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𝄞 SPACE SONG — Beach House 𝄞
Le goût sur ses lèvres ne semblait pas vouloir partir.
Il était allongé dans son lit, et la nuit régnait en maître dehors. Le château était silencieux, plongé dans le sommeil. Seuls les gardes dont le service était de nuit, avaient encore l'œil ouvert à une heure pareille. Les gardes et nul autre que le prince héritier, qui, allongé par dessus ses draps, observait la lumière de sa chandelle danser sur le plafond de couleur crème. Ses doigts caressaient lentement ses deux lippes charnues et légèrement gercées. Elles avaient été embrassées il y avait quelques heures à peines. Le jour était voué a bientôt montrer son nez et il n'avait pas fermé l'œil. La scène se rejouait encore et encore dans son esprit. La manière dont leurs corps s'étaient pressés l'un contre l'autre, la manière dont le chevalier avait saisi ses cuisses pour le soulever et le faire asseoir sur le marbre froid, contrastant avec sa peau brûlante. Et surtout, la manière dont leurs lèvres s'étaient avidement entrechoquées, se goûtant, se découvrant, se désirant.
Jimin poussa un profond soupir et se redressa en position assise. Ça le hantait. Il ne pensait qu'à ça. Il voulait recommencer. Ce n'était pas lui qui avait stoppé le baiser. Et bien qu'il avait agis en fonction de la convenance, il était persuadé que Yoongi s'était forcé de le faire. Peut être que les choses auraient pu être différentes s'il ne s'était pas arrêté.
Jay était perdu. Perdu et en pleine remise en question. Ces émotions semblaient bien lui appartenir, et cela commençait à ressembler fortement à du dénis que de penser que tout cela provenait de Jimin lui-même. Il se leva alors de son lit, et se dirigea vers la salle de bain. Il se posta devant le miroir pour observer ses traits qui ne lui appartenaient pas mais auxquels il s'était habitué. Les mains posées contre le marbre, sa chemise de nuit tombait légèrement sur son épaule. Il finit par lentement porter sa main à son visage, passant ses doigts sur cette peau rebondie et d'une époustouflante jeunesse. Aucune imperfection ne demeurait sur ce visage. Il était magnifique. Ses doigts passèrent ensuite dans ses cheveux, ses dents triturant doucement sa lèvre inférieure, tandis qu'il caressait ses longues mèches brunes. Et si ce reflet était celui qu'il verrait tous les matins jusque qu'à sa mort ? Peut-être devrait-il se faire à l'idée. Il ne savait pas comment il était venu ici, alors il ne savait encore moins comment repartir.
Jimin finit par faire tomber sa chemise de nuit au sol, son corps se dévoilant doucement à son regard. Il passa ses mains sur ce dernier, et mince, il avait le corps d'un Dieu. Mais pas ce genre de corps de héros, musclé et bâtit pour les combats, non. Si on devait l'associer à ces divinités on pencherait plus pour le comparer à une Déesse. Ô oui, il était bel et bien Fils d'Aphrodite. Ses courbes étaient voluptueuses, sa peau aussi claire qu'une fleur à la naissance de sa vie, et ses formes n'étaient pas de restes. Aphrodite avait été d'une incroyable générosité, et l'avait façonné à la perfection. Ses fesses étaient rondes et fermes, ses hanches créaient une balances sur son corps, ses jambes étaient fines et élancés, et il avait une cambrure naturelle à damner.
« Merde, je suis vraiment beau. »
Souffla alors Jimin qui ne le réalisa que plus encore. Il avait déjà été surpris aux premiers jours dans ce corps, mais il le réalisait pour la seconde fois et plus en profondeur. Suite à ça, il décida de se nettoyer un peu, peut être cela pourrait-il le détendre. Les seaux étaient présents à l'entrée de la pièce, et il fit comme il le put pour les soulever et les verser dans la baignoire. Il fouilla dans les produits de bains et donna des senteurs florales à ce dernier avant de finalement y entrer. Il s'y laissa choir lentement, ses bras s'étendant sur les rebords et les effets furent presque immédiats. Il se détendit rapidement, les yeux clos, et s'assoupit en moins de temps qu'il ne le fallut pour le dire. Enfin un peu de sommeil...
Il n'avait jamais été aussi bien embrassé. Et surtout pas par un homme. Ses lèvres glissaient contre les siennes avec tellement de ferveur et de désir, et refermer ses cuisses autour de son corps était une des choses les plus sexy qu'il avait fait de sa vie. Leurs langues finirent par se rencontrer, et Jimin poussa un gémissement qui fit frémir Yoongi contre lui. Ses doigts s'enfoncèrent un peu plus dans sa chair, dans ses cuisses, les tirant pour que leurs bassins se rencontrent, les faisant tous deux haleter. Ils se détachèrent un instant, se regardant dans les yeux avec l'ombre de leur envie, les pupilles dilatées et noircies par leurs actes, et Jimin glapit lorsqu'il sentit le visage du chevalier dévier jusqu'à sa nuque, sur laquelle il fit pleuvoir une myriade de baisers. Baisers qu'il descendit lentement le long de son corps, faisant suffoquer le prince qui tenait fermement ses mèches entre ses mains, ses yeux suivant sa progression, jusqu'à ce que son visage ne se retrouve entre ses cuisses, et qu'un frisson ne fasse trembler son corps entier.
Lorsqu'il ouvrit de nouveau les yeux, il était encore dans son bain. Il s'était endormi plus profondément qu'il ne le pensait, et son esprit s'était joué de lui. Alors c'était ça, maintenant ? Il allait le hanter ?
*
« Je vous présente Lady Giselle de Carta, jeune Prince. »
Le comte de Carta, Jenseng, tenait la main de sa fille qu'il présenta à Jimin avec un grand sourire fier. Jimin posa ses yeux sur la jeune fille face à lui, et prit quelques secondes pour l'étudier. La jeunesse illuminait ses traits à elle aussi. Elle était belle, c'était une vérité générale. Sa peau était claire, parsemée à de nombreux endroits de petites taches de rousseurs. Ses cheveux étaient brillants, ondulant comme des vagues, empruntant leur couleur aux magnifiques toisons de renard. Elle portait une belle robe en velours bordeaux, le corset faisant ressortir sa poitrine généreuse emprisonnée entre les laçages. Oh, Jay l'aurait trouvé à son goût en temps normal. Pourquoi alors n'avait-il en ce moment, aucun attrait pour cette dernière ?
« Lady Giselle, enchanté de faire votre connaissance. »
Balbutia alors Jimin en faisant la révérence, prenant sa douce main pour y déposer un petit baiser. La jeune fille sourit légèrement et s'inclina à son tour. Le père de Jimin souriait, visiblement satisfait de leur rencontre.
« Et si vous alliez faire faire un tour à Lady Giselle, Jimin ? Je suis sûr qu'elle appréciera grandement la beauté de nos jardins. »
« Bien sûr, Père. »
Souffla le prince, qui essayait d'être le plus naturel et décontracté possible. Giselle n'avait pas l'air d'être une mauvaise personne, simplement il n'aimait pas ce sentiment d'obligation qui trônait dans sa poitrine, puis toute la mascarade qui était perpétrée autour de cette rencontre. Ils saluèrent donc tous deux leurs pères avant que Jimin n'entraîne la jeune fille dans les jardins. Le printemps saluait le pays, et toutes les plantes étaient en fleurs, embaumant le jardin de leurs agréables senteurs. C'était une belle journée, le soleil était haut dans le ciel d'un bleu sans nuage.
« Etes-vous déjà venue à Orôn, Madame ? »
Demanda alors Jimin, qui honnêtement, ne savait même pas quoi dire. Il voulait essayait d'orienter la discussion pour que la jeune fille puisse en être la meneuse et que, de ce fait, il ait la possibilité de répondre seulement brièvement.
« Oui, quelques fois, mais c'est la première fois que je met les pieds au palais. Enfin, la seconde en réalité. Mais il faut dire que j'étais extrêmement jeune la première fois, je n'en ai donc aucun souvenir. »
Jimin hocha doucement la tête en mordant sa lèvre. Giselle avait une voix douce et fluette, et aspirait à la douceur dans sa personnalité toute entière.
« Que pensez-vous alors du palais ? De la ville ? »
Les deux marchaient côte à côte et s'échangeaient simplement des banalités. Au moins, ils arrivaient à tenir une discussion, pour éviter les blancs qui s'avéreraient gênants au sein de la discussion. Ils arrivèrent ensuite au niveau d'un kiosque fleuri, et Jimin put constater l'émerveillement dans les prunelles de la jeune fille.
« Pouvons-nous nous y arrêter un moment ? »
« Bien sûr. »
Acquiesça Jimin qui resta à la suite de Giselle qui grimpa les marches pour aller s'asseoir sur un banc en bois de chêne, tandis que le kiosque leur faisait un petit coin d'ombre. La coupole au dessus d'eux était parcourue de ronces et de roses blanches. Les colonnes autour d'eux, en marbre blanc, n'avaient pas été épargnées elles non plus par les plantes grimpantes qui les entouraient. Mais le résultat était délicat, et quelque peu champêtre.
« J'aime beaucoup vos jardins. Les notre ne sont pas aussi riches et diversifiés. Ce n'est pas sur cela que mon père a mis l'accent. »
Souffla la jeune fille, ayant l'air déçue de ce qu'elle affirmait.
« Sur quoi donc l'a-t-il mis, alors ? »
« Sur la partie militaire de notre demeure. »
Jimin comprit mieux. Et ce qu'il sembla comprendre encore plus était le fin stratège que le compte se demeurait être. Ce n'était par ailleurs, qu'un comte. Il avait moins d'importance qu'un prince, de toute évidence, mais aussi moins qu'un duc ou qu'un marquis. Si sa fille épousait le prince royal, il aurait tout a y gagner. Des titres, des terres, des richesses, du pouvoir... C'était ainsi que cela fonctionnait, après tout. Mais pourquoi son propre père, qui était sans doute bien meilleur stratège que le comte de Carte, voudrait-il cela ? Quel apport pourrait-il en tirer ? Jimin était ailleurs, il se questionnait, voulait comprendre. Et ce qui le sortit de sa réflexion ne fut pas la voix ou encore la présence de Giselle à ses côtés, mais l'arrivée d'une toute autre personne. En effet, la Garde Royale passait par les jardins, semblant rentrer de leur entraînement. Les yeux du prince se posèrent alors instantanément sur la petite troupe qui évoluait entre les haies, jusqu'à ce que son regard ne finisse par capter la présence du chevalier qui hantait ses pensées.
Yoongi était couvert de sueur. Ses cheveux et son front étaient trempés. Par ailleurs, le soleil commençait à faire briller ses racines dorées, ce qui rappela à Jimin qu'il n'avait pas évoqué ce fait auprès de lui. Disons qu'il avait eu toute autre chose en tête, dernièrement.
« Bien le bonjour, votre Altesse. Madame. »
Argua alors Jungkook en s'inclinant devant les deux jeunes gens, près du kiosque. Giselle sourit et salua Jungkook à son tour, souriant à la petite troupe qui était venue à leur rencontre.
« Giselle de Carta. »
La présenta Jimin, par pure politesse.
« Et voici Jungkook, notre Général. »
« Enchantée, Général. »
Souffla Giselle en se levant, prenant les pans de sa robe pour s'incliner. Jimin dévia ensuite de nouveau son regard, le posant sur Yoongi au fond des rangs. Et lorsque leurs regards se croisèrent, le chevalier tourna la tête. Jimin cligna plusieurs fois des yeux à cela, surpris. Regrettait-il ? Oh, c'était sans doute le cas. Il n'aurait jamais dû faire ça, et le chevalier avait sombré sans réfléchir dans les bras de son prince. Il n'était pourtant pas fautif, puisque c'était Jimin qui avait fait le premier pas, mais il devait ressentir la culpabilité de l'avoir laissé faire, de ne pas l'avoir repoussé, comme leur statut respectif le dictait. Jimin comprenait cela et en même temps, ne pouvait s'empêcher de ressentir une amère déception en lui.
« Nous ne faisions que passer, nous ne vous embêtons pas plus longtemps. »
Finit par dire Jungkook qui les salua de nouveau avec politesse, avant de s'éloigner, la garde le suivant alors en un rang discipliné.
« Cela doit être rassurant d'avoir une armée de soldat prêt à tout pour assurer votre protection. »
Jimin sembla revenir sur terre et posa ses yeux sur la jeune fille.
« C'est, disons... grisant. Parfois c'est étrange, quand on y pense. »
« Ah oui ? »
« Oui. Une troupe entière d'hommes prêts à se sacrifier pour vous, mais eux... Qui se sacrifierait pour eux ? »
Souffla Jimin en tournant la tête pour poser son regard dans les yeux clairs de Giselle. Il se rendit enfin compte qu'elle les avait verts. Il se sentit ridicule de ne pas les avoir remarqué plus tôt. La jeune fille le regarda quelques instants avant d'hocher la tête, un léger sourire aux lèvres.
« Je n'avais jamais vu les choses sous cet angle... Vous avez bon cœur, votre altesse. »
Jimin pinça ses lèvres. Bon cœur ? Il ne savait pas si c'était réellement cela. De la considération, peut-être, ou alors tout simplement une humanité. Ils reprirent ensuite leur promenade, continuant simplement de parler de tout et de rien, et pourtant, une question taraudait Jimin, lui brûlait les lèvres... Et ce jusqu'à ce qu'il ne puisse plus tenir.
« Giselle, puis-je vous poser une question ? »
La jeune fille tourna la tête vers le prince, l'inclinant légèrement sur le côté, le questionnant du regard, l'incitant ainsi à travers ce dernier à lui poser sa fameuse question.
« Désirez-vous vraiment épouser quelqu'un que vous venez de rencontrer ? Quelqu'un que vous n'aimez pas vraiment ? »
Giselle sembla se figer un instant, prise au dépourvue par cette question. En effet, on apprenait aux jeunes filles de noble lignée qu'un jour, elles devront épouser quelqu'un de leur rang, apporter des héritiers et perpétrer leur nom. On ne leur laissait pas le choix, et on ne leur demandait encore moins leur avis. Il n'y avait pas de justesse dans ce genre de situation. C'était leur devoir, et cela s'arrêtait là. Et là, c'était bien la première fois que l'on demandait son avis à Giselle sur la question, que l'on se préoccupait de ce qu'elle voulait et pas de ce qu'elle devait.
« Et bien... Je... »
« Vous pouvez être honnête envers moi, Madame. »
Jimin remarqua le trouble dans ses iris. Il comprit rapidement que ses désirs n'avaient pas une seule fois été consultés depuis qu'elle avait été mise au monde. Et c'était d'une aberrante tristesse.
« On nous apprend dès notre plus jeune âge qu'un jour, nous devrions nous marier, faire des enfants, et apporter gloire et honneur à notre famille... »
Jimin hocha doucement la tête, n'étant pourtant pas satisfait par cette réponse qui était ce que son éducation lui dictait de faire.
« Etes-vous déjà tombée amoureuse, Giselle ? »
Jimin ne se privait maintenant plus de poser ce genre de question, qui était pourtant inconvenante pour les personnes qu'ils étaient. Il vit les pommettes de Giselle virer au rouge, et elle regarda ses pieds disparaissant sous toutes ses couches de vêtements, sa rivière rousse virevoltant au gré du vent. Elle contempla le sol un moment, avant de finalement relever la tête. Ses yeux brillaient, et elle n'osait toujours pas regarder le prince à ses côtés.
« Oui, je crois que oui. »
Un petit sourire s'installa sur les lippes de Jimin, qui voulait en entendre plus.
« Et n'avez-vous jamais penser, dans vos rêveries, à épouser cette personne ? »
Un petit sourire naquit sur le visage de Giselle, à son tour, et elle hocha doucement la tête.
« Si, cela a pu me traverser l'esprit... Mais j'étais jeune, votre altesse. »
« Peu importe notre âge, Madame. On peut tomber amoureux de tout temps, et cela n'en reste pas moins important et réel. Cette personne est-elle encore dans votre vie ? »
Un ange passa, et Jimin put remarquer que Giselle avait à présent les lèvres pincées.
« Non, elle ne l'est plus. »
Jimin cligna plusieurs fois des yeux, et en voyant cet éclat de souffrance traverser les émeraudes de la jeune fille, regretta sa question. Mais, avant même qu'il ait pu ajouter qu'il était désolé, Giselle reprit.
« J'avais quinze ans. Mon ancien garde personnel avait dû partir à la retraite plus tôt que prévu à cause de problèmes de santé qui l'empêchaient d'assurer ma sécurité. Suite à cela, mon père a embauché un nouveau garde. Plus jeune, plus fort, plus agile, plus vigoureux. Haylee, il s'appelait. »
Elle avait des étoiles dans les yeux, lorsqu'elle contait, et la poitrine de Jimin se réchauffa d'une agréable sensation.
« Au début, il était discret, timide, comme une ombre. Le rôle des gardes est de nous protéger tout en restant le plus discret possible. En effet, ils ne devaient pas empiéter sur notre vie, sur notre quotidien. Par ailleurs, je n'ai jamais compris le désir qu'avait mon père de m'attitrer un garde. Je ne suis pas une princesse, ou une marquise... Je ne sais même pas si vous en possédez un vous-même. »
« Je n'en ai pas, Madame. »
« C'est bien ce que je pensais... Enfin. Rapidement, sans trop savoir pourquoi ni comment, une certaine complicité s'est installée entre Haylee et moi. Il était gentil, charmant et attentionné... Il veillait tout le temps à ce que je ne manque de rien, et je me sentais à l'aise et en sécurité en sa présence. Savoir qu'il me suivait partout ne me dérangeait plus tant que ça, puisque ça me permettait de passer du temps avec lui. Un soir, je l'ai convié à une balade nocturne, et il a accepté. Ce soir là, nous étions à l'abris du vent, au sein d'un magnifique bosquet. Il m'offrit une rose rouge, qu'il était allé cueillir avant notre promenade. Il savait que j'adorais les fleurs. L'ambiance était magique, puis, le temps d'un instant, je me suis sentie comme une princesse, lorsqu'il posa ses lèvres contre les miennes... »
Le cœur de Jimin battait la chamade. Il avait l'impression de vivre l'histoire de Giselle par procuration, et la voir dans un tel état lorsqu'elle racontait tout ça, cela apportait un bonheur simple et agréable au creux de son ventre.
« Que s'est-il passé, ensuite ? »
Mais là, le sourire de Giselle fana, et elle regardait ses doigts avec lesquels elle jouait.
« Mon père a finis par découvrir notre histoire. Il a fait une scène en public, ne se privant pas pour humilier Haylee, le traitant comme un moins que rien, le déshonorant de toutes les manières possibles et inimaginables. Suite à cela, il fut renvoyé du domaine, et exilé. Il n'eut pas le droit de mettre le pied à moins de cent kilomètres de Carte... Cela fait deux ans que cette histoire s'est produite, et je n'ai plus jamais eu de ses nouvelles. »
La tristesse dans le regard de Giselle impacta Jimin de plein fouet. C'était injuste. Ils vivaient, tous les deux, dans un système où leur vie n'était qu'exploitation. Ils n'étaient pas importants dans le fond, mais dans la forme. Ils étaient utiles. Pas substantiels. Leurs pères tenaient les ficelles de leurs vies. Et le seul moment où ils seraient en capacité de se prendre réellement en main, sans personne pour essayer de leur faire faire le contraire, serait à la mort des hommes qui leur avaient donné la vie. N'était-ce pas ironique ?
« Je suis désolé que votre histoire se soit arrêté ainsi. Je ne doute pas de la sincérité réciproque de vos sentiments. On ne devrait pas être traité de la sorte. »
Giselle releva les yeux vers Jimin, le regardant avec un mélange de tristesse et de curiosité.
« Que voulez-vous dire... ? »
« Nous devrions avoir le choix, non subir les désirs de nos créateurs. Notre vie nous appartient. »
La jeune fille cligna plusieurs fois des yeux, laissant un silence peser entre eux quelques secondes durant.
« Je ne vous avez pas imaginé ainsi, votre altesse. »
Jimin releva les yeux vers elle, penchant la tête sur le côté.
« Comment m'aviez-vous donc imaginé ? »
« Bien moins... Je ne sais comment dire ça. En principe, les princes suivent leurs devoirs à la lettre. Cela s'est très peu vu dans l'Histoire de notre pays, les héritiers qui prennent leur propre chemin, qui font leurs propres choix. Tout comme les mariages d'amour... Ils sont quasiment inexistants au sein de notre rang. »
« Je veux faire changer cela. Quand je serai roi... Les choses seront différentes. »
Les yeux de Giselles retrouvèrent leur éclat, et une nouvelle chose sembla se mettre à briller dans ses pupilles : de l'espoir.
« Votre Altesse... Vous êtes notre Avenir. »
*
Après le repas, Jimin accompagna Giselle jusqu'aux appartements dans lesquels elle allait reposer le temps de son séjour au palais, et lui souhaita la bonne nuit. Ils avaient passé la journée ensemble, et finalement, cela s'était passé autrement que ce que Jimin avait pu imaginer. Giselle était vraiment gentille et... ils se comprenaient. Ils aspiraient au même futur. Et Jimin se rappela des quelques mots de la jeune fille. Vous êtes notre Avenir. Il avait donné de l'espoir à quelqu'un de par ses valeurs qui étaient pourtant les plus justes de toutes et que tout le monde devrait avoir. Mais merde, il n'était pas vraiment le prince, il n'avait pas été éduqué comme tel, arriverait-il à apporter les changements qu'il avait promis de faire ? Mais alors... Peut-être était-elle là, la raison de sa présence ici, dans ce corps, à cette place... Jimin s'arrêta au beau milieu du couloir, en direction de ses propres appartements. Il tourna doucement la tête et posa les yeux sur une statue incrustée dans le mur.
Thémis, Déesse de la Justice.
La Justice. Il allait l'apporter avec ses valeurs et son mode de penser du XXIe siècle. C'est ainsi qu'il allait faire changer le monde, la société. Il n'était personne, pourtant, à son époque. Il n'était qu'un gars parmi tant d'autres, qui n'avait pourtant pas un avenir brillant, au contraire. Il n'était pas une mauvaise personne pour autant, mais ses ambitions étaient faibles, voire inexistantes. Et pourtant, ici, il avait un but, il avait un objectif. Peut-être était-elle là, la réponse à la question qu'il se posait depuis son arrivée ici.
« Votre Altesse ? »
Jimin sursauta brusquement. Il était tellement absorbé dans ses pensées que le monde autour de lui avait, le temps d'un instant, disparu. Il n'avait donc pas entendu les bruits de pas se rapprochant de lui. Et, lorsque ses yeux se posèrent sur le visage de Yoongi, son palpitant se mit en marche accélérée.
« Yoongi... »
Les deux se regardèrent en silence, et Yoongi, hésitant, finit par reprendre la parole.
« Vous allez bien ? Vous étiez figé, comme si vous aviez vu un fantôme passer. »
Le prince le regarda plusieurs secondes, détaillant ce visage qui restait dans son esprit à présent. Il repensa un instant à la triste histoire de Giselle... Mais les choses n'auraient jamais dû se passer ainsi. Elle aurait dû avoir le droit d'aimer et d'être heureuse avec Haylee. Et Jimin devait avoir le droit de laisser ce qui grossissait en lui, prendre possession de son être. Un éclat brilla aux creux de ses prunelles, éclat qui ne passa pas inaperçu aux yeux de Yoongi qui semblait se demander à quoi le prince pouvait bien penser. Et la seconde d'après, la proximité entre eux disparut. Jimin venait de fondre une nouvelle fois sur ses lèvres.
Les changements commençaient maintenant.
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