Chapitre 38 : Discrétion ratée
On tombait. Droit dans le vide, sentant le vent glacial nous fouetter de part en part. Toujours agrippés à Myaji, on hurlait de terreur. La chute se poursuivait, interminable, tandis que je criais à la dragonne de reprendre son envol. Ils faisait froid. Très froid. Et on tombait encore. Puis soudain, les ailes de notre monture se déployèrent, ralentissant la chute. Et elles se mirent à battre. Une vague de soulagement traversa mon corps tandis que l'on volait maintenant à l'horizontale. J'ai remercié Myaji par la pensée avant de me tourner vers mes amis. Malgré la faible clarté de l'endroit, je pouvais tout de même lire les expressions de leurs visages. Maïwen souriait, appréciant sans doute la sensation du vol, tandis que Djenn, ayant peur des hauteurs, était blanc comme un linge. Liam, quant à lui, admirait le paysage en hurlant comme un gamin surexcité.
— Regardez ! cria-t-il en pointant du doigt vers le bas. Nous sommes au-dessus de la mer !
En effet, nous survolions une immense étendue d'eau : l'océan Atlantique. En regardant vers l'horizon, on pouvait apercevoir les dernières lueurs du couchant qui éclairaient faiblement les lieux. C'était dû au décalage horaire. Alors qu'il faisait Nuit au Maroc, ici il devait être sept heures du soir.
Myaji fonçait vers le large, défiant les courants d'air et battant des ailes à un rythme régulier. Je regardais au loin, émerveillée par ce paysage sans pareil. Une main se posa sur mon épaule.
— T'en veux ? m'a demandé Maïwen en me tendant un sandwich bien garni.
J'ai accepté volontiers sa proposition avant de dévorer mon repas. Puis, la faim me tiraillant toujours l'estomac, j'ai avalé deux pommes entières et quelques sablés.
La fatigue me gagnait. Mes paupières étaient lourdes et je peinais à me tenir droite. Cependant, je ne voulais pas m'endormir. Si jamais les Nawas nous repéraient, notre plan tomberait à l'eau. Je luttais pour rester éveillée, mais finalement, ma volonté céda. Le sommeil prit possession de mon corps alors que ma tête, bien trop lourde, tombait vers l'avant.
— Wanda, réveille-toi !
La voix de Maïwen m'a tirée de mes rêves afin de me ramener à la réalité. À présent, il faisait complètement noir. Combien de temps avais-je dormi ? Je n'en avais pas la moindre idée.
— Regarde ! cria-t-elle en désignant des lumières qui brillaient plus bas devant nous.
La dragonne se dirigeait justement vers là-bas.
— C'est la forteresse de Saouro, ai-je affirmé.
— Nous devons absolument passer inaperçus.
Tandis que nous nous rapprochions de plus en plus des points lumineux, nous pouvions commencer à distinguer les contours d'une île au milieu de l'eau. Une imposante forteresse se trouvait sur l'une des extrémités du morceau de terre, et c'était de là que provenaient les lumières. J'ai intimé l'ordre de se poser le plus loin possible de la citadelle à Myaji, et celle-ci effectua un plongeon vers l'autre côté de l'île. Tendue comme la corde d'un arc, je fixais continuellement la demeure de Saouro en guettant le moindre mouvement. De là où nous nous trouvions, seuls les points lumineux et la silhouette de l'immense fort étaient visibles. Pour le reste, il faisait trop sombre.
Notre monture exécuta un atterrissage maladroit qui manqua de nous faire tomber. Puis, après lui avoir caressé l'encolure, je me suis laissée glisser le long de son flanc. Nous avions atterri dans une petite clairière, juste à côté d'une falaise qui surplombait l'océan. Presque tout autour de nous, des arbres imposants formaient une forêt ombrageuse qui arrêtait les rayons pâles de la lune. L'herbe était sèche, brûlée par le soleil, et quelques rochers se dressaient au bord du précipice. Une agréable odeur de pin flottait dans l'air et le silence régnait. Mes amis descendirent à leur tour du dos de Myaji en évitant de faire du bruit.
Nous sommes restés quelques secondes à contempler les alentours sans dire un mot. L'angoisse me nouait le ventre, mais je me sentais malgré tout assez bien. La fatigue avait disparu, ce sûrement dû à la sieste sur le dos de la dragonne, et je me trouvais plutôt en forme.
— Donc on les attend là, a dit Djenn en brisant le silence.
— Oui. Nous devrions faire un plan, a proposé Maïwen.
Elle a fouillé dans son sac pour en sortir une feuille en papier pliée.
— J'ai écrit ici les deux prophéties, a-t-elle expliqué. On pourrait tenter de les analyser et les comprendre.
Après l'avoir dépliée, Maïwen a entamé sa lecture :
— Quatre enfants ayant la marque d'Olou, sont destinés à ramener la paix. Dans la vallée du milieu, soleil et lune fusionneront. Le pouvoir de l'obscurité causera notre perte, ou notre salut.
Un court moment de silence s'installa sur le groupe avant que Djenn ne prenne la parole.
— On est d'accord que les enfants, c'est nous. Mais ce truc de « vallée du milieu », c'est incompréhensible.
— À mon avis c'est un lieu, insinua Liam.
— Le soleil et la lune, ça parle sûrement des pierres, et non des astres, ai-je enchaîné.
— La dernière phrase, celle qui cite le pouvoir de l'obscurité, est sans nul doute liée à Wanda, a terminé Maïwen.
Tous les yeux se tournèrent vers moi. Je me sentais mal, gênée. Pourquoi ça devait être moi ? Qui l'avait décidé ?
— Donc, soit tu nous tues tous, soit, au contraire, tu nous sauves, a conclu Liam.
C'était un choix simple, trop simple. Mais ce, seulement en apparence.
— Je vous lis l'autre ? a demandé l'aînée.
La prophétie des ténèbres. Mon cauchemar. J'ai tout de même hoché la tête en essayant de calmer ma colère et enterrer ma peur. Maïwen s'est raclée la gorge avant de commencer :
— La fille du seigneur des ténèbres et de la déesse de la nuit, est destinée à faire régner l'obscurité éternelle.
Calme-toi, Wanda, ai-je pensé alors que la rage bouillait en moi.
— Seul la dague se l'immortalité et le sang de l'enfant de Jour, délivreront les dieux des chaînes d'Olou. À l'endroit la terre tournera, et ainsi la fille de la nuit la détruira.
N'y tenant plus, j'ai frappé mon poing contre le sol avec une rage démesurée. Toutes les têtes se tournèrent vers moi, leurs expressions mêlant peur et étonnement. Maïwen m'a pris la main avant de dire :
— Tu feras le bon choix.
Le choix. Ce moment que je redoutais, qui hantait mes pensées et se rapprochait de plus en plus chaque jour qui passait. J'en avais peur. Terriblement peur. Mais j'y étais obligée.
— La dernière phrase est incompréhensible, s'est découragé Djenn.
« À l'endroit la terre tournera, et ainsi la fille de la nuit la détruira. » Ça n'avait aucun sens.
— À mon avis, les tours qu'effectue la terre ont quelque chose à voir. Peut-être que Wanda aura besoin de cette énergie pour détruire le soleil et nous plonger dans le noir, réfléchit Maïwen à voix haute.
— Possible. Mais n'avons et n'aurons pas de preuve. Il faut que l'on improvise et attendre que le mystère s'éclaircisse, a décidé Liam.
J'étais incapable de parler, car je sentais qu'ouvrir la bouche ferait exploser le feu d'émotions qui brûlait en moi. Je luttais contre les larmes et la colère dévastatrice qui risquait de causer des dégâts. Il fallait absolument que je me calme.
— Revenons au plan, trancha Maïwen. Nous quatre devrions tenter de...
Crack ! Le bruit venait de la forêt, côté opposé à la falaise qui bordait l'océan. Le silence tomba automatiquement sur le groupe et mon cœur se mit à battre de plus en plus vite. Le regard dardé vers la direction du craquement, j'ai attendu en quête d'un quelconque mouvement. C'est alors qu'une figure encapuchonnée et complètement vêtue de noir a surgi de derrière les arbres. Deux épées étaient accrochées à sa taille et sa capuche lui tombait sur les yeux. Mon cœur rata un battement. Ils nous avaient repérés. Après la surprise, mon cerveau se mit immédiatement en mode « survie ». J'ai intimé l'ordre de s'en aller à Myaji, ce qu'elle fit sur-le-champ. J'ai ensuite bondi sur mes pieds en activant les lames de mon épée double. L'humain en noir porta ses doigts à ses lèvres et siffla, juste avant que deux autres personnes similairement habillées ne surgissent à leur tour des bois. Ils étaient trois. Contre quatre. Mes amis brandirent leurs armes tandis qu'ils faisaient de même.
— Nous sommes plus nombreux, indiqua Maïwen d'une voix qui se voulait ferme. Fichez le camp.
Des trois personnages, celui du milieu enleva sa capuche et j'ai pu voir qu'il s'agissait d'une femme.
— Bien sûr, mais ce, seulement quand vous nous suivrez gentiment jusqu'aux murailles, a-t-elle répondu en souriant.
La colère se mit à grandir en moi, n'attendant qu'une chose : que je la délivre.
— Vous l'aurez voulu, ai-je tranché en projetant un halogène de lumière bleue vers la jeune femme et ses collègues.
La boule d'énergie, chargée de rage et d'une immense puissance, fonça dans leur direction à une vitesse incomparable. Mais soudain, alors qu'elle allait les toucher, un mur invisible l'arrêta d'un coup sec et la fit exploser en une gerbe d'étincelles. Nous nous sommes jetés à plat ventre tandis que les feux d'artifice nous survolaient en sifflant. Ils avaient réussi à parer mon attaque. Cela signifiait qu'un puissant magicien se trouvait parmi eux. Et je devais l'éliminer.
— Rendez-vous, fit une voix d'homme à droite de la femme. Nous sommes beaucoup trop forts.
Je me suis relevée instantanément en préparant une deuxième attaque. Mais elle n'eut pas lieu. L'individu qui se tenait le plus à gauche, sûrement une femme vu la natte qui dépassait de son capuchon, a tendu les bras vers nous et une boule de feu en a surgi, s'écrasant à quelques mètres devant moi. J'ai éclaté d'un rire nerveux en applaudissant.
— Impressionnant !
J'avais parlé trop vite. L'herbe s'enflamma soudainement à cet endroit, et le feu se mit à se répandre en formant une ligne. Ligne qui commençait à nous encercler à une vitesse effroyable. Les flammes mesuraient au moins un mètre et demi de haut, ce qui nous empêchait d'essayer de sauter. J'ai fait volte-face avant de foncer vers l'ouverture du cercle qui allait bientôt être refermée par le mur de feu. J'avais agi trop vite. Au moment où je traversais l'espace, le sol se déroba sous mes pieds. La falaise. Je l'avais oubliée. Mon corps chuta, incapable de se rattraper à quelque chose. Ne rien voir était insupportable, je ne pouvais savoir où j'allais atterrir. Puis soudain, le sol. Ferme et dur sous mes pieds. Il était arrivé bien trop vite. En baissant le regard, j'ai tout compris : je me trouvais sur une saillie rocheuse, le véritable sol étant quelques mètres plus bas. Et j'étais en vie.
Après m'être fermement accroché à la paroi pour éviter de basculer dans le vide, j'ai tendu l'oreille. Des cris se faisaient entendre au-dessus de moi. Accompagnés de l'entrechoquement des lames. Cependant le bruit ne dura pas longtemps, annonçant la victoire de l'un des deux camps. Mais lequel ?
— Où est la fille ? hurla une voix féminine, répondant à ma question.
Silence. Des bruits de pas se firent ensuite entendre.
— Je suis la seule fille. On était quatre mais l'un des trois garçons est tombé, a menti Maïwen, la voix secouée de sanglots.
— T'ai-je autorisée à parler ? fit de nouveau la même voix de femme.
Un fort bruit de coup se distingua soudain, suivi d'un fracas et d'un gémissement. J'ai ressenti un vif pincement au cœur. Ces crétins d'idiots maltraitaient mes amis.
— Cherchez ! hurla encore une fois la femme.
Les pas se firent de plus en plus bruyants. Je devais trouver une idée, et vite. Remonter tout de suite n'était pas une solution : je me ferais battre en deux secondes et les chances de délivrer mes amis seraient réduites à néant. Il fallait tenter un sauvetage discret. Les pas étaient juste au-dessus de moi. J'ai levé la tête pour apercevoir une silhouette penchée dans le vide. Retenant ma respiration, j'ai prié pour que l'on ne me voit pas. Après des interminables secondes d'angoisse, l'humain finit par faire demi-tour. Sauvée.
— Elle n'est pas là, a annoncé une voix masculine.
— Elle ne peut pas s'être volatilisée ! tonna l'apparentée chef.
— Rentrons, Saouro sera quand même reconnaissant pour ces prises, fit une troisième vois, de femme cette fois. Je crois que l'un de ces jeunes est un élu.
Il y eut un court instant de silence avant que la dirigeante ne reprenne la parole.
— Emmenons-les.
Des cris de protestation fusèrent, venant de la part de mes amis. Des bruits de pas, d'abord sonores, se firent entendre, puis ils s'éloignèrent petit à petit. Je suis restée accroché à la saillie encore quelques minutes, de peur que l'on me surprenne. Puis, alors que mon impatience devenait trop forte, je me suis fermement agrippée aux irrégularités de la roche pour commencer mon ascension. Par chance, la falaise était recouverte de prises : des racines, des plantes, des arbres et de multiples bosses et trous m'aidaient à grimper. J'atteignis donc le pré d'herbe sèche sans trop de difficulté.
Et maintenant, je dois trouver un moyen d'atteindre la forteresse et de délivrer mes amis, ai-je pensé sans trop de conviction. Puis soudain, comme si un far s'était allumé dans mon esprit, dissipant la brume, je me suis rendue compte de la gravité de la situation. Mes amis venaient de se faire capturer. Par les Nawas. Par Saouro. Et j'étais seule, contre toute une armée. La forteresse de mon père devait être presque imprenable. Je n'avais aucune de chance de réussir à m'y infiltrer et libérer Maïwen, Liam et Djenn.
Tout était perdu.
J'ai été submergée par la culpabilité et l'envie de me jeter du précipice, en évitant cette fois la saillie. Je voulais me tuer. Je n'avais pas su protéger mes amis. Cependant, je devais essayer. En prenant une grande inspiration pour tenter de me calmer, je me suis mise à courir. Objectif : suivre discrètement les trois Nawas pour pouvoir m'infiltrer dans la forteresse de Saouro. Tandis que je courais dans la forêt à en perdre haleine, une pensée me traversa : Nuit et Jour. Ils nous avaient dit de les attendre. Je pouvais rester là et patienter jusqu'à leur arrivée. Mais non. Rester les bras croisés pendant que mes amis étaient en danger n'était pas dans ma nature. J'ai accéléré ma course.
Il faisait sombre, les pins gigantesques masquant la lumière pâle de la lune. Je devais faire attention à ne pas trébucher. La peur de perdre mes amis et la colère envers les kidnappeurs me donnaient la force nécessaire pour pouvoir courir sans prêter attention aux formes sombres autour de moi. Car malgré les révélations de Nuit, je craignais toujours l'obscurité. Mon pied buta soudain contre quelque chose de dur, entraînant tout mon corps vers l'avant. J'ai mis les mains au sol pour me rattraper et ainsi éviter de m'étaler comme une crêpe. Sans me reposer une seule seconde, je me suis relevée pour continuer à courir. Cependant, ma détermination avait une limite. Je fatiguais et n'avais toujours pas rejoint les trois Nawas et mes amis. Ce qui était vraiment étrange vu la vitesse à laquelle j'avais couru. Et en plus, les kidnappeurs avaient sans doute été ralentis par leur butin. Avaient-ils trouvé un moyen de transport rapide ? Où possédaient-ils un truc similaire à l'Ombriporteur ? Puis soudain, alors que je tombais d'épuisement, une silhouette sombre se matérialisa devant moi. Vif comme l'éclair, le nouveau venu m'a saisi la main. J'ai tenté de me dégager. Mais c'était trop tard. Un tourbillon glacial nous enveloppa et ce fut le noir total.
Salut à vous, chers lecteurs. Ok,vous savez ce que je vais dire, ça commence à devenir habituel. Mais là ça va être légèrement différent. Bon, déjà : MERCI !!!!!!!!!!!!!!!
Passons à la suite : les questions pour ceux qui n'ont pas la flemme.
- Avez-vous aimé ce chapitre ?
- La (courte) scène de combat est-elle bien écrite ?
- est-ce que l'histoire vous tient en haleine ou avez-vous parfois envie d'arrêter ?
et le plus important :
-des conseils/critiques ou autres ?
V. O. I. L. A. ( Votre Orrible Interrogatoire Lassant s'Arrête.) Je sais, j'ai fait une faute x)
JE ME LANCE POUR UN CHALLENGE !!! (que j'ai déjà essayé) Écrire au MINIMUM 1 chapitre tous les 15 jours. 7, si possible.
C'est raté d'avance mais bon, on essayera :/
A +
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