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6. Le fond des eaux


Je ne dormis que quelques heures. La médiatrice des Nations Terrestres Unifiées revenait dans mes rêves comme un monstre. Les longs poils kératiniens sur son crâne s'épaississaient et se faisaient nuée de serpents sifflants. Sa peau que la graisse sous-jacente rendait jaunâtre se solidifiait en marbre froid, ou bien les veines que l'on apercevait par transparence surgissaient de ses bras comme mille lianes déchaînées.

Toujours, leurs paroles revenaient, comme s'ils ne vivaient que pour parler, le plus vite possible, et pour se répéter sans cesse entre eux comme le faisaient les singes dans les derniers arpents de l'Amazonie.

Factuellement, ils avaient bien plus en commun avec ces singes sauvages qu'avec les mammifères marins.

Sans cérémonie, nous rejoignîmes le lieu de plongée par bateau, à quelques kilomètres de la côte. On apercevait, de là, les tours de leur ville. Les diplomates étaient sortis malgré la bruine. Ils me regardèrent enfiler mon harnais, fixer le résonateur sur ma tête et le projecteur sur mon torse. Je collais un masque sur mon visage, relié à la caisse de branchies artificielles sur mon dos. Elles permettaient de respirer quasiment indéfiniment sous l'eau, contrairement aux dix minutes d'apnée habituelles des omaq. J'agitai mes mains palmées avec impatience, et plongeai dans l'eau.

Je testai le modulateur. D'abord un clic. L'écho m'informa à l'oreille que les membres du groupe Nê étaient tout près.

J'avançai dans leur direction et entendis les trois syllabes.

Ga-ba-nê.

Ga-ba-nê.

C'était une mise au point. Je répondis alors. Le modulateur envoya dans l'eau les sifflements de mes trois syllabes.

Par-ti-lan.

Par-ti-lan.

Par-ti-lan.

Nous nous étions reconnus, un processus qui n'avait pas changé depuis que Klaus Bergen avait déchiffré leur langage. La masse de l'orque se découpa lentement dans la lumière de mon projecteur. C'était Ga-ba-nê, la matriarche du groupe, tacitement désignée parmi tous les orques rassemblés ici.

Pour l'heure, ils étaient en chasse. À quelques autres clics, je devinai la présence d'un banc de poissons dans les eaux.

Son énorme masse me prit dans son courant.

« Viens, nage, dit-elle en quelques syllabes.

Un petit essaya de se faufiler jusqu'à moi, mais ses parents le reprirent aussitôt. Il babillait des syllabes que mon résonateur ne pouvait traduire. Un parler local qui n'entrait pas dans le cadre du langage de Bergen.

— Ga-ba-nê, dis-je. Je suis là pour l'accord.

— Quel est ta parole aujourd'hui ?

— Les secrets de l'océan appartiennent aux nageants.

Un proverbe que se répétaient longtemps les dauphins du groupe Ya, avec qui j'avais passé un certain temps à Nova.

Contrairement aux humains avec qui j'avais discuté des termes, le groupe Nê ne semblait ni intéressé ni concerné par l'accord. Je ne m'en rendais pleinement compte que maintenant. Je retrouvais avec les seigneurs des océans le calme que les humains m'avaient forcé à quitter.

— L'accord dit que vous serez libres de rejoindre Nova, ajoutai-je pour lui rappeler.

— Pourquoi ?

— C'est ce que veulent les humains.

— Sais-tu pourquoi nous sommes ici ?

— Je souhaiterais le savoir.

Elle fit un mouvement de queue qui m'indiquait de la suivre. Deux orques se joignirent à nous, de jeunes mâles silencieux.

— Oui, tu dois voir.

— Quoi donc ?

— Au fond.

Elle se lança alors dans un discours plus long, au fur et à mesure de notre descente.

— Certains ne te veulent pas là.

— Qui ?

— Ils sont eux à l'extérieur, et d'autres à l'intérieur.

Oui, songeai-je. Les tiliens. Voilà pourquoi j'étais ici. Mais je ne comprenais toujours pas le rapport entre ce rassemblement inhabituel et le déclenchement d'une guerre.

— Ils sont très peu de comprendre. D'un lointain ailleurs et veulent d'un monde.

Mais quel pouvoir pouvait bien avoir la faction des tiliens ? Avaient-ils vraiment utilisé l'humanité comme un producteur de CO2, comme le pensait Jamela, et s'apprêtaient-ils réellement à la balayer d'un revers de la main ? Si tel était le cas, que pouvions-nous faire face à un envahisseur qui avait peaufiné ses plans durant des siècles ?

— Est-ce le début de la guerre ? Demandai-je.

J'avais traduit le vocable de « guerre » comme je le pouvais, suggérant un affrontement entre deux parties.

— Tu ne sais pas ce qu'ils font dans l'eau.

C'était à la fois une affirmation et une question.

— Loin au-dessous de nous, ils déplacent les roches, expliqua Gabanê.

Ils construisent, songeai-je. Car les cétacés ne connaissaient pas ce concept – ils avaient culture et apprentissage, mais pas de mains.

À Nova, nous avions commencé, avec leur accord, des expériences de contrôle à distance. Moyennant des puces cérébrales non invasives, cela permettait par exemple aux dauphins de maîtriser le déplacement d'une barge, ou de se faire obéir de robots marins pourvus de membres préhensiles.

Un processus qui accélérerait sans doute le nettoyage des océans. Si jamais le reste du monde acceptait de regarder ce problème en face – car il ne semblait pas capable de le faire sans se culpabiliser ; et les hommes détestent, plus que tout, se sentir coupables.

Gabanê était en train de me dire que les tiliens, ou quel que soit leur vrai nom, avaient investi des profondeurs océaniques et y bâtissaient quelque chose.

— Comment déplacent-ils ? Demandai-je.

Je voulais savoir ce qu'ils construisaient.

— Tu sais.

Non, je ne savais pas. Peut-être que Jamela s'en doutait en m'envoyant ici, mais pour ma part je n'avais jamais vécu que sur Nova. Je n'avais eu des contacts qu'avec nos orques et nos dauphins, qui jamais ne quittaient nos eaux territoriales, en raison des accords légaux entre le continent artificiel et le reste du monde. Et il n'y avait pas de tiliens dans nos eaux, cela au moins était certain.

— Où allons-nous ? Demandai-je.

Le littoral n'étant pas très loin, la plaine continentale s'étendait en contrebas. Deux cent mètres de fond à peine. J'imaginais que les tiliens s'étaient installés dans les profondeurs océaniques.

— Voir quelqu'un.

— Qui ?

Pourquoi semblait-elle aussi réticente à répondre ?

— Um-pec-ten.

— Pourquoi ?

Pec-ten ? Pourquoi m'emmenait-on voir des mollusques ? Ce n'était même pas leur alimentation habituelle.

— Pour comprendre. »

Nous passâmes près d'une espèce de grand bras qui ondulait. Un morceau de bâche de plastique planté dans le sol, quelques dizaines de mètres en contrebas, maintenant recouvert de coquillages. Il se délitait lentement, mais la solidité de sa structure lui laissait encore un bon siècle devant lui.

Je compris où nous étions.


***


Klaus sortit de l'eau, plus fatigué que d'habitude.

Tout au long de sa conversation du jour avec le groupe, il n'avait cessé de penser à Angha. Sar-plo-tel, le patriarche, lui avait demandé où elle se trouvait. Il faisait aisément la différence entre eux deux, rien qu'à leurs manières de nager. Et rien qu'à cela également, il semblait avoir décelé leur affection mutuelle.

Petersen l'attendait sur le pont. Dans sa main pendait un fusil à harpon. En cas de problème majeur, par exemple si Klaus se faisait attaquer, l'arme à air comprimé était leur seule ligne de défense. Une bien piètre sécurité.

« Petersen ?

— Croyez bien, Bergen, j'aurais aimé que cela n'aille pas jusque-là.

Il confirma ses craintes en ôtant la sécurité du fusil et pointant la flèche d'acier dans sa direction. Même en essayant de replonger, Klaus faisait une proie facile.

— Je représente des intérêts mis à mal par votre activité, expliqua brièvement Petersen en finissant sa manipulation.

— De quoi parlez-vous ? Des multinationales ? Qui s'intéresse encore aux derniers mammifères marins ?

— Il ne s'agit pas d'entreprises, dit Petersen, mais d'intérêts supra-nationaux ayant à voir avec les océans, en effet.

La porte de la cabine s'ouvrit brusquement. Angha surgit, une surprise marquée sur son visage.

— Klaus ?

Petersen se tourna vers elle et déclencha le fusil avec flegme. Le harpon la frappa près du cœur, et le choc la jeta contre le bastingage. Klaus vit ses mains glisser sur le métal couvert de givre, et elle tomba dans l'eau glacée.

— Je ne suis pas habilité à laisser des témoins. »

Le scientifique essaya de se jeter sur lui, mais il glissa sur le pont, et Petersen le renvoya au sol avec un coup de pied dans les côtes. Il commença à enclencher un deuxième harpon. Du sol, Klaus parvint à bloquer sa cheville pour le faire chuter à son tour. Petersen tomba en avant et se retrouva à l'eau.

La température de celle-ci ne sembla pas le saisir, même pas l'incommoder. Il remit la main sur le fusil, qui flottait et que l'eau n'empêcherait pas de fonctionner. Klaus et lui échangèrent un regard de défi.

Puis une mâchoire puissante se referma sur sa tête et il disparut sous la surface, ne laissant derrière lui qu'une tache rouge, que dispersa une nageoire caudale noire et luisante. La mise à mort avait été l'œuvre d'une jeune orque du groupe, comme pour parfaire son apprentissage.

Son esprit tangua, comme le navire, qu'un silence enveloppait maintenant tel un linceul. Un morceau de glace porté par le courant se cogna contre la coque. Il n'y avait qu'eux trois ; Angha, Petersen et lui – il était maintenant le dernier humain à des centaines de kilomètres à la ronde.

Klaus se traîna jusqu'à l'endroit où l'indienne était tombée par dessus-bord. Seule une infime tache de sang gelé sur le sol confirmait ce qu'il voulait être un cauchemar. Il regarda dans l'eau ; l'océan sombre lui apparut comme un monstre vorace. Si le harpon avait épargné son cœur, elle était déjà morte d'hypothermie.

Sans réfléchir, il remit ses bouteilles et plongea.

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