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Oblivion - Rougeturquoise

Un texte de Rougeturquoise, sur le thème d'une fille découvrant l'océan.

Un très joli texte, bravo ^^



   C’est ma famille qui m’a envoyée ici, ils sont persuadés que ça m’aidera. À guérir. Par contre, moi je n’ai pas le droit de savoir de quoi je dois guérir. Si c’est pour me rendre aimable, qu’ils me fassent du gratin de carotte, ce serait plus clair. Peut-être pas plus efficace. En tous cas, passer mon temps entourée de toutes ces vieilles geignardes me donne le tournis, et personne ne viendra me voir.

   Depuis la terrasse, on peut voir le port. Sur le dépliant, il y avait marqué :

l’Océan Indien à portée de regard.


   Publicité mensongère ! Tout ce à quoi on a droit, c’est un panorama très réussi sur la pollution de la zone commerciale. Sur cette terrasse, il y a aussi un distributeur de café. Je n’ai jamais aimé le café, mais il paraît que ça fait vivre plus longtemps. Là où j’en suis, qu’est-ce que ça peut faire ?

   La télévision de la chambre ne s’allume plus, la femme avec l’accent arabe m’a dit que la maintenance passerait bientôt. Elle m’a dit ça il y a un mois. Depuis, je passe mes journées au club cinéma, mais ils repassent en permanence leurs même vieux films mal conservés.

   Il paraît que le « vintage » est à la mode en ce moment, eh bien je ne veux pas de cette mode chez moi ! Mais bon, il n’y a rien d’autre à faire. Hormis le coiffeur, mais une fois qu’on y est allé, ce n’est plus la peine de revenir. Quoique, la jeune coiffeuse a une discussion intéressante, et elle a un vrai avis sur l’actualité. En fait, c’est grâce à elle que je me tiens un peu au courant de ce qu’il se passe dans le monde.

   Et puis il y a les jours de promenade, où les internes ont tout le loisir de se balader dans les rues autour de l’institut. Mais pas plus loin, il paraît qu’il y a déjà eu des disparitions. Il ne faut pas exagérer quand même, je suis capable de choisir mon propre trajet de sortie, je n’ai pas l’intention de m’enfuir. Pour aller où ? L’aéroport est trop loin pour mes jambes affaiblies, et aucun taxi ne voudra me prendre, à cause de ce bracelet beaucoup trop voyant qu’ils m’ont mis sur le bras. J’ai collé du ruban adhésif sur l’étiquette, ça me rendait trop triste.

   Aujourd’hui, c’est jour de promenade. Nous n’avons pas le droit d’aller sur le port, ni d’aller voir l’Océan. Soit-disant à cause de la pollution. Premièrement, si je suis venue ici c’est pour le voir, l’océan, et ensuite, je suis sûre que ça m’aiderait à guérir. Pourquoi eux ils voudraient que je guérisse ? Ils sont bien payés tant que je suis malade !

   Alors je marche, en prenant soin d’emporter mon sac avec moi, et je m’arrête à un belvédère vide. La vue sur le large est exceptionnelle, pas une vague ni un bateau, seulement le bleu profond, celui qu’on voit sur les photos. C’est très beau, je vais rester ici, ça me rappelle pourquoi j’ai choisi cet endroit.

   Je m’assois sur le banc, un peu maladroitement à cause de mon dos, mais mieux quand même que sur les chaises droites de l’institut. Je vais faire des sudokus, j’aime bien ça, c’est reposant. J’ai besoin de me reposer, c’est tout, je me demande comment ils n’ont pas compris.

   Au bout de quelques heures, quand le soleil commence à descendre, je me rends compte que je me suis endormie au belvédère. Il n’y a toujours personne, et je n’ai rempli mon sudoku qu’à moitié. Alors que je me redresse un peu pour le terminer avant de rentrer, je m’aperçois que le niveau de l’eau se met à monter. Il monte très vite.

   En quelques minutes, l’océan arrive à la hauteur du belvédère. Les embruns s’enroulent tout autour de la place, et l’odeur du sel, de la vie là-dessous me donne l’impression de revivre. Je ne sais pas nager, mais j’ai soudainement envie de poser mes pieds juste là, à la surface de l’eau. C’est pour ça que je suis venue.

   Le bruit que font mes chaussures mouillées n’est pas très rassurant, pourtant il y a comme une bonne âme errante qui me souffle de continuer. J’ai l’impression qu’avec ce vent dans mes cheveux, je suis plus vivante que je ne l’ai été depuis longtemps. Peut-être que je suis guérie ? Je m’en fiche, je suis heureuse, c’est tout. Tellement heureuse. Ça fait un moment que je voulais avoir cette liberté, ce n’est pas mon arthrose qui va m’empêcher d’en profiter. Alors j’avance, pas à pas, avec l’impression de marcher sur l’eau.

   Le niveau monte lentement le long de mes chevilles, et je continue à marcher vers le large, l’horizon au bleu enchanteur des plus beaux paysages du monde. Je peux sentir la vie qu’il y a là-dessous, les poissons qui dansent et les algues balayées au gré des courants. Puis, j’arrive au bord du belvédère. Je m’en rends compte au moment où les profondeurs de l’eau m’attirent.

   Il fait de plus en plus sombre autour de moi. Des bancs de petites créatures virevoltantes m’encadrent, certaines émettant même une douce lumière dorée. Il y a de longs calamars qui laissent gracieusement onduler les tentacules derrière eux, d’autres plus petits, rouges, qui font trembler leurs petites ailettes de chaque côté de leur crâne. Je vois défiler sur ma droite la falaise haute, recouverte d’anémones animées par de tous petits poissons oranges, qui se jettent entre les coraux.

   Je n’ai jamais rien vu d’aussi beau, et pourtant j’ai vu bien des choses. La fatigue revient, et ferme lentement mes yeux piqués par les sel. Puis peu à peu, je me laisse tomber dans le grand vide de l’océan, vers les abysses les plus mystérieuses qui soient. Dire vers l’inconnu serait un euphémisme.

Adieu.

*****

   Quand ils ont prévenu mes enfants, ils n’avaient pas retrouvé le corps, seulement le bracelet qui s’était détaché pendant la chute. D’ailleurs, ils n’ont jamais retrouvé mon corps, c’est comme si j’avais été aspirée dans un autre monde.

   Sur ma tombe, le rosier fleurit chaque année, un peu en retard. C’est un beau rosier blanc, comme celui que j’aimais tant sur ma terrasse. Dans le cercueil, ils ont mis le bracelet, comme si c’était moi. À la différence qu’il n’y a pas marqué Centre héliothérapeutique de Calaca – Maison de retraite sur mon front.

   Je serais bien allée les hanter pour leur expliquer mon point de vue sur la chose, mais il paraît que les fantômes ne peuvent rester sur terre que s’ils n’ont pas accompli toutes leurs tâches ou vécu toute leur existence. J’ai fait les deux. Pour moi, il est clair qu’il était l’heure, la Grande Faucheuse m’a rappelée comme elle a pu.

    Alors je suis retournée à l’Océan, pour avoir l’impression d’être encore un peu vivante, une dernière fois. Et je suis partie.

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