Oh toi, petit bouton d'or regardant inlassablement le lys blanc tournoyant, rempli de légèreté et de grâce.

Depuis aussi longtemps que tu te souviennes, tu t'es tenue au bord d'une piste de danse.

Depuis aussi longtemps que tu te souviennes, tu t'es tenue sur une piste de danse.

Entraînée dans le tourbillon qu'est ton frère aîné.

Sans particulièrement te demander ce que tu préférerais.

Mais ton frère est si doué.

Comparé à toi.

Alors tu le suis. Sans rien dire.

Tu te dis que ce n'est pas grave. Qu'après tout, toi aussi, tu aimes danser.

Mais tu ne raffoles pas des danses latines, sa spécialité.

Toi, tu aimes la valse.

Tu aimes les grandes robes bouffantes de princesse.

Tu aimes virevolter en tout sens. Tu aimes sentir le tournis dans ta tête lorsque tout s'arrête.

Mais tu ressens de moins en moins ce tournis.

Et tu te dis que ce n'est pas grave.

Au moins, tu peux admirer celui des autres.

Et le sien, oh, le sien.

Sans aucune once de défaut. Sans aucun mouvement inutile.

La perfection lorsqu'elle se balance aux bras de son partenaire.

Un partenaire qui lui va si bien, qui la complète.

Elle est si radieuse que cela fait parfois mal aux yeux.

Tu te demandes souvent si le jury est aussi aveuglé que toi.

Très probablement au vu des notes qu'elle reçoit.

Mais ces notes sont méritées. Parce qu'elle est sublime.

Tu aimerais te dire qu'elle ne brille que sur la piste de danse.

C'est normal. Son partenaire est comme ça.

Mais même en dehors, elle resplendit.

Sa beauté semble quelques fois irréelle.

Et tu te scrutes devant le miroir, à la recherche de tout ce qui ne va pas.

Ta taille. Ton visage. Tes cheveux. Tes yeux. Tes formes.

Rien ne va. Tu le sais. Et tu ne peux pas y faire grand-chose.

Tu es quelqu'un de gentille, d'effacée. Le genre sur lequel on marche sur les pieds.

Mais parfois, des sentiments que tu n'avais jamais connu montent à la surface, venus de tu ne sais pas où.

La jalousie. L'envie. L'exaltation.

Ton cœur bat à mille à l'heure. Tes joues sont rouges. Tes mains sont moites.

Tu aimerais détourner le regard mais tu n'y arrives pas.

Parce qu'encore une fois, tu es hypnotisée par elle.

Autant sa beauté que sa danse.

Et des pensées qui n'étaient pas là avant font leur apparition dans ton esprit.

Tu aimerais qu'elle te tienne dans ses bras comme elle-même est tenue.

Tu aimerais qu'elle te fasse voler comme elle semble voler.

Tu aimerais qu'elle te dirige.

Et tu ne sais plus si tu aimerais être elle ou être avec elle.

Et en-dehors de la piste de danse, tu imagines encore et encore.

Parce que l'imagination est la seule chose que tu as.

Tu imagines, tard le soir, dans ton lit, quand tu n'arrives pas à dormir. Ce que ce serait de se reposer sur sa poitrine et sentir son cœur battre directement dans ton oreille.

Tu imagines ses longs doigts fins tracer le contour de ta mâchoire et remonter pour te tresser les cheveux avec la plus infinie douceur que tu n'as jamais connu.

Tu imagines son corps derrière le tien, guidant tes gestes dans une cuisine semée par le chaos de préparations ratées.

Tu imagines ses mains sur toi. Dans ta main. Sur ta taille. Deux robes dans des couleurs opposées. Tourbillonnant devant les jurés.

Mais c'est tout ce que tu fais. Tu imagines.

Tu n'as l'occasion de te rapprocher réellement d'elle qu'avec l'apparition d'un nouveau prétendant.

Ils sont tous après elle. Tu le vois. Et tu ressens un pincement de jalousie.

Incapable de savoir si tu préférerais être elle ou tous ces garçons qui se jettent à ses pieds comme tu aimerais, en fait, toi aussi le faire.

Il n'est pas très doué. Il vient de débuter. Mais il est enthousiaste. Et son sourire est communicatif.

Tu te dis que si tu étais « normale », tu tomberais sans doute amoureuse de lui et de sa gentillesse.

Mais c'est déjà trop tard. Parce que tu es déjà amoureuse.

Tu es tombée dans le piège sucré de l'amour depuis un moment.

Et tu n'as pas forcément envie de t'en extraire.

Mais il te fait danser comme personne ne l'a jamais fait. Et au fond, ça fait un bien fou.

Tu redécouvres ce que cela fait de danser. Avec un partenaire fait pour toi, de la bonne taille. Qui prend tes désirs et inconforts en compte.

Et tu te retrouves dans une compétition impromptue pour retrouver ton partenaire originel.

Tu ne peux t'empêcher de penser qu'au final, tu te fiches bien de qui danses avec qui. 

Tu veux juste que ton frère te respecte. Tu veux juste qu'il arrête de te regarder avec cet air de déception dès que tu rates un pas qu'il a réalisé trop rapide pour toi.

Mais tu n'oses le dire à haute voix.

Alors le petit nouveau te fera danser jusqu'à ce qu'il comprenne.

Sur cette piste où ton frère t'a pris ta partenaire.

Celle que tu aimerais tant avoir mais que tu sais inaccessible.

Et pour une fois, c'est toi qui es resplendissante. C'est toi que l'on ne peut lâcher du regard. C'est toi qui mènes la danse.

Le champion l'a bien fait comprendre. Ce n'est pas une compétition entre ces deux messieurs. C'est entre toi et elle.

Et cette proximité que tu n'as jamais pu ressentir avec elle fait enfin son apparition.

La sensation est grisante. Tu ne peux t'empêcher de sourire. C'est sans doute la première fois qu'ils te voient tous avec un sourire qui monte aussi haut.

Dans les allers-retours que tu fais sur la piste, tu jettes des coups d'œil partout.

Et tu ne peux t'empêcher de la regarder elle. Comme d'habitude.

Elle te fixe. Comme tous les autres. Elle ne peut détacher son regard de toi. Et c'est la plus belle chose que tu n'aies jamais vu.

Ses beaux et grands yeux noirs ne peuvent se concentrer sur autre chose. Tu es la seule personne qu'elle peut regarder dans toute la salle.

Et tu te dis que pour une fois, une seule fois, elle est toute à toi.

Mais maintenant que tu connais l'effet de son regard sur toi, tu le veux pour toujours. Tu ne veux pas perdre cette chaleur.

Tu aimerais continuer de danser jusqu'à ce que tes pieds en saignent. Si cela signifie que tu es tout ce qu'elle peut regarder.

Mais la danse se termine malheureusement. Tu es essoufflée mais tellement ravie. Parce que tu as réussi à conserver son regard sur toi pendant quelques minutes tout au plus.

Tu n'aurais jamais pensé que cela ferait tellement de bien. Mais c'est le cas. Alors tu chériras cette sensation pour le reste de ta vie.

Mais même alors que tu quittes la piste de danse, épuisée, elle ne te lâche pas des yeux.

Alors tu profites encore un peu.

Tu ne t'attendais cependant pas à ce qu'elle vienne te voir, se plantant juste devant toi pour te dire, le rouge aux joues, à quel point tu as été fabuleuse.

A ce moment-là, tu n'arrives plus à te concentrer sur rien.

Parce que vos yeux se croisent enfin. Et qu'elle te regarde comme tu l'as toujours regardé. Qu'il y a enfin de la reconnaissance dans ses prunelles sombres.

Tu aimerais dire quelque chose. Au moins la remercier. Mais rien ne sort. Tu es bloquée dans la profondeur de son regard qui t'inspectes de la même manière.

Il n'y a plus aucun bruit autour de vous. Les mouvements sur les côtés te semblent si flous. Comme si vous vous étiez isolées dans votre propre petit monde.

Vous levez la main en même temps. Sans crier gare, tu agrippes la sienne. Tu l'entraînes à l'écart.

La chaleur de sa paume dans la tienne te semble si familière même si vous ne vous êtes jamais tenues la main. C'est parfait.

Tu l'embarques dans un petit coin, sous le regard de son ancien partenaire, pas ton frère. Ton frère qui ne comprend rien. Son partenaire aux cheveux de feu qui vous suit des yeux, la compréhension se reflétant dedans.

Elle est encore plus grande en talons. Tu es encore plus impressionnée. Tu sais qu'elle pourrait se dégager si elle le voulait vraiment. Elle a bien plus de force que toi.

Mais elle te suit sagement. Et ton cœur s'en retrouve encore plus rempli de joie.

Vous êtes dans un petit coin sous l'escalier, accroupies. Encore une fois, vous n'arrivez pas à vous lâcher du regard.

Elle te voit enfin. Tu n'as jamais réussi à deviner à quoi elle pouvait penser. Mais cette fois, en te plongeant dans ses iris, tu arrives à savoir qu'ils tremblent comme les tiens l'ont toujours fait.

Vous n'avez pas besoin de parler. Vous appuyez vos front l'un contre l'autre.

Tu as l'impression que ton cœur va éclater de bonheur. Tu sens battre le sien.

Elle te regarde.

Tu es heureuse.

Tu la regardes.

Tu souris comme une dingue.

Tu l'aimes.

Elle t'aime.

-----------------------------------------------

Je devrais vraiment rien planifier parce qu'au final, c'est comme ça que je sors des trucs.

Personne n'avait vu venir un autre "des filles" et surtout pas sur un autre fandom inconnu. Mais il semblerait que ce soit l'une de mes spécialités.

A noter d'ailleurs que je suis la première personne à écrire sur ce ship, j'ai regardé. J'ai donc l'honneur (comme avec mon canaki) de décerner son ship name !!!

A la base, je voulais écrire sur un ship yuri où l'une des deux est resplendissante et l'autre se contente de la regarder, pensant qu'elle ne la mérite pas. Je voulais aussi expérimenter l'écriture à la deuxième personne du singulier et ce trope me semblait parfait pour ce style d'écriture.

J'ai un peu galéré à trouver le ship qu'il me fallait. Je voulais vraiment une ambiance spécifique et tous les ships que je trouvais ou qu'on me proposait quand je demandais ne me convenaient pas. Et puis j'ai repensé à Ballroom e youkoso. J'avais vu l'anime quand c'est sorti, grosse dinguerie d'ailleurs, foncez toustes voir. Et ma médiathèque a les premiers tomes donc je me suis replongée dans le début. Et en y repensant, je me suis rendue compte d'à quel point ces deux jeunes filles étaient parfaites pour ce que je voulais faire. Les voilà donc pour mon petit bonheur.

Pour mon plus grand malheur, il y a un manque cruel de fanfictions dans ce fandom, parce que c'est pas assez connu. Et je rajoute encore une fois ma pierre à l'édifice des fandoms inconnus et ships inconnus.

Playlist écriture : - "Mermaids" Florence and the Machine

Sinon, comme d'habitude, en espérant que vous avez aimé ^^