Chapitre 2 : Tu as un rêve ? (2/2)
Elle soupira et se lança, ce serait douloureux, elle le savait, mais elle lui devait ça.
-Je rêvais que mon père s'en sorte. Mais ce rêve est tombé à l'eau.
-Comment ça ?
-Mon père est décédé, Julian.
-Oh...
L'ambiance devint lourde, en une fraction de seconde. Il comprenait beaucoup plus de choses, maintenant. Pourquoi elle était si triste, si pensive tout le temps et aussi pourquoi elle était ici, en Alsace.
-Je suis désolé...
-Tu n'y es pour rien. Je n'ai pas besoin de ta pitié.
-Je n'ai pas pitié de toi. Je te trouve forte au contraire. Si mon père décédait, je crois que... enfin je ne sais pas, ça doit être difficile d'y survivre. Surtout à nos âges.
-On essaie d'apprendre à vivre autrement.
-C'est arrivé quand ?
-Le 18 mars dernier.
-Comment ?
-Julian, on peut arrêter là ? S'il te plait.
Elle lui demandait tellement sincèrement. Ce n'était pas pour le stopper dans son élan, c'était pour elle, pour se protéger, alors il acquiesça. Il reporta son regard vers la plaine, de même qu'elle. Il sentait qu'elle se retenait de s'énerver contre elle-même, alors il fouilla dans le sac de Mary, et en sortit la crème hydratante. Il lui prit son bras, et lui en appliqua délicatement pour faire ensuite de même avec l'autre côté. La situation était plutôt comique, et ils étaient plutôt proches. Elle adorait cette proximité, tout comme lui.
-Pourquoi tu fais ça Julian ?
-Tu as mal, c'est normal...
-Non...- elle lui prit le tube de crème et le posa, il s'éloigna en ne la quittant pas des yeux - Je veux dire, pourquoi tu essaies de me faire aller mieux, c'est ce que tu fais non ? Pourtant j'ai pas vraiment été correcte...
-Je ne sais pas. J'aime bien être avec toi. Et j'essaie peut-être de te prouver que quelqu'un peut entrer dans ta vie. Sans que ce soit le chaos.
-Tu ne sais vraiment pas dans quoi tu t'embarques, je te préviens.
-Et alors, c'est vrai c'est déjà la catastrophe t'es cramée comme un steak !
Elle le bouscula de son épaule, mais aussitôt la douleur recommença. Elle sourit, malgré ça. C'était agréable d'être avec lui, c'était simple.
-T'aimes les steaks biens cuits alors !
-Non, plutôt à point.
-Ah oui, c'est vrai, la mannequin, comment elle s'appelle ?
Il leva les yeux au ciel... Parler de sa petite copine ne faisait pas partie de ses plans. Pas avec Mary, pas maintenant. Parce qu'en la présence de la jeune femme, il oubliait complétement, sa petite-amie.
-C'est pas ce que je voulais dire. Et elle s'appelle Alice, Alice Ambiehl. Retiens son nom c'est la future Kate Moss !
-Sans les problèmes de drogues ?
-Oui bien sur...
Ils restèrent un moment à se laisser bercer par le son du vent qui se cassait sur les arbres, à perdre leur regard dans ce beau paysage, à être libre. Et tous les deux, étrangement, auraient souhaité que ce moment se fige, que la simplicité de l'instant soit éternelle. Le temps passait, malheureusement, trop vite, pour lui comme pour elle. Certes ils ne se parlaient que très peu, mais ils aimaient ça. Julian finit par se lever, au bout d'un certain temps, et regarda son portable en faisant de grands yeux.
-Mary !
Surprise elle dut sortir de leur bulle, se leva et se mit face à lui. Il avait réellement l'air alarmé. Une mauvaise nouvelle ? Un drame ?
-Quoi, qu'est-ce qu'il y a ?
-Il est 20h30 !
Il était paniqué, elle ne comprenait pas.
-C'est tout ? T'as pris ce ton pour dire ça ? Sérieusement ?
Elle était blasée par son attitude et également par le fait qu'il ait brisé leur moment de cette manière.
-Quoi mais attend, je sais que chez les Mathis vous mangez à 19h30 précise tous les soirs !
-Ah... Ouai c'est vrai.
-Allez viens on file ! Vite !
-Hé mais attends c'est pas grave...
Elle lui prit la main et lui fit signe qu'ils pouvaient prendre leur temps. Il lui fit un sourire un peu stressé, malgré sa sagesse apparente. Et puis sans rien dire, elle approcha sa bouche de son oreille et lui chuchota un "merci". Il lui fit un signe de tête, il en était ravi. Une première mission était réussie, ils avaient réussi à partager quelques heures ensemble, à se comprendre l'espace d'un instant. Ils filèrent rapidement vers la voiture de Julian qui la raccompagna, dans le silence, comme ils avaient passé une bonne partie de l'après-midi. Mais il avait le sentiment de commencer à la cerner. Il aimait ça, il aimait la découvrir, il avait envie de la protéger. Et elle, aussi surprenant que ça pouvait paraître, aimait passer du temps avec lui...
....
Ils arrivèrent devant la maison des Mathis, toujours en silence. Mary soupira longuement en voyant qu'ils étaient arrivés, elle savait qu'elle allait se faire passer un savon aux vus des nombreux appels que la famille lui avaient passés. En plus, sa peau la brulait sérieusement et Julian sentait qu'elle "chauffait" même à sa place de conducteur. Elle resta un moment dans la voiture à se préparer mentalement. Julian ne comprenait pas trop ce qu'elle faisait, mais il y a avait sûrement une raison, alors il attendit quelques instants avant de la sortir de sa méditation...
-Mary, tu devrais rentrer...
Elle tourna la tête vers lui, et il vit qu'elle était beaucoup plus angoissée que ce qu'elle avait laissé paraitre, il se demandait même s'il avait eu une bonne idée en quittant les vignes. Elle se contenta de secouer positivement la tête, et ouvrit la portière. Il rattrapa sa main avant qu'elle enclenche la poignée. Tentant de la rassurer au maximum, il fit en sorte de couvrir son regard couleur émeraude d'une tendresse sans pareil. Il glissa sa main sur la joue de la jeune fille, délicatement. Et la caressa, doucement...Mary ne put s'empêcher de sourire, et d'apprécier. Ne comprenant pas, mais profitant du moment présent, elle laissa échapper un soupir reflétant tristesse, angoisse et douceur.
-Ça va aller, ok ?
-Ouai ...
-Au pire, tu m'appelles, je te cherche tel un chevalier servant et on campe dans les vignes.
-Ok...Je te prends au mot, fais attention.
-C'est pas un soucis. Et puis c'était tranquille, cette après-midi.
-Oui c'était tranquille.
Il finit par enlever sa paume de la joue chaude de Mary et elle descendit de la voiture en lui faisant un signe de la main. C'était parti pour la confrontation, peut-être qu'elle s'imaginait le pire ? Elle monta les marches du porche et rentra dans la maison, ouverte. Son oncle, sa tante et Mina l'attendaient. Elle marcha en essayant de faire le moins de bruit dans le salon mais ils étaient là, tous les trois devant la télé. Anna et Christophe côte à côte, Mina sur un autre canapé, qui ne la regarda même pas.
DOULEUR.
L'indifférence de Mina était une des choses qu'elle redoutait le plus... Mais elle n'eût pas le temps d'examiner sa cousine que Christophe se leva et se posa devant elle, avec son air de chef de famille ridicule. Après tout, il faisait ce qu'il voulait, il était chez lui. Elle essaya de soutenir son regard, se répétant dans sa tête qu'elle n'avait rien fait de mal...
-T'es au courant qu'il est plus de 21h !
-Oui, désolée.
Techniquement, elle n'en avait rien à faire de sa remontrance, ce n'était pas son père, il n'avait aucune autorité sur elle.
-On t'a appelé, on s'est inquiété ! Ou t'étais, et avec qui ?
-Dans les vignes, à Châtenois, avec Julian, le frère à Nicolas, on s'est baladé.
-T'aurais au moins pu répondre au téléphone tu crois pas ? On a mangé sans toi du coup, on allait quand même pas t'attendre ! Sérieusement Mary c'est la dernière fois que tu fais ça, c'est clair ?
-Oui.
-Mais Papa ! -Mina se leva du canapé comme une furie - Tu vois pas qu'elle en à rien faire ? Elle ne t'écoute même pas ! Regarde la, elle reste juste là pour être polie, elle rentre une heure et demi après le dîner et elle est même pas punie ! Vive l'égalité !
Mina avait explosé. Elle en voulait à son père, de ne pas punir Mary, et apparemment elle en voulait à sa cousine aussi. Mary sentait qu'elle n'en avait pas fini et elle voyait dans ses yeux noisettes une colère qui lui était inconnue. Si sa Mimi voulait la faire réagir, elle réussissait. C'était la seule personne, actuellement, qui avait le pouvoir de la blesser. Sa cousine s'approcha de la jeune brune et la regarda droit dans les yeux, la fixant méchamment. Mary fit même un pas en arrière, sous le choc des éclairs que lançait Mina.
-Forcément, mademoiselle est "dépressive" alors on la punit pas. Et moi ?! Je suis privée de sortie pour quelques pauvres bouteilles d'alcools et elle rien, alors qu'on s'est fait du soucis toute la soirée ! Moi qui pensait que t'étais là pour avoir une structure familiale, tu veux juste être chouchoutée en fait, avoue !
-Non Mimi je...
Sa cousine avait réussi, Mary perdait tous ces moyens, au bord des larmes, sentant son cœur qui se pressait contre sa cage thoracique, sa respiration qui s'accélérait sous le poids de l'angoisse. Et le pire dans cette confrontation ? Mina continuait.
-Oui c'est ça, pleure, fais toi passer pour la victime ! Mais t'inquiète pas, Papa et Maman seront là pour te consoler, toi ! La petite Mary qu'on accueille les bras ouverts et qui fait sa princesse !
-Pourquoi tu-
-Pourquoi ? Pourquoi ??? Te fous pas de moi, c'est à se demander si ton but en venant ici était de détruire une famille.
-Quoi...
-Mina ça suffit ! Dans ta chambre ! -le père de Mina tenta de s'interposer -
-Bah voyons, je dis la vérité et je suis cloitrée, Merci !
-File ! Maintenant... - Anna eut le dernier mot -
-Méfiez-vous, chers parents, Mary est une très bonne comédienne !
Elle s'exécuta, bien que très renfrognée. Mary était plantée en plein milieu du salon, dénuée de force... Anna s'apprêta à la prendre dans ses bras pour la réconforter alors que Christophe s'était à nouveau assis sur le sofa, en soupirant. Mais Mary fit signe qu'elle ne voulait pas, ce n'était pas le moment.
-Mange au moins un bout Mary...
-Non, merci, j'ai pas faim. - réussir à articuler était une véritable épreuve - Je peux monter ? Dans ma chambre.
-Oui bien sur. Vas-y.
Anna se tourna vers son mari en lui lançant un regard désapprobateur. La jeune fille était déjà fragile, pour elle, ça ne servait à rien de lui faire la leçon. Quant à Mary, elle monta les marches lentement, comme anesthésiée, sous le choc de l'esclandre de sa cousine. Elle entra dans sa chambre toujours dans le même état et se précipita sur sa guitare. Elle ne sentait même plus sa peau la brûler. Trop blessée et attristée par l'attitude de Mina. Elle commença à jouer, mais elle bloquait. Elle se mit à son bureau, et essaya alors d'écrire, mais toutes ces ébauches de chansons ne ressemblaient à rien alors elle jetait les feuilles, tour à tour dans la poubelle, jusqu'à s'écrouler sur la table. De fatigue, de douleur, et de peine.
Elle resta quelques minutes dans cette position, quand quelqu'un toqua à la porte. Elle savait qui c'était, Mina avait cette manière de toquer, trois fois, délicatement. Elle s'y précipita et vit sa cousine adorée les yeux rougis. Elle avait pleuré, et Mina se jeta dans les bras de sa sœur de cœur. Arrachant un cri de douleur à Mary. Ses bras la faisaient toujours souffrir.
-Je suis désolée, vraiment désolée Mary, pour ce que j'ai dis, je le pensais pas.
-Moi aussi Mina. Je sais que ce n'est pas facile de me voir débarquer dans ta vie comme ça. Tu es fille unique, c'est normal que tu sois troublée.
-Alors tu m'en veux pas? - elle défit son étreinte et regarda Mary dans les yeux – Sûre sûre ?
-Non, bien sur que non.
Mina allait à nouveau la serrer dans ses bras, mais Mary recula de son plein gré. C'est alors que Mina vit l'importance de ses coups de soleil. Elle fila en bas, et remonta aussitôt avec des pots de yaourt dans les mains sans même que Mary ne puisse savoir ce qu'elle faisait. Cette dernière ne pût s'empêcher d'éclater de rire en la voyant si fière.
-Tu vas pas t'y mettre toi aussi, Mina ! Ça marche vraiment ?
-Mais oui bien sur ! Allez enfile un short et un débardeur que tu peux retourner sur ta poitrine pour te tartiner le ventre.
-T'es sérieuse ?
-Oui très, allez dépêche, tu souffres là, après ça ira mieux !
-Qu'est-ce que vous me faites pas faire sérieusement...
Elle soupira, plus amusée que blasée, et elle se changea. Sa Mimi lui fit signe de s'allonger sur le lit et commença, en prenant son travail très au sérieux, à badigeonner le corps de Mary. C'était vraiment drôle comme situation, mais Mary était soulagée, elle n'avait plus mal, se sentait comme purifier et hydrater.
-Au fait,c'est qui , "vous"?
-De quoi ?
-Tu as dis , vous me faites faire des trucs... C'est qui l'autre ou les autres ?
-Ah, c'est Julian...
-Qu'est-ce que tu faisais avec lui cette après-midi ?
-Il est venu me chercher.
Un léger sourire se dessina sur son visage, sourire qu'elle réprima tout de suite, elle se demandait vraiment ce qu'il lui prenait de sourire en pensant à lui.
-Il te plait, avoue !
-Quoi, non non pas du tout !!
-Tu mens très mal quand il s'agit de garçon, même au téléphone à l'époque je savais quand tu mentais.
-Non, de toute façon il a une copine, et il est plus âgé. Alors c'est réglé.
-C'est pas le fait d'avoir une copine qui va l'empêcher de draguer, crois-moi ! C'est de famille !
-Pardon ?
-Entre Alice et lui il n'y aucune passion tu sais, ils sont plus des meilleurs amis qui flirtent qu'un couple, et puis bon, Julian est un coureur de jupons.... comme son frère.
-Nico ?
-Oui, on va dire ça.
Elle se referma sur elle-même, mais Mary savait qu'elle avait envie d'en parler, elle la connaissait trop bien.
-Allez raconte...
-J'hésite à arrêter, avec lui.
Mina avait l'air très triste.
-Mais tu l'aimes voyons... Non ?
-Oui mais il drague tout ce qu'il bouge, il me reste fidèle, je le sais, il me le jure. Mais comme après les cours on ne peut plus se voir et bien, je sais qu'il va boire un coup avec des amis à lui et des amies filles aussi, et je me fais pas d'illusion. Il les drague c'est sur...
-Et tu es jalouse ?
-C'est normal, non ?
-Oui je suppose, Mais Mimi, réfléchis-y. Tu tiens à lui alors ne fais rien que tu pourrais regretter, d'accord ? Entre les paroles et les actes il y a un gros écart.
Elle fit signe de la tête que oui, elle y réfléchirait, et se coucha à côté de Mary.
-Alors, ça va mieux ?
-Beaucoup mieux, je dois ressembler à une tartine de fromage blanc, mais ça va mieux !
-Mary ? Je peux dormir ici, ce soir ? S'il te plait.
-Oui, bien sur. Mais c'est à tes risques et périls, si demain tu te retrouves couverte de yaourt.
-Je prends le risque !
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