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Chapitre 26 - Doutes


Point de vue de Lucas

Cela fait plusieurs jours que j'ai revu Audrey. Les baisers que nous avons échangés m'ont complètement chamboulé. Je suis tout le temps distrait et ma rééducation en souffre.

- Lucas, tu fais n'importe quoi! Concentre-toi bon sang, grommèle Allan. Tu es sûr que tu es pressé de partir? Parce qu'à ce rythme là, ton séjour parmi nous va se prolonger.

- Désolé, j'ai la tête ailleurs, m'excusais-je piteusement.

- J'avais remarqué. Qu'est-ce qui te met dans cet état?

- Si tu savais, lui dis-je en riant.

- Et bien justement, je suis assez curieux de savoir ce qui perturbe autant le très sérieux Lucas! me dit-il en riant à son tour. Il n'y aurait pas une histoire de fille là-dessous?

- Peut-être bien...

- Raconte-moi un peu tout ça puisque de toute façon, tu n'es bon à rien.

- T'y vas un peu fort quand même.

- Si peu, dit-il en riant toujours.

- Il y a bien une fille. Elle est différente des autres et c'est pour ça que je suis perturbé.

- Je la connais? me demande-t-il pensif. Attends un peu! Ce ne serait pas la fille qui est venue te voir la dernière fois?

- Comment es-tu au courant de ça?

- Tout se sait ici. N'essaie pas de cacher quelque chose, tu n'y arriverais pas, me dit-il en riant.

- Je vous jure, pires que des concierges, soupirais-je. Mais oui, c'est bien elle. On a chacun nos problèmes à régler. Sa vie est pour ainsi dire compliquée ces derniers temps. Et si elle avait été quelqu'un d'autre, j'aurais probablement laisser tomber tout de suite. Seulement, c'est elle. Audrey prend de plus en plus de place dans ma vie et dans mes pensées.

- Et ça te perturbe parce que...

- Parce que je n'ai jamais connu ça. J'avance en terrain inconnu et je n'aime pas ça. D'un autre côté, on a passé un cap la dernière fois que nous nous sommes vus. Nous ne nous sommes rencontrés que quelques fois. D'accord, on a beaucoup parlé par lettres, texto et téléphone mais... je crois que je ne pourrais plus me passer d'elle. C'est bête non?

- Non, ce n'est pas bête. Ça porte même un nom, me dit-il.

- Ah ouais? Lequel?

- Tomber amoureux mon vieux.

- Arrête tes conneries! Je ne suis pas fait pour tomber amoureux.

- Tu tiens beaucoup à elle. Tu n'arrêtes pas de penser à elle, tu veux tout partager, tu accoures au moindre problème. Et je suis même prêt à parier que tu te sacrifierais pour elle. Je me trompe?

- Non, grommelais-je.

- Je ne veux pas te perturber mais tu es en train de tomber amoureux. Je dirais même que c'est trop tard, tu es accro.

Je le fusille du regard tout en sachant qu'il a probablement raison. En tout cas quand il parle d'addiction. Pour le reste, j'en suis moins sûr. Je suis son «plus» et elle est le mien mais qu'est-ce que cela représente exactement? Qui me dit que ces sensations ne sont pas là uniquement parce que ça fait longtemps que je n'ai plus eu de relation avec une femme? D'accord, nos baisers me font sourire mais c'est juste parce que ça me fait de bien. J'ai besoin d'elle dans ma vie mais ça ne fait pas de moi quelqu'un d'amoureux. Si?

- Et si on reprenait mes exercices? J'ai besoin de sortir d'ici et de retrouver mes repères.

- Comme tu voudras. Refais ceux de ce matin. Ça t'évitera peut-être de dire des bêtises.

Je m'y remets tout en essayant de ne pas écouter la petite voix qui me dit que je suis un fieffé menteur.

Plusieurs mouvements plus tard, mes idées sont toujours aussi confuses. Ma décision est prise. Je vais reprendre la vie que je menais avant et je laisserai les choses évoluer sans essayer de mettre une étiquette sur ce que je ressens. C'est ce que j'ai fait jusqu'à maintenant et ça me va plutôt bien.

- Tu t'es bien défoncé finalement. Je vais parler avec les autres de tes progrès et voir un peu où tu en es.

- Ok, je vais aller prendre une douche.

- C'est une excellente idée. À demain Lucas.

- À demain Allan.

L'eau ruisselle sur ma peau faisant disparaître les dernières traces de mes efforts. Audrey est toujours présente avec moi peu importe ce que je fais. Elle m'a envoyé plusieurs textos pendant l'après-midi auxquels je n'ai pas répondu. Ce n'est pas très sympathique surtout vu l'épreuve qu'elle traverse mais j'ai besoin de mettre un peu de distance entre nous. Je dois retrouver ma vie comme elle l'était. Je ne dois surtout pas me laisser distraire pour mon retour. Les gars comptent sur moi. Audrey aussi, je le sais. Mon cœur le sait. Mais j'ai la trouille. Tomber amoureux n'était pas dans mes plans et ça ne l'est toujours pas. Ça m'effraie de dépendre affectivement de quelqu'un. Tant que j'étais ici, à l'abri du monde extérieur, je ne me posais pas de question mais maintenant que je suis sur le point de retourner dans la vie réelle... Je ne dois pas non plus perdre de vue que la vie de militaire n'est pas simple pour les personnes en couple. Je ne compte pas arrêter l'armée, c'est simplement hors de question. Est-ce le genre d'existence que je veux offrir à Audrey? Le supporterait-elle? Et pourrais-je aller au front tout en sachant que quelqu'un m'attend ici? Logan avait raison. Mon départ pose plus de questions que ce à quoi je m'attendais. C'est le seul à pouvoir m'aider.

Une fois rentré dans ma chambre, j'attrape mon téléphone et compose le numéro qu'il m'a donné.

«Bonjour, vous êtes bien en communication avec le répondeur de Logan Miller. Indisponible pour le moment, je vous recontacte le plus rapidement possible. Laissez votre nom, numéro de téléphone et votre message après le bip.»

- Logan, c'est Lucas. Je ne sais pas si tu te souviens de moi. Je suis résident du centre où Gabriella travaille. Tu m'avais dit que si j'avais des questions je pouvais te contacter. Tu peux me rappeler au numéro qui s'affiche. Bonne journée.

Ça m'ennuie qu'il ne soit pas là. Cela dit, c'est compréhensible. Il a une vie et ne peut pas être disponible tout le temps. D'après Franck, il a arrêté l'armée après plus de dix ans de services. Il aurait eu pas mal de coup durs. Sa rencontre avec Gabriella l'a finalement convaincu de choisir la voie civile. Il a trouvé un travail dans une boîte de surveillance et de protection et pour ce que j'en sais, s'y plaît vraiment. C'est un sacrifice que je ne suis pas prêt à faire, pour le moment du moins. J'ai encore tellement de choses à apprendre et à donner à l'armée. En plus ma relation avec Audrey n'en est qu'au début. Nous nous sommes simplement embrassés et pour une fois j'ai envie de prendre mon temps, de ne rien brusquer. J'ai donc bon moment devant moi pour vivre d'autres expériences.

Quand je me contentais d'histoires sans lendemain, c'était beaucoup plus simple. Nous couchions ensemble et passions au suivant. Pas de prises de tête. Pas d'inquiétude pour ceux que je laissais derrière moi. Personne ne dépendait de moi. Je pouvais me concentrer sur mes actions et ne pas réfléchir en fonction de quelqu'un d'autre.

Audrey change la donne. Je n'ai jamais été un adepte du changement. Ça m'effraie. Énormément. Suis-je prêt à changer une partie de mon existence pour elle?

En réalité, elle m'apporte énormément. Grâce à elle, j'ai remonté la pente et suis de nouveau prêt à me battre. J'ai découvert que je pouvais avoir des sentiments pour quelqu'un. Elle embellit ma vie et me fait voir le monde à travers elle.

Bon sang! Il faut que j'arrête de cogiter ou je vais devenir dingue. Un regard vers l'horloge me montre qu'il est l'heure du repas. Je vais y aller pour me changer les idées. Ils font toujours tellement de singeries et de bêtises que ça va me faire du bien. Rester seul ne m'apporte rien de bon ce soir. J'ai encore plus de questions qu'avant ce qui n'est pas peu dire.

Comme prévu, les autres résidents sont au summum de leur bêtise et me font passer un bon moment loin de mes questionnements incessants. Après deux heures bien remplies, nous rejoignons tous nos chambres, épuisés par cette fin de journée. Je suis enfin dans mon lit quand mon portable sonne.

- Allo?

- Salut Lucas, c'est Logan. Excuse-moi de te rappeler si tard mais je viens seulement de rentrer.

- Ça ne me dérange pas, t'inquiètes. Ce n'est pas comme si j'avais un horaire surchargé! riais-je.

- Tu as des questions à me poser?

- Tu m'avais dit que si j'avais besoin...

- C'est au sujet de ton retour à la caserne?

- On ne peut rien te cacher. Écoute, c'est un peu délicat. Normalement je ne me serais pas cassé la tête mais les choses ont quelque peu changé.

- Audrey?

- Gabriella je parie, soupirais-je.

Il ne fait pas semblant de ne pas comprendre et me répond en riant.

- Gabriella et Franck.

- Tu as la bonne source d'info, lui dis-je résigné.

- C'est sûr qu'avec ces deux-là, même si je ne veux pas écouter, les informations rentrent malgré moi. Plus sérieusement que veux-tu savoir?

- Ça ne fait que deux ans que je me suis engagé, je n'ai donc pas ton parcours. Je sais cependant que je ne suis pas prêt à mettre fin à ma carrière. D'un autre côté, ma relation avec Audrey est toute neuve.

- Et tu te demandes si c'est possible de concilier les deux?

- À peu près. Comment font les gars qui sont en couple? Je veux dire, leur femme tiennent le coup?

- C'est dur pour elles mais je sais aussi qu'elles se serrent les coudes. Et puis, elles ont leur vie ici.

- Je ne sais pas si je peux demander à Audrey de supporter tout ça. Et je ne me vois pas quitter tout pour elle, en tout cas dans l'immédiat.

- T'a-t-elle demandé quelque chose?

- Non rien du tout.

- Tu lui en as parlé au moins? Peut-être qu'elle te surprendrais?

- Elle a beaucoup de problèmes pour l'instant. Je ne veux pas l'ennuyer avec ce sujet en plus.

- Tu ne crois pas que c'est justement une discussion que vous devriez avoir? Surtout, si comme tu le dis, elle est dans une mauvaise passe. Elle doit savoir dans quoi elle s'engage. Je peux te poser une question?

- Bien sûr.

- Où vous en êtes tous les deux?

- C'est compliqué, soufflais-je. Il ne s'est pas encore passé grand-chose à vrai dire. On discute beaucoup par téléphone, texto ou lettres et il y a quelques jours, on s'est embrassé, dis-je gêné. Par contre, ce qui nous lie, et peu importe ce que c'est, est de plus en plus fort.

- Et ça t'effraie. Je me trompe?

- Tu lis dans les pensées? dis-je ahuri.

- Non, je suis simplement passé par là avec Gaby. Mes doutes n'ont cependant pas eu le temps de se frayer un chemin. J'ai du retourner au front assez vite et la distance nous a rapproché plutôt que le contraire.

- Qu'est-ce que ça fait..., qu'est-ce que ça fait de laisser quelqu'un derrière soi? murmurais-je.

- Tu veux la vérité ou les mots que tu voudrais entendre?

- La vérité.

- Ça fait un mal de chien. C'est comme si tu laissais la moitié de ton être en arrière. Tu n'es jamais sûr que tu pourras revenir et la serrer encore une fois dans tes bras, ni si tu auras encore l'occasion de voir grandir votre relation. Mais tu avances malgré tout parce que tu es fait pour ça. Tu es déchiré entre tes sentiments pour elle et ton besoin de faire ce pourquoi tu es né. Mais elle te donne une bonne raison de rester en vie et de rentrer chez toi. Parce que, peu importe où tu te trouves, ton chez toi sera toujours auprès d'elle. Je peux te donner un conseil?

- C'est pour ça que je t'appelle, dis-je ému par ses paroles.

- Discutes-en avec elle. Ne la laisse pas à l'écart. Si elle tient à toi, elle saura ce qui est le mieux.

- Mais si ce qui est le mieux pour moi la fait souffrir?

- Vous surmonterez ça à deux. Elles sont plus fortes que ce que tu croies. De toute façon, qui a dit que l'amour est quelque chose de facile?

- Qui t'a dit que je suis amoureux? L'amour n'est pas pour moi. Je tiens énormément à elle mais ça s'arrête là.

- On en reparlera, me dit-il en riant. Tu es en plein déni mon vieux. Je dois te laisser, ma compagne m'attend et j'ai intérêt à me dépêcher. N'hésite pas si tu as d'autres questions.

- Merci Logan, bonne soirée.

Il ne me reste plus qu'une chose à faire si j'ai bien compris. Je dois parler avec Audrey.

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Voilà mes loups, Lucas est en pleine crise de doutes. Que va-t-il ressortir de tout ça?

Désolée d'avoir publié un peu plus tard, j'ai passé une journée avec ma fille hier avant la rentrée. J'ai passé un bon moment mais j'étais sur les rotules et mon inspiration était partie dormir avant moi lol.

Vos avis?

Chapitre corrigé le 11/10/18

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