XXXIV : La part d'Albus Dumbledore
Chronologie :
2 mai 1998 : Bataille de Poudlard
26 décembre 2003 : Mariage de Harry et Ginny
20 juin 2004 : Élection de Ron à la tête de la guilde de l'Artisanat magique
17 juillet 2005 : Naissance de James Sirius Potter
04 janvier 2006 : Naissance de Rose Weasley
26 juin 2006 : Naissance d'Albus Severus Potter
16 mai 2008 : Naissance de Lily Luna Potter
28 juin 2008 : Naissance de Hugo Weasley
Décembre 2009 : Harry devient commandant des Aurors
30 juin 2011 : Inauguration du musée de la Magie
22 mars 2014 : Élection d'Adrian Ackerley comme ministre de la Magie
Mars 2016 : Hermione nommée cheffe de département de la Justice magique
Période couverte par le chapitre : 9 au 12 mai 2017
Harry resta un moment immobile, sous le coup de la consternation. Puis, il redescendit le sentier à pas lents pour rejoindre Funestar qui était toujours près de la fontaine.
— Qu'est-ce que vous avez fait ? l'apostropha le chef du département des Mystères.
— Exactement ce qui était prévu, assura Harry.
— Ma procédure est la bonne, j'en suis certain.
— Je sais, la magie m'a accompagné tout le temps et elle a réagi aux incantations. Mais ça n'a pas marché, reconnut Harry.
Funestar laissa passer un moment, semblant réfléchir, pendant que Harry sentait le contrecoup des évènements retomber sur ses épaules comme une chape de plomb. Finalement, le chef des Mystères avança :
— Nous sommes à la veille de la pleine lune. Nous aurions dû attendre le bon jour.
Harry hocha la tête, trop fatigué pour discuter.
— Demain, à la même heure, décréta Funestar. Et ne dites rien à personne de ce qu'il s'est passé ce soir.
Harry acquiesça sans mot dire et laissant le chef des Mystères le faire transplaner dans l'atrium.
*
Le lendemain matin, Harry eut du mal à se lever. Il lui fallut deux cafés et une longue douche pour que ses gestes reprennent leur fluidité habituelle. Il ne fut pas surpris en arrivant à son bureau d'y trouver une note du ministre le priant de venir le voir à sa convenance. Ackerley savait que la veille était la première date possible pour reposer le sceau et il préférait se renseigner auprès du commandant des Aurors plutôt que de s'adresser au chef du département des Mystères. Harry le comprenait très bien.
Il décida de se débarrasser tout de suite de cette corvée, mais Mandy l'informa que son patron était en réunion et qu'il ne serait libre qu'à seize heures.
— Je reviendrai à ce moment-là, promit Harry.
Il accomplit ses tâches de la journée comme un automate, sentant le doute et le découragement devenir de plus en plus intenses, alors que l'heure du second essai approchait. Stanislas lui demanda où en était l'affaire, et Harry répondit brièvement qu'ils en sauraient davantage le soir même. Son adjoint n'insista pas, comprenant qu'il était astreint au secret.
À l'heure dite, Harry alla rejoindre le ministre. Celui-ci haussa les sourcils en remarquant son air sombre. Une fois la porte refermée, il ouvrit un placard et sortit deux verres et une bouteille. Il s'assit près de Harry, et lui proposa du whisky Pur-Feu.
— Funestar ne va pas apprécier, commenta Harry en acceptant.
— Tant pis pour lui, décréta Ackerley. Qu'est-ce qui n'a pas marché hier soir ?
— Moi, avoua Harry après avoir pris une gorgée. Le rituel n'est pas en cause. Je pense que Funestar avait raison en disant que je n'ai pas assez de puissance.
— Ce n'était pas encore la pleine lune, rappela le ministre.
— C'est ce que Funestar a avancé, mais je sais à quoi m'en tenir. Je n'y arriverai pas davantage aujourd'hui qu'hier.
Ackerley resta un moment silencieux avant d'exposer doucement :
— Si cela ne marche pas, on s'arrangera autrement. Soit on réussira à mieux contenir la source de magie, soit on convaincra le gouvernement moldu de décréter la zone interdite et de déplacer le village. Vous n'êtes pas le seul à porter la responsabilité de cet évènement. Nous arriverons à y faire face, d'une manière ou d'une autre.
Harry considéra son vis-à-vis. Malgré leurs désaccords, il y avait des aspects de l'homme qui lui plaisaient bien. Notamment sa capacité à reconnaître les compétences de son entourage, sa souplesse d'esprit, et le fait qu'il assumait son rôle, sans jamais faire porter le chapeau à ses collaborateurs. Son style était différent de celui de son prédécesseur et ses valeurs ne coïncidaient pas toujours avec celles de Harry, mais c'était un bon ministre. Kingsley avait fait un choix judicieux en l'aidant à réaliser son ambition.
— J'y retourne ce soir, répondit finalement Harry. Ensuite, vous reprendrez la main.
Il termina son verre et se leva, ne voyant pas ce qu'ils pourraient se dire de plus. Ackerley le raccompagna à la porte et, avant de l'ouvrir, lui souffla d'un ton convaincu :
— Si cela ne marche pas, ne le prenez pas comme un échec. Il y a dix-neuf ans, c'est d'un Harry Potter dont nous avons eu besoin, et vous avez accompli ce que vous étiez le seul à pouvoir faire. Ne vous reprochez pas de ne pas être Albus Dumbledore.
Harry resta pétrifié pendant que le ministre s'effaçait pour le laisser passer. La solution était évidente, il aurait dû y penser plus tôt.
*
Sitôt revenu à son étage, Harry s'enferma dans une salle d'interrogatoire, l'insonorisa et appela Bill avec son miroir.
— Je vais tenter quelque chose ce soir, lui annonça le Survivant, et j'ai besoin que tu couvres mes arrières.
— Tu peux compter sur moi.
— Je sais, sourit Harry. Tu peux me retrouver à dix heures devant chez moi ?
— J'y serai.
Après avoir prévenu Stanislas, Harry rentra au Square Grimmaurd. Albus et Lily étaient depuis peu revenus de l'école. Ils crièrent de joie en le voyant arriver si tôt, mais il dut leur expliquer qu'il devait repartir tout de suite. Il leur promit qu'il serait de retour pour le dîner, ce qui les rasséréna. Sous la houlette de Missy, ils montèrent dans leur chambre pour faire leurs devoirs.
Harry se rendit dans la bibliothèque qui lui servait de lieu de travail. Il y prit sa cape d'invisibilité, dissimulée derrière des livres en hauteur. Il se dirigea ensuite vers le bureau pour y chercher la carte du Maraudeur qu'il n'avait pas touché depuis plusieurs semaines, s'habituant à l'absence de James. Il fouilla longuement ses tiroirs sans réussir à mettre la main dessus. Certain de l'y avoir déposée, il maudit sa tendre épouse et son désordre perpétuel. Il voulait bien lui prêter ses affaires, mais il trouvait extrêmement agaçant qu'elle ne les replace jamais là où elle les avait prises quand elle n'en avait plus l'usage.
Au bout d'un quart d'heure de recherche, il décida qu'il pouvait s'en passer. Au pire, s'il était repéré dans le château, il présenterait ses excuses au directeur de Poudlard pour son intrusion. Cela faisait dix-huit ans qu'il n'était plus un élève et n'allait ni faire perdre des points à sa maison ni se voir infliger de retenue.
Pour ne pas trop se fatiguer, il choisit de se rendre à Pré-au-Lard par le réseau de Cheminette. Il transforma son visage pour ne pas être reconnu. Bien que ce soit l'heure de pointe, il n'attendit pas trop longtemps avant de pouvoir émerger de la cheminée publique.
Dans une ruelle sombre, il se dissimula sous sa cape et se faufila dans la réserve de Honeydukes. Vingt minutes plus tard, il faisait pivoter doucement la Sorcière borgne, veillant à ne pas donner l'éveil à un éventuel élève maraudant à proximité. Il avait bien choisi le moment de son expédition. C'était l'heure du dîner à Poudlard – les étudiants mangeaient tôt pour avoir le temps de faire leurs devoirs ensuite – et il n'y aurait pas grand monde dans les couloirs.
C'est en toute quiétude qu'il monta au septième étage. Campé devant la tapisserie, sous l'œil curieux des trolls dansants, il entreprit de faire des allers-retours.
— Je cherche à protéger les autres d'un pouvoir incontrôlable, psalmodia-t-il. Je ne veux pas récupérer cette baguette pour mon usage personnel. Je ne m'en servirai que pour sceller un lieu de Grande Magie qui est dangereux pour ceux qui vivent à proximité.
Au bout d'une trentaine de secondes, la porte attendue apparut sur le mur. Harry poussa un soupir de soulagement et entra dans la Salle sur demande. Elle avait bien pris l'aspect de l'espèce de cathédrale qui abritait les objets peuplant les contes et légendes du monde. Il parcourut lentement les allées, recherchant le lutrin sur lequel il avait posé l'artefact qui lui avait permis de vaincre Voldemort. Il le trouva entre une lampe orientale et une flûte sur laquelle étaient gravés des rats.
Harry saisit la baguette et la rangea dans sa poche, à la fois impressionné et fier du pouvoir qui lui était ainsi confié. Il ne pensait pas être capable de l'utiliser avec la sagesse de Dumbledore, mais au moins il ne la convoitait pas pour sa propre gloire comme Grindelwald ou Voldemort l'avaient fait.
Quand il sortit de la pièce, il découvrit avec stupéfaction que James se trouvait dans le couloir. Son fils était planté devant la tapisserie des trolls qu'il contemplait avec intérêt.
— Mais qu'est-ce que tu fais là ? questionna-t-il.
— Papa ? répondit James en se retournant.
Ses yeux semblaient chercher quelque chose, et Harry réalisa qu'il portait toujours sa cape. Il fit glisser sa capuche en arrière pour que sa tête apparaisse. James le regarda avec un mélange de triomphe et de soulagement.
— Je ne m'étais pas trompé ! s'exclama-t-il avec satisfaction.
— Comment savais-tu que j'étais ici ? s'étonna Harry.
Le sourire de son fils disparut, et l'enfant se mit à se tortiller sur place. Avait-il vu la Sorcière borgne bouger ? se demanda Harry. Mais il ne pouvait pas connaître ce passage s'il n'avait pas la...
— Quelqu'un n'aurait pas pris une certaine carte dans mon bureau pendant les vacances de Pâques ? s'enquit Harry d'une voix sévère.
James devint écarlate, et Harry s'apprêta à lui dire deux mots. Puis il songea que ce mode d'acquisition était en accord avec la mentalité de ses créateurs et il décida de passer l'éponge. Par contre, il jugeait son fils trop jeune pour être en possession d'un tel objet. Lui-même n'en avait eu l'usage qu'en troisième année.
— Donne-la-moi, ordonna-t-il.
— Mais Papa ! Elle ne te sert à rien ! protesta James.
Harry dut reconnaître la justesse de l'argument. La carte était faite pour être utilisée dans le château et non pour rassurer des parents qui supportaient mal le départ de leur enfant. Mais James ne devait pas être encouragé à patrouiller clandestinement dans l'école.
— Très bien, mais dès demain, tu la donnes à Victoire, décida-t-il. Je vais lui écrire pour qu'elle me confirme que tu la lui as bien confiée.
— Et l'année prochaine ? demanda James qui ne lâchait jamais le morceau. Elle ne sera plus là...
— Elle ira à Dominique, puis à Freddy, continua Harry. Quand tu seras en quatrième année, tu pourras l'avoir...
— Mais...
— Et l'année d'après, ce sera au tour d'Al...
— Ce n'est pas juste !
—... qui la donnera ensuite à Lily.
James fixa un moment son père, cherchant sans doute des arguments pour le faire changer d'avis, avant de réaliser qu'il n'avait pas le choix.
— Bon, d'accord.
— Parfait. Mais dis donc, comment as-tu réussi à l'activer ? Qui t'a donné le mot de passe ?
James rougit de nouveau, mais serra les lèvres. Harry soupira. Il connaissait son fils. Il préférerait se voir priver de la carte plutôt que de dénoncer un complice. Il réglerait ça plus tard. Le nombre de candidats n'était pas si élevé. Ce ne pouvait être que Ron ou George.
— Je lui dirai deux mots, promit-il. Je vais devoir partir, maintenant.
James, visiblement déconfit, s'avança vers son père pour l'embrasser avant de s'arrêter net et demander :
— Pourquoi es-tu là ? Et comment tu as fait pour disparaître de la carte ? Tu n'étais plus dessus quand je suis arrivé dans le couloir.
— Tu n'as pas besoin de savoir ça. Je te laisse, maintenant. Va vite manger.
— Oh, Papa... fit James implorant.
— Dis donc, James, tu mériterais d'être puni non seulement pour m'avoir pris la carte, mais aussi pour être ici au lieu d'être dans la Grande Salle. Alors, estime-toi heureux de t'en tirer comme ça.
Il ne fallut pas très longtemps au garnement pour comprendre qu'il avait intérêt à faire profil bas.
— Bien, Papa. À bientôt. Embrasse Maman pour moi !
— Entendu. Et j'essaierai de la convaincre de ne pas t'envoyer une beuglante pour t'apprendre à fouiller dans mes affaires.
— Oh, non, tu ne vas pas lui dire !
— Tu sais comment ça marche, mon grand. On ne se cache pas ce genre de choses entre nous. Et tu peux dire à Victoire que Bill et Fleur seront mis au courant du petit cadeau que tu vas lui faire.
James fit une grimace, mais tendit obligeamment la joue quand son père s'avança pour y déposer un baiser, ce qui montrait à quel point il était soulagé de s'en tirer à si bon compte. À moins qu'il n'imagine déjà la manière dont il pourrait convaincre Victoire de lui faire bénéficier des avantages de la carte.
Alors que Harry atteignait la porte, son fils lui lança :
— Dis, Papa, est-ce qu'un jour j'aurai le droit d'avoir ta cape ?
— J'en ai régulièrement besoin, lui opposa Harry. Maintenant, file !
— Oui, Papa, répondit James d'une voix trop sage pour être totalement sincère.
Harry tourna la tête pour sourire sans que son fils ne le voie puis le laissa rejoindre ses camarades.
De retour au Square Grimmaurd, Harry dîna avec sa famille puis embrassa Albus et Lily qui montèrent ensuite les escaliers pour commencer le rituel du coucher.
Il s'octroya une sieste de deux heures, puis indiqua à Ginny qu'il devait ressortir. Il ne lui révéla pas ses intentions, mais il se promit de la mettre au courant pour la carte du Maraudeur qui avait repris du service. Pour l'heure, il avait un rendez-vous avec une colline magique.
*
Il retrouva Bill devant sa porte.
— On va retourner à la source de magie, expliqua Harry. Je vais accomplir le rituel que Funestar a déchiffré sur la fontaine.
Bill hocha la tête, sans paraître surpris. Il avait dû deviner une bonne partie de l'histoire.
— Hier, on a déjà essayé, mais ça n'a pas marché, développa Harry. Je manquais de puissance. Cette nuit, je pense réussir, mais il ne faut pas laisser Funestar approcher de ma baguette. PERSONNE ne doit y toucher, tu comprends ? Stupéfixe-le s'il le faut. C'est essentiel.
— D'accord, personne ne touche à ta baguette, répéta Bill sans ciller. Stupéfixer l'autre abruti ne me pose aucun problème. S'il fait un geste dans ta direction, il le regrettera.
— Parfait. Allons-y. Tu peux me faire transplaner ?
Quand les deux hommes arrivèrent près de la fontaine, Harry appela par miroir Funestar, qui devait l'attendre dans l'atrium, pour l'informer qu'il était sur place.
Le chercheur arriva immédiatement en aboyant :
— Je vous ai dit de ne pas transplaner vous-même ! Mais qu'est-ce qu'il fait là ? ajouta-t-il en découvrant Bill.
— J'ai besoin de lui, fit brièvement Harry. C'est l'heure, on n'a pas le temps de discuter.
— Mais...
— Ça suffit ! coupa Harry en prenant son ton de commandant. Je dois commencer le rituel, ne me déconcentrez pas.
Le disque nacré avait déjà émergé derrière les arbres. Harry se plaça sur la pierre de départ et prit plusieurs inspirations profondes pour se calmer. Il savait qu'il n'avait pas à s'occuper de Funestar. Bill était là.
Quand il se sentit prêt, il sortit lentement la baguette de l'Aîné de sa poche et la leva devant lui. Puis il commença. C'était les mêmes paroles que la veille, les mêmes pas, les mêmes changements de direction. Pourtant, tout était différent. La nuit précédente, il avait dansé. Là, il avait l'impression de voler. Il oublia les balises qui devaient le guider, se laissant simplement porter par la Magie.
Quand ce fut le moment, il le sentit. Son pouvoir avait peu à peu enflé, et toute la colline était entrée en résonance, le sol ondulant sous ses pieds. Il était arrivé au bout de son chemin de mots et n'avait plus qu'à poser le point final. Il lança le dernier vocable, celui qui ne faisait qu'une seule syllabe, mais qui contenait tout. Le son claqua à ses oreilles, comme qu'il ne l'avait jamais entendu, et il sut que c'était ainsi qu'il devait être prononcé.
La baguette de l'Aîné se mit à vibrer avec violence, mais Harry ne la lâcha pas. Fort de son expérience de la veille, il s'y était attendu et la tenait fermement. Il était son maître, et l'artefact se soumit. Un pouvoir phénoménal alla à la rencontre de la magie primitive du lieu et s'y arc-bouta.
Pendant une seconde, les deux forces restèrent en équilibre. Le temps sembla suspendu, puis la puissance de Harry prit le dessus, contraignant l'autre à céder du terrain. Enfin, il y eut comme un roulement de tonnerre, et la terre tressaillit quand le sceau s'apposa.
Harry sentait la magie l'emplir tout entier. Il en avait des picotements dans les doigts et avait l'impression que ses cheveux se dressaient sur sa tête, alors qu'une énergie extraordinaire l'enveloppait. Il était à ce moment-là le sorcier le plus puissant de sa génération, invincible, le maître absolu. Personne ne pouvait lui imposer sa loi, c'est lui qui tenait le destin des autres entre ses mains.
Puis il se reprit. Cette ivresse n'était pas saine. Il se demanda comment Dumbledore avait réussi à rester aussi humble alors qu'il avait la possibilité de faire tant de choses. Il repensa à l'extraordinaire autodérision dont était capable ce grand sorcier et l'admira encore davantage.
Il n'était pas Albus Dumbledore, réalisa-t-il. Dix-neuf ans auparavant, il avait fait le bon choix en refusant de garder cette baguette pour lui. Il inspira profondément pour reprendre ses esprits. Peu à peu, la tension le quitta, et son corps se mit à trembler alors que la magie refluait.
Il se sentit faiblir et se laissa tomber à genoux. Il entendit des pas précipités, puis la voix de Bill retentit à ses oreilles :
— Ça va ?
— Je crois, répondit Harry avec difficulté. Je crois.
Il regarda autour de lui pour évaluer la situation. Ils se trouvaient tout en haut de la colline, à l'endroit où s'ouvrait auparavant la faille. Il posa sa main sur le sol et sentit une légère vibration. La magie bouillonnait sous le sceau.
— C'est bon, tu as réussi, lui dit doucement Bill. Tu peux te lever ? Je t'emmène ?
Ils entendirent d'autres pas alors que Funestar déboulait à son tour, essoufflé par la montée. Harry s'accrocha au bras de son beau-frère pour se remettre debout.
— Comment avez-vous fait ? demanda le Langue-de-plomb.
Après avoir vérifié que Harry pouvait tenir sur ses jambes, Bill se décala pour se placer devant Harry.
— C'était le même rituel, raisonna Funestar en continuant à s'avancer vers eux. C'est vous qui avez changé. Vous étiez plus puissant. Très puissant. Vous...
Son regard se focalisa sur la baguette que le Survivant avait toujours à la main.
— C'est la baguette des frères Peverell ? demanda-t-il. La baguette de l'Aîné, aussi dite celle de Sureau ?
— Peu importe comment j'ai fait, dit Harry d'une voix fatiguée.
— Puis-je la prendre un instant ? poursuivit Funestar comme hypnotisé par l'artefact.
— Non.
— Vous ne connaissez pas sa valeur, argumenta Funestar d'un ton passionné.
Bill leva sa propre baguette.
— Il a dit non, répéta-t-il fermement. Si vous faites un geste, je vous stupéfixe.
Chose que Harry n'aurait jamais cru possible, la voix du désagréable chef du département des Mystères se fit plaintive :
— Je vous en supplie, implora-t-il. Je veux seulement la toucher.
Bill revint vers Harry, lui prit le bras et transplana en escorte. Ils atterrirent juste devant la maison du Square Grimmaurd. Le Survivant ouvrit la porte et entra précipitamment chez lui, suivi de son beau-frère. Même s'il était impossible que Funestar les ait tracés, Harry se sentait soulagé de savoir qu'il était désormais sous la protection du Secret.
À l'abri dans le vestibule, Harry rangea la baguette dans sa poche, pressé d'échapper à son contact.
Bill le regarda faire en silence avant de remarquer :
— On ne s'embête pas avec toi.
— Merci pour ton aide, répondit Harry.
— Voir ce connard perdre sa superbe valait le déplacement, assura Bill. Tu m'offres un verre ?
— J'aimerais bien, mais ma soirée n'est pas terminée. J'ai une dernière livraison à faire, s'excusa Harry.
— Certaines choses n'attendent pas, reconnut Bill. Ce sera pour une prochaine fois.
— Oui, ce sera ma tournée, lui promit Harry. Dis, ce serait possible que tu m'amènes encore quelque part. Tu as le temps ?
— Bien sûr.
— Chéri, c'est toi ? demanda la voix de Ginny en haut de l'escalier.
— Je ne fais que passer, je serai de retour dans une heure, lui indiqua Harry.
— Tu es avec quelqu'un ? s'enquit Ginny.
— Il est parti, prétendit Harry. À tout à l'heure, mon amour.
Puis il chuchota pour son beau-frère :
— Honeydukes.
Ils ressortirent discrètement pour pouvoir transplaner. Une fois à l'arrière du magasin de bonbons, Bill demanda :
— Et maintenant ?
Harry réfléchit et s'avoua qu'il ne pourrait pas rentrer chez lui sans aide, étant donné que la cheminée publique était fermée durant la nuit.
— Tu peux m'attendre une petite heure ?
— Bien sûr.
Ce qui était bien avec Bill, c'est qu'il ne parlait pas pour ne rien dire quand il était en mission.
Le voyage dans le souterrain tortueux jusqu'à la Sorcière borgne parut interminable à Harry. Il monta avec difficulté les escaliers déserts de Poudlard qui le menèrent au septième étage devant la tapisserie des trolls.
Le sanctuaire pour les objets féeriques était baigné par la lueur de la pleine lune qui entrait par les hautes baies en forme d'ogive. Alors qu'il avançait dans la travée entre les lutrins où étaient déposés les trésors, Harry sentit une paix profonde l'envahir. Sa fatigue s'envola, et il respira à grandes goulées l'air parfumé qui l'entourait. Ce fut l'âme apaisée qu'il ressortit la baguette de l'Aîné de sa cape pour la remettre à sa place. Il contempla les lieux pour en graver l'image dans son esprit, sachant – ou du moins espérant – qu'il n'aurait plus jamais à y revenir. Son regard tomba sur les bottes de Sept lieues. Il caressa une seconde l'envie de les saisir pour rentrer rapidement chez lui, mais abandonna l'idée avec un sourire. Il était venu pour se débarrasser d'un artefact magique, pas pour repartir avec un autre.
Il retraversa silencieusement le château pour rejoindre Bill qui l'attendait.
*
Quand le réveil sonna le lendemain matin, il grogna, se tourna puis se rendormit. Il n'émergea que vers deux heures de l'après-midi. Ginny était installée au bureau qu'ils avaient dans leur chambre, travaillant manifestement à un article.
— Tu aurais dû me réveiller ! lui reprocha-t-il une fois qu'il eut réalisé l'heure qu'il était.
— J'ai essayé, mais tu avais l'air tellement épuisé et tu t'étais couché si tard, se justifia-t-elle. J'ai eu Stanislas, il m'a dit qu'il n'y avait rien d'urgent au bureau.
Harry reconnut que le sommeil lui avait fait du bien et que Stanislas pouvait assurer la gestion courante du service sans lui. Il l'appela cependant après avoir pris une douche, s'être rasé et avoir mangé – il mourait de faim.
— J'ai eu une panne d'oreiller, s'excusa-t-il. Je suis là dans une demi-heure.
— Il paraît que tu as fait du bon travail, la nuit dernière, lui répondit son assistant. Apollo est venu m'en informer. Il était très soulagé.
— J'imagine.
— Mateïs est également passé pour m'indiquer que ses mesures confirmaient que tout était redevenu normal. Il m'a confié que son chef était dans une humeur épouvantable et qu'il n'avait pas voulu nous apporter lui-même la nouvelle. Tu as une idée de ce qui se cache derrière ça ?
— Hum, peut-être. Rien de grave. Quoi d'autre ?
— C'est tout. Ah si ! ton beau-frère m'a appelé. Lui et ses collègues ont fait disparaître leur mur anti-magie et sont allés faire un tour au village. Tout y est rentré dans l'ordre. De mon côté, j'ai envoyé Spinnet et Obala vérifier que tous les avertissements pour sorciers et Repousse-Moldu étaient bien en place.
— Excellent.
— Je pense qu'on a la situation en main. Tu peux prendre ta journée, si tu veux, je te la donne, plaisanta Stanislas.
— Tu sais quoi ? C'est exactement ce que je vais faire. Si le ministre me demande, dis-lui de me joindre par miroir.
— D'accord, repose-toi bien.
— Merci Stan. À demain.
*
En arrivant au ministère le jour suivant, Harry alla directement voir Ackerley. Leur cause commune contre Funestar les avait rapprochés, et il estimait que son supérieur avait légitimement le droit d'avoir un récit de première main sur la manière dont le problème avait été résolu. Harry doutait que le chef des Mystères soit venu de bon gré lui en rendre compte.
Mandy lui sourit quand il arriva dans l'antichambre. D'un geste de la main, elle lui fit signe de frapper directement à la porte de son patron, preuve qu'elle avait pour instruction de ne pas le faire attendre. Il la remercia et entra chez le ministre après s'être annoncé.
— Monsieur Potter, je vous en prie, asseyez-vous, l'accueillit chaleureusement celui qu'il était venu voir. Un café ?
Harry accepta en précisant :
— Je ne reste pas longtemps, je ne suis pas encore passé à mon bureau.
— Je suis sensible à cette préséance, sourit aimablement Ackerley.
Quelques secondes plus tard, le commandant des Aurors avait une petite tasse fumante entre les mains, et son interlocuteur prenait place sur le fauteuil d'à côté.
— J'espère que vous avez bien profité de votre journée de repos. Vous l'avez bien méritée à ce qu'on m'a rapporté. Il semble que vous ayez davantage de puissance en vous que vous ne le pensiez avant-hier.
— Disons que, poussé dans mes derniers retranchements, j'ai quelques cordes à mon arc, convint Harry.
— Je n'en suis pas vraiment surpris. Vous êtes une valeur sûre, Monsieur le Survivant. Puis-je vous demander ce qui a fait la différence entre votre première tentative et la seconde ?
Harry réfléchit à l'opportunité de faire savoir à Ackerley quelle était son arme secrète. Mais il ne put se résoudre à lui en parler.
— Mes techniques sont d'autant plus efficaces qu'elles sont mystérieuses, opposa-t-il en souriant pour atténuer son refus.
Le ministre hocha la tête comme si cette fin de non-recevoir ne l'étonnait pas et enchaîna sans insister :
— Avez-vous lu la presse ?
— Jamais, affirma Harry. Question d'hygiène de vie.
— Alors il vous a échappé que notre agitation autour d'un périmètre déclaré comme instable a fini par arriver aux oreilles de La Gazette et que je dois expliquer comment nous avons maîtrisé une éruption de magie inopinée et protégé le Secret, malgré les troubles que cela a causés chez les Moldus.
— On ne peut rien vous reprocher, estima Harry. Nous sommes allés rapidement sur les lieux et avons identifié le problème. Les briseurs de sorts ont permis d'en amortir les effets, le département des Mystères a trouvé comment y mettre fin en moins de dix jours. Vous pouvez affirmer avoir totalement contrôlé la situation.
— Il y a toujours plusieurs manières de rapporter les faits. Je peux mettre en avant l'aptitude du ministère à faire face à une circonstance imprévue et complexe et me féliciter de l'efficacité de ses services. Mais je pourrais aussi ajouter un chapitre au roman national.
— Oh non ! comprit Harry.
— Quelque chose me disait que vous alliez réagir ainsi, soupira Ackerley sans paraître pour autant contrarié.
— C'est indispensable ? grimaça Harry sentant qu'il avait ce jour-là la faveur du ministre et qu'il pouvait espérer être entendu.
— Pas du tout, répondit effectivement Adrian. Mais je ne peux pas non plus cacher le rôle essentiel que vous avez joué sans être certain que c'est ce que vous souhaitez, justifia-t-il.
— Merci pour votre délicatesse, mais je me passerais volontiers de toute publicité, s'empressa de faire savoir le Survivant.
— Je m'en doutais, mon cher monsieur Potter. Cependant, il ne serait pas mauvais que l'on sache que, même si dix-neuf ans se sont écoulés depuis la bataille de Poudlard, vous vous dressez toujours entre nous et un éventuel danger.
— Vous voulez vous servir de moi comme Épouvantard, comprit Harry.
— C'est bien de gagner une guerre, mais réussir à ne pas être contraint de la mener est encore mieux, justifia Ackerley.
— Avez-vous des raisons de penser que ce rappel serait opportun ? s'inquiéta Harry.
— Ce serait seulement à titre préventif, le tranquillisa son interlocuteur.
— Dans ce cas, je maintiens ma position.
— Dois-je comprendre que vous préférez que je mette Mr Funestar à l'honneur ? feignit de s'étonner Ackerley.
— C'est assez déloyal de m'imposer un tel dilemme, estima Harry amusé.
— Ce bonhomme est incroyable, commenta Ackerley d'un ton badin. Autant de suffisance et d'insensibilité en font un spectacle presque comique. Par contre, je lui ai trouvé une petite forme hier. Que diable lui avez-vous fait ?
— Je lui ai montré la part de Dumbledore qui sommeille en moi, se borna à révéler Harry. Je ne m'en fais pas pour lui. Si les journalistes se mettent à l'encenser, il reprendra rapidement du poil de la bête.
— J'espère que vous réalisez la responsabilité que vous prenez, fit sévèrement Ackerley.
— Il faut bien que j'aie mes petites lâchetés, sourit Harry en se levant. Bonne journée, Monsieur le ministre.
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Chat avec J.K. Rowling 30 juillet 2007 :
o Mon sentiment est que [Harry] n'a donné [la carte du Maraudeur] à aucun [de ses enfants], mais que James l'a piquée dans le bureau de son père un jour.
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L'idée de cette magie inexplicable et soudaine n'est pas de moi, mais d'un de mes lecteurs que je n'ai pas retrouvé en fouillant mes reviews. Qu'il n'hésite pas à se faire connaître s'il lit ces lignes. En tout cas, je le remercie.
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Voilà, il n'y a plus que l'épilogue à poster. Il viendra vendredi prochain, le 1er septembre 2017, pour être raccord avec la date de la première rentrée d'Albus.
C'est le temps de faire un bilan :
.-.-.-.-.-.-.-.-.
Quelques chiffres sur la saga HP7, 3/4 :
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C'est 764 400 mots, en 4 volumes et 137 chapitres.
La période de publication (si je commence avec les publications sur les autres sites) s'est étagée entre le 27/10/2007 et le 01/09/2017, soit 9 ans, 10 mois, 5 jours.
415 personnages sont nommés, dont 225 inventés et 190 tirés des livres ou de certains produits dérivés (Cartes des Sorciers célèbres, Gazette du Sorcier).
Harry est bien entouré : sa famille étendue de se compose de 48 personnes et il croise 135 connaissances. Pour les enquêtes, j'ai requis 33 Aurors et 89 personnes sont suspectées, interrogées, arrêtées, enlevées, assassinées (certaines s'en tirent mieux que d'autres). J'évoque aussi 10 Mangemorts et 11 victimes de la guerre. Harry n'est pas le seul à se sentir responsable des autres : 44 personnes faisant partie des guildes ou du Ministère modèlent la société sorcière. Enfin, 17 créatures magiques ont fait partie du casting (les auditions ont été un cauchemar, un centaure est resté des heures coincé dans l'ascenseur et une harpie a rayé ma table basse avec ses griffes) et 28 personnages historiques se sont rappelées à notre bon souvenir.
(pour en savoir plus c'est sur hp7troisquart. free. fr)
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