Chapitre 6 - Zach
— Votre soirée sera démentielle.
Le sourire de Kelly et de ses sbires est communicatif. Je lui tape un high five en guise de gratitude, même si je sais que cette petite cochonne en attend davantage. Allez, hop, un clin d'œil charmeur pour lui faire plaisir. Après tout, elle et quelques membres de son cercle nous ont prêté main-forte pour mettre en place la déco de la soirée de malade qui arrive. Il va y avoir du sang, des jolis petits culs à profusion, et surtout, de la chair fraîche pour cette nouvelle année ; Liam craint qu'on manque de bizuts après le scandale du semestre dernier. Perso, je ne me bile pas. On tâchera de conserver notre prestige cette année. On prouvera au doyen que ce n'était qu'un accident comme il en arrive parfois sur les campus. Notre classement n'a chuté que de deux rangs, on remontera facile en tête de liste. Chez les Bêta Thêta Phi, l'argent coule à flots. La place est onéreuse, nous n'attirons que les rejetons de familles friquées. Ce qui nous permet de jouir d'une baraque qui a du cachet, comparée aux garçonnières géantes de certaines fraternités où des nanas ne poseront jamais un orteil. Elles se sentent bien chez nous, c'est chic, comme la plupart de nos patronymes, et c'est déjanté, comme le cerveau des anciens de notre cercle. Poings sur les hanches, j'examine les tentures de velours étalées çà et là sur le mobilier en bois massif, leur couleur bordeaux conférant un aspect plus feutré que d'habitude. Des petites tombes sont disposées sur les buffets, ainsi que des crânes fracassés destinés à foutre la chair de poule. Quelques chauves-souris et fausses toiles d'araignées assombrissent encore l'atmosphère.
— Ça claque ! s'extasie West. Le spectacle les fera tous baver. Les candidatures vont pleuvoir, bro.
— J'espère, affirmé-je d'un signe de tête. On compte sur toi, Kelly.
Je lui adresse une œillade complice, tandis qu'elle mime un baiser sexy de sa bouche à pipes, avant de rappeler ses acolytes. Une fois qu'elles désertent les lieux pour aller se préparer, West m'envoie un coup de coude dans les côtes.
— Alors, tu te l'es faite ?
Je joue des sourcils.
— Pourquoi gâcher cette belle alchimie aussi tôt ? Regarde comme elle me fait du charme, c'est bien plus excitant que les relations postbaise. Les meufs deviennent tellement chiantes.
— Hmmm, j'en sais rien. Peut-être parce qu'elle et Derek n'en ont pas terminé ? hasarde-t-il d'un air faussement innocent.
Rien qu'à entendre son nom, je sens mes poils se hérisser.
Kelly m'a avoué que ce lâcheur comptait se pointer ici, ce soir. Cette grande gueule était pressentie pour devenir préz' des BTP cette année. Tout lui réussissait, la fraternité et ses performances au foot avec West ont fait monter sa cote de popularité en flèche. Il en jouissait, d'autant qu'il est le pire des charos que cette terre ait jamais portés. Un vrai vicelard. Dès que Fietz s'est défenestré, Derek s'est barré du cercle. Il s'est désolidarisé de ce qui avait pu se produire ici en nous laissant dans notre merde. Il a menti aux flics sans vergogne, alors que je ne connais pas les détails de cette affaire, mais j'ai l'impression qu'il n'était pas tout à fait clean dans cette histoire. Les rushs de West sont parfois trash, mais les bizuts sont libres de ficher le camp si ça leur chante. On n'a jamais harcelé personne qui désirait raccrocher. J'ignore ce qu'il a à nous dire, mais si c'est pour ramper et nous servir des excuses, il peut se les fourrer où je pense.
Lorsqu'un de nos plus jeunes membres nous rejoint dans le hall, des capes plein les bras, West commence à trépigner.
— On n'acceptera que les suiveurs et les plus téméraires, nous prévient-il. Personne susceptible de nous causer de problèmes, cette année-ci.
Je kiffe ce mec, toujours partant pour nous entraîner dans ses dingueries. C'est certes parfait pour me faire oublier où je me trouve et surtout, pourquoi je prends part à tout ça, mais il doit se calmer un peu.
— Ouais, enfin, on y va mollo tant qu'on n'a pas retrouvé notre classement. Garde en tête que le cercle a besoin de membres.
Et moi, j'ai besoin de boire un coup.
Déco, check.
Bouffe, check.
Costumes, check.
DJ, check.
Spectacle, check.
Alcool, check.
Reste plus qu'à attendre que les filles des ZAZ reviennent sans se faire gauler pour le show.
— Bienvenue dans l'antre des Bêta Thêta Phi ! gronde une voix d'outre-tombe dans les baffles. Soyez prêts ce soir à vous abandonner entre nos mains toutes-puissantes. C'est ici que se décidera votre avenir au sein de notre cercle. Les autres, profitez de notre hospitalité, la meilleure de HHU, vous ne le regretterez pas ! Que débutent les festivités !
La lumière s'éteint d'un coup, ne laissant l'éclairage que des fausses bougies disséminées un peu partout ainsi que des néons violets en mouvement. Un beat dément déchire l'air pour ponctuer le discours, extirpant aux premiers invités regroupés dans le hall des cris de joie à m'en percer les tympans. Ils s'intensifient lorsque des jets mousseux et rougeoyants les éclaboussent, et annoncent la couleur ensanglantée de cette soirée.
Après avoir descendu pas moins de cinq shots de tequila, je me fais sucer dans les toilettes par une fille dont le nom m'est inconnu. Puis je prends place sur la balustrade du premier, histoire d'avoir une vue d'ensemble sur la fiesta. Les mains accrochées à la rambarde, couvert de ma cape sur mon smoking corbeau arborant nos lettres grecques, je considère la foule avec joie. Elle grossit à mesure que les étudiants continuent d'affluer. C'est bon, ça, très bon.
Dès que j'aperçois Liam déambuler dans la masse avec sa propre cape, d'un rouge inratable, une tache vient assombrir ma satisfaction.
« Est-ce qu'elle viendra ? »
Je n'arrive pas à croire que Leyah Smith se retrouve à High Hills University, si loin de sa famille. Même si elle avait rejoint les quelques mormons du coin, je vois mal les Smith la lâcher dans la nature sans chaperon. Ils ont toujours surprotégé leurs gosses, alors laisser leur progéniture chérie vivre la vie de campus est une folie. Surtout si elle s'aventure dans ce genre de fête, sapée comme une bigote, avec un air d'agneau égaré. J'ignore ce qui lui passe par la tête. Bordel, ce qu'elle m'agaçait à jouer la fifille parfaite, à suivre les règles à la lettre. Ça se voyait tellement qu'elle adorait les compliments ; que les autorités adultes la considèrent toujours comme un modèle pour les autres jeunes devait la faire jubiler.
Mes lèvres me démangent.
Je mentirais si j'affirmais que la petite Smith n'est pas pleine de surprises.
Allez, je vire ces pensées de mon esprit en m'ébrouant. J'ai besoin de me mettre la tête à l'envers !
J'investis le rez-de-chaussée, serre des poignées, roule des pelles, pelote des culs, vide des verres, rendant mon univers cotonneux, et les meufs plus hot que d'ordinaire. Le nombre de vampirettes sexy nous fait tourner la tête à tous. Je remercie Kelly pour cette ultra bonne idée. Sans déconner, si moi, j'ai l'habitude d'organiser des méga soirées, cette meuf est un atout précieux pour les BTP, car il est interdit aux membres des sororités de nous aider. Mais elle se débrouille toujours pour contourner les règles. Un peu comme nous.
D'ailleurs, je cherche West du regard pour le traîner sur la petite scène qu'on a préparée. Le trouve en compagnie d'une nana à se damner. Une crinière blonde cascadant jusqu'au bas du dos, elle est vêtue d'un top en dentelle de style gothique, dévoilant une paire de beaux nibards cloisonnés dans un soutif noir tout simple. Le ventre à l'air, elle porte un slim en cuir qui lui moule un cul à faire bander un zombie. Peut-être aurait-elle pu sauver Rick et tout Alexandria. Son rouge à lèvres aussi sombre que le nuage cerclant ses yeux est carrément dans le thème. Évidemment, mon ami n'en perd pas une pour ferrer les plus jolies proies du paysage. Petit veinard.
Tant pis, il la chopera après.
Je le surprends par l'épaule, quand il se retourne, tout sourire.
— Frère Reed, Kelly nous attend, annoncé-je assez solennelle pour lui signifier de quoi il s'agit.
Il saisit le poignet de sa future conquête, le lève en lançant :
— Elle est OK pour être le second sacrifice.
Sans m'y attarder, j'opine et les entraîne à ma suite. Du moment que nous offrons du spectacle, n'importe quelle poupée fera l'affaire.
Notre habituelle complice féminine est déjà montée sur la petite estrade devant un public en feu. West et moi la rejoignons, tandis que la jolie blonde attend sagement son tour sur le bas-côté.
Le son lugubre d'un orgue capte l'attention de l'assemblée. De sa cape grise, mon pote entoure les épaules de Kelly et se munit d'un couteau de boucher. Tandis qu'il déplie le bras de la belle brune au vu de tous, je m'empare du micro.
— Mes chers hôtes, ce soir seront offertes deux brebis innocentes en sacrifice ! Enfin, innocentes... (Je jette un regard à Kelly, faisant mine de pouffer.) Disons que le fluide dont elles vous feront grâce est le seul qu'elles n'aient jamais échangé avec quiconque.
— Salaud ! réplique Kelly, faussement vexée.
— Je sais, mais tu m'aimes quand même, bébé, lui retourné-je avec un clin d'œil. L'instigateur de ce rituel, j'ai nommé West Reed, a décidé de vous faire plaisir.
En réalité, l'idée venait de moi, car celle de mon ami était bien trop trash pour inciter qui que ce soit à déposer sa candidature.
— Et comment, les gars ! fanfaronne-t-il, avant d'enfoncer le couteau au creux du coude de l'étudiante, pour ouvrir son bras jusqu'au poignet.
Des gerbes de sang jaillissent de la ligne écarlate. À la sidération du public, j'étire mes lèvres démoniaques.
Haha, les cons, ils retiennent leur souffle quand la langue de West vient cueillir le liquide visqueux.
— Le maître des lieux se régale, commente-t-il après avoir gémi.
— « Partage » ! lance un autre BTP.
Je reprends le micro et m'adresse à mes ouailles :
— Parce qu'au sein de cette fraternité, la générosité est primordiale, cette jeune sirène vous fera don à vous, mes Nosfératus, de son élixir de jouvence ! Mais, attention, ajouté-je avec grandiloquence, le premier qui se montrera inconvenant prendra la porte et sera interdit d'entrée dans notre confrérie jusqu'à la fin des temps.
Autrement dit, la fin de l'année. On ne malmène surtout pas une Zêta Alpha Zêta.
Je lance un regard sur un groupe de nanas captivées.
— Vous aussi, mes créatures de la nuit, régalez-vous. C'est du sang comme on n'en fait plus !
Avec une cruauté feinte, West pousse sa victime consentante à travers l'estrade, laquelle prétend tituber et se laisse rattraper par Liam, qui fait tourner la demoiselle parmi les mecs en rut.
Bien sûr, il ne s'agit pas d'un vrai couteau. Et bien sûr, il ne s'agit pas de sang, mais d'un alcool sucré à la grenadine qu'un tuyau caché dans la fausse arme blanche propulse quand on en presse le manche.
Tant que la mise en scène plaît...
Le quarterback tend ensuite la main vers sa blonde ténébreuse ultra sexy.
Cette nouvelle recrue fera un carton. Je me demande bien d'où elle vient.
Elle glousse, serre les lèvres et roule des épaules. Sa nervosité m'inquiète. West l'a-t-il briefée ? Sérieux, sera-t-elle vraiment capable de déambuler dans la masse pour laisser des nerds friqués lécher son bras ? Je hausse un sourcil quand elle rejoint le grand Black d'un pas hésitant, sans se désister pour autant.
Je poursuis dans le micro avec un ton dramatique, la main sur le cœur.
— Une deuxième pauvre pucelle se présente pour le rituel. Le bras d'une seule vierge n'est sans doute pas suffisant pour contenter une armée de queut... euh, de vampires !
Quelques ricanements retentissent. Tout le monde sait que Kelly est loin d'être vierge. D'ailleurs, je ne vois toujours pas son « ex mais c'est compliqué » dans la foule. Si tant est qu'il soit possible de discerner sa face de rat dans la pénombre.
En revanche, un visage que je remets tout de suite est en train de me fusiller à un mètre de l'estrade. La copine de Kenzo, avec sa tête flippante dénuée d'émotions. Bras croisés, elle plisse les paupières dans ma direction, puis dans celle de la nana qu'on compte immoler. C'est quoi son problème ? À côté d'elle, le guitariste semble inquiet et Liam joue des sourcils. Leur bassiste aussi est présent... D'instinct, je fouille les lieux à sa recherche. Mais ne trouve que celui de Liam qui agite un billet de cinquante à mon intention, l'air triomphant.
Sous-titres : t'as parié cinquante dollars qu'elle ne viendrait pas. Et, mon vieux, t'as perdu.
C'est quand j'entends la Japonaise me balancer de sa voix de fumeuse : « Bon sang, mais contrôle-la ! » que je crois comprendre !!
Non ? Ne me dites pas que...
Les yeux ronds, je pivote lentement vers West, dont un bras ceint sa poupée, tandis que l'autre tient son poignet.
En deux éclairs de seconde, je détaille le faciès de la bombe sulfureuse. Et putain de mes couilles remplies à ras bord ! Dans l'obscurité, je n'avais pas noté le bleu particulier de ses iris. Ni son petit nez si parfait qu'il en est agaçant. Ni sa bouche, pas pulpeuse, mais dont le dessin sensuel me rappelle sa saveur. Et ses pommettes hautes qui rougissent à la moindre émotion... Merde, son maquillage la change radicalement !
Mon palpitant proteste. Malgré les apparences, je me remémore tout ce qu'elle est, et le visage d'Aaron se greffe dans mon esprit. Putain ! Hors de question que West livre la mormone aux canines de ces types. À l'instant où la pointe de la fausse lame s'enfonce dans la chair de Leyah, je bondis vers eux et lui arrache le couteau des mains.
Nos yeux se percutent. Il m'interroge en silence, quand, désemparé par ma propre détresse, je lui fais signe de se décaler. Tant pis, on mettra ça sur le coup de l'alcool. Sitôt qu'il saisit, il obéit sans faire d'histoire. Leyah, elle, m'observe avec un intérêt déstabilisant. Depuis tout à l'heure, éméché que j'étais, je pensais que mon charme opérait, comme avec la plupart des meufs sur mon chemin. Je n'avais rien capté, en fait.
— T'es pas croyable, grommelé-je dans ma barbe, lui adressant pléthore de reproches.
Sans attendre sa réaction, je m'oriente vers le public, ma cape virevoltant avec grâce lorsque j'attrape le bras de Leyah.
Show must go on.
— J'ai décidé que celle-ci serait pour moi ! annoncé-je, feignant la détresse.
Détresse de céder à mes pauvres instincts de mâle.
Quelques murmures de protestation s'élèvent autour de nous. Fait chier, West aurait pu choisir n'importe qui d'autre !
Comme mon ami précédemment, je mime une profonde entaille, laissant le « sang » éclabousser mon costard.
— Je suis tout excitée ! trépigne Leyah, papillonnant de ses incroyables cils.
— Tu as bu ? grogné-je.
— Un cocktail rouge. Ce truc aux fruits. Il paraît que l'alcool donne du courage, alors...
Dans l'intimité de notre échange, je secoue la tête avant de m'adresser aux gens derrière moi.
— Voyons voir quel goût possède l'innocence !
Avalant ma salive avec peine, je ne peux m'empêcher de zyeuter en direction des membres des Thunders qui me scrutent avec chacun une expression différente. Il y en a une qui rêve visiblement de m'empaler.
Je prends une ample goulée d'air et lèche le poignet de Leyah.
Cette peau si tendre, si douce, si chaude oblitère le monde extérieur. Son odeur se mélange à celle de la grenadine. Agacé en mon for intérieur, je continue de lécher le reste de son bras, avec lenteur, pour me laisser le temps de voir plus clair dans ma cervelle embrumée. Juste pour ça, bien sûr. Pas en raison de la chair de poule qui recouvre son épiderme ou du volume de ses seins qu'on discerne facilement à travers son top. Avec ses fringues de nonne, je ne les avais jamais remarqués. Qui aurait cru ?
Une fois son bras nettoyé, ma langue imprégnée de grenadine, j'arrime mon regard à ses pupilles dilatées.
— Ils vont tous me lécher comme ça ? chuchote-t-elle, les joues toutes roses.
Eh, merde !
Je m'adresse aussitôt aux autres.
— Navré, braves gens, celle-ci, je me la garde ! Le meilleur est réservé aux membres de la maison !
J'ignore la houle de déception et, sans ménagement, j'entraîne Leyah hors de la scène.
— Aïe ! se plaint-elle.
— Aïe ? la reprends-je, outré.
Quelque peu isolé, pas loin de la cuisine, je me plante devant son air penaud.
— T'as perdu la tête, Leyah ? Tu te rends compte de ce que tu t'apprêtais à faire ?
Elle bombe le torse (argh, pourquoi elle m'inflige ça ?) et fronce les sourcils sur ce visage que je ne connais pas.
— Ça ne posait aucun problème à la fille avant moi ! Ils allaient juste lécher un peu de ce truc sur mon bras et voilà ! ... Non ?
La candeur de son timbre m'exaspère. Heureusement, la musique a repris ses droits. Je peux alors crier :
— Non ! J'en sais rien ! Ne te compare pas à Kelly qui peut se défendre. Tu te ferais bouffer en deux minutes ! T'as rien à faire ici ! C'est pas ton monde ! T'as beau... (je désigne sa tenue foutrement bandante) te saper comme une...
Je n'ai pas les mots.
— ... De façon provocante, me rattrapé-je, tu restes bien trop naïve.
— C'est ce que tu crois ! me défie-t-elle, en colère. Qu'est-ce que tu connais de ma vie avant que je débarque à Los Angeles ?
Oh, plus qu'elle le pense !
— Tu vas me faire croire que tu te saoulais en cachette de tes parents ? Que tu menais une double vie ? Tu te rendais à l'église le dimanche, priais le lundi soir avec les Smith, et allais t'éclater dans les bas-fonds débauchés de Salt Lake City avec les quelques âmes égarées de la ville ?
— Si seulement..., soupire-t-elle, crispée de la tête aux pieds.
Je lève un sourcil. Songe à son incursion éclair dans ma chambre, le jour de mon départ.
Elle me déroute...
Leyah me contourne et s'engouffre dans la cuisine où sont terrés quelques membres du cercle. Elle s'empare d'une bouteille de vodka pure et attire l'attention de l'un d'eux.
— S'il vous plaît, je peuuuuux ?
Amusé, il hausse les épaules.
— Sers-toi, bébé.
— Arrête ça, Smith ! beuglé-je en me précipitant vers elle.
Elle m'esquive avec une moue boudeuse, puis porte le goulot à ses lèvres.
Cinq gorgées devant mon expression médusée.
Je saisis la vodka et la lui retire avant qu'elle se foute en l'air.
Son visage vire au cramoisi, ses globes oculaires sont sur le point de sortir de leurs orbites.
— Ça brûûûûle ! s'étouffe-t-elle, les mains pressées contre sa gorge.
— Sans blague ! hurlé-je, claquant la bouteille sur le buffet sous le ricanement de mes frères.
Je m'apprête à lui proposer de l'eau quand elle titube vers moi, se rattrape à mon épaule, avant qu'un flot de gerbe infâme ne jaillisse de ses tréfonds buccaux pour s'étaler sur mon costard hors de prix.
— C'est pas vrai !!
— Oh, dégueu ! s'esclaffent les gros lourds à côté.
Si je n'étais pas moi-même sur le point de rendre ma pizza de la soirée, je leur balancerais mes fringues à la gueule, à ces cons !
Le gémissement de Leyah m'inquiète davantage. Je tente de lui empoigner le bras tandis qu'elle trébuche, mais elle le retire brusquement, vacille en arrière, bousculant une immense jarre en terre cuite à l'effigie d'un mec important de notre fraternité. Tout se passe en slow motion. L'objet bascule devant notre expression affolée à tous. Avant que qui que ce soit ait le temps de l'approcher, elle se fracasse sur le sol en mille morceaux, et renverse les litres de cocktail qu'elle contenait sur le carrelage de la cuisine.
— Bordel de merde, entends-je derrière moi.
La pièce est plongée dans un silence assourdissant. Avant que Leyah tombe dans les débris, je saisis son bras et la tire contre mon torse puant.
— Arrête ! se débat-elle.
— Tu préfères te blesser ? Merde, viens avec moi avant de saccager toute la baraque !
Mon ton est sans appel, je la traîne à l'étage d'un pas furieux et l'emmène dans la salle de bains la plus proche de ma chambre. Je me débarrasse de mes fringues poisseuses le plus vite possible, les balance dans la douche et, plus qu'en boxer, je me rince le visage avec acharnement.
— Bordel, ça t'arrive souvent de dégueuler sur les autres, sœur Smith ?
J'entends sa voix répondre avec émotion.
— Je... non. Enfin, si, une fois, j'ai attrapé la grippe et maman m'aidait à me relever. Je venais de...
— Smith, l'interromps-je, coupant le débit d'eau. Je m'en branle.
Je me frictionne la figure à l'aide d'une serviette qui traîne sur les crochets, la surprends en train de reluquer mon corps, rouge comme une tomate. Et plus précisément mon entrejambe.
Bon sang !
Je soupire, essaie de fuir toute forme de tension. Sous la lumière crue, la jeune femme est encore différente. Je lui retourne son examen, bloquant sur ses seins appétissants. Son visage non plus ne m'est jamais apparu si... adulte, malgré les traces de maquillage qui le maculent. Elle dégage un truc qui me trouble. Un quelque chose d'intense que je ne lui avais jamais remarqué lorsqu'elle avait quatorze piges.
Je m'ébouriffe les cheveux avant que mes membres ne me trahissent. Du moins, un en particulier.
— Bouge pas, j'arrive. Profites-en pour te nettoyer.
Limitant tout risque de lui sauter dessus, je file dans ma piaule pour nous imposer de la distance, m'habille d'un autre ensemble classique, et extrais un tee-shirt noir de ma penderie. Lorsque je reviens dans la salle de bains, les traits de Leyah sont dénués de maquillage et elle s'acharne à frotter son petit top avec la même serviette que j'ai utilisée.
— Je ne savais pas si je pouvais, s'excuse-t-elle, mais le vomi est tenace, et c'est une tenue empruntée à Yuri...
Je lui tends mon tee-shirt.
— Enfile ça. J'apporterai ton top au pressing avec mon costume.
Elle s'immobilise et cille, le temps que l'info monte au cerveau.
— Oh. Merci. Je suis vraiment désolée pour tes vêtements.
Mains dans les poches, je me retourne pour la laisser se changer.
— Aaron sait que t'es ici ? m'enquiers-je, curieux de connaître l'opinion de son frère.
— Non, il est en mission en France depuis presque un an.
Je suis au courant, mais je ne lui avoue pas. Car elle n'a pas l'air de savoir qu'on a gardé contact depuis que ma mère et moi avons fui l'Utah.
Le froissement de ses vêtements me titille, introduit des images bien trop déplacées dans ma tête.
— Tiens, interrompt-elle mon film interdit aux moins de dix-huit ans, se plantant devant moi avec son haut.
Je le balance sur la pile de fringues sales et, sans me détourner d'elle, m'adosse au carrelage du mur, bras croisés sur la poitrine.
Avec mon tee-shirt qui lui arrive juste sous les fesses, sa chevelure emmêlée, elle est encore plus affriolante que tout à l'heure. Difficile de déceler son potentiel sous ses couches de pudibonderie, ses coiffures tressées à la mords-moi-le-nœud et ses longues jupes de mémère.
— Ce genre de vêtement te va bien, me lance-t-elle, les lèvres incurvées et le regard vaseux. Je n'aime pas les chemises, ça me rappelle les elders, mais sur toi, c'est hyper classe.
Je roule des yeux, empêche son compliment spontané de me toucher derrière les côtes.
— Explique-moi, sœur Smith, c'est quoi ce nouveau délire ? Aux dernières nouvelles, tu donnais une représentation pour la messe de Noël avec tes potes de la paroisse. T'as renoncé au royaume céleste ? T'as abandonné l'Église ?
Sa posture vacille comme si je lui avais administré un coup.
Tout doux, Leyah, je t'ai juste posé une question.
Elle s'appuie contre le lavabo, l'expression voilée de tristesse.
— Comment tu sais que je chantais pour la paroisse ?
Elle se fout de moi ?
— Tu m'as ajouté sur les réseaux, je te signale.
Surprise, elle se redresse imperceptiblement. Se recroqueville de nouveau.
— J'ai décidé de mettre de la distance avec l'Église. Je veux m'amuser comme une jeune fille normale et ne pas gâcher les plus belles années de ma vie.
— T'amuser ? Tu n'as pas peur d'être rongée par la culpabilité, une fois que ça te sera passé ? Ils vont te reprocher le fait d'avoir manqué à tes devoirs de dévote modèle.
Piquée, elle fronce les sourcils. Ses doigts resserrent leur prise sur le bord du lavabo.
— C'est pas une passade. J'étouffe, là-bas. J'ai assez donné. J'ai besoin de décompresser hors de cette bulle qu'ils nous ont créée.
Je me rappelle tout ce qu'elle représentait. Tout ce que je détestais. Qu'elle avoue en avoir souffert me chatouille les nerfs. C'est trop facile d'être la pureté incarnée, puis de décider un jour que c'est trop de restrictions, qu'au final, s'amuser comme les autres jeunes, c'est plus sympa. Je ne sais pas si sa foi est ébranlée, si c'est un caprice, si elle ne veut plus rien à voir à faire avec ces gens-là. Mais quand toute ta famille en fait partie, c'est le grand bordel. Elle n'oserait pas se les mettre à dos. Quoique... venant d'une gosse capable de me voler mon premier baiser, rien ne m'étonnerait.
— Et tes parents ? Ils croient que tu as juste voulu changer d'air, sans bafouer vos valeurs ? Que t'as rejoint le groupe mormon du campus ? Qu'est-ce qu'ils penseraient s'ils te voyaient à cette fête, hein ?
Vu la notoriété de son père, la vertu de sa femme et de ses rejetons, et ses relations plutôt intimes avec les personnalités influentes du temple, je n'ose pas imaginer le scandale que ça provoquerait.
Elle tressaille et son faible coup d'éclat se transforme en chagrin. Son menton s'enfonce dans son cou, et elle inspire à pleins poumons.
— Ils n'approuvent pas que je me sois éloignée, mais ils ne savent pas, non. Ma mère serait dévastée, Zachary, dit-elle, sa voix mélodieuse éraillée par l'émotion.
— Ne m'appelle pas comme ça.
Ce nom, vestige de mon enfance, me hérisse le poil.
— Alors ne m'appelle pas « sœur Smith », rétorque-t-elle.
Je plisse un œil, mesure son trouble à la façon dont ses oreilles et son cou gracile rougissent.
Lexmo ».
— Pardon ?
— Leyah-ex-mormone. Lexmo, ça te va à mer-veille.
Elle ouvre la bouche. La referme en secouant la tête.
— Haan, mais noon ! Arrête avec tes surnoms ! Leyah, c'est simple, pourtant !
Elle peut rêver. Je refuse de l'appeler Leyah. Je ne la dissocierais pas de cette secte.
— Pas tant que tu n'assumeras pas tes choix jusqu'au bout. En plus, regarde-toi, c'est ta deuxième fête sur le campus et tu déconnes. Ça me laisse perplexe, tout ça, la charrié-je en ricanant.
— T'as qu'à m'apprendre.
Circonspect, j'enfonce mes mains dans les poches.
— T'apprendre quoi ?
Elle hausse les épaules, écarte les bras.
— La vie normale, ici. Je n'ai pas l'impression d'avoir déconné, ce soir, alors peut-être que j'ai besoin d'être guidée. Ça serait trop cooool, vu qu'on se connaît déjà, s'excite-t-elle d'un coup.
Ma musculature, celle qu'elle ne manque pas de zyeuter à tout bout de champ, se tend.
— Putain, t'es mignonne, mais j'ai pas que ça à faire, Lexmo.
— Tu me trouves mignonne ? s'extasie-t-elle.
Je lève les yeux au plafond, essaie de résister au sourire que cette drôle de meuf me provoque.
— Façon de parler.
Ouais, en fait, ça me fait chier de l'admettre, mais on va dire que d'une certaine façon, elle est mignonne.
— Tu vois, je n'ai pas les codes ! geint-elle comme si je projetais de la jeter en pâture à une bande de lions enragés.
— Mais t'as une coloc toute disposée à te briefer, vu comme elle te couve déjà.
— Yuri ? Non, secoue-t-elle la tête. Entre ses mains, je risque de me transformer en Mercredi Addams ! Tu te souviens, la jeune fille dans cette série interdite que mes par...
— Je sais qui est Mercredi Addams !
Elle me détaille avec une moue boudeuse.
— Hum ! Monsieur le président est trop occupé pour se soucier d'une fille qui n'est membre ni d'une sororité populaire ni du club des reines du billard. L'altruisme, tu ne connais pas !
Le club des reines du... c'est quoi cette connerie ?
Je balaie ses suppositions d'un geste.
— Moi ? Président ?
— On m'a dit que tu le deviendras à la prochaine élection.
Je manque de lui rire à la face.
— Je ne suis ni ne serai jamais président. C'est n'importe quoi, ces rumeurs. Je n'ai pas le profil.
Je sais que les membres voteraient pour moi, mais hors de question que je m'implique davantage dans cette mascarade. Que je me range pour l'image. Si mes amis les plus proches font partie de la maison BTP, je ne l'ai pas intégrée pour faire de la politique. Je suis là pour le prestige, parce que, de son temps, mon beau-père en était le président et que, par conséquent, en tant qu'héritier, c'est le seul cercle que je pouvais intégrer sans être bizuté.
En réalité, moi aussi, je m'y trouve pour m'amuser.
— Alors, tu as du temps à m'accorder, suppute-t-elle en s'approchant de moi.
Qu'est-ce qu'elle fabrique, là ? C'est quoi cette démarche chaloupée complètement exagérée ? Je déglutis et me redresse, sur mes gardes.
— Par exeeeemple, pour être à la mode, je ne devrais pas remonter un peu ce tee-shirt, mime-t-elle en dévoilant son nombril, et le nouer juste iciii ?
C'est moi ou elle s'est tout à coup cambrée comme si elle figurait dans un clip de hip-hop ?
OOOK, ça devient carrément gênant, là...
— Je suis pas conseiller de mode, Lexmo.
À la mention de son surnom, son nez se fronce. Très bien ! Pitié, qu'elle interrompe son entreprise, quelle qu'elle soit.
— Mais t'es un garçon ! Tu dois savoir ce qu'ils aiment !
Attends, quand elle affirme qu'elle veut s'éclater... elle ne veut quand même pas s'envoyer en l'air ?
J'abdique. M'approche d'elle, soumis à ses mirettes pétillantes. Un cercle bleu électrique entoure ses iris d'un bleu autrement plus clair, mais tout aussi intense. Je les ai toujours trouvés flippants chez son frangin, mais sur elle...
Sans m'en détourner, je lève le menton, résistant à l'appel de ses lèvres entrouvertes. Celles qui se sont posées sur les miennes il y a si longtemps que j'ai cru à une hallucination.
Je saisis l'ourlet du tee-shirt des deux mains et avec lenteur, je l'enfonce à l'avant de son pantalon.
— Voilà, tu ne ressembles plus à mère Teresa, là. Contente ?
Et au moins, son adorable petit nombril reste bien au chaud.
« Adorable petit nombril » ? Je délire, moi...
— Sur ce, j'ai des futurs membres à recruter ! claqué-je avant qu'elle n'ait le temps de réagir.
— Mais...
— Trouve-toi une activité ou... rentre chez toi. Allez, viens, je te raccompagne en bas.
Penaude, elle abandonne son entreprise de débat ou je ne sais quoi et me suit tel un chiot obéissant.
De retour au rez-de-chaussée bondé, étrangement, j'ai l'impression de mieux respirer. Lexmo a rejoint sa coloc (bon vent !), tandis que Kenzo et Nerdy semblent avoir déniché un dernier membre pour les Thunders. Ça m'arrange carrément. L'an passé, le groupe a joué gratos lors des soirées de la frat', puisque Liam est des nôtres, ce qui a boosté leur notoriété. Un échange parfait de bons procédés. Avec la copine sexy de Kenzo au micro, ils vont tout déchirer.
L'épisode étrange de la salle de bains me laisse songeur. Rejoint par une fille dont j'ai oublié le prénom (un peu fâcheux, vu qu'on a passé une nuit d'enfer avec sa sœur, avant l'été), j'essaie de chasser la blonde de mon esprit.
Que je lui serve de chaperon alors qu'elle m'a dégueulé dessus, et puis quoi encore ?
L'alcool me fait gamberger. Son discours tourne quand même en boucle dans ma cervelle. Putain de mormone !
L'heure file et c'est un autre problème qui surgit dans mon champ de vision.
Derek James.
Il a osé se pointer, finalement. En tenue normale, qui plus est.
Il est accompagné de deux types : deux anciens bizuts.
Je me plante devant lui, prêt à le chasser, tout de même curieux de connaître la raison de sa présence.
— James ! annoncé-je d'une voix forte. Je suis surpris de vous voir ici, ton courage et toi. Une réconciliation est en vue ?
Il claque sa langue sur son palais.
— Zach, mon pote. Je m'attendais à un accueil plus chaleureux, ironise-t-il.
Je secoue la tête, tamisant la rage qui pointe le bout de son nez.
Si lui et moi étions très proches, c'est via le cercle qu'on s'est connus. Même si je n'accordais pas de crédit à ces conneries, lui si. Et la queue entre les jambes, il a trahi ses frères, l'an dernier. Ça ne passe pas.
— Écoute, je ne suis pas venu ressasser les souvenirs désagréables. J'ai quelque chose à te dire, je préférais le faire avant que la saison débute.
— Zaaaach ? m'interpelle une voix par-derrière.
Je pivote bon gré, mal gré, interroge Lexmo du regard. Qu'est-ce qu'elle me veut encore ? Ses joues sont un peu plus roses que tout à l'heure, ce qui m'amène à scruter la salle à la recherche de sa coloc. La petite Smith tombe mal, là.
— Je venais te dire au revoir, me sourit-elle de toutes ses dents. J'ai passé une suuuuper soirée ! Je reviendrai à coup sûr !
Si je le lui permets.
— Tu rentres comment ? m'inquiété-je.
Les dortoirs se trouvent sur les collines, à un gros quart d'heure à pied du quartier des fraternités. Sa présence me fout les boules, mais qu'il lui arrive un pépin m'énerverait davantage.
— Yuri m'attend dehors, rougit-elle de plus belle.
— Au revoir, la gerbeuse ! s'exclame Brad en passant, un BTP bourré qui n'était pas dans la cuisine au moment des faits.
On dirait que l'anecdote a déjà fait le tour. Manque de bol, ce surnom va lui coller au train le reste de l'année.
— Hey ! JE M'APPELLE LEEEYAAAH ! Y en a marre des surnoms ! Le seul que je tolérerai, c'est REINE DU BILLARD ! s'égosille-t-elle dans sa direction.
Brad s'esclaffe et disparaît dans la salle de jeux.
— Enchanté, Leyah, reine du billard, s'amuse le traître, qui n'a pas bougé d'un iota. Je suis Derek James, membre de l'équipe de foot.
Ouais, c'est un Coyote, lui aussi. West devra composer avec malgré sa rancœur.
Je n'aime pas le regard qu'il visse sur elle. Cette lueur prédatrice flagrante, cette expression charmeuse qui les fait toutes tomber.
— Ah, c'est toi, Derek !
Bon sang, comment elle le connaît ?
— Je suis si populaire ?
— Je dirais plutôt impopulaire, glousse-t-elle en m'envoyant un sourire de connivence.
Elle est au courant de l'histoire ou elle perçoit juste mon hostilité à son égard ? Je lui retourne un rictus satisfait.
— OK, je suis déjà grillé, plaisante-t-il en se grattant la tête.
— Les présentations sont terminées. Lexmo, ta pote t'attend. Derek, qu'est-ce qui se passe ?
Tandis qu'elle s'éloigne, mon attention est toute focalisée sur le mâle qui n'arrive visiblement pas à en décoller ses prunelles perfides.
— Derek ! Faut que Kelly tire sur sa laisse ?
Rappelé à l'ordre, il inspire à plein nez, avant de plonger les mains dans ses poches, et d'ancrer ses pieds au sol avec aplomb.
— Écoute, je ne voulais pas que vous l'appreniez par d'autres. Cette année, je rejoins les Gamma Bêta.
— Quoi ?!
Moi et les quelques curieux qui gravitaient autour nous sommes exprimés comme un seul homme.
Le visage de Derek demeure impassible. Il hoche la tête pour appuyer sa déclaration.
— Tu sais qu'après l'incident de l'année dernière, je ne peux pas rester ici.
— Et donc, tu décides de te rallier à nos pires ennemis ? T'as craqué, putain ?
Il hausse les épaules.
— Ils sont montés à la première place du classement, Zach. Tu connais ma famille, tu sais que c'est important pour moi.
Je le sais mieux que quiconque, mais... merde. Il se fout de moi ?
— Tu devrais en faire autant, avise-t-il, avant d'accueillir mon poing dans sa gueule.
Des exclamations fusent alors qu'il chavire en arrière et tombe sur le cul, main scotchée sur la mâchoire.
— Putain, t'es taré ?
— Va te faire foutre ! Me prends pas pour la merde que t'es devenue.
La musique baisse, dirige les projecteurs sur nous. Super !
— Si t'étais dans ma situation, tu ferais pareil, Zach. On sait tous pourquoi t'es ici !
Je me retiens de lui cracher à la gueule et tourne les talons. Devant la sortie, Lexmo tire une tronche ahurie.
— La fête est finie ! rugis-je à la cantonade. Tout le monde rentre chez soi !
— Dégage, Derek, ne fous plus jamais les pieds ici, entends-je West balancer à notre ancien camarade.
J'ignore les protestations, manque de bousculer la sœur de mon vieil ami en me dirigeant vers ma chambre, les nerfs à fleur de peau.
Notes de bas de page:
Normalement, les membres des sororités n'ont pas le droit d'aider les membres des fraternités à organiser leurs évènements. Ceux-ci sont des petits rebelles.
Appellation pour les frères mormons
Dans la religion mormone, l'un des trois royaumes que les hommes gagneront après leur vie sur terre (paradis)
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