça m'a soûlée donc j'ai quitté ces raclures.
- Pour te lancer dans la piraterie ?
- On dirait pas comme ça, mais c'est vachement plus marrant !
- Je vais faire comme si je te croyais...
Elle ricane avant d'être prise d'un frisson.
- ON SE GÈLE LE CUL DANS CETTE TAULE !! Hurle-t-elle tout à coup.
- Tu aurais dû penser aux conséquences avant de partir sur un coup de tête.
Elle tire puérilement la langue.

- Pourquoi t'appelle-t-on "La Flamme"? Reprends-je après un moment.
- Ça se voit pas peut être. C'est pas comme si j'étais rousse ou agitée. Répond-elle froidement.
- Comment t'es tu faire attrapée ?
- Un traître devenu votre clébard obéissant m'a tendu un piège. J'ai toujours su qu'il était prêt à me vendre pour se bourrer la gueule...
- De qui parles-tu ?
- T'es au courant de rien. T'es sûr que tu as ta place là ?
Serrant les dents pour ne pas rentrer dans le jeu de cette vipère, je reste impassible.
- Ralf le Sans-Pitié. C'est lui qui m'a vendue à vous et votre roi de pacotille.
- Je t'interdis de parler mal de notre Roy.
- Ouais ouais, c'est ça !
Elle ricane à nouveau.

Levant les yeux au ciel, je quitte la pirate pour rejoindre mon petit bureau.
La Flamme reprend ses chansons, un peu moins fort cependant. Avec un peu de chance, elle arrêtera de parler ou de se moquer avec le temps...

Une fois le rapport rédigé, je remonte sans un mot et ferme la porte.
- MALPOLI, VA ! VA CREVER DANS LA RUE, CHIEN ! PERSONNE NE ME MÉPRISE COMME ÇA, PETITE PUTE ! Hurle-t-elle
- Qu'elle est fatiguante... Fais-je en soupirant.
Quel est cet étrange sentiment qui m'empare cependant, lorsque je m'éloigne d'elle ? Très étrange... Peut être ai-je contracté une malade qu'elle m'a transmis...