12 - Midgard
Thor adorait New York. Son gigantisme lui rappelait beaucoup Asgard, qui commençait à lui manquer. Et, de plus, il s'était habitué à venir sur Midgard régulièrement, notamment pour accompagner Jane à ses nombreuses réunions scientifiques. Car sa fiancée avait beau avoir accepté de vivre la majeure partie du temps sur Asgard, elle aimait sa ville, et Thor ne pouvait que la comprendre.
D'ailleurs, les cris enthousiastes qui s'élevaient à son passage lui assuraient qu'on ne l'avait pas oublié, ici. Il songea avec amusement que, à la longue, les New-Yorkais avaient pris l'habitude de surveiller le ciel plus souvent que leurs... météorologues... puisque les chances qu'une quelconque silhouette familière, masquée ou non, costumée ou non, y passe, avaient assez drastiquement augmenté ces dernières années. De façon générale, Midgard s'était transformé en un véritable nid de héros potentiels.
Sauf que qui disait héros disait aussi vilains, et le nombre de ces derniers augmentait proportionnellement. En fait, il y avait de plus en plus d'humains dotés de pouvoirs, tout simplement. Et, à l'échelle de l'univers, cela commençait à attirer les populations esclavagistes, telles que les Kree.
— C'est cool, ça nous fait de la bonne pub... ricana Daisy à ses côtés lorsqu'il l'expliqua ainsi. Après Aida on en avait besoin...
Thor n'avait aucune idée de quoi elle parlait, mais ce n'était pas le cas des autres.
— Daisy... soupira Fitz.
— Désolée... marmotta-t-elle, soudain honteuse.
Un silence gênant s'installa dans l'oreillette de Thor.
— Qu'est-ce que c'était, Aida ? demanda-t-il, conscient de ramener un sujet sensible sur le tapis, mais néanmoins trop curieux pour s'abstenir de poser la question.
Quelqu'un, en arrière-plan, se racla la gorge. Durant quelques secondes, personne n'osa répondre. Puis, finalement, ce fut la scientifique, Simmons qui éleva la voix.
— Aida était... une intelligence artificielle. Pour vous donner une idée, c'était un peu une version bêta d'Ultron. Elle nous a emprisonnés dans un univers numérique, pour pouvoir, à long terme, se synthétiser un corps humain et des émotions.
Thor poussa un long soupir à la mention d'Ultron. Il en gardait le souvenir d'une bataille particulièrement pénible, au milieu d'une ville volante, et de la mort d'un gamin doté de pouvoirs, qui n'avait en rien mérité son sort. C'était aussi cette bataille qui, à long terme, avait causé une scission éprouvante au sein des Avengers. Les choses s'étaient arrangées, ces dernières années, mais apaiser les tensions entre Captain America et Iron Man avait été une histoire de longue haleine, qui avait mobilisé tous les Avengers.
— Vous aviez vraiment besoin de construire un nouveau Ultron, après tout ce qui s'est passé ? grommela le dieu, grincheux.
— Ce n'était pas nous, répondit Daisy, on s'est contentés de réparer le bordel. Comme d'habitude...
La remarque provoqua quelques rires nerveux au sein de l'équipe, qui se dissipèrent très vite lorsque Fitz reprit :
— Ok, vous arrivez près de la côte. Si possible, ralentissez un peu.
Thor s'exécuta avec un petit sourire. Le bord de mer commençait apparaissait désormais clairement entre les immenses buildings, dont un, très familier : une haute tour, marquée d'un simple A près du sommet. Ils ne s'arrêtèrent pas, malgré le pincement au cœur qu'il éprouvait ; la situation ne s'y prêtait pas. Le dieu se promit néanmoins d'y retourner dès que possible. Mais d'abord, il fallait arrêter ces vagues venues du cœur de la terre.
— Génial. Maintenant, il faudrait que vous alliez un peu plus vers le sud.
Le dieu prit un peu de hauteur pour survoler les derniers bâtiments, obliqua vers la gauche.
— Euh, Thor ?
— Là, vous allez vers le nord.
— D'ailleurs, Thor, s'enquit soudain Coulson alors que l'Asgardien changeait de cap, Nick vous a dit qui vous avait envoyé les héliporteurs, durant la bataille de Sokovie ?
— Vous allez sérieusement parler de ça maintenant ? pesta Daisy.
— Non, pourquoi ? fit Thor, ignorant sa compagne de voyage.
Il y eut un instant de silence, avant que des murmures grincheux, indignés, ne retentissent. Le seul qui se permit de rire fut Coulson.
— Ah, ce bon vieux Nick... soupira-t-il, amusé.
— Ce bon vieux Nick nous enlève tout le crédit que nous méritons, grommela une voix féminine inconnue.
— Je sais, May, mais il est incorrigible... Bref. Tout ça pour dire que c'était nous.
Le rire de Coulson résonna dans l'oreille du dieu, qui se prit à sourire. Il avait à peine fréquenté cet homme, et pourtant, il l'aimait bien. Et puis, d'une certaine manière, cela le rassurait. Sa survie voulait dire que Loki n'était pas un meurtrier. Il n'était plus cette version froide et sans cœur de lui-même, qu'il avait été lors de son séjour sur Terre. Il n'était plus cet enfant blessé, rongé par le manque d'amour et la jalousie. Il était redevenu le frère que Thor se souvenait avoir eu.
Bon, il y avait toujours cette part d'ombre et de regrets qui le rongeait. Mais, comme il avait pu le constater, la simple présence d'une certaine femme parvenait à le rendre plus joyeux, à lui redonner le sourire et l'envie de vivre.
— Un merci serait le bienvenu... fit soudain Daisy en lui tapotant le bras.
— Pour ? marmonna Thor, distrait.
Un nouveau soupir collectif échappa à l'ensemble du groupe. L'Asgardien fronça les sourcils, essayant de se remémorer la conversation pour savoir ce qu'il avait manqué.
— Ah, les héliporteurs ? Merci infiniment.
— Génial. Maintenant, est-ce que vous pourriez arrêter de bavarder, et tourner vers l'est ? À gauche, quoi.
Il s'avérait que Thor, au milieu de l'action, n'aimait pas distinguer sa gauche de sa droite. Après quelques fous rires, des plaintes lugubres de la part de Daisy, et une nouvelle volée de soupirs, ils parvinrent finalement au-dessus d'une zone précise de l'océan, où Fitz leur demanda de s'immobiliser.
— Bon. Maintenant que vous êtes là, il faut que vous m'écoutiez. L'idéal serait de créer cette onde à sept mètres de profondeur. Est-ce que vous pouvez le faire ?
Solidement accrochée au dieu, qui se maintenait en vol stationnaire à quelques mètres au-dessus de l'eau, Daisy grimaça ostensiblement.
— Dans l'absolu, oui, mais je vais avoir moins de puissance si je maintiens une bulle d'air au-dessus de moi. Et la plongée, c'est pas mon truc, ajouta-t-elle avec une moue.
Pensif, Thor demeura quelques instants là où il était avant de, lentement, commencer à descendre vers la mer agitée. Il sentit que la jeune femme s'agrippait instinctivement un peu plus fort à lui. Mais, lorsqu'ils furent à quelques mètres seulement au-dessus de la crête des vagues, l'eau commença à se courber, repoussée par l'air que Thor brassait en faisant tournoyer son marteau.
Ils poursuivirent leur descente. Sous leurs pieds, un entonnoir se creusait progressivement, leur permettant d'aller de plus en plus bas, jusqu'à pénétrer dans une bulle venteuse, sous la surface de l'océan. Ils s'arrêtèrent ainsi à sept mètres, où Daisy ferma les yeux, et se concentra intensément.
— Fitz, on y est ! lança-t-elle.
— Paaarfait, répondit celui-ci, sans poser de questions sur comment ils y étaient parvenus. La bande sur ton bras permet de mesurer la puissance que tu libères. Bleu, pas assez, vert, tip top, rouge, trop. Tu es censée tout lâcher en une fois.
— Compris.
Soudain, Thor perçut une étrange variation dans l'air qui les entourait, comme une vibration. Il fronça les sourcils, et réalisa rapidement que la source de cette énergie n'était autre que la jeune femme accrochée à lui. Pour preuve, la petite bande velcro accrochée au-dessus de son coude s'était allumée, et scintillait de bleu. Daisy, elle, se concentrait intensément.
Elle rouvrit les yeux un instant avant que les diodes sur la bande ne virent au vert. Un petit sourire aux lèvres, elle tendit la main, et libéra brutalement une puissante onde de choc, si forte que Thor ne put encaisser le recul. Ils se retrouvèrent brutalement projetés sous la mer, à une demi-douzaine de mètres de profondeur, et la bulle qui les avait protégés explosa autour d'eux.
Soudain trempé de la tête aux pieds, alourdi par son armure, l'Asgardien eut le bon réflexe de ne pas lâcher la poignée de son marteau, ni l'agente qui l'accompagnait, d'ailleurs. D'une torsion de la volonté, il incita son marteau à les tirer hors de l'emprise liquide de l'océan, qui tentait de les garder en son sein. L'eau collait à leur peau, s'infiltrait sous leurs vêtements, menaçait d'envahir leurs voies respiratoires. Instinctivement, Thor – qui n'avait que rarement nagé, dans son existence pourtant millénaire – comprit pourquoi Daisy n'aimait pas l'eau.
Ils fendirent la surface à une vitesse hallucinante, fusèrent haut dans le ciel, avant de s'immobiliser un peu en-dessous d'un nuage.
— Je suis navré... lâcha-t-il à l'intention de la brunette solidement accrochée à sa taille, qui grimaçait. Je ne m'attendais pas au...
La voix inquiète de Coulson l'interrompit brutalement :
— Daisy, ça va ?
— Ça va, répondit-elle, pour l'un comme pour l'autre.
Elle souffla, dégagea une mèche de cheveux humide de son front, et interrogea :
— Fitz, Simmons, c'est bon ?
— D'après les données de nos capteurs, ça devrait aller, fit la scientifique. Vous pouvez rentrer.
Thor ne se le fit pas dire deux fois. Il réorienta leur course vers New York, profitant du vent qui les fouettait pour faire sécher sa cape trempée. Quelques mauvaises expériences – avec Loki, notamment – lui avaient appris qu'une cape humide n'était pas exactement une garantie de précision lorsqu'il s'agissait d'effectuer des virages. Certes, il avait Mjöllnir pour compenser, mais il préférait éviter de démolir un bâtiment juste parce que les pans de sa cape avaient pris l'eau. Ainsi, il prit de la hauteur en parvenant près des côtes, fit deux grands tours de la tour Avengers avec un pincement au cœur nostalgique, et se dirigea à nouveau vers le grand immeuble au sommet duquel son vaisseau avait atterri. Par quel miracle s'était-il posé tout seul, l'Asgardien n'en avait aucune idée, mais il préféra ne pas songer aux conséquences du cas contraire.
Il se posa au sommet du toit, à quelques mètres de l'équipe à moitié complète, lâcha Daisy, et lança :
— Est-ce que vous avez encore besoin de moi ?
Coulson passa une main dans ses cheveux coupés court, hésita un instant, puis finit par secouer la tête.
— Non, ça ira. Dans le pire des cas, où est-ce qu'on peut vous trouver ?
— Chez Stark, en principe, répondit instinctivement Thor, avec une petite pensée pour sa chambre si familière.
Il y eut quelques grimaces au sein de l'équipe, mais personne ne protesta. Daisy se tourna vers lui, comme frappée d'une inspiration subite :
— Vous savez ce qui provoque ces catastrophes naturelles ? C'est pour ça que vous êtes là ?
Thor fronça les sourcils, surpris par la question.
— Ça fait combien de temps qu'elles se produisent ?
— Une dizaine de jours, répondit Fitz, les yeux fichés sur sa tablette.
Il n'eut pas de mal à faire le rapprochement. Dans l'espace, le temps s'écoulait différemment, mais cela devait probablement faire une semaine ou deux qu'ils avaient quitté Asgard... et la tempête qui s'y était déclarée peu auparavant. Ces cataclysmes sur Terre ne devaient être qu'une conséquence supplémentaire du déséquilibre de l'Yggdrasil, l'arbre des mondes. Rien n'allait.
— Non, je n'en ai aucune idée, finit-il par mentir, pensif. Mais je vais voir ce que je peux faire.
Il se dirigea vers son vaisseau, mû par un étrange pressentiment, et récupéra la gemme dorée posée sur le tableau de bord, qui luisait doucement. Au contact de ses doigts, elle se mit à chauffer, et sembla multiplier l'instinct du dieu par mille. Il tourna la tête vers une région précise de New York, fit tourner Mjöllnir.
Phil Coulson, pressentant le départ immédiat du dieu, haussa la voix pour couvrir le vent que Thor provoquait :
— Et votre vaisseau ?
— Gardez-le le temps que je revienne !
Et il décolla.
❆
Bon, j'ai pris un peu de libertés avec les lois de la physique, hein... mais après tout, on est dans un Disney, non ? (c'te excuse pourrie XD)
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