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Chapitre 24


   En prenant toutes les précautions possibles, Ren et Zelda arpentaient l'un des nombreux sentiers du territoire turme. L'environnement ne différait pas de celui d'Altoz, il y avait des gisements de gemmes nox à même le sol et la roche, des racines sèches pendaient de la voûte et de rares végétaux poussaient entre les pierres par terre. L'Hylienne, durant leur traversée, n'appréciait pas de n'entendre que l'écho de leurs pas entre les parois. Le silence qui planait sans cesse instaurait une atmosphère presque morbide et inquiétante. Elle observait la Soneau qui connaissait bien les lieux et la menait au Guide sans rien dire. Toutes deux s'arrêteraient bientôt pour dormir car la fatigue se ressentait de plus en plus. Depuis combien de temps marchaient-elles ? Zelda ne savait même pas l'estimer. Sans soleil, elle ne pouvait même pas déterminer s'il faisait jour ou nuit. Des notions inconnues pour Ren.

   Par deux fois durant leur trajet, elles durent s'arrêter et se cacher car des Krassens ne se trouvaient pas loin. Il avait donc fallu patienter jusqu'à ce qu'ils s'éloignent assez pour ne pas percevoir leur présence. De ce fait, le stress et la nervosité de Zelda croissaient de plus en plus au fil de leur avancée. Elle ne se sentait nulle part en sécurité. Et les douleurs dans son ventre n'arrangeaient rien, hélas. Depuis qu'elle avait entamé son voyage pour rejoindre le Guide, la jeune femme avait mal de plus en plus souvent, bien que le seuil de douleur soit en deçà de ce qu'elle avait ressenti face à Omi.

- Nous allons nous arrêter pour que tu puisses dormir, décréta Ren en se dirigeant vers de larges débris de rochers qui appartenaient anciennement à la voûte. Je m'occuperai de veiller sur toi.

- Le trajet a aussi été éprouvant pour toi, souligna la blonde en fronçant les sourcils. Tu devrais te reposer.

   La cheffe souffla du nez puis se laissa tomber sur le coccyx avant de croiser ses bras devant ses jambes repliées.

- Avec les Turmes dans les parages ? Certainement pas. Nous sommes surveillées depuis que nous avons mis les pieds sur leur territoire. Je ne serais même pas étonnée qu'ils viennent nous rendre une petite visite.

  Zelda prit place à ses côtés en dissimulant un bâillement discret derrière sa main. Elle aurait aimé que sa compagne de route dorme aussi afin de récupérer des forces, mais la situation ne le permettait pas pour le moment. Malgré le manque de confort criant de l'endroit, l'Hylienne s'allongea après avoir retiré le crâne de Krassen sur sa tête.

- Remets ça immédiatement, l'intima Ren à travers un regard sévère. S'ils arrivent et qu'ils voient ta chevelure, notre stratagème n'aura servi à rien. Il faudra que tu dormes assise.

   Elle chuchotait pour ne pas que sa voix puisse résonner entre les parois. Zelda se redressa en s'exécutant puis vint coller son dos contre un rocher arrondi. En posant une main sur sa sacoche, elle perçut la viande séchée que lui avait donné Lasya avant de partir. Sans vraiment réfléchir, elle attrapa la cuisse de rat puis la regarda avec appréhension.

- Cette petite Lasya a du goût, sourit Ren en fixant le met. Qui ne s'arracherait pas une cuisse de rat séchée ?

- Moi... souffla la blonde qui éloigna un peu la viande de son visage. Tu en veux ?

   La guerrière haussa les sourcils, surprise qu'on puisse refuser d'en manger. Zelda semblait sérieuse en lui proposant de la prendre à sa place. Ren ne se fit pas prier, attrapa la chair sèche puis la dévora avec avidité.

- Toujours un peu filandreux au début, puis fondant sur la fin, nota-t-elle en passant son doigt entre deux dents pour enlever quelques fibres coincées. Crois-moi, tu rates quelque chose.

   L'étrangère préféra ne rien dire, elle se contenta de fermer les yeux et de se laisser emporter par le sommeil. Avec les douleurs persistantes dans son ventre, ce ne serait pas chose aisée mais il faudrait ne pas y penser. D'ici peu, elle aurait des explications et peut-être même des réponses. Par la même occasion, elle espérait recouvrer une partie de sa mémoire pour savoir si l'enfant en son sein était désiré. Car dans le cas contraire, elle demanderait à avorter. Seule, elle ne pouvait pas se permettre d'élever un enfant qu'elle n'aurait jamais souhaité. Cette simple idée lui assécha la gorge. Quelle malédiction, cette amnésie... D'ici peu de temps, tout reviendrait, elle en avait l'intime conviction. Ce garçon, Link... Où était-il ? Au vu de l'accélération de son rythme cardiaque, il avait été important pour elle. Zelda remarquait l'apparition progressive de ses réactions corporelles quand elle pensait à lui, comme son cœur qui battait plus vite, celle chaleur réconfortante qu'elle ressentait ou bien cette lueur d'espoir au fond de son être.

   Tout à coup, une détresse poignante la foudroya littéralement, la faisant hoqueter de surprise. La jeune femme rouvrit aussitôt les yeux puis se pencha en avant en posant une main sur sa poitrine, juste au-dessus de son cœur. Un sentiment de désespoir, comme jamais elle n'en avait encore jamais ressenti, suscita un vide abyssal en elle, entraînant avec lui une tristesse profonde et une douleur non physique. Son halètement anormal attira l'attention de Ren qui baissa les yeux vers elle et découvrit son visage marqué par la peur.

- Zelda ! s'affola la cheffe qui se pencha vers elle. Zelda, que se passe-t-il ?!

L'Hylienne émit un geignement plaintif et aigu, les larmes se mirent à couler sur ses joues.

- J'ai... J'ai envie... de mourir... gémit-t-elle pendant qu'elle fermait ses yeux avec force.

- Je te demande pardon ?!

   Zelda ne comprenait pas l'origine de ces idées noires et néfastes pour elle-même, pourquoi elles étaient si soudaines. De manière involontaire, elle posa son regard sur son bracelet et la brume, qui brouillait sa raison, se dissipa lorsqu'elle se souvint de la nature de ce bijou. On le lui avait offert car il permettrait à deux individus de connaître les émotions les plus vives de l'autre, voire de transmettre les siennes. Brusquement, ce désespoir qui n'était pas le sien s'évapora et la laissa respirer afin de reprendre son calme. Ren, à ses côtés, la regardait avec incompréhension et se demandait sérieusement si Zelda n'était pas folle.

- Il est vivant... dit Zelda dans un souffle empli d'espoir. Ren, Link est vivant !

- Qui est Link ? demanda-t-elle avec méfiance.

La blonde posa sa main droite sur son anneau de fiançailles.

- Je ne me souviens pas encore de lui... Mais je sais qu'il est mon compagnon.

- Et ça te donne envie de te suicider ? Bon sang, j'espère que la Rivière des Tourments ne t'a pas fait perdre la raison en plus de t'avoir volé ta mémoire...

   À travers le bracelet, elle perçut un sentiment de joie qui lui était étranger : celui de Link. Lui aussi venait de prendre conscience que Zelda vivait toujours et se réjouissait – en plus d'être incroyablement soulagé – d'avoir eu un contact aussi infime avec elle.

- Ce bijou me permet de connaître ses émotions, lui apprit l'Hylienne en le regardant. Je viens enfin de les ressentir !

- Elle est devenue totalement folle, ça y est, pensa la cheffe qui éprouva une certaine peine pour elle.

   Dans son dos, la guerrière entendit des cailloux rouler et s'entrechoquer, ce qui la fit sursauter et se crisper. Ren se tourna d'un coup, s'empara de sa hache puis fit face à un groupe de six Turmes, dont deux femmes, tous armés de lances. Zelda retint son souffle en les voyant, elle vérifia presque immédiatement que le crâne de Krassen se tenait bien sur sa tête puis dévisagea les nouveaux venus. Les Turmes possédaient les mêmes traits physiques que les autres habitants de Delteha, à savoir les cheveux blancs et le visage très pâle. Ceux-ci n'étaient pas aussi musclés que Ren mais leur nombre leur donnait un avantage considérable si un combat devait s'engager. Et la cheffe d'Altoz ne souhaitait pas en arriver là.

- Que faîtes-vous sur notre territoire, Soneaux ? leur lança l'homme le plus âgé du groupe. Vous n'êtes pas les bienvenues ici.

- Nous traversons vos terres en paix, répliqua Ren en se levant. Et nous vivons pacifiquement à Altoz.

   La tension qui venait de s'installer monta d'un cran, notamment quand ils virent le crâne sur la tête de Zelda. Cette guerrière voulait les intimider ? Si elle avait tué un Krassen, elle devait être vraiment redoutable au combat. De plus, ils faisaient face à deux Soneaux. Ce détail provoqua leur méfiance car, d'après les rumeurs, il n'y aurait qu'un seul Soneau qui vivrait à Altoz.

- Quel est le nom de cette femme ? lui demanda un autre guerrier avec une pointe d'animosité. Les Soneaux n'ont pas pour habitude de quitter leur clan.

   Il désignait vraisemblablement Zelda qui se fit plus petite. Elle priait de tout son cœur pour qu'ils ne découvrent pas la supercherie. Ren se mit entre elle et les Turmes puis posa la pointe de sa hache sur le sol en adoptant une allure imposante. Ainsi, elle tentait d'impressionner ses interlocuteurs.

- Les Soneaux n'ont pas non plus pour habitude de parler d'eux à de vulgaires inconnus, répliqua-t-elle froidement. Qui penses-tu être pour mieux connaître les miens que moi ?

   L'homme qui venait de parler tiqua et regarda mauvaisement la jeune cheffe qui ne se laissait pas marcher sur les pieds. Elle vit l'une des femmes du groupe se pencher vers le Turme plus âgé afin de lui murmurer quelque chose à l'oreille. Son expression s'assombrit puis il plissa les yeux après avoir redressé la tête.

- Puisque ta compagne ne daigne répondre, dis-nous au moins comment tu t'appelles.

La Soneau le considéra un instant, se demandant certainement à quoi lui servirait sa réponse.

- Mon nom est Ren. Mon totem est le dragon.

   Ses doigts passèrent sous la peau de bête qui recouvrait le haut de son bras ; elle la remonta ainsi et dévoila le motif du dragon qui luisait d'une couleur verte dans la pénombre.

- Quant à ma compagne de route, elle est métisse, ni ses yeux ni son totem ne peuvent luire. Selon les traditions de mon village natal, vous n'avez pas le droit de connaître son nom.

- Ton village natal ? Que des mensonges perfides... siffla l'homme plus âgé. Le seul village soneau qui appliquait cette coutume n'existe plus !

   Le silence revint quand il eut fini sa phrase, comme s'il méditait sur ses dernières paroles et la précédente réponse de la guerrière. Cette dernière ne bougeait plus, elle attendait une seule réaction de sa part : la peur lorsqu'il aurait compris. Un des autres Turmes vint poser une main sur l'épaule de son camarade puis, d'une voix tremblante, lui dit :

- Alagh, c'est... c'est elle ! Une Soneau qui vient d'Altoz et qui s'appelle Ren, ça ne peut qu'être que la Vipère de Tahan ! Celle qui a décimé son village avant de trahir les siens...

   Les yeux de Zelda s'agrandirent en l'apprenant. Ren, décimer son village puis trahir les Soneaux ? Il délirait, n'est-ce pas ? Ren était une femme juste, bienveillante et très protectrice des villageois d'Altoz. Il demeurait impensable pour l'Hylienne que la guerrière ait pu commettre des actes aussi terribles.

- Oui, c'est bien moi, admit la concernée qui releva sa hache. Je ne suis pas venue sur votre territoire pour me battre, mais si vous entravez ma route, je vous ferai subir le même traitement qu'aux membres de Tahan.

   Les six Turmes reculèrent d'un pas, les sourcils froncés et les lances prêtes à servir en cas de besoin. Ils avaient tous entendu la même histoire, des Éclosions auparavant : une gamine qui aurait ôté la vie à tous les siens pour une raison inconnue. L'unique fait de savoir qu'une enfant était capable d'un tel massacre, cela les refroidit et les mena à croire qu'en tant qu'adulte, elle devait être encore plus dangereuse.

- Vous pouvez y aller, décréta le plus âgé en baissant son arme. Mais ne tardez pas ici si vous ne voulez pas que des incidents graves se déroulent près d'Altoz.

- Je vous conseille de ne pas présager un tel conflit, la prévint Ren avec gravité. Les derniers qui ont attisé mon courroux sont tous morts.

   Son avertissement fut sans appel. Les six Turmes lui jetèrent un dernier regard noir puis s'éloignèrent pour de bon. Ils n'avaient pas eu le temps d'accorder plus d'importance à Zelda puisque Ren avait accaparé toute leur attention. Cette dernière attrapa l'Hylienne sous le bras, la releva de force puis lui ordonna de la suivre. Il ne valait mieux pas rester là, tant pis pour son sommeil. Toutes deux ne seraient en sécurité que chez le Guide. Il habitait une zone neutre où tout combat, toute altercation était prohibée. Dans son dos, Zelda la scrutait avec crainte après les propos de l'homme. Dorénavant, elle voulait savoir. Au village, personne ne lui avait parlé du passé de leur cheffe, ils ne tarissaient pas d'éloges à son sujet. Étaient-ils seulement au courant ? Avant même que la blonde n'ose lui poser de questions, Ren prit la parole sans se retourner :

- La première fois que tu es venue dans ma hutte, je t'ai raconté mon vécu d'ancienne tourmentée.

Elle marqua une pause, puis reprit :

- À ce moment-là, je t'ai menti.

   Un poids oppressa la poitrine de Zelda qui eut peine à respirer convenablement. Elle redoutait d'apprendre ce qu'il s'était vraiment passé. Où avait-elle menti ? Ren n'aurait pas été une tourmentée ? Non, elle semblait être vraiment tombée dans la Rivière des Tourments, enfant.

- Je t'avais dit que pendant mon enfance, j'étais tombée dans cette foutue rivière. C'est vrai, appuya-t-elle en posant sa voix. Ensuite Delun, mon père adoptif, m'a trouvée puis a essayé de me rendre aux miens. Mais quand il est arrivé à Tahan, il n'y avait personne pour le chasser ni même l'accueillir. Car ils étaient déjà tous morts.

    La guerrière serra les poings quand tous ses souvenirs refirent surface. Elle eut du mal à poursuivre son récit bien qu'elle s'y efforça pour Zelda. Elle devait savoir maintenant, Ren ne pouvait plus lui cacher.

- Il est difficile de te réveiller en te souvenant de quelqu'un, en pensant que vous vous entendiez très bien. Puis, bien plus tard, tu te rappelles qu'il ne s'agissait que d'une crevure de la pire espèce, se répéta Ren tout en marchant.

Son regard se perdit loin devant elle.

- Je n'oublierai jamais cet instant précis où je sculptais avec ma mère et mon père, prononça-t-elle avec rancœur. Une femme est entrée dans notre hutte, une « amie » de notre famille. Elle a prétexté qu'en ces temps de famine, mon père lui avait volé une partie des récoltes. Un mensonge pour s'accaparer ses richesses qu'elle convoitait en fait depuis des Éclosions. Et elle l'a tué. Froidement, sous mes yeux...

   Sa voix se brisa. Elle avait beau imposé le respect par sa morphologie imposante, Ren n'en restait pas moins un humain comme les autres, émotive et sensible. Ces souvenirs-là, gravés à jamais dans son cœur, ne cesseraient de la faire souffrir.

- Par la suite, d'autres Soneaux complices sont entrés dans ma hutte pour humilier encore plus mon père. Mon peuple a fait preuve d'une telle barbarie... Ma mère a tenté de protéger son corps inanimé, elle s'est interposée.

Ren s'arrêta d'un coup puis attrapa son bras, juste au-dessus de son tatouage en forme de dragon.

- Et ils l'ont assassinée sans le moindre état d'âme.

   Elle se tourna et fit face à Zelda qui put discerner ses iris luisantes à travers ses yeux humides. Par pudeur et dignité, la cheffe retenait ses larmes devant l'étrangère.

- Je n'ai pas pu contrôler la haine et le désespoir qui m'ont submergée à ce moment-là. Je me souviens d'une vive douleur au niveau de mon totem, des cris de peur et de souffrance, puis plus rien. J'imagine que j'ai dû plonger dans la Rivière des Tourments pour tout oublier et espérer me noyer. Mais cela n'a pas été le cas.

   La Soneau ne pouvait en raconter plus car la mémoire lui faisait défaut, et ce n'était pas dû à l'eau de la rivière. Ce qu'elle avait vécu... était l'origine de son amnésie post-traumatique.

- Quand Delun est arrivé à Tahan pour me ramener, tous étaient morts, plongés dans une brume qui planait encore sur le village. Une brume empoisonnée qui l'aurait tué s'il n'avait pas fui en comprenant le danger.

Zelda en eut des frissons quand elle prit conscience de l'ampleur de ses aveux.

- Inconsciemment, j'ai créé ce brouillard mortel, énonça clairement Ren en regardant sur le côté. Les Soneaux possédant des dons magiques sont de plus en plus rares. Et moi, j'ai éveillé le mien quand mes émotions sont devenues incontrôlables. Le pouvoir que je renferme... pourrait annihiler Altoz si je revenais à perdre le contrôle. Delun m'a appris à garder mon sang-froid et à rester imperturbable, quelle que soit la situation. Mais il se peut qu'un événement gravissime puisse me faire perdre la raison... Je suis humaine, après tout. Maintenant, je dois apprendre à vivre avec cette malédiction. La Vipère de Tahan... Cela fait bien longtemps que je n'avais pas entendu ce surnom.

   Tous ces aveux installèrent un sentiment de malaise entre les deux femmes. Savoir que Ren, lorsqu'elle n'était qu'une enfant, avait tué tous les membres de son village avec un pouvoir destructeur, cela inquiéta encore plus l'Hylienne. Les mots lui manquaient, elle était partagée entre la pitié pour cette Soneau et la peur qu'elle lui provoquait.

- Qui... Qui d'autre est au courant ? demanda maladroitement Zelda qui ne se sentait plus en sécurité.

- Voseth et Omi sont les seuls, ainsi que Delun, de son vivant. Les autres villageois n'en savent rien. J'aimerais donc que tu taises mon secret.

   Zelda riva son regard au sol puis opina après une courte hésitation. Elle se demanda quelles seraient les conséquences si elle trahissait Ren en révélant la vérité. Non, jamais une telle chose n'arriverait. Trahir quelqu'un, ce n'était pas dans ses habitudes, encore moins dans ses valeurs. Ren lui tourna le dos puis reprit leur route en silence, le cœur lourd. Repenser à ces souvenirs-là lui tordait le ventre et la plongeait dans une nostalgie éprouvante. Chaque situation particulièrement compliquée mettant à rude épreuve son sang-froid, comme la mise à mort de Galang, lui rappelait indéniablement cette période sombre de sa vie. Si Ren venait à perdre le contrôle d'elle-même pour une raison quelconque, ses proches seraient voués à périr, tout comme Tahan durant son enfance.

- Tu te souviens quand je t'ai dit que j'ai failli mettre fin à mes jours en tant que tourmentée ?

   Sa question fut pour la moins inattendue. Zelda, qui suivait la jeune cheffe, opina difficilement bien que son interlocutrice ne le vît pas.

- Cette envie a pris le dessus sur tout quand je me suis souvenue de cette traîtresse de femme, ainsi que de la mort de mes parents. Delun m'a véritablement sauvé la vie. Il m'a donné une autre raison de vivre et un combat à mener. Je veux... Je veux offrir une existence meilleure aux habitants d'Altoz.

   Une once d'espoir se fit percevoir à travers sa voix, mêlée à une conviction certaine. Qui, à Delteha, ne rêvait pas d'une vie bien plus simple et moins dangereuse ? Une vie où il n'y aurait plus de famine, plus de conflits, plus d'espaces limités ? Était-ce trop demander ? Zelda éprouva une réelle empathie pour la Soneau. Dans son cœur, elle savait qu'une telle existence serait possible quelque part, dans ce monde où le soleil et la lune existaient, où l'écoulement temps était parfaitement défini. Bientôt... Bientôt, l'Hylienne serait en mesure de s'en souvenir et d'en parler à Ren. Si cela pouvait lui apporter des réponses et lui offrir la paix, elle n'hésiterait pas un instant.

   À cause du poids de la hache dans son dos et de la distance parcourue, les jambes de Zelda peinaient à marcher correctement, la fatigue les engourdissaient de plus en plus. Son souffle devenait sifflant et saccadé, signe manifeste qu'une pause serait la bienvenue. Mais Ren ne pouvait le lui permettre pour le moment. Toutes deux se trouvaient à cheval entre le territoire turme et le territoire soneau. Sans oublier la présence des Krassens dans les environs. Elles avaient dû se cacher une fois de plus pour échapper à leur sens aiguisé du toucher. Et bientôt, elles arrivèrent dans une vaste cavité composée d'une multitude de cristaux et de pierres luminescentes. Le vert, le bleu, le violet se mélangeaient dans un rendu harmonieux et superbe qui émerveilla Zelda. Jamais encore elle n'avait vu pareil décor, elle en avait la certitude. Sur leur droite, un lac souterrain laissait voir d'autres cristaux sous sa surface, ainsi que des poissons de petite taille nageant entre une variété d'algues noires. Il y avait bien plus de lumière dans ce lieu que dans les autres cavités de Delteha, mais pas assez pour éblouir les humains et les bêtes habitués à la pénombre.

   Ren annonça qu'elles traversaient à présent un territoire neutre, personne ne viendrait les embêter. Pour la simple et bonne raison que le Guide résidait non loin de là et qu'il avait interdit toute forme de conflit sur son territoire. La blonde se demanda à quoi il pouvait bien ressembler. Selon les dires d'Omi, il serait très vieux, bien plus vieux qu'elle. Mais était-ce seulement possible ? Peut-être avait-il été remplacé depuis par un homme qui lui ressemblait ? Sur le sentier creusé au fil des passages, les deux voyageuses croisèrent la route d'une famille soneau revenant de leur visite chez le grand sage. Au vu de leur expression grave, ils n'avaient pas obtenu le fruit de leur requête, ni même une compensation.

- Le guide se trouve là-bas, lui indiqua Ren en pointant une direction du doigt.

   Zelda concentra son attention sur l'endroit visé et décela une étrange prison bleutée et cubique, dont les murs ressemblaient de loin à du verre transparent. En son centre, un homme, assis en tailleur et les mains jointes pour former un triangle à base supérieure. Cette vision stupéfia la jeune femme qui s'arrêta. Ce symbole qu'elle voyait sur son voile, il appartenait au clan... sheikah. Aussitôt, tous ses souvenirs liés aux Sheikahs et à Impa lui revinrent à l'esprit. Une partie de son enfance passée à ses côtés, son adolescence ainsi que les derniers mois avant de perdre la mémoire. Pourquoi avait-elle vieilli aussi vite ? Cela n'avait aucun sens.

- Impa... prononça Zelda quand les larmes lui montèrent aux yeux.

   Se souvenir d'elle renforça ses doutes quant à sa véritable famille. Si elle avait passé son enfance ailleurs qu'à Altoz, les affirmations d'Omi devenaient des mensonges.

- Ne reste pas plantée là, grommela Ren en lui agrippant le bras. Je ne veux pas rester ici trop longtemps.

   La blonde se laissa tirer, toujours plongée dans ses pensées. Faras, Pru'ha, Pahya, les chercheurs... Tous lui revinrent à l'esprit. Elle ne remarqua le Guide une fois qu'elle fut complètement devant lui. Ce dernier gardait le visage penché vers le sol, il n'oscilla aucunement face aux deux nouvelles arrivantes. Ren posa un genou à terre afin de le saluer avec humilité puis elle donna un coup de coude à sa compagne de route car elle devait l'imiter. Cependant, Zelda demeurait figée et incapable d'effectuer le moindre mouvement pour le moment.

- Je vous attendais, prêtresse royale d'Hyrule, prononça soudainement le Guide d'une voix rauque.

   Toujours genou à terre, les yeux de Ren s'écarquillèrent légèrement suite à cette appellation. Prêtresse royale d'Hyrule ? Elle ne comprit aucun de ces mots, tout simplement car ils n'étaient plus employés à Delteha depuis des millénaires.

- Vous... parlez de moi ? le questionna Zelda, hébétée.

- Princesse Zelda, descendante de la déesse Hylia, il n'y a que vous que je puisse appeler ainsi. Je connais tout votre parcours, toutes les épreuves que vous avez traversées depuis votre naissance. Je suis le dernier sage de la déesse, Miz'Kyosia, celui choisi pour vous guider dans la voie de votre destinée.

   Le manque de réaction de la princesse entraîna un silence pesant et oppressant. En vérité, il était dû au trouble perturbant qu'elle ressentait à cause des souvenirs vagues qui lui revenaient en tête. Certains restaient flous mais retransmettaient des émotions que Zelda aurait préféré oublier.

- Votre mémoire vous fait toujours défaut, énonça le Sheikah qui releva un peu la tête. Approchez-vous, je vous en prie. Touchez la paroi et votre mal ne sera plus.

   Elle devait... non, elle voulait savoir. Pourquoi était-elle ici ? Quelle avait été sa vie avant tout cela ? Ses proches ? Ses buts ? La raison de sa présence à Delteha ? Le regard de Zelda changea pour devenir plus déterminé. Elle parcourut les quelques mètres la séparant du Guide, sous le regard interloqué de Ren, puis posa sa main sur la paroi bleutée. Aussitôt, une décharge électrique se créa à son contact et la brume présente dans son esprit s'évapora dans la foulée, dévoila toute la vie de Zelda. Absolument tout. Même le visage de Link réapparut enfin et lui arracha de nouvelles larmes, cette fois-ci dues à la joie et au soulagement.

- Je ne pensais pas un jour rendre la mémoire à l'une des descendantes de la déesse. C'est pourtant elle qui est à l'origine des Ruines des Tourments, ainsi que de la rivière du même nom, annonça Miz'Kyosia sans bouger.

    Zelda peina à sortir de sa torpeur et du choc causé par la récupération de sa mémoire. Apprendre, en plus, qu'Hylia elle-même était l'origine de cette amnésie, cela la laissait véritablement sans voix. Le Guide décida de tout lui expliquer afin qu'elle puisse mieux comprendre. Après tout, ce secret lui revenait de droit puisqu'elle portait le sang divin en elle.

- « Lors des temps immémoriaux, la déesse vint en Delteha pleurer la mort d'un être cher. Rongée par le chagrin, elle pleura sans cesse sur le lieu de leur rencontre. Pour la première fois, elle ne put supporter la douleur de la solitude et de la perte. Elle souhaita un instant tout oublier, car elle savait que sa souffrance serait allégée. Mais bien vite, elle abandonna ce vœu égoïste et se maudit d'avoir voulu oublier celui qu'elle aimait de tout son être. Cependant, il était déjà trop tard. Ses larmes, empreintes de magie et portant la trace de son souhait d'oubli, s'écoulèrent dans la rivière au pied du lieu. Aussitôt, l'eau acquit une propriété amnésiante qui permettrait à tous les êtres souffrants d'être allégés du poids de leur peine. La gravité de l'amnésie était proportionnelle à la durée d'exposition à l'eau, mais aussi à la douleur des souvenirs. »

Le Sheikah marqua une pause pour laisser le temps aux deux femmes d'assimiler ses propos.

- Tel a été le récit que j'ai maintes fois conté par le passé. Jusqu'à ce que les habitants de Delteha cessent peu à peu de croire en la déesse Hylia. Le conflit interne qui a touché le clan soneau a bien failli taire son nom pour toujours.

    Un conflit... interne entre Soneaux ? Maintenant qu'elle avait passé une durée indéterminée à Altoz et qu'elle avait appris l'existence des peuples guidant les souterrains, Zelda se sentait perdue. Les Soneaux avaient quitté Hyrule, non ? Thomas était d'ailleurs l'un de leurs descendants revenant sur les terres de leurs ancêtres. Mais après ce que venait de dire Miz'Kyosia, en plus de l'existence de Ren, elle peinait à comprendre. Ils vivaient toujours dans le royaume, mais sous terre... Lors du Miroir du passé, les Soneaux aperçus avec Link... représentaient véritablement les derniers membres de ce clan ? Un clan qui aurait manqué de s'éteindre pour une raison qu'elle ne connaissait pas ?

- Une connexion particulière me lie aux descendantes de la déesse, poursuivit le Guide. J'ai eu connaissance de votre souhait de vaincre définitivement l'esprit du Malin. C'est pourquoi j'ai tenté de vous aider quand vous êtes arrivés devant la porte du temple de Firone. Hélas, je me suis ravisé presque immédiatement car j'ai eu peur que vous réitériez les erreurs de votre ancêtre, la princesse ayant combattu Ganon, dix mille ans avant vous. J'ai essayé de vous effacer une première fois la mémoire afin que vous oubliiez le message que je vous avais adressée. Mais vous avez tout de même trouvé un moyen de parvenir à vos fins.

    Zelda éprouva une gêne pour respirer. Quelles erreurs ? Une de ses ascendantes seraient venues ici ? Dans quel but ?

- Comment ? lui demanda la princesse en reculant d'un pas.

   Le Guide aurait tenté de la dissuader de poursuivre ses desseins ? Mais... pourquoi ?! N'étaient-ils pas légitimes et compréhensibles ? Empêcher Ganon de revenir indéfiniment était tout ce qu'elle désirait.

- Il y a dix mille ans, la princesse de cette époque a, elle aussi, cherché à vaincre le seigneur du Malin afin qu'il ne puisse plus jamais se réincarner, lui apprit Miz'Kyosia sur le même ton. Car en ces lieux reposait le corps de Ganondorf, celui qui a donné naissance à Ganon. Après avoir battu la Calamité, avec l'aide du Héros et de l'enfant gardien, elle avait le pouvoir de mettre un terme définitif à l'existence du Mal en s'attaquant au corps scellé du Mal en personne. Et lors de l'apposition du sceau gardien... celui-ci lui a pris la vie.

   Les mains du Guide bougèrent enfin, elles inversèrent la position du triangle qu'elles formaient jusqu'à ce que sa base devienne inférieure.

- Sokyn a tué la princesse car il a corrompu celui qui ne pouvait être son réceptacle.

    Sokyn, tel était le nom soneau du sceau gardien. Zelda en eut des frissons et des sueurs froides. Son ancêtre avait été tuée ? Impossible... Elle n'aurait jamais eu le temps de mettre au monde une fille et de lui transmettre le sceau divin. Selon les histoires contées par Impa, la princesse ayant combattu Ganon avait presque son âge, dix millénaires plus tôt. Elle n'aurait pas pu se permettre d'enfanter et donc de prendre le risque d'affaiblir son pouvoir.

- Qu'est-ce que... le sceau gardien ? voulut savoir Zelda en se tenant les mains, le regard baissé vers le sol rocheux.

    Le silence qui s'ensuivit fut révélateur de la volonté du Guide de ne pas en dire plus. Il craignait réellement pour la vie de la princesse actuelle. Et au vu de la situation, elle devait survivre à tout prix en s'éloignant de cette magie oscillant entre le Bien et le Mal. Cependant, ne rien dire pourrait être encore plus dangereux, surtout si la prêtresse royale venait à être confrontée malgré tout au sceau gardien sans même en connaître l'origine et la dangerosité. Et Miz'Kyosia savait pertinemment que Zelda le reverrait, car le Héros lui-même en était le réceptacle.

- Sokyn a été créé par les Soneaux au temps où la déesse Hylia vivait encore. Leur peuple habitait les terres d'Hyrule bien avant l'arrivée des premiers Hyliens. Il les partageait avec les Zoras ainsi que les Gorons, lui apprit le Guide pendant que sa tête s'abaissait de nouveau. Les Hyliens sont venus bien plus tard, suivis par les Piafs. Il y a de cela de nombreux millénaires, tous ces peuples vivaient en paix et en harmonie, adorant et vénérant la déesse Hylia. Ce n'est que peu avant l'arrivée des Piafs que Sa Grâce a décidé d'abandonner son immortalité. Dans le but de transmettre le sceau divin et de permettre à sa descendance d'user de la Triforce.

    Ren s'accrochait à ses mots tandis qu'elle trouvait tout cela irréel et insensé. Comme si elle ne comprenait rien, ou plutôt qu'elle ne voulait pas comprendre. Toutes ces révélations de la part du Guide la dépassaient. Zoras, Piafs, Gorons, Hyrule n'avaient aucune représentation à ses yeux. Ni même la Triforce.

- Cependant, elle avait conscience qu'au fil des millénaires, son pouvoir s'affaiblirait peu à peu bien qu'il resterait très puissant. Quand la déesse a compris que les forces de Ganondorf s'accoiseraient indéniablement après chaque réincarnation, elle a décidé de créer un deuxième sceau pour y pallier. C'est ainsi que Sokyn est né avec l'aide des Soneaux, peuple dévoué et serviteur. Un peuple gardien, dans tous les sens du terme.

   Miz'Kyosia poursuivit ses explications toujours plus dures à accepter et à entendre aux yeux de Ren. Après la disparition d'Hylia, Sokyn aurait été cultivé par ses différents réceptacles, lui permettant de gagner en puissance au cours des différents millénaires. Il ne devrait être utilisé que le jour où son pouvoir serait assez grand pour se confronter à celui de Ganondorf. Ainsi, le temps s'écoula, il fut passé manuellement entre les nombreux réceptacles. Hélas... Il ne fut pas toujours entre de bonnes mains. Certains Soneaux lui insufflèrent une part de leur malveillance et de leur perversion, si bien que le sceau gardien devint à la fois bon et néfaste. Jusqu'au jour où il développa une volonté propre ; les Soneaux perdirent son contrôle. À partir de ce moment-là, Sokyn choisit son réceptacle par lui-même. Il désignait un nouveau-né qui le porterait et l'alimenterait en pouvoir jusqu'à sa mort. Le cycle se perpétua durant des générations et des générations. Quelques oracles soneaux parvinrent parfois à prédire quel futur enfant serait le prochain réceptacle.

   Et un jour, trente mille ans avant la naissance de Zelda, fille de Rhoam Bosphoramus Hyrule, Sokyn fut utilisé pour la première fois. Malheureusement, il n'avait pas encore atteint sa maturité et écroua Ganondorf dans la prison du temps, empêchant la prêtresse royale de sceller complètement l'esprit du Malin. Suite à cela, Sokyn exista sous deux formes : une première qui retenait Ganondorf scellé, et une autre apposé sur le bras d'un nouveau réceptacle. Ce lien permit de transmettre son énergie vitale à la première forme et de maintenir le sceau.

- Dix mille ans avant votre naissance, la précédente princesse connaissait l'existence du sceau gardien ainsi que sa fonction, continua le Guide d'une voix monotone. Elle était persuadée qu'en réexploitant Sokyn, elle pourrait vaincre le seigneur du Mal de manière définitive. Seulement... L'enfant gardien qui les accompagnait, le réceptacle de cette époque, a perdu le contrôle du sceau. Et la princesse a péri à cause de cela. Voici ce qui m'a poussé à revenir sur ma décision, prêtresse royale. Je ne pouvais pas vous laisser retrouver Sokyn. Malheureusement, son nouveau réceptacle n'est autre que le Héros d'Hyrule.

    Zelda se pétrifia. Link ? Link était lié à tout cela ? Elle se souvint alors de ce jour où avec lui et Thomas, tous trois visitaient la deuxième partie du temple. Avant de découvrir cette momie ainsi que cette spirale verte qui montait vers la voûte. Le sang de la jeune femme se glaça. Cette chose... était Sokyn ? Le sceau gardien ? Mais alors, cette momie...

- En parvenant à entrer dans Delteha, le Héros et vous avez réveillé Ganondorf, la devança Miz'Kyosia d'une voix grave. Sokyn a vu un réceptacle qui pourrait lui permettre de se régénérer, et donc de ne pas disparaître. Mais le Héros n'était pas digne d'être son porteur. Il a failli y perdre la vie.

- Link est le nouveau réceptacle... souffla Zelda dont les mains tremblaient.

- Durant votre amnésie, le seigneur du Malin a apporté le chaos sur le monde de la surface. Les terres d'Hyrule sont corrompues, presque toute forme de vie a disparu. Seul le plateau du Prélude semble résister grâce aux soldats qui s'y sont réfugiés pour protéger le Héros. Les royaumes limitrophes sont à leur tour attaqués et subiront le même sort qu'Hyrule si personne n'est en mesure d'arrêter Ganondorf.

    Zelda ressentit tout le poids des responsabilités retomber sur ses épaules. Elle devait quitter cet endroit et rejoindre son peuple. Il fallait retrouver Link au plus vite et combattre une fois de plus, côte à côte. Ganondorf, leur ennemi de toujours... Celui qui avait causé indirectement l'assassinat de sa mère, la défunte reine. Et il avait détruit Hyrule, une fois de plus, répandant sa corruption sur ses terres, tuant ses populations. Et tout cela en son absence. Zelda déglutit difficilement car sa gorge s'était nouée. Qu'avait-elle fait ? Par sa faute, plus personne ne pouvait guider les Hyruliens et leur apporter de l'espoir. Peut-être même pensaient-ils qu'elle était morte... Non, Link savait qu'elle vivait toujours. Si quelqu'un avait la possibilité d'annoncer à tous que la descendante d'Hylia vivait toujours, c'était bien lui. Et s'il se battait déjà à l'heure actuelle ? Il menait sans doute un combat difficile face aux forces du Mal, tandis que sa fiancée partageait son existence avec les habitants d'Altoz. Ces pensées furent un nouveau coup de poignard dans le cœur de Zelda. Je dois partir d'ici dès maintenant et retrouver la porte du temple de Firone, pensa-t-elle en posant ses mains sur sa poitrine.

- Vous avez perdu la tête ?! s'écria Ren en se relevant d'un coup.

L'Hylienne sursauta mais le Guide resta parfaitement impassible.

- Je ne comprends rien à ce que vous dites... Vous parlez d'endroits qui n'existent pas, d'une soi-disant descendante de la déesse Hylia et d'un ennemi dont j'ai jamais entendu le nom ! J'ai quitté les miens pour entendre des conneries pareilles ?! Pendant mon absence, des Krassens et une armée dangereuse parcourent notre territoire et menacent mon village ! Ne... Ne me faîtes pas croire que tout ce chemin jusqu'ici a été inutile...

    Sa voix trembla sous l'effet de la colère, ce qui inquiéta davantage Zelda. Après avoir appris l'histoire de son enfance, elle ne voulait pas que la Soneau perde de nouveau le contrôle de ses émotions et active son pouvoir néfaste. Ren attrapa sa hache, la prit à deux mains puis menaça la princesse en s'approchant d'elle à grands pas. Effrayée, Zelda eut un mouvement de recul avant de trébucher sur un cristal qui provoqua sa chute. Elle poussa un geignement plaintif puis vit la lame de l'arme dirigée dans sa direction, prête à frapper.

- Maintenant que tu as recouvert ta mémoire, dis-moi qui tu es ou je mets un terme à ton existence ici même ! 

    Puisque la prêtresse royale savait pertinemment qu'Omi et Lasya n'appartenaient pas à son sang, elle eut la confirmation que sa présence à Altoz n'avait jamais vraiment été acceptée par tous. À commencer par Ren qui s'était toujours méfiée d'elle. Zelda ferma les yeux afin de calmer les battements frénétiques de son cœur. Rester calme permettrait de ne pas envenimer plus la situation.

- Je m'appelle Zelda Hyrule ! s'exclama-t-elle en dépit de son manque d'assurance. Je suis la princesse et la prêtresse royale d'Hyrule, le royaume au-dessus de Delteha.

- Il n'y a rien au-dessus de Delteha ! répliqua sèchement la guerrière. Il n'y a que la voûte !

   Une affliction manifeste tira les traits de son visage tandis qu'elle pinçait ses lèvres. D'une certaine manière, Ren se sentait trahie même si elle s'était attendue au pire quant à l'identité de Zelda.

- La présence de ces êtres faits de chose, la mort de Galang, la venue de cette femme nommée Caï... Tu es liée à tout ça ! Nous n'aurions jamais dû t'accueillir et te soigner... Par ta faute, Altoz encourt de graves dangers ! Alors il n'y qu'une seule solution pour que tout cesse.

- Ren, non ! se défendit Zelda qui commença à paniquer sérieusement. Je n'ai jamais voulu mettre qui que ce soit en danger ! Écoute-moi !

- Non !!

    Au moment où elle s'apprêter à abattre sa hache sur elle, une lumière éblouissante eut lieu et arrêta net Ren dans son mouvement. Des centaines de particules bleutées volèrent autour du Guide qui n'était plus entouré par sa prison vitreuse. Il marcha avec calme vers la Soneau, posa sa main asséchée sur celle qui tenait l'arme puis l'abaissa sans brusquerie.

- Les Soneaux sont dévoués à leur déesse et à leurs descendantes, ils ne peuvent les attaquer directement. Ren, vous êtes incapable de porter la main sur elle. Au plus profond de votre être, vous savez que la princesse Zelda est spéciale. Et vous êtes la seule de votre village à avoir cette impression. Je me trompe ?

    Elle voulut le contredire mais se ravisa puisqu'il avait raison. Ren avait toujours perçu une aura étrange chez Zelda, et personne d'autre à Altoz n'avait ce même sentiment. Elle aurait sans doute dévié son attaque pour ne pas la tuer. Non, c'était une certitude. Jamais elle n'aurait pu la tuer, et cela déstabilisa la guerrière de ne pas se sentir pleinement maîtresse de ses actes.

- La descendante de la déesse Hylia se tient devant vous, reprit Miz'Kyosia en retirant sa main. Votre sang vous oblige à lui venir en aide et à la soutenir dans sa quête future. Vous ne pouvez pas vous y soustraire.

   Ren plissa les yeux après avoir lâché sa hache. Par les esprits, il n'avait pas tort. Inconsciemment, elle aidait Zelda depuis tout ce temps pour une raison qui lui échappait. Mais la situation actuelle la dépassait, toutes ces révélations la plongeaient dans un sentiment de malaise, comme si elle était étrangère à sa propre nature.

- Je... Je ne comprends plus rien, admit-elle en reculant.

Zelda put ainsi souffler de soulagement et calmer sa précédente panique.

- Avant que la prêtresse royale ne tombe dans la Rivière des Tourments, une entité maléfique nommée Ganondorf a été tirée d'un très long sommeil, lui apprit le Guide. Cet homme est l'ennemi éternel d'Hyrule, un royaume surplombant Delteha. Son but est de tuer la descendante d'Hylia afin de régner sur les terres qu'il pense lui revenir de droit. En réalité, il ne veut qu'apporter que destruction et chaos car il est la représentation même du Mal à l'état pur.

   Le Sheikah se tourna vers l'Hylienne qui se relevait avec difficulté. Elle était manifestement troublée et chamboulée par ce qu'elle apprenait depuis qu'elle avait vu le Guide.

- Ganondorf a remporté sa première bataille en installant son règne de peur sur Hyrule. Mais sa victoire n'est pas complète puisque la gardienne du sceau divin demeure introuvable. C'est pourquoi il a envoyé des soldats à sa recherche. Ils parcourent actuellement Delteha et détruisent les tribus qui s'opposent à leur passage. Parmi la vingtaine de villages qui peuplent les souterrains d'Hyrule, six ont déjà été détruits au Nord. Ces guerriers du néant se dirigent vers le Sud, ils atteindront bientôt Altoz.

   Ren se crispa. Elle savait que son village serait le prochain à être attaqué après Eorin. Son chef, Morlag, avait-il déjà pris les armes ? Ou cela ne saurait tarder ? Cette incertitude alimenta la crainte croissante qu'elle ressentait. Il fallait revenir à Altoz, et vite.

- Prêtresse d'Hyrule, vous devez quitter cet endroit et accomplir votre destin. Le Héros ne peut se battre pleinement sans votre soutien.

- Link...

   Elle regarda son bracelet puis ferma les yeux afin de se concentrer sur lui. Aucune émotion particulière ne lui parvenait, son fiancé n'avait pas l'air en danger et cela suffit à la rassurer pour le moment.

- Pour quitter Delteha, vous devrez trouver l'emplacement des souterrains du château, lui indiqua Miz'Kyosia sans lui en dire davantage sur ce qui était arrivé à la forteresse. Telle est l'unique issue qu'il vous ait possible d'emprunter. Cependant, elle est gardée par des soldats du néant. Il vous faudra des alliés au sein même de ces terres.

- Vous parlez... des Soneaux ?

   Il hocha la tête pour le lui confirmer. Il argumenta en disant, notamment, que leur lien ancestral avec la déesse les pousserait à lui prêter main forte. Toutefois, il fallait rester vigilant. Plusieurs millénaires auparavant, certains Soneaux avaient brisé leur dévotion pour Hylia dans le but de se retourner contre elle et soutenir Ganondorf. Ils avaient sans doute eu des descendants qui perpétuaient cette nouvelle allégeance.

- Si vous parvenez à leur montrer qu'un lien invisible les lie à vous, alors vous serez en mesure de vous battre et de partir d'ici.

- Je vois, déclara Zelda en fronçant les sourcils.

   Elle comprit pleinement pourquoi les habitants d'ici le surnommé « le Guide ». En effet, il savait guider chacun dans sa voie, comme il venait de le faire avec elle. Cela la fit sourire pour témoigner sa reconnaissance.

- Je vous remercie pour votre aide, Miz'Kyosia. Je suis admirative devant tout votre savoir...

- En réalité, ce don d'omniscience m'a été offert par la déesse en personne, afin que je puisse guider ses successeuses dans le besoin. Malheureusement, je n'ai pas le droit de tout vous dire. Vous ne pouvez savoir que ce qui touche à votre mission et que je juge nécessaire de vous dévoiler.

    Zelda regarda ensuite Ren qui n'osait plus rien dire. Apprendre le véritable lien de Soneaux avec Hylia, ainsi que la guerre ravageant la surface, la laissait sans voix et désorientée. Aider la descendante de la déesse ? Mais en accomplissant quoi ? Ren se savait que se battre et gérer son village. À moins que sa place... résidait en tant que médiateur. L'Hylienne voulait-elle qu'elle soit la traductrice face aux Soneaux ?

- Ren, puis-je compter sur ton soutien ? lui demanda Zelda avec bien plus d'assurance. Si tu acceptes, cela signifie que tu rejoins une guerre qui surpasse ton imagination et qui te demandera de nombreux sacrifices.

    Avait-elle vraiment Zelda en face ? La cheffe d'Altoz la voyait aussi sérieuse et adulte pour la première fois. Nul doute qu'elle se confrontait à un grand chef. Une prêtresse royale serait donc la cheffe d'une grande tribu ? Ren se le demanda. Mais cette question n'avait guère d'importance en comparaison de l'inquiétude qu'elle éprouvait pour son clan.

- Si nous sortons victorieux de ce conflit... commença-t-elle d'une voix tremblante. Peux-tu me promettre que tu offriras un avenir meilleur aux miens et à tous les habitants de Delteha ?

Sa demande surprit la princesse, bien qu'elle finît par la trouver légitime.

- Je m'y emploierai, tu as ma parole.

- Dans ce cas, ma hache est tienne.

    La guerrière lui tendit sa main pour conclure leur accord. Sans hésiter, Zelda la lui serra et la remercia humblement. Elle allait pouvoir retrouver Link après sa longue absence, et cette unique pensée lui réchauffa le cœur. Tout ce temps, elle avait cherché cette personne qui avait été à ses côtés, et même la Rivières de Tourments n'avait pu la lui faire oublier. N'était-pas la preuve de la force de ses sentiments pour lui ? Rien ne pourrait les effacer.

- Votre Altesse, vous n'êtes pas venue me voir dans le but de récupérer votre mémoire, éluda Miz'Kyosia en reportant son attention sur elle. Vous souhaitiez avoir d'autres réponses.

   Elle haussa les sourcils avant que la réalité ne la rattrape une fois de plus. Les douleurs dans son ventre ainsi que l'enfant en son sein l'avaient menée à trouver le Guide, selon les bons conseils d'Omi. Zelda pouvait enfin le questionner à propos de cette grossesse soi-disant anormale. Elle retint son souffle. Link était le père. Comment lui annoncer... une telle nouvelle ? Dans ce cas, devait-elle avorter ou attendre de retrouver son fiancé ? Ce choix lui revenait de droit puisqu'elle portait l'enfant. Mais l'unique fait que Link soit le père, cela changeait tout, d'une certaine manière.

- Vous n'êtes pas sans savoir que le premier enfant d'une descendante d'Hylia est une fille, et que le pouvoir du sceau lui est transmis peu à peu pendant la grossesse, énonça Miz'Kyosia. Une fois que l'enfant nait, les jours de sa mère sont, hélas, comptés.

    Oui, Zelda en avait conscience... Mettre cette enfant au monde marquerait le début d'une durée déterminée avant sa mort inévitable, le jour où leur fille éveillerait véritablement ses dons. Car il ne peut y avoir deux Zelda capables d'utiliser les pouvoirs divins de leur ancêtre Hylia.

- Vous attendez un fils.

Une fois de plus, Zelda se figea.

- Comment ? murmura-t-elle, stupéfaite.

- Les dames de la famille royale ont déjà eu des fils par le passé, mais jamais en tant que premier enfant. C'est pour cela qu'il n'est pas compatible avec votre corps.

    La jeune femme en eut des vertiges. Quelle était donc cette histoire ? Elle n'avait encore jamais entendu dire que ses ancêtres avaient eu des garçons. Depuis son enfance, on avait toujours répété à Zelda que les reines d'Hyrule n'enfantaient que des filles.

- Le sceau divin tente de se transmettre dans son corps, mais cela est impossible car seules les descendantes sont capables d'hériter et d'user de ce pouvoir. Cependant, en plus de cette première complication, votre propre sceau se régénère depuis la défaite de Ganon. Ces deux facteurs provoquent les douleurs que vous connaissez. Plus le temps s'écoulera, plus elles seront fréquentes et fortes. Il se peut que vous en veniez à perdre connaissance.

Il regretta de devoir continuer à parler malgré l'effarement de la princesse.

- Votre grossesse est un obstacle dans votre quête pour la libération d'Hyrule et des autres royaumes.

- Si je décide de garder cet enfant... Survivra-t-il ?

   Le silence soudain de Miz'Kyosia amplifia sa nouvelle crainte. Pourquoi la vie lui imposait-elle des épreuves si dures ? Zelda avait perdu sa mère, son père, Urbosa, Impa. Alors perdre un nouvel être dont elle aurait accepté l'existence, cela serait trop pour elle.

- Il se peut que votre fils meure si vous utilisiez votre sceau à pleine puissance contre Ganondorf, lui avoua le Guide à contrecœur. Et s'il y survit, il mourra dès l'instant où il ne sera plus rattaché à vous. Vous êtes l'unique personne qui retient et contrôle, même involontairement, les dons qui lui sont accordés. Lorsque votre lien sera rompu, la pleine possession de ses pouvoirs le tuera car il n'en est pas légitime.

   Les larmes montèrent aux yeux de Zelda qui se sentait particulièrement coupable du destin de son fils. Peut-être que, finalement, il valait mieux mettre un terme à son existence le plus tôt possible. La souffrance cesserait, pour l'un comme pour l'autre.

- Il n'y a aucun moyen pour sauver la vie à ce gosse ? intervint Ren qui regagnait enfin son assurance habituelle.

    La blonde leva prestement la tête vers elle, les yeux emplis d'espoir. Elle s'étonna de voir la Soneau s'impliquer dans cette affaire.

- Il en existe peut-être un, mais les chances de réussite sont, pour le moment, très infimes, l'informa le Guide qui revint lentement vers son ancien siège de pierre. Et il n'est pas sans risque pour le futur. En particulier si Ganondorf n'est pas entièrement vaincu.

    Les yeux de Zelda s'agrandirent légèrement quand elle pensa comprendre. Sa main se posa de manière inconsciente sur son ventre. 

- Vous voulez dire... commença-t-elle avec hésitation.

- Oui, sacrifier définitivement le sceau divin, l'exploiter au-delà de vos limites jusqu'à ce qu'il disparaisse de votre corps, et donc de celui de votre enfant. Mais cela vous mènera à un état proche de la mort et tuera probablement votre fils. C'est un risque à prendre en compte.

    Il faudrait donc que la princesse soit très bien protégée à ce moment-là. Mais ce n'était pas tout car Miz'Kyosia ajouta une dernière chose :

- Une fois votre sceau éteint à jamais, Ganondorf devra être définitivement défait. Pour le reste des temps. Sinon, vous condamnerez les générations futures qui n'auront plus le sceau divin pour sceller le Mal...

- Mais comment le vaincre ?! se désespéra Zelda en retirant le crâne de Krassen de sa tête, celui-ci la gênant bien trop dorénavant. Avec Link, nous espérions trouver des réponses en analysant l'intérieur du temple de Firone...

   Sa gorge se noua d'un coup et l'empêcha un instant de poursuivre. Elle n'avait sans doute pas été la première à chercher un moyen de battre Ganondorf une bonne fois pour toutes. S'il y avait eu une solution, elle l'aurait sue et Ganon n'aurait jamais vu le jour, cent ans plus tôt, ni même dix mille ans auparavant.

- Trouvez Altéis, dit le Guide pour rompre le lourd silence. Ainsi, la Clé s'offrira à vous et vous aurez la possibilité de vaincre Ganondorf. Mais si vous ne la découvrez pas à temps, vous ne pourrez avoir recours qu'au sceau divin et à la Lame Purificatrice. 

Et dans ce cas-là, l'enfant ne pourrait être sauvé et le cycle des réincarnations se poursuivrait.

- Où dois-je la chercher ? le questionna une dernière fois Zelda. Je ne peux pas prendre le risque d'accorder trop de temps à une quête dont l'issue n'est pas certaine.

La paroi bleutée et vitreuse commençait déjà à se reformer quand il lui répondit :

- Altéis se cache quelque part dans Hyrule. Si vous avez assez foi en votre cœur, suivez-le, et peut-être vous guidera-t-il sur la bonne voie.

- Mais vous savez où elle se trouve ! Je vous en prie, dites-le-moi...

Elle l'implora du regard en espérant qu'il daigne lui apporter une dernière réponse.

- Je crains que des êtres malintentionnés soient arrivés et nous écoutent, Votre Grâce. Je ne peux prendre le risque de vous en dire plus pour le moment. Car si la Clé venait à tomber entre de mauvaises mains, tout comme Sokyn, elle causerait votre perte. Maintenant, hâtez-vous de partir, vous êtes en danger ici.

    Zelda hésita puisqu'elle voulait avoir toutes les réponses à ses interrogations. Cependant, au vu de l'air grave et inquiet de Ren, cette dernière devait aussi avoir perçu la présence d'êtres indésirables dans la cavité. Elle enfonça de force le crâne de Krassen sur la tête de Zelda puis l'intima de quitter les lieux immédiatement. La guerrière préférait amplement avoir affaire à des Turmes plutôt qu'à ces « soldats du néant ». Ils devaient être les mêmes que les hommes composés de chose. Après la mort tragique de Galang, Ren n'avait certainement pas envie de croiser leur chemin, encore moins de se battre contre eux. Quant à la princesse, alors qu'elle était tirée, elle se retourna pour remercier et saluer le Guide qui l'avait tout de même grandement aidée. Cependant, son sang se glaça quand elle vit une dizaine de Corrompus sortir de leur cachette – des gros blocs de gemmes nox – puis s'élancer silencieusement vers elles.

- Ren ! s'écria Zelda.

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