Le chant des baleines
J'ai écrit ce texte en écoutant la chanson que j'ai mis ici en média, pour que vous puissiez vous mettre dans l'ambiance. ^^
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L'eau est calme, d'un trouble serein et léger dans lequel se laissent porter les baleines. Ni ici ni ailleurs, elles voguent entre les couches de vapeurs aux lueurs roses d'oubli.
On dit que leur danse est un spectacle fascinant. Il est depuis des milliers de décennies la raison d'être de tous les marins qui ne peuvent plus quitter la mer, encore emprisonnés dans les mouvements gracieux de celles qui disparaissent à l'horizon.
On dit que leur chant fait pleurer le silence. Qu'il transperce les cœurs d'une mélancolie qui ne pourra jamais s'effacer.
On m'a souvent conté ces rencontres avec l'harmonie, celles qui ont vu revenir des hommes à terre, les yeux remplis de larmes salées. De larmes océans.
De ces êtres dont on a tant vanté la beauté, peu en ont vu l'apothéose.
Peu ont suivi leur départ.
On aurait dit des sirènes, à rouler doucement sur ces écumes de vent. Elles glissaient entre les mailles de la vie, le cœur courbé et l'esprit vacillant. Que leur gris était terne au milieu de tant de couleurs... le soleil déclinait ses ravages sur les nuages du monde, et elles, sans ouvrir seulement les yeux, elles se dispersaient comme des ombres sur ces chemins oubliés.
À la barre de mon voilier, je les ai vu passer devant nous, coquilles inexistantes ballotées par ces flots dans lesquels elles naviguaient sans même y penser.
Leur peau brillait de tristesse et leur mouvements de bonheur. C'était si cruel et si pur à la fois... comme un homme perdu au milieu des mers, j'ai suivi leur course lointaine du regard.
Leurs cris perçants firent vriller mes souvenirs et trembler toute mon âme. La mélodie lancinante de ces bancs entiers happa mon âme et l'attira aux confins des océans, voguant à jamais aux côtés de ces ombres mystiques de la mer.
Elles étaient partout ; sous mes pieds soutenant mon corps vacillant ; au-dessus de mes yeux ébahis ; glissant à mes côtés vers l'horizon illuminé de soleil.
Elles s'échappaient, oui, vers cet autre univers au-delà des montagnes, au-delà des prairies et des villes des hommes. Vers ce monde infini où l'eau se mélange à l'air, où les galaxies sont des refuges dans lesquels dorment des étoiles de mer.
Peut-être trop désolées par ce monde qui perdait sa magie, elles quittaient leurs existences et leurs terres. Je les ai vu s'éloigner, avec une douceur infinie, lentement et sans crainte.
Leur lendemain était peuplé de merveilles, et les rêves dans lesquels elles berçaient mon esprit me gardèrent de la peur pendant des années. Car leur chant était doux, oui. D'une mélancolie inaccessible et lointaine, qui pourtant était d'une bienveillance que je n'ai jamais sentie aussi vivement que ce jour-là.
Ce jour où j'ai vu les reflets de mon monde danser sous mes yeux, dans un rythme plus calme que l'écume qui roule sur les mers endormies.
Je me suis réveillé sur mon voilier. Les battements de mon cœur résonnaient dans le silence... cet instant d'éternité n'était pas de ce monde, je le sais bien. Mais j'ai vu ce que d'autres avant moi ont conté jusqu'aux oreilles de la mer.
J'ai vu la danse de l'océan.
Le chant de l'harmonie.
La couleur de l'avenir et la douceur de la paix.
Même au creux des abysses, au plus profond de mes désespoirs, je les entends chanter leur amour au vide de l'espace. Même aux portes de l'hiver, la danse de leurs corps me fait aimer l'automne.
Alors non, vous savez, je n'ai plus peur de partir. Car si mes yeux se ferment sur les rivages de ce monde, c'est pour s'ouvrir sur ceux qui bordent le soleil. À mon tour, moi aussi, je suivrais ces baleines dans leur chant apaisé et leur course lente vers l'au-delà.
Au-delà des mers d'asphalte et des tempêtes de cris.
Au-delà des pluies amères et des saveurs de gloire.
Au-delà de ces jours qui s'effacent sur le sable tiède.
Au-delà même de l'aube.
Jusqu'à ce monde lointain où les galaxies sont des refuges dans lesquels dorment nos cœurs, des éclats de bonheur en étoiles de mer...
C'est le chant des baleines qui parcourt les mers,
Cette danse oubliée où mon cœur se perd
S'étale en écume aux nuages des cieux
Qui se perd, pour finir, dans l'abysse de mes yeux.
Car la vie est voyage sur les flots déchaînés,
Et nos cœurs s'égarent sur ces routes naufragées,
C'est ici que s'apaisent les marées de nos peines
Là où l'écho s'évade sur le chant des baleines...
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